Enseigner au XXI siècle

Archive mensuelles: décembre 2015

Un vœu pour 2016 : moins de clichés, plus de pensée !

Ce sera sans doute un vœu pieux, mais comme il est d’usage en fin d’année de souhaiter une bonne année et une bonne santé, je crois que pour la santé intellectuelle de notre vie sociale et en particulier dans le domaine scolaire au sens large, il serait bon de beaucoup, beaucoup moins utiliser un certain nombre de vocables qui sont autant de manifestations d’un paresse d’esprit, d’un prêt-à –penser qui fait fi de la complexité, d’une facilité peu digne de ceux qui se prétendent analystes ou commentateurs. Certaines de ces expressions pourraient d’ailleurs avantageusement disparaitre du vocabulaire, d’autres être confinées à un usage plus limité, circonscrit et rigoureux. En voici un florilège, hélas non exhaustif…

VA déclin

Une des nombreuses « une » de news (mais Valeurs actuelles se surpasse souvent) sur le thème du « déclin »…

Aller dans le mur : une expression stéréotypée qui permet à de nombreux essayistes, commentateurs, éditorialistes de lancer de façon péremptoire tel ou tel anathème défaitiste (le pire est à venir, sauf si par miracle, on les écoutait). Le problème est que la métaphore est usée, trop souvent répétée et semble parfois prendre la place d’un raisonnement nuancé et complexe pour expliquer dangers et menaces bien réels qui pèsent par exemple sur la démocratie ou les liens sociaux en France. (suite…)

L’éducation au développement durable n’est pas un gadget !

La COP 21 s’est achevée, mais déjà l’écho de la journée de samedi 12 a été étouffé par les commentaires post-électoraux et on risque fort de mettre au second plan cette question du réchauffement climatique qui, si on y réfléchit bien, est d’une importance bien plus grande pour notre avenir que l’ampleur de la menace terroriste ou que ce qu’il faut faire à court et moyen terme pour barrer la route au  Front national.

cop21Remarquons que concernant l’accord final et le déroulé de cette grande manifestation, on a retrouvé la même proportion de donneurs de leçons, de cyniques ricanant sur l’échec -toujours certain, « je vous l’avais bien dit »- de toute tentative de conjuguer le futur autrement qu’à la forme négative, de « déjà revenus de tout sans y être jamais allés » que lorsqu’il s’agit de proposer une analyse politique de la situation française ou d’évoquer les questions du terrorisme ou de la montée de l’islamisme radical. C’est tellement facile de se considérer ainsi comme les « bons » qui savent, eux, face aux « puissants » et les naïfs qui les suivent!

En fait, concernant ces questions, il me parait plus que jamais nécessaire d’en faire un enjeu pour l’école et de travailler sur le plan de nos responsabilités d’éducateur et de formateur sur plusieurs aspects:

  • comment faire réfléchir à l’école sur ce que signifie « être citoyen » aujourd’hui, au-delà de leçons de morale et de la guimauve qui mettrait sur le même plan ne pas faire couler l’eau quand on se lave les mains et les problèmes des énergies fossiles en Chine ou en Inde par exemple !
  • comment éduquer à l’esprit critique en éloignant les élèves des croyances non fondées, dont celle qui fait qu’on doit « se méfier de tout » (« on nous cache tout, on ne nous dit rien » chantait Dutronc)
  • comment permettre la conjugaison de l’esprit scientifique qui prône par essence un certain doute, un certain scepticisme (la fameuse loi de Popper sur la falsification) et la promotion de valeurs positives autour de la devise républicaine peut-être. Aucune loi scientifique ne nous fera rejeter le racisme, mais la lutte anti-raciste peut s’appuyer en partie sur la science.

Pour ne pas parler dans ce billet de trop de choses à la fois, je voudrais revenir sur l’éducation au développement durable. Timidement, elle est apparue dans les programmes scolaires et par exemple dans la thématiques des futurs EPI dans les collèges. A l’occasion de la COP 21, une petite place lui est faite, alors qu’elle était absente du Grenelle de l’environnement. (suite…)

No pasaran!

Dans quelques jours, les élections régionales vont, hélas, marquer une avancée significative du Front national qui risque même de remporter des régions. Pour les enseignants, cela aurait des conséquences directes vu l’importance grandissante des régions sur un certain nombre de points comme la gestion des lycées (qui dépasse la simple administration des locaux) ou la lutte contre le décrochage.

Mais au-delà des conséquences directes possibles de la prise en mains d’une région par le FN, il y a cette progression des idées nauséabondes d’extrême-droite qui nous inquiète, doit nous inquiéter alors même que la mobilisation intellectuelle contre ces idées ne me semble pas du tout à la hauteur. Je suis révolté par rapport à certaines attitudes de complaisance ou de défaitisme cynique et par le peu d’énergie dans la riposte indispensable contre cette idéologie plus que néfaste pour notre pays.

Complaisance, quand par exemple, un syndicat prétendument progressiste répond à la proposition d’entretien d’un pamphlétaire bien connu qui affirme être d’accord à 80% avec le programme éducatif du FN. Espérons qu’il ne s’agit que d’une initiative locale (Marseille) qui choquera des adhérents qui sont au moins en désaccord avec 90% du programme du Front national… Et on aimerait que ceux qui défilent contre la réforme du collège avec le collectif Racine ou SOS éducation aient un peu honte de ces convergences ! (suite…)