Lundi 2 novembre, sur ma radio préférée, une série d’émissions sur l’Ecole avec des personnes qui savant de quoi ils parlent, à la fois des acteurs de terrain et des chercheurs ou personnalités. Et des débats de qualité où il ne s’agit pas d’être le plus fort, mais d’échanger autour de questions pas si simples que cela. Ainsi, une discussion de haute tenue entre Vincent Peillon et Dominique Schnapper (cette dernière faisant au passage un éloge du travail commun avec Jean-Louis Bianco, attaqué par une coalition droite-gauche assez lamentable), autour de la laïcité. Ou encore, « le temps du débat » où Edwige Chirouter, promotrice des débats philo enfants, Mathieu Farina de la Main à la pâte et co-auteur d’un très bon livre récemment paru et un prof du lycée de Coutances travaillant avec ses élèves sur les « mémoires » ont pu discuter de la place respective de l’émotion, de la raison, de la juste distance, du « bon » doute et du « mauvais » , de la voie parfois étroite à trouver entre dogmatisme et relativisme.
On est alors à des années-lumières de tous ces éditorialistes qui parlent à tort et à travers de ce qu’ils connaissent si mal ou ne connaissent plus. Version plus intello avec les Julliard ou Polony ( ? pour intello), version trumpienne pour Pascal Praud ou Brighelli.
Car à côté des brillantes émissions de la radio publique (qui n’a pas toujours d’équivalent à la télévision, même chez Arte, en dehors de très bons reportages), que de sottises circulent. On peut tout ignorer de ce qu’est l’enseignement moral et civique, de l’étude à l’école des faits religieux et de leur place dans les programmes, de la place importante qui est accordée dans les cours de Français à des auteurs comme Voltaire) et proférer des énormités du genre : « il faudrait enfin… »
Ne parlons pas des vœux de retour des blouses grises (j’ai lu ça quelque part) chères aux Hussards qualifiés curieusement de « noirs » en référence à Peguy, cet auteur curieusement encensé chez qui on peut percevoir pas mal de relents populistes ou nationalistes (jusqu’à vouloir coller au poteau Jean Jaurès !). Ou encore cet appel à reconstruire les estrades. On sait bien que si on est plus haut que les élèves, l’autorité sera rétablie dans une belle verticalité, n’est-ce pas ? Gardons le bois pour faire du feu, comme le demande l’instituteur du film L’Ecole buissonnière, inspiré de Célestin Freinet.
S’agit-il d’inculture, ou plutôt de pure démagogie ? Ou les deux ? Ainsi quand le député ex-socialiste Falorni clame que l’EMC ne suffit pas, qu’il faut un cours dédié à la Laïcité ! Pourtant, il dit avoir enseigné à une époque où l’EMC n’existait pas déclarant : « je souhaite un enseignement de la laïcité, dans un cours dédié, pour tous les élèves de France afin que les valeurs de la république ne soient plus remises en question. »
Comme c’est simple, un cours et tout est résolu. Les profs n’avaient jamais eu l’idée de parler des « valeurs de la République » ! Les bras nous en tombent…
Mais est-ce par inculture que plusieurs personnalités de droite, y compris des leaders, reprennent le couplet contre l’enseignement de l’arabe, pourvoyeur de djihadistes futurs selon l’inénarrable Luc Ferry ( qui autrefois pouvait écrire des choses intelligentes…) Djihadistes dont beaucoup ne sont pas du tout de pays arabes, dans un monde musulman dont les pays les plus peuplés ne sont pas arabes, où on ne parle pas arabe…
Bref, on a bien besoin d’écouter plutôt France Culture, de lire des livres d’intellectuels qui travaillent vraiment (par exemple je conseille le dernier livre, très subtil, de Hervé Le Bras Serons-nous submergés ? et j’entame la lecture de ce grand chercheur trop peu connu, Serge Audier qui propose des pistes stimulantes dans La Cité écologique) pour ne pas succomber au pessimisme…