« Tiger Moms » est le surnom donné à ces nombreuses mères asiatiques qui poussent leur enfant à exceller à l’école, en particulier en mathématiques et en sciences, et à être meilleurs que leurs camarades de classe. Pour ces mères autoritaires, avoir un enfant qui n’obtient pas la mention « très bien » à l’école est considéré comme un échec. C’est pourquoi les parents asiatiques engagent des tuteurs, envoient leurs enfants en école maternelle, en cours d’été et les inscrivent à des cours de piano, de musique ou de danse pour occuper leurs weekends. Un rapport récent de la St. Louis Federal Reserve Bank a montré que les collégiens américains de parents asiatiques passent 50% plus de temps à étudier que leurs autres camarades de classes. Au Japon, les examens d’entrée pour les jardins d’enfants commencent dès l’âge de 3 ans. L’Asie représente le plus gros marché du tutorat privé, en particulier florissant à Singapour, Hong Kong, au Japon, en Corée du Sud, en Inde et en Chine, mais de plus en plus également dans toute l’Asie du Sud-Est.
Cet esprit de compétition fait de l’Asie un marché extrêmement propice au développement de startups éducatives, pour les enfants mais aussi et surtout pour les parents. Un exemple: la startup Taamkru, basée en Thailande, qui a créé une application pour tester les enfants en âge préscolaire. La startup a rencontré un succès déroutant : 500 nouveaux téléchargements en moyenne par jour dans les mois qui ont suivi son lancement, principalement en Thailande et en Chine. Les parents peuvent ainsi comparer le score de leur enfant à ses camarades du même âge dans d’autres écoles du pays. Taamkru a également organisé une compétition nationale en Chine, Thailande et Vietnam pour tester le QI des participants, avec plus de 300.000 visites et 20.000 familles enregistrant leurs enfants à l’événement.
(Taamkru)
L’utilisation déjà impressionnante et continuellement en croissance du mobile dans la région (85% des Singapouriens ont un Smartphone, 80% en Corée du Sud, 74% à Hong Kong et 70% en Chine) a aussi donné naissance à de nombreuses plateformes de tutorat mobile afin de préparer les étudiants aux tests, comme les startups indiennes Vedantu et Toppr qui viennent de lever respectivement 5 et 10 million de $, la chinoise Yuan Tiku, évaluée à 360 millions de dollars selon le blog QQ Tech ou la japonaise Mana.bo.
Et pour les « Tiger Moms » qui n’ont pas les moyens de faire appel à des tuteurs privés, il existe désormais des services pour l’instant gratuits comme God Of Homework, actuellement en beta-testing, qui répond aux questions des parents cherchant à résoudre les problèmes mathématiques de leurs enfants via l’application de messagerie WhatsApp, très utilisée à Singapour. La startup était inondée de questions peu après son lancement. Une autre startup Singapourienne, EduSnap, a lancé une application mobile permettant aux parents de photographier le problème et de recevoir une réponse gratuitement. L’application reçoit 150 questions par jour.
Tout l’enjeu pour la « Tiger Mom » est aussi d’arriver à motiver l’enfant à développer ses connaissances même en dehors de l’école et du tutorat, ce qui se traduit par le recours à des outils d’apprentissages plus engageants faisant appel aux nouvelles technologies et à la « gamification ». Le marché des jeux mobiles éducatifs est en quelques années devenu extrêmement compétitif en Asie, avec des startups comme Kunfu Math à Singapour, QQL (quick language learning) en Chine, KnowRe en Corée du Sud, Mathaly en Inde ou encore une version éducative finlandaise du célèbre jeu Angry Birds, lancée notamment en Chine et à Singapour. L’Asie devrait représenter 27% des revenus de cette industrie d’ici 2017, d’après une étude d’Ambiant Insight de 2013 et est déjà considérée comme le leader mondial en technologies d’apprentissage ludiques et mobiles.
(KnowRe)
(KungFu Math)
Même si cette méthode d’éducation stricte encourageant l’esprit de compétition et l’excellence est critiquable car elle met en danger la confiance en soi de l’enfant et laisse peu de place à la créativité ou à la prise de risque, les « Tiger Moms » asiatiques ont incontestablement boosté l’innovation en technologies éducatives dans la région au cours des dernières années, faisant de l’Asie un terrain d’expérimentation idéal pour les startups de cette industrie.