7 idées pour créer une véritable French Touch de l’éducation

Y a-t-il une French Touch de l’éducation ? La France est l’un des pays européens les plus actifs en matière pédagogique, et le digital a accéléré cette tendance. Les entrepreneurs, les universités et grandes écoles, les associations, les particuliers, les youtubers ne cessent de lancer de nouvelles offres et de réinventer l’éducation.

 

Cela fait près d’un an que LearnAssembly contribue au développement de l’écosystème edtech français, via la French Touch de l’éducation et les différents partenariats que nous développons avec les startups, grands comptes et universités. Et pourtant, force est de constater que les initiatives autour du secteur edtech français ne prennent pas toujours l’ampleur qu’elles pourraient prendre. Voici quelques idées pour faire avancer les choses. Comment aider les startups edtech à s’internationaliser ? Comment valoriser l’approche française en pédagogie ? Comment peser sur un marché de plus en global avec une forte tendance à la concentration et à l’oligopole ?

 

1 – Faire découvrir l’open innovation au monde académique

Le monde académique, comme de très nombreux corps constitués (taxis, avocats, médecins pour ne citer qu’eux) mais aussi de nombreuses grandes entreprises repose sur la certitude de son omniscience. La certitude de tout pouvoir faire seul, d’être maitre du jeu, entraine parfois un scepticisme à l’égard des innovations, trop souvent perçues comme des effets de mode. Le premier boom de l’e-learning, puis du serious game et maintenant des Moocs a alimenté ce scepticisme, tout à fait compréhensible. Rares sont les acteurs de l’enseignement supérieur à avoir entamé des démarches d’open innovation, de sourcing de startups innovantes éducatives, de rencontres, de projets pilotes en partenariat. Or, faire des hypothèses et expérimenter est l’un des fondamentaux de toute démarche scientifique et pédagogique, afin de rester innovant dans un contexte économique et pédagogique en pleine évolution.

Idée : organiser des sessions de présentation de startups et tester des pilotes sur des échantillons d’apprenants réduits.

Coût : proche de 0

 

2 – Soutenir les startups edtech à l’export

«  Le problème des entreprises françaises c’est qu’elles ne savent pas exporter » ; « le problème des entreprises françaises c’est qu’elles ne savent pas passer de la recherche fondamentale au produit » ; «  le problème des entreprises françaises c’est qu’elles sont trop atomisées et que le marché national est trop petit » : ces remarques, tous les entrepreneurs, les journalistes et les investisseurs se les font. Les entreprises françaises innovantes peinent à passer à l’échelle, à grandir, à exporter, à passer de 10 à 100 salariés. Combien de jolies PME qui ne deviendront jamais des ETI, voire des géants ? L’accès au financement n’est pas le seul problème, comme le montre le dynamisme du capital-risque français et les succès de startups comme Blablacar ou Sigfox. La concertation et la création de consortiums avec des acteurs innovants est une pratique totalement inexistante dans le monde de l’enseignement. La lisibilité des offres de soutien à l’export est largement perfectible ; les relations avec des partenaires extérieurs sont peu développés. La France est encore trop franco-française en matière d’éducation et de formation. Jérôme Serre, fondateur d’eduPad présentera à l’occasion de la French Touch de l’éducation une comparaison du déploiement des applications éducatives aux US et en France pour illustrer ce point. Avec Victor Wacrenier, co-fondateur d’Appscho, nous essayons actuellement de définir ce qui pourrait être la boite à outils de l’entrepreneur edtech qui cherche à s’internationaliser.

Idée : Créer un Mooc sur le thème de l’internationalisation des entreprises innovantes et accorder un crédit d’impôt pour chaque euro signé à l’étranger.

Coût : environ 70 000€ pour le Mooc.

 

3 – Comprendre les enjeux des startups

 Le rythme de certaines grandes entreprises et des acteurs de l’enseignement supérieur est un rythme plus long, en terme de prise de décision. Ainsi, chez LearnAssembly, il nous est parfois arrivé de me voir proposé un premier rendez-vous très enthousiaste : «  ce que vous faites a l’air très intéressant, voyons-nous très vite ! ». Au cours de ce premier rendez-vous, j’aborde avec mon interlocuteur différentes formes de partenariat possibles, toutes plus enthousiasmantes les unes que les autres. Mais trop souvent, l’absence d’interlocuteur identifié et d’autonomie dans la prise de décision ralentit le déploiement d’innovations. Les startups et les acteurs institutionnels de l’éducation doivent apprendre à s’aligner, à se comprendre, à s’adapter. Aux startups d’être moins impatientes, de murir leur produit et d’intégrer les feedbacks; aux grands comptes, la capacité de prendre des décisions plus rapides, plus agiles et à décloisonner leur modes de fonctionnement. Le monde de l’éducation et de la formation réfléchit encore à des stratégies de déploiement massives à 5 ans; commençons par des tests&learn rapides et agiles afin de valider l’intérêt de telle ou telle solution.

Idée : créer dans les départements formation et le supérieur un poste de référent,  en charge de la veille innovation et de la mise en relation entre l’externe (partenaires, startups, LMS) et les ressources internes (DSI, marketing, équipe pédagogique)

Coût : 40K/an

 

4 – Repenser la relation avec la francophonie

Le français serait la langue la plus parlée au monde en 2050. Avoir la possibilité, via la francophonie, de diffuser un autre modèle pédagogique que le modèle anglo-saxon, de pouvoir capitaliser sur l’excellence de nos chercheurs est une opportunité tout simplement incroyable. Actuellement, les acteurs économiques ont principalement les yeux tournés vers l’Amérique Latine, l’Asie, zones en forte croissance. Mais l’Afrique francophone va avoir des besoins de formation tout simplement colossaux et les Moocs sont déjà une partie de la réponse. D’après Catherine Mongenet qui interviendra à la French Touch de l’éducation, le nombre d’inscrits sur France Université Numérique venant d’Afrique est en pleine explosion. C’est également la conviction de Gilles Babinet, conviction renforcée par de nombreux échanges avec des dirigeants d’Afrique francophone mais aussi de Bibliothèques Sans Frontières qui déploie de nombreux projets en francophonie comme Ideas Box.

Idée : nouer des partenariats avec des acteurs locaux et comprendre leurs spécificités

 

5 – Repenser les «  plans numériques »

Les grands plans d’investissement sont une grande tradition de la politique publique française et de la communication politique ; ils permettent de créer une nouvelle « séquence »,  de rassurer, de gagner du temps. La France n’est pas encore sortie de cette posture qui repose sur la toute-puissance d’un Etat qui croit encore – mais le croit-il encore vraiment ? – pouvoir sauver le monde à coups de milliards. Des milliards pour les ordinateurs dans les années 80 au milliard pour les tablettes en 2015, rien n’a véritablement changé dans cette vision archaïque de l’innovation, centrée sur l’équipement en matériel plutôt que sur le contenu pédagogique et son appropriation par le corps enseignant. Je me souviens encore de mes années lycée et des « cimetières d’ordinateurs », ces rangées d’ordinateurs vétustes, remplis de bugs et de virus, qui hantent les CDI des collèges français et servent principalement à jouer à des jeux vidéos, à regarder South Park, ou et à tchatter sur feu MSN et maintenant Facebook.

 

6 – Créer une direction des Achats numérique et une place de marché pédagogique

L’essor phénoménal des startups de l’éducation plébiscitées par des utilisateurs demande à être reconnu plus largement ; donner aux enseignants la possibilité de tester des applications ludo-éducatives, d’intégrer des Moocs, permettre aux dirigeants de facs et d’école de prendre des décisions à leur échelle, leur donner la possibilité de ne pas avoir à organiser 12 réunions et trois appel d’offres et de convoquer le conseil d’administration pour débloquer 10 000 euros de budget permettrait de sourcer des innovations, de les qualifier et de les diffuser auprès d’un réseau identifié. Les problématiques rencontrées par les différentes directions de la formation et par les universités sont mutualisables; partager les retours d’expérience permettrait de gagner un temps fou et d’innover rapidement.

Idée : intégration d’une direction des Achats numérique et d’un poste de Directeur du Digital de l’Education Nationale.

Coût : 60K€/an

 

7 – Sensibiliser au digital le corps les professionnels de l’éducation et de la formation

 Tout le monde a le mot de transformation digitale à la bouche ; mais l’une des principales difficultés que nous rencontrons suite aux déploiements de nos évènements de formation et de nos Moocs et Spoc , c’est que la montée en compétences sur le digital ne peut se faire que si la culture d’entreprise s’y prête. Autrement dit, former à la culture digitale dans une organisation très pyramidale et hiérarchisée n’aura pas forcément l’effet escompté en termes de transformation visible et opérationnelle. La formation à la culture digitale touche à des sujets bien plus profonds et sensibles que le simple fait de twitter ou ne pas twitter. C’est toute l’organisation, ses méthodes de travail qui sont impactées. Ainsi, un parent d’élève, entrepreneur dans le secteur de l’éducation, me disait récemment que 80% des professeurs de son école avaient répondu « non » à la question «  le digital va-t-il changer votre manière d’enseigner ». Former ces enseignants sans qu’ils aient pris conscience des enjeux n’a donc de sens que si la formation est précédée d’une évangélisation, d’une acculturation.

Je vous propose de prolonger ce débat lors de la 5ème édition de la French Touch de l’éducation, en partenariat avec la Sorbonne.

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