La résistance des procédures d’orientation, jusqu’à quand ?

Silence, on oriente

Le PDMF, mais aussi l’orientation active, et le socle commun avec sa septième compétence, vont télescoper les procédures d’orientation. Dans le champ de l’orientation, c’est la conception éducative qui semble se développer au travers de ces « trois objets ». Mais silence sur les procédures, long silence depuis fort longtemps.

  • Lors du DEBAT NATIONAL SUR L’AVENIR DE L’ÉCOLE, les procédures d’orientation n’avaient pas été critiquées. On s’en étaient pris au manque de motivation des élèves (mal préparés), au manque d’information (mal informés, mal conseillés), un peu à l’affectation, jamais au procédures. En tout cas nulle trace d’un débat quelconque sur ce thème. J’en avais déjà fait une analyse dans une formation de formateurs (voir sur mon site le diaporama intitulé Analyse du miroir, le thème de l’orientation ).
  • Très curieusement, les fédérations de parents d’élèves développent également un discours éducatif concernant l’orientation des élèves. Mais elles ne portent pas le débat sur la question de l’existence des procédures d’orientation. Comme si on était dans un consensus social,chacun y trouvant son compte, sans doute. Cyniquement on pourrait dire avec François Dubet que le sale boulot, l’élimination des faibles, est laissée aux enseignants, au système (voir le compte rendu de La conférence de François Dubet sur l’hypocrisie scolaire du 16 janvier 2003, notamment : http://cpe.paris.iufm.fr/spip.php?article713 ).
  • Enfin si on regarde les divers rapports sur l’orientation (j’ai essayé d’en tenir une liste sur mon site wiki ), on y retrouve un tir croisé contre les conseillers d’orientation psychologues qui à eux seuls préparent très mal les élèves à ces choix d’orientation ! Petite précision l’extension du corps des COP s’est arrêté au début des années 80 autour de 4700 postes. C’est le moment de la décentralisation, de la déconcentration,et surtout de l’apparition de l’EPLE, l’établissement scolaire comme unité sociale, organisationnelle. Quinze ans après, après une nouvelle explosion scolaire, en 1996, ils sont toujours 4700. Mais aujourd’hui ils sont 4500, alors que la scolarisation s’élargit encore ! On retrouve les mêmes constatation concernant l’état des élèves. Parfois quelques critiques sont portées à l’organisation de la formation professionnelle, avec souvent comme remède le développement de l’apprentissage. Mais là encore, silence sur les procédures d’orientation.

L’Ecole supérieure de l’éducation nationale (ESEN) et le CRAP-Cahiers pédagogiques ont publié « L’orientation, c’est l’affaire de tous tome ». Le tome 1 traitait des enjeux et du cheminement qui a amené à de nouvelles conceptions de l’orientation. Le tome 2 traite des expériences et des outils pratiques. A cette occasion, le Centre régional de documentation pédagogique d’Amiens a organisé le 19 décembre 2007 une rencontre-débat consacrée aux Enjeux de l’orientation. Je faisais partie des intervenants (voir sur mon site mon intervention ). A ma critique des procédures, un ancien inspecteur général de l’orientation s’est opposé. Il considérait que ces procédures permettaient une meilleure démocratisation. Si elles n’existaient pas, la discrimination sociale serait encore plus forte. Sur ce point on pourra voir la vidéo de la conférence que Christian Forestier a donnée à l’ESEN et dont le contenu se trouve également dans l’introduction au livre « Que vaut l’enseignement en France ? : Les conclusions du Haut Conseil de l’évaluation de l’école (Broché) de Christian Forestier (Auteur), Claude Thélot (Auteur), Jean-Claude Emin (Auteur), Stock, 2007. Si les procédures protègent contre les excès de discrimination sociale, alors on se demande bien ce qui se passerait au vue des données rassemblées par Forestier !

J’ai repris et développé le contenu de cette intervention. Le texte a été proposé à Formation et emploi » consacré à l’orientation, il a été refusé. Réécrit je l’ai proposé à la revue TransFormations qui l’a accepté (publication à venir). Je reprendrais ce thème sans doute dans d’autres billets.

Bernard Desclaux 10 avril 2009


Vers la suppression des procédures d’orientation

Dans le rapport annuel d’activité, année 2009, du délégué interministériel à l’orientation, à la page 5, on trouve ce paragraphe.

Cette nouvelle architecture, qui permet des changements d’orientation jusqu’en première, se double d’un assouplissement des procédures d’orientation. Le projet de décret « orientation » introduit ainsi la possibilité de changer de voie en cours ou en fin d’année à l’intérieur du cycle terminal. Il prévoit à cet effet l’organisation de stages passerelles pour permettre l’acquisition des prérequis dans les disciplines de spécialisation. Ces dispositions constituent un pas important vers la disparition des procédures autoritaires, qui contribuent à l’image d’une orientation subie au lycée : près de 20% des décisions des conseils de classe vont à l’encontre des vœux formulés par l’élève et sa famille et les nombreux redoublements alimentent les sorties sans diplôme. A terme, la suppression du palier d’orientation à la fin de la seconde générale et technologique apparaît souhaitable. Cela permettrait de responsabiliser pleinement les élèves et leurs parents et de ne pas limiter les choix aux seuls critères de résultats.

Depuis un troisième Délégué est nommé, Jean-Robert Pitte. Sur Educpros, deux appréciations ont été formulées : ici et

On trouvera également des informations sur cette page.

Ce délégué interministériel à l’orientation, placé sous l’autorité de Matignon (premier ministre) poursuivra-t-il cette réflexion sur les procédures d’orientation ? Ce serait très étonnant !

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This entry was posted on mardi, septembre 7th, 2010 at 15:47 and is filed under Orientation. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a response, or trackback from your own site.

One Response to “La résistance des procédures d’orientation, jusqu’à quand ?”

  1. Le blog de Bernard Desclaux » Blog Archive » Interrogeons le diagnostic de Jean-Robert Pitte Says:

    […] La question essentielle reste celle que j’avais déjà soulevée dès la mise en œuvre de l’éducation à l’orientation : comment ces actions, ces dispositifs peuvent-il avoir un effet éducatif dans un contexte qui repose sur la contrainte et non l’autonomie des individus ? Autrement dit, leur efficacité réclame une modification en profondeur du fonctionnement de tout notre système éducatif, dont un des piliers se trouve être les procédures d’orientation (voir notre post : La résistance des procédures d’orientation, jusqu’à quand ?) […]

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