Depuis quand l’apprentissage fait-il partie du système éducatif ?

Michel ABHERVE vient de publier sur son blog un post intitulé Luc Chatel exclut l’apprentissage du système éducatif. Je ne comprends pas très bien d’où vient l’idée que l’apprentissage était une formation « initiale » et qu’à ce titre il faisait partie du système éducatif avant la déclaration de Luc Chatel à propos des décrocheurs.

Le contrat d’apprentissage est un contrat de travail. Il a toujours été un contrat de travail. Il oblige l’employeur notamment à organiser le temps de travail pour permettre à l’apprenti de suivre une formation, au bout de laquelle, celui-ci passera un examen lui permettant d’obtenir un diplôme professionnel. Et ce diplôme professionnel est reconnu nationalement car il est inscrit au Répertoire national des certifications professionnelles tenu par la Commission nationale de la certification professionnelle qui dépend du ministre de la Formation professionnelle.


Initial pourrait renvoyé au fait qu’il est réservé aux jeunes (16-26 ans). Mais une même personne peut signer plusieurs contrats successifs pour obtenir divers diplômes de niveaux successifs, puisque les formations possibles depuis une vingtaine d’année ont été ouverte à l’ensemble des formations professionnelles (du CAP au diplôme d’ingénieur). En ce sens, on ne peut pas dire qu’il s’agisse d’une formation initiale.


Le CAP, premier diplôme professionnel, a été créé pour sanctionner les premières formations professionnelles. Historiquement, il était réservé aux apprentis. Il ne faisait pas partie de l’éducation nationale. Pour une histoire plus précise, on se réfèrera au livre de Guy Brucy « Histoire des diplômes de l’enseignement technique et professionnel (1880-1965), L’État, l’École, les Entreprises et la certification des compétences », Belin, 1998. Voir également mon post « La suppression des CAP » .


Ajoutons enfin que, sur le plan des procédures d’orientation, l’apprentissage n’a jamais été une voie d’orientation, autrement dit, les conseils de classe n’ont jamais pu imposer l’apprentissage comme voie d’orientation. A la fin de la scolarité obligatoire (16 ans ou sortie de 3ème), un jeune, avec l’accord de sa famille peut signer un contrat d’apprentissage, mais les conseils de classe ne peuvent l’imposer. Et comme ancien directeurs de CIO, je peux dire heureusement ! Voir notamment mon post intitulé Apprentissage : le contexte historique français.


Il me semble donc normal que les apprentis ne soient pas comptabilisés dans les effectifs de l’éducation nationale.

Bernard Desclaux

This entry was posted on mercredi, avril 20th, 2011 at 12:48 and is filed under Apprentissage. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a response, or trackback from your own site.

8 Responses to “Depuis quand l’apprentissage fait-il partie du système éducatif ?”

  1. mabherve Says:

    Un simple rappel de textes officiels qui montrant que si l’apprentissage relève bien du code du travail d’un côté, il relève de l’autre du Code de l’Education

    « L’apprentissage est une voie normale de formation initiale et d’éducation, complémentaire à la voie scolaire par ses modalités de fonctionnement et ses pratiques pédagogiques. Elle se déroule en alternance entre une entreprise et un centre de formation, dans le cadre d’un contrat de travail de type particulier régi par le code du travail »

  2. bernard-desclaux Says:

    En réponse au commentaire de Michel Abhervé :
    Si la citation est exacte, et je n’en doute pas, elle ne clarifie pas le problème que vous avez construit me semble-t-il à partir de la déclaration de Luc Chatel.
    Il y a un an, Martin Hirsh publiait un post : « on ne se fiche pas des décrocheurs ! » http://martinhirsch.blogs.nouvelobs.com/archive/2010/04/27/on-ne-se-fiche-pas-des-decrocheurs1.html, où l’on voit bien comment le problème du décrochage est lié aux trous, à l’absence de connexions entre les divers systèmes d’information sur les personnes.

    Au USA, puis au Canada, dans les années 70, le décrochage était appelé le « dropping out », il s’agissait des jeunes qui disparaissaient de tout encrage social. Foucault dirait qu’ils passent au travers du maillage territorial social. Ils ne sont marqués nulle par. Ils sortent du social officiel.

    Les décrocheurs sont d’abord définis comme des sortants du système scolaire sans diplôme. Le deuxième critère étant qu’on ne les retrouve pas dans un autre système de formation ou sous un statut de demandeur d’emploi. Il est donc normal de trouver une partie des apprentis dans le premier groupe puisqu’ils sont sortis du système scolaire, puis de les voir retirés selon le deuxième critère.

    Bernard Desclaux

  3. Patrick Says:

    L’apprentissage est, par nature et légalement, une formation initiale. La plupart des diplômes préparés en apprentissage dépendent du ministère de l’Education nationale. Dans chaque Rectorat, il y a un service de l’inspection de l’apprentissage chargé des contrôles pédagogiques, de la vérification de la formation des maîtres, de l’instruction des dossiers d’ouverture…
    Le seul problème et il est de taille : on a donc deux types d’enseignement professionnel en France, l’apprentissage et l’enseignement technique dans les lycées professionnels. Mêmes formations, mêmes diplômes… D’ailleurs, les frontières commencent à se lézarder : de plus en plus de lycées professionnels ouvrent des sections par apprentissage.

  4. Alain Augé Says:

    Votre querelle est stérile.
    La formation professionnelle doit être dispensée par des professionnels. Elle débouche sur des diplômes et qualifications classés dans les conventions colectives. Les enseignants dans les lycées ne sont pas qualifiés car diplômés (CAPET, Agreg)mais sans expérience professionnelle du métier qu’ils ont à transmettre. Quant aux formateurs, moniteurs , répétiteurs,.. des CFA,ils possèdent en général l’expérience professionnelle. Mais s’ils souhaitent être sur un pied d’égalité avec l’éducation nationale, qu’ils soient recrutés de la même façon (PLP, CAPET, AGREG).
    Un enseignement n’est performant que par la qualité de ses enseignants.Conséquence évidente: il faut former par alternance (contrat de travail)tous les futurs enseignants de la formation professionnelle.

  5. Dubois Says:

    La querelle n’est pas stérile. Au contraire : elle permet de complexifier le débat en vue de trouver un accord analytique et politique, sur des bases les plus objectives possibles. Un fait à prendre en compte : le développement de l’apprentissage dans l’enseignement supérieur (BTS, BTSA, DEUST, DUT, Licences professionnelles, masters professionnels, formations d’ingénieurs).

    Eclairons la situation à partir d’une licence professionnelle que j’ai dirigée et dont Michel Abhervé a développé avec succès l’alternance (contrats d’apprentissage et contrats de professionnalisation).

    1. Ce diplôme est un diplôme national, organisé par le MESR. Les étudiants sont comptabilisés dans les effectifs du supérieur.

    2. La licence professionnelle n’est pas reconnue dans les conventions collectives. Ce fut un grand débat entre Michel Abhervé et moi : faut-il viser cet objectif ?

    3. Le corps enseignant est mixte : des enseignants-chercheurs et des professionnels (Michel Abhervé est professeur associé). C’est même une exigence du décret de 1999

    4. Cette licence est accrochée formellement à un CFA du SUP. Celui-ci n’est jamais intervenu dans le contenu de la licence et pour la recherche de contrats en alternance. Mais il reversait à la licence une part du financement de la région et engageait quelques professionnels de la licence en contrat de travail.

    5. Dans la licence, il y avait non seulement des étudiants en apprentissage mais également des étudiants en contrats de professionnalisation. Les premiers étaient en formation initiale et les autres en formation continue.

    Quant à Chatel, il n’est pas ministre de l’enseignement supérieur. Avant d’ouvrir la bouche, il aurait pu se mettre d’accord avec Valérie Pécresse !

    Quant à l’apprentissage, comme voie pour les étudiants en décrochage, c’est bien sûr possible, mais en y insistant trop, on dévalorise fortement l’apprentissage lui-même. Or il apporte des atouts phénoménaux aux étudiants de formation initiale qui choisissent cette voie

    A bientôt de pouvoir en débattre de vive voix avec Michel et Bernard le 12 mai prochain. Bien cordialement

  6. bernard-desclaux Says:

    Poursuivons le débat :
    il y a des modalités de formation
    – temps plein
    – alternance
    et il y a des statuts des apprenants :
    – scolaires, étudiants
    – contrat de travail (contrat d’apprentissage)
    – formation continue

    Et il y a peut-être bien d’autres choses à prendre en compte.

  7. Le blog de Bernard Desclaux» Blog Archive » L’apprentissage favorise l’insertion : thématique du gouvernement Says:

    […] nous sommes interrogé sur l’appartenance de l’apprentissage au système éducatif dans un autre article faisant suite à la polémique engagée par Michel […]

  8. Le blog de Bernard Desclaux » Blog Archive » L’apprentissage, une voie d’orientation comme une autre ? Says:

    […] déjà abordé ce thème dans mon article : Depuis quand l’apprentissage fait-il partie du système éducatif ? Voir également les […]

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