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Pierre Dubois

Avoir un DUT/BTS et après ?

5ème chronique sur les points forts et les points faibles des STS et des IUT. Poursuites d’études et devenirs professionnels.

On dispose de plusieurs enquêtes sur le devenir des diplômés de DUT (enquêtes 28 mois après l’obtention du diplôme). La première date de fin 2003 et concerne les diplômés 2001 (Coquard, 2005). La 5ème date de novembre 2007 (diplômés 2005) (Le Nir, 2008). La 6ème enquête (diplômés 2006 enquêtés en novembre 2008) n’est pas disponible sur le site de l’ADIUT, mais ses principaux résultats en sont connus (EducPros et ORFS de Basse-Normandie). Les poursuites d’études immédiates sont beaucoup plus nombreuses pour les diplômés de 2005 et 2006 (près de 80%) que pour les diplômés de 2001 (64,5%) : la licence professionnelle est passée par là ; le DUT n’est plus un diplôme terminal que dans un cas sur 5.

 

64,5% des diplômés de DUT en 2001 ont poursuivi immédiatement des études ; en 2002-2003, 51,4% sont toujours en études ; en novembre 2003, 39,3% sont encore en études ; certains d’entre eux sont donc inscrits en 5ème année d’études supérieures (en DESS, en école d’ingénieurs ou en école de commerce, puisqu’il n’existe quasiment pas de Master 2 à l’époque). Le taux de poursuite d’études est même un peu plus élevé car des diplômés qui avaient arrêté leurs études en 2001 les ont reprises en 2002 ou en 2003 : le taux de reprise d’études n’est pas négligeable : il atteint 14% des diplômés qui avaient arrêté.

Poursuites d’études encore plus accentuées pour les diplômés 2005 et 2006 : le taux approche les 80% en sortie immédiate de DUT ; en novembre 2007, 46% sont encore en études, en 3ème année d’études après le DUT. Les licences professionnelles ont accueilli 32% des poursuites immédiates d’études de 2006 (contre 10% pour les diplômés de 2001). “Les poursuites en école d’ingénieurs sont stables (15% de l’ensemble des diplômés et près de 30% des titulaires de DUT secondaires), tout comme celles en licence universitaire générale (entre 10 et 15%) ou en école de commerce (un peu plus de 5%). La poursuite d’études à l’étranger tend par ailleurs à augmenter (7% des diplômés)” (Florence Pagneux, EducPros, 2009). Les reprises d’études atteignent 10%. Les poursuites d’études sont liées à l’origine sociale : avoir un père cadre, ingénieur, profession libérale ou chef d’entreprise induit davantage de poursuites d’études” (A. Coquard, 2007).

Les données précédentes sont confirmées par l’enquête réalisée en Basse-Normandie auprès de 1.134 diplômés de DUT 2006 (ORFS, 2009). 79,2% d’entre eux ont poursuivi des études après l’obtention de leur DUT. Fin 2008, soit un peu plus de 2 ans après l’obtention du DUT, 42,5 % étaient encore en études (certains d’entre eux ayant donc atteint le niveau bac+5). 31,2% avaient poursuivi une ou deux années d’études, pour obtenir une licence puis pour engager, sans le terminer, un master ou un diplôme d’ingénieur. Les autres – 5,5 % des 79,2% – avaient choisi un autre parcours.

On ne dispose pas d’études nationales sur le devenir des titulaires d’un BTS. Leur taux de poursuites d’études est inférieur à celui des titulaires d’un DUT. Il progresse grâce à l’ouverture progressive de licences professionnelles. Deux études sur les licences professionnelles (Massé, 2006, Prouteau, 2007) indiquent en effet des poursuites d’études non seulement après un DUT mais aussi après un BTS. Ces deux études de la DEPP n’utilisent pas la même nomenclature : la première retient une catégorie de “non inscrits l’année précédente”. Parmi les 18.900 étudiants inscrits en 2002-2003 (Prouteau, 2007), on comptait 20% d’étudiants titulaires d’un BTS et 29% de titulaires d’un DUT (7% de titulaires d’un DEUG ou d’un DEUST et 18% de titulaires d’un autre diplôme). Parmi les 26.900 étudiants inscrits en licence professionnelle en 2004-2005 (Massé, 2006), on comptait 45% d’étudiants titulaires d’un BTS et 32% de titulaires d’un DUT (5% de titulaires de DEUG, 5% titulaires d’un autre diplôme) ; 39% des inscrits n’étaient pas scolarisés l’année précédente. Il n’y a malheureusement pas de données plus récentes.

Les diplômés de DUT qui entrent directement sur le marché du travail après l’obtention de leur diplôme ont une bonne insertion professionnelle. “90% des diplômés de DUT 2006 n’ayant pas poursuivi d’études étaient en emploi fin 2008, 8% en recherche d’emploi et 2% sans activité. Des chiffres similaires aux années précédentes. La durée de recherche du premier emploi – 3 à 4 mois – est également demeurée stable. Le salaire net médian s’établit pour sa part à 1350 euros par mois et 81% des diplômés possèdent un CDI (contrat à durée indéterminée)” (F. Pagneux).

Combien sont les diplômés de DUT qui vont directement au travail après l’obtention de leur DUT ? 9.660 seulement (46.000 diplômés en 2006 et 79% de poursuite d’études). C’est un problème. La création et la localisation d’un département de DUT font l’objet de négociations au niveau régional, même si, au final, l’habilitation est décidée au  niveau national. Le dossier d’habilitation doit prouver qu’il y a des débouchés professionnels locaux et c’est aux employeurs, partenaires du DUT, d’apporter des preuves. Il peut y avoir des débouchés qui ne trouvent pas preneurs. L’exemple du DUT “Génie civil” de Reims en est en bon exemple : une fois diplômés, 10% seulement des entrants dans ce DUT travaillent localement dans le secteur. Certes, l’exemple, tiré de notre études de 2003 sur le développement des exigences de qualité dans l’enseignement supérieur professionnel court en Europe (Dubois, 2005), date du début des années 2000, mais la situation très insatisfaisante d’alors pour les entreprises de travaux publics locales n’a pu que se confirmer (de plus en plus de poursuites d’études après un DUT). Il faut également rappeler qu’à cette date les fédération syndicales patronales étaient hostiles à la création des licences professionnelles : elles disaient avoir besoin de techniciens supérieurs diplômés à bac+2 et non à bac+3. 

From the number of applicants to the number of graduates involved in the regional industry :
the case of a DUT in Civil Engineering in Reims

 

1998-1999

2001-2002

Comments : tendencies, contexts, actions decided by the IUT

Possible number of students (”capacité d’accueil”)

100

100

The Department has reduced its “capacité d’accueil” in 1997. Since 1998, it is “100 students” in the 1rst year of the DUT

 

Number of applicants

378

251

Decrease in the number of applicants : young people do not like the industrial work ; concurrence done by the BTS. Actions for making the degree more attractive : “stages” abroad, development of the apprenticeship and of the continuous vocational training, campaigns of advertising organised with the industrial branch

Number of applicants who are accepted in the DUT

297

222

In order to have a sufficient number of students (100), two actions are decided : decrease of the rate of selection at the entrance; the number of accepted applicants is more than the possible number (100) (most of the applicants candidate in several vocational degrees)

Actual number of registered students

97

87

In spite of the actions, the “capacité d’accueil” is not filled

 

Number of graduates after a deadline of 2 or 3 years

 

68

70 *

Because of changes in the regulation (1998) (changes in the examination modalities), the rate of success has increased (67% in 1997, 81% in 2001). So, in spite of a decrease in the number of students, the number of graduates has increased

Number of graduates who immediately take a job after their graduation

24 *

18 *

In that DUT, the number of graduates who go on higher studies is high. Because of the setting up of the licences professionnelles, that number will increase. So the number of graduates immediately entering on the labour market will decrease

Number of graduates who immediately take a job after their graduation in a regional company of the industry

16 *

11 *

More than 1/3 of the DUT graduates have a job outside the region where they got their degree or outside their DUT speciality.

So, about only 10% of the students, entered in the DUT in 2001, have, in 2003, a job in a regional building company

* : estimate

 

 

 

Points forts. Le DUT, un passeport pour la réussite. Près de 80% des diplômés sont capables de poursuivre des études et réussissent à obtenir au moins un diplôme bac+3. Ils s’inscrivent donc dans la logique du LMD (3, 5, 8). Ceux qui s’insèrent directement sur le marché du travail ont de bons débouchés professionnels. On peut penser (penser seulement, vu l’absence d’enquêtes sur le devenir des diplômés de BTS) que les diplômés de BTS vont prendre la même voie : poursuivre jusqu’à l’obtention d’une licence professionnelle (si s’offrent dans ce diplôme davantage de places : ce n’est pas encore le cas mais ça le deviendrait avec la création des Instituts d’enseignement supérieur).

Points faibles. Les points forts ont leur revers symétrique. Les places que les diplômés de DUT et de BTS occupent en licence professionnelle ne vont pas aux étudiants de 2ème année de licence générale, écartant ceux-ci d’une possibilité de professionnalisation et les incitant à poursuivre en 3ème de licence puis en master (absence de débouchés professionnels en sortie de licence générale). La dépense pour un étudiant de DUT et de BTS, cumulée sur plusieurs années (de l’entrée en 1ère année jusqu’à bac+5 pour certains) est donc bien plus importante que celle allouée à un étudiant de licence générale qui poursuit en master. Ces inégalités de dépense publique par étudiant ne sont pas admissibles ; elles entraînent, de fait et de plus, de forte inégalités d’accès au marché du travail.

 

COQUARD Audrey, JAGGERS Christophe, SANDOVAL Véronique (2005), “L’insertion professionnelle des diplômés universitaires de technologie de 2001″, DEPP, Note d’information, 05.18, mai

DUBOIS Pierre, “Pour une accréditation des diplômes professionnels”, Les Cahiers de l’IAURIF, numéro spécial Les universités en Ile-de-France. Des pôles de développement économique et social, n°143, octobre 2005, pp. 24-31.

LE NIR Michel (2008), “Le DUT : un passeport pour la réussite”, ADIUT, 5ème enquête nationale sur le devenir des diplômés d’IUT, octobre

MASSE Sandrine (2006), “Les licences professionnelles en 2004-2005″, DEPP, Note d’information, 06.12, avril

PROUTEAU Danielle (2007), “La réussite en licence professionnelle”, DEPP, Note d’information, 07.13, avril

 

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