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Claude Thélot

Repenser les fonctions des agrégés

Les deux ministères de l’éducation et de l’enseignement supérieur sont convenus de se réunir pour examiner certaines questions liées aux PRAG et aux PRCE, ces professeurs respectivement agrégés et certifiés qui sont affectés à l’enseignement supérieur et enseignent donc, en tant que métier principal, dans les universités. Ce devrait être l’occasion, non seulement d’évoquer les « conditions de recrutement et d’affectation », mais, à mon avis la question plus large des fonctions respectives des certifiés et des agrégés.

Les agrégés et les certifiés sont en effet trop peu différenciés dans leurs fonctions, et leur différence de traitement (horaires et salaires) devient donc difficilement compréhensible. L’Etat employeur devrait différencier davantage les postes de travail des uns et des autres, ce qui correspondrait mieux à leur différence de formation et d’exigences, initiales ou continues selon le cas. En particulier il est anormal que 20% des agrégés, un sur cinq !, exercent en collège. Et cela dans toutes les matières (les contingents les plus élevés sont en lettres, en EPS, en langues et en mathématiques). Outre qu’il n’est pas sûr que les agrégés y enseignent systématiquement mieux que les certifiés, le décalage entre leurs études et leur enseignement est ici trop grand. L’investissement de la collectivité dans leur formation ne s’y « retrouve » pas.

L’Etat employeur devrait donc clairement dire :
– que les agrégés doivent enseigner dans les lycées et dans les universités, et pas ailleurs ;
– que les certifiés doivent enseigner dans les lycées et dans les collèges, et pas ailleurs.
Sans modifier les situations existantes, mais pour l’avenir, y compris immédiat, cela conduirait d’abord à ne plus recruter d’agrégés au collège, à lier étroitement pour un professeur exerçant en collège le fait d’être reçu à l’agrégation interne et le fait de changer de niveau d’enseignement, à ne plus recruter de PRCE en université, et à développer le nombre de PRAG à l’université. Sur ces bases pourraient être définis beaucoup mieux qu’aujourd’hui des profils de carrière.

Il y a en effet un peu plus de 13 400 PRAG ou PRCE (surtout des PRAG), pour 57 700 professeurs et maîtres de conférence (hors médecine). Cet effectif pourrait être fortement accru dans la perspective d’une amélioration de l’enseignement universitaire. Car s’il faut se réjouir de ce que désormais l’évaluation des enseignants-chercheurs intégrera une dimension « enseignement » à côté de la dimension « recherche », pratiquement seule à jouer jusqu’à maintenant, il faut reconnaître que les centres d’intérêt principaux des enseignants-chercheurs resteront les travaux de recherche (c’est compréhensible et sans doute indispensable). Aussi l’amélioration pédagogique nécessaire de l’université, au moins dans les premières années, devrait beaucoup plus être attendue d’un développement du nombre de PRAG précisément. Les professeurs agrégés en effet ont de leur expérience du lycée une attention aux élèves et à leurs progrès qui, certes, est perfectible, mais qu’ils portent aux étudiants lorsqu’ils enseignent à l’université de façon beaucoup plus marquée que les maîtres de conférence et les professeurs.

L’université de masse dans laquelle nous sommes entrés depuis une vingtaine d’années requiert d’avoir des enseignants dont la préoccupation principale soit l’amélioration de l’enseignement et les progrès des étudiants. D’où la nécessité d’un ensemble d’enseignants à l’université qui soit plus équilibré entre enseignants-chercheurs et agrégés qu’aujourd’hui.

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