La Faculté de Droit est constitutive de l’université médiévale au même titre que les deux autres facultés-mères, la Théologie et la Médecine. Dès l’origine cependant, les universités cherchent à être attractives par une orientation juridique dominante ; Bologne se spécialise dans le droit romain et Paris dans le droit canonique. Comme toutes les disciplines, le droit se déclinera progressivement en sous-disciplines et donnera naissance à de nouvelles disciplines, au fil des besoins de la société en professionnels, parfaitement connaisseurs des savoirs juridiques de leur champ d’intervention et eux-mêmes demandeurs de nouvelles règles.
Les 3 chroniques précédentes (le droit à Strasbourg, Nancy, Paris 2, Besançon, Dijon, Cergy-Pontoise, Reims, Mulhouse) montrent que le droit et les disciplines qui en sont issues au fil du temps (la science politique, l’économie, le management) 1. constituent le coeur même de l’enseignement et de la recherche de l’université (Paris 2), 2. ou demeurent dans une seule et même faculté (Nancy, Besançon, Mulhouse), 3. ou se partagent en deux facultés (droit et sciences politiques d’une part, économie et gestion d’autre part, Strasbourg, Dijon, Reims, Cergy-Pontoise).
Cet éclatement est le fruit d’une part de la constitution des universités sous le régime de la loi Faure de 1968 (et des clivages politiques existant alors entre le droit et l’économie), et d’autre part de la progression du nombre d’étudiants jusqu’au milieu des années 90 (elle permet la création de plusieurs facultés “de taille humaine”).
En parallèle, des disciplines, filles du droit, quittent l’université et/ou la faculté éponyme pour s’inscrire dans d’autres formes organisationnelles, qui se veulent plus attractives pour les étudiants mais, surtout, concurrentes. La complexité devient croissante au fil du temps : c’est un des facteurs de la faible lisibilité de l’offre de formation, tant à l’entrée en licence qu’à l’entrée en master.
Jusqu’à la guerre de 1870, toutes les spécialités du droit demeurent des disciplines enseignées dans la Faculté de droit. C’est le cas à Nancy en 1864 ; la faculté ”comporte alors sept chaires : trois de code napoléonien, une de droit romain, une de droit administratif, une de droit commun, et une de procédure civile”. Notons la disparition du droit canon. Aujourd’hui, si on se réfère à la composition du Conseil national des universités, le droit s’inscrit dans 4 sections : 1. Droit privé et sciences criminelles, 2. Droit public, 3. Histoire du droit et des institutions, 4. Science politique.
La science politique, comme discipline d’enseignement et de recherche, s’autonomise du droit au lendemain de la défaite de 1870. “En s’inscrivant dans l’effort de renouvellement républicain et en vue de réformer la formation des élites de la France pour donner un nouveau départ au pays, Émile Boutmy, entouré d’un groupe d’hommes de sciences et d’industriels, crée, en février 1872, l’École libre des sciences politiques” (Wikipédia).
Cette “Ecole libre” devient “publique” en 1945, et porte désormais le nom d’Institut d’études politiques (IEP) de Paris ; il devient par la suite Grand établissement, autonome de toute université. On le sait, l’IEP de Paris mène une stratégie offensive de diversification. Il possède ainsi aujourd’hui une Ecole de droit, clairement concurrente des masters de Paris 2.
Les huit autres IEP, créés de 1945 à 1991, sont rattachés chacun à une université (Wikipédia). Le premier d’entre eux, l’IEP de Strasbourg, est, comme l’IEP de Paris, créé en 1945 : son site et la présentation qu’en fait le site de l’université. Au sein de la même université, la faculté de droit, de sciences politiques et de gestion est donc concurrencée par l’IEP, non seulement au niveau master, mais aussi au niveau licence. L’intégration à l’IEP est en effet possible sur concours après le baccalauréat. Mais évidemment une grande différence : numerus clausus et sélection à l’entrée pour l’IEP, pas de sélection pour entrer en 1ère année de licence à la faculté de droit. Comment gérer dans la même université des composantes et des formations à plusieurs vitesses ? Pourquoi ne pas faire de l’IEP un des parcours de formation de la faculté ?
Chronique à venir : le Droit, l’Economie et le Management.