Deuxième chronique sur l’UNIL. La première a porté sur les 3 sites géographiques de l’université au fil des temps (ici). Plus de 11.500 étudiants inscrits dans les cycles de Licence (Bachelor), de Master et de Doctorat : la Suisse s’est en effet adossée au processus de Bologne pour l’architecture de son enseignement supérieur. LMD en Suisse, LMD en France. La tentation est donc grande : comparer, dans les deux pays, les parcours de formation (les taux de réussite) et les insertions professionnelles des diplômés ?
En fait, seuls les parcours dans le cycle L (licence) pourraient peut-être faire l’objet de comparaisons. C’est ce que j’en déduis après avoir navigué longuement sur le site de l’université : 5 clics nécessaires pour trouver l’information, c’est évidemment trop : clic 1 (”L’UNIL en chiffres”), clic 2 (”Plus de chiffres”), clic 3 (”Pour des données plus détaillées”), clic 4 (”Bureau des statistiques”), clic 5 (”Indicateurs sur la réussite universitaire”). Ouf ; on y est !
La méthode utilisée est, avec raison, celle du suivi de cohorte (cohortes concernées : 2004, 2005, 2006, 2007). Que deviennent les entrants en 1ère année de licence (bachelor) après 1, 2 et 4 années ? Les “sets d’indicateurs” retiennent 4 taux clés : abandon, réorientation, redoublement, progression / réussite. Ces taux sont donnés pour l’ensemble des entrants et par discipline de formation (deux spécificités de l’UNIL : la théologie et les sciences des religions, les sciences criminelles). Les taux sont moyennés pour l’ensemble des cohortes déjà concernées : ce qui est dommage car on ne peut savoir si les taux évoluent dans un sens favorable (moins d’abandons et moins de redoublements ?) d’une cohorte à l’autre.
Quelques résultats. Les taux de réorientation sont inférieurs à 10%. L’UNIL n’est pas épargnée par le phénomène d’abandon en cours d’études de licence : 20% après un an, 31% après 2 ans, 39% après 4 ans ; les taux sont fort variables d’une formation à l’autre (les plus élevés se situent en sciences criminelles, les plus faibles en géosciences et environnement).
25% des entrants en 1ère année redoublent celle-ci (les extrêmes : 0% en Lettres mais 52% en Médecine). 59% des étudiants obtiennent leur 1ère année en 2 ans (les extrêmes : 26% en Sciences criminelles, 79% en Géosciences et environnement). 48% des 1.769 étudiants entrés en 2004 ont obtenu leur licence en 3 ans. Les 3 taux les plus faibles sont : 25% en Sciences criminelles, 42% en Sciences sociales et politiques, 48% en Droit. Les 2 deux les plus élevés : 60% en Biologie, 69% en Géosciences et environnement.
Peut-on comparer les taux d’obtention de la licence en 3 ans en France et en Suisse ? Il faut, en toute rigueur, répondre : non ! En dépit d’un point commun : en Suisse comme en France, il n’y a pas, à part le secteur de la médecine, de sélection à l’entrée de la 1ère année de licence. Les comparaisons seraient délicates : les taux de succès dans une université donnée dépendent, en effet et en particulier, de la structure de son offre de formation (les taux varient fortement d’une discipline à l’autre) et de la structure de sa population étudiante.
Enfin, pour la France, on ne dispose pas de taux sûrs (chronique : “Licence en 3 ans“). Le taux d’obtention de la licence en 3 ans, selon le Projet de Loi de Finances 2010, était de 38,3% en 2007 ; l’objectif à atteindre est 40% en 2010 et de 43% en 2012. D’où sort ce taux de 38,3% ? Il est en effet en contradiction avec le taux de la Note d’information 09.23 : “Parcours et réussite en licence des inscrits en L1 en 2004” (lire la Note). Seulement 28,8% des 179.300 étudiants inscrits en L1 à la rentrée 2004 ont obtenu la licence en 2007, c’est-à-dire en 3 ans. 38,3% ou 28,8% ? Un tel décalage de taux n’est pas sérieux et détruit toute possibilité de comparaison.
Au final pour l’UNIL. Des suivis de cohorte existent mais ce serait mieux si chaque cohorte d’entrants était isolée des autres. Pas d’enquêtes sur les parcours de formation et la réussite en master. Pas d’enquêtes sur le devenir professionnel des diplômés. L’enquête BAMA (”Que font les étudiants après leur bachelor ?”) s’intéresse à la poursuite d’études en master, dans ou en dehors de l’université ; elle ne dit rien de ceux qui ont arrêté leurs études après la Licence : sont-ils en emploi ou en recherche d’emploi ? Bref, l’université de Lausanne, comme la plupart des universités françaises, peut faire beaucoup mieux pour mettre des données de réussite et de débouchés à la disposition de ses étudiants et futurs étudiants.