“Je cesse de m’indigner ?“. Quelquefois, j’en ai envie (lire la chronique) ! Je m’indigne des initiatives d’excellence (IDEX) alors qu’aucune université n’a refusé d’y aller ! S’indigner pour rien ? Les IDEX m’exaspèrent parce qu’elles ont été élaborées sans consultation des principaux intéressés, loin des préoccupations des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche, des étudiants et parce qu’elles auront une gouvernance… ingouvernable (chronique : “IDEX. Pire qu’une usine à gaz“).
Il paraîtrait même que certaines des 17 IDEX (liste sur le site du MESR) ont été conçues et écrites non pas par les directions des établissement concernés par le regroupement projeté, mais par des Agences privées lucratives, plus à même de “pondre” des textes conformes aux appels à projets. Quel a été le coût financier de telles opérations clandestines ? Le connaîtra-t-on un jour ?
S’exaspérer certes, mais aussi “espérer”, dit Stéphane Hessel. D’où l’idée de cette nouvelle rubrique du blog : “Initiatives excellentes“, initiatives nées “en bas”, ”de terrain”, portées par des personnels et par des étudiants, qui ne cherchent pas à se mettre en valeur et à qui on donne trop peu la parole, personnels et étudiants qui sont fortement impliqués et qui, avec persévérance, font bouger les lignes dans l’enseignement supérieur et la recherche, réalisent des actions socialement utiles, mènent des projets, prennent des initiatives pour l’intérêt collectif et non pour leurs intérêts particuliers.
Décembre 2010, 18 heures. Il pleut sur Strasbourg. Je participe à une session de formation d’Etudiants et Développement (site d’E & D). Créé en 1994, E & D est un réseau de près de “200 associations d’étudiants et de jeunes agissant pour la solidarité internationale, désireux de travailler main dans la main avec les partenaires au Sud et de s’ancrer dans le monde associatif”. Les missions : “sensibiliser aux problématiques internationales, informer, accompagner et former, faire émerger une réflexion et une parole de jeunes”.
E & D a un statut associatif et est donc pilotée “politiquement” par un conseil d’administration et un bureau (ici) ; à Strasbourg, c’est Lucille Thiébot, vice-présidente (à droite sur la photo ci-contre), qui encadre la formation. L’équipe permanente, relativement étoffée (ici), est chargée de mettre en oeuvre les actions décidées par le CA.
Nous sommes 10. Je suis le seul “non étudiant” et je ne m’y attendais pas. La session de formation démarre et j’y suis associé. Première prise de parole : présenter un(e) des participant(e)s ; pour cela, nous devons d’abord interviewer l’un d’entre eux durant cinq minutes. J’interviewe Fanny : ”qui es-tu et pourquoi es-tu là” ? De fait, l’exercice n’est pas simple mais il est formateur. Les dix participants sont en 2ème année de master à Strasbourg ou sont tout juste diplômés de master en “Coopération et développement”, en “Droits de l’homme”, en “Commerce et management”, en “Droit international”, en “Economie”… Choix de ce type de master parce qu’on a un projet à l’international ou naissance de ce type de projet à l’occasion des enseignement du master ? Pas le temps d’approfondir !
Ce qui est sûr. 1. Les étudiants ou les diplômés présents ont déjà une expérience à l’international (dans le cadre du stage de master, ou parce qu’ils ont été “Volontaire international”, ou encore parce qu’ils sont étrangers : plusieurs étudiants originaires d’Amérique du Sud). 2. La plupart ont un engagement associatif dans l’université de Strasbourg. 3. La moitié d’entre eux a déjà un projet de solidarité internationale : sortir les enfants des mines pour protéger leur santé, développer l’accès à la culture en milieu rural, faire l’animatrice itinérante…
Deuxième prise de parole : le jeu de rôle. Nous sommes partagés en deux équipes. La première représente une association internationale qui vient défendre un, projet d’implantation d’une école dans un village du Sénégal ; la seconde est constituée de représentants sénégalais du village en question. J’appartiens à cette seconde équipe et je dois jouer le rôle du nostalgique de la colonisation française ! Dans cette même équipe, il y a le commerçant qui compte “profiter” de l’implantation d’occidentaux dans le village et le partisan du refus de la proposition parce que sa parenté a combattu les français pour acquérir l’indépendance. Dans l’autre équipe, il y a également une multiplicité de profils d’engagés dans l’association pour l’école (bien sûr, il y a celui qui veut voyager et connaître d’autres pays et cultures). Difficile pour chaque équipe de trouver et de présenter une position consensuelle devant l’autre équipe. Apprentissage de la négociation !
Troisième exercice : la méthodologie de projet, les étapes, le financement (les projets JSI et VVVSI sont soutenus par le Ministère des affaires étrangères : cliquer ici). E & D joue son rôle d’accompagnement de projet… Je n’ai pas de projet de solidarité internationale et il est donc temps de laisser les jeunes se former entre eux. C’est le moment des photos reproduites dans cette chronique. Je quitte le groupe. La neige commence à tomber sur Strasbourg. Je suis heureux de cette “initiative excellente” : générosité, solidarité, dévouement, altruisme, engagement, indignation contre les inégalités… L’université de Strasbourg et la vie étudiante citoyenne : cliquer ici.