Nous distinguons ici la contrefaçon qui constitue juridiquement toute atteinte au droit d’auteur et le plagiat qui revient à s’approprier la création intellectuelle d’autrui. Comme nous l’avons souligné dans notre chronique précédente, “confession d un enseignant délinquant !”, l’on devient contrefacteur lorsque nous utilisons une ressource à des fins pédagogiques en excédant les prescriptions légales. Mais dans ces comportements nous respectons scrupuleusement le droit de paternité des auteurs. En revanche le plagiat vise des faits qui tendent à réutiliser la création d’autrui en s’appropriant indûment ce travail intellectuel, c’est-à-dire concrètement en supprimant toute référence à l’auteur de la création. Ici au-delà de l’atteinte au droit d’auteur il s’agit de véritable malhonnêteté intellectuelle.
L’ampleur du plagiat dans les établissements d’enseignement supérieur est largement sous-estimée.
Ce phénomène existe depuis des décennies, dans l’enseignement supérieur nous avons tous entendu parler de telle ou telle anecdote de plagiat manifeste : un étudiant rédigeant un article pour un enseignant, un enseignant s’appropriant le travail de son doctorant, une thèse plagiée,… Bien souvent, et c’est même la règle, ce type d’agissement n’a pas donné lieu à une sanction. Evidemment une sanction pénale ne s’avérait pas indispensable, nous rappelons que la contrefaçon peut être punie au maximum de 3 ans de prison et de 300 000 euros d’amende, néanmoins une sanction disciplinaire paraissait s’imposer.
Aujourd’hui le numérique met en évidence et accroît le phénomène de plagiat.
Le numérique en général et plus spécifiquement Internet souligne douloureusement l’ampleur du plagiat car nous disposons d’outils permettant de déceler le plagiat. Des outils « experts » sur le marché des logiciels, des projets universitaires open source accessibles par page web (aux Etats-unis entre autre) et enfin le recours aux moteurs de recherche nous permettent de caractériser les faits de plagiat. En résumé nous disposons dorénavant des moyens techniques pour lutter contre ce phénomène alors qu’il y a quelques années l’impunité était de mise puisque bien souvent il n’était pas possible de prouver les faits de plagiat.
Le numérique et Internet ont accru également le plagiat, l’utilisation des fonctionnalités « copier-coller » permet facilement de s’approprier le travail d’autrui. On apprend désormais dès les premières années de l’enseignement primaire à interroger Google et à « copier-coller » une image, un texte,…
Toute une génération, les Digital Natives, a été biberonnée au « copier-coller » !
Les parents sont-ils en mesure de montrer l’exemple ? Nous ne le pensons pas, ils sont bien souvent eux-mêmes des contrefacteurs. Il suffit de constater l’ampleur et la banalisation du téléchargement sur Internet dans le domaine de la musique, de l’audiovisuel et, avec l’avènement des tablettes numériques, du livre. Pire même, les partisans du copyleft et de l’abandon du droit d’auteur bénéficient d’un écho retentissant sur la toile. Cette dénégation quasi-systématique du droit d’auteur constitue également un facteur aggravant du phénomène de plagiat.
Il est une évidence qu’il convient de rappeler : sans droit d’auteur il n’y a plus de plagiat. La question nous semble aujourd’hui plus relever d’un enjeu culturel. Il s’agit de redonner son entière valeur à la création intellectuelle, à l’investissement créatif et au respect du travail d’autrui.
Tout dispositif de contrôle et de sanction anti-plagiat, comme nous l’appelons de nos vœux, serait inutile sans un travail de prévention. Il est aujourd’hui nécessaire de réhabiliter le droit d’auteur et de former nos jeunes générations au respect du travail intellectuel d’autrui. Pour cela un grand plan d’action dans l’enseignement nous semble indispensable. Ce plan devrait contenir deux volets. Un volet répressif : des outils numériques de contrôle du travail des élèves et étudiants pourraient être proposés à l’ensemble des établissements d’enseignement. Un volet préventif : dès les premières années de scolarisation des actions de formation au respect de la propriété littéraire et artistique devraient être organisées parallèlement aux formations aux outils numériques.