En marge de la réunion de la CPU consacrée au “cycle licence”, qui se tenait à Toulouse du mercredi 11 au vendredi 13 mai 2011, Valérie Pécresse aurait publié un long document, qui prend parfois des aspects d’autocritique, mais qui sème le trouble dans notre milieu. Faut-il aller négocier ? Peut-on aller plus loin ? L’auteur, sans se prononcer, livre ici quelques extraits de ce document.
Sur la LRU
Après en avoir fait un bilan, et malgré les réticences de certains Présidents d’université (de ceux qu’on n’a jamais vus dans les batailles), Valérie Pécresse affirme vouloir « réformer la loi LRU pour favoriser une autonomie des établissements d’enseignement supérieur et des organismes de recherche fondée sur la collégialité universitaire, la démocratie interne et sur l’attribution de moyens matériels et humains accrus pour faire vivre cette autonomie dans de bonnes conditions. ». Et d’enchaîner un peu plus loin : « la multiplication des structures (PRES, RTRA, FCS, etc.) entraîne une véritable dilution de la démocratie si leur subsidiarité n’est pas clairement établie et si elles ne sont pas dotées d’organes délibératifs (les CA) dans lesquels soient présents des élus des différentes communautés. Il importe ainsi de mieux équilibrer le rôle des différents conseils, en allant vers des solutions qui combinent : une forte délégation vers les acteurs de terrain, chacun doté de ses instances de concertation ; la généralisation du contrôle a posteriori ; l’affirmation du pouvoir de contrôle et de gestion stratégique dévolu aux instances élues de l’université, en particulier le conseil d’administration ».
« La loi LRU prétend instaurer l’autonomie des universités, mais sans leur en donner les moyens en ressources humaines et financières. Dans le cadre de la réforme de la loi LRU, nous nous engageons à redéfinir les moyens concrets de l’autonomie en refusant une concurrence entre établissements et en sécurisant les financements. (…) Avant tout l’autonomie ne doit pas se traduire par plus de contrôle a priori, d’une part, et un désengagement financier de l’État, d’autre part ».
Sur le grand emprunt
Valérie Pécresse veut aussi « réviser les investissements d’avenir du Grand emprunt et le plan Campus, tout en assurant à la fois le rayonnement international de la France et l’élévation du niveau d’ensemble par la mise en réseau ». Elle ajoute lucidement que « le plan Campus, annoncé à grand renfort de communication, n’a, trois ans après son lancement, toujours pas débouché sur une réalisation concrète. La superposition de règles absurdes et de financements par partenariat public-privé (PPP) ruineux a débouché sur un gel des constructions et rénovations dans les lieux choisis. Une libéralisation des financements et une réelle coopération avec les collectivités locales permettront de débloquer des situations inextricables ».
« En mettant en place les Idex (Instituts d’excellence pour moins de dix sites en France), le gouvernement a rendu plus illisible encore l’organisation territoriale des établissements. Pour les Idex, le mode de gouvernance préconisé menace l’autonomie des instances des universités et des organismes, tout en accentuant fortement les disparités entre régions. De plus, le financement se fait uniquement par les intérêts d’un capital placé et dans les faits nous sommes très loin des milliards annoncés par le gouvernement. Comme on peut le constater aujourd’hui, il existe un risque réel de développement de véritables déserts scientifiques, qui, dans une perspective de société de la connaissance, vont encore accentuer les inégalités de développement. Face à cette situation nous développerons une politique visant un double objectif : assurer au meilleur niveau le rayonnement international de la France dans un monde universitaire et scientifique mondial très compétitif, et dans le même temps faire en sorte que l’ensemble du territoire français bénéficie des retombées de la science et de la formation à un niveau supérieur. Aussi, dans le cadre d’une augmentation des crédits budgétaires, un soutien important devra être apporté aux régions aujourd’hui délaissées, en travaillant particulièrement sur l’organisation du réseau territorial de connaissance dans ces régions. Par ailleurs, par notre politique de mise en réseau des forces scientifiques au niveau national, local et européen nous ferons en sorte que les points forts puissent tirer vers le haut l’ensemble du système national ».
Sur l’emploi scientifique et les CDD
Valérie Pécresse se déchaîne même, au point qu’on se demande si c’est bien elle qui a écrit ce texte : « Le plan pluriannuel de l’emploi concernera aussi bien les universitaires que les personnels administratifs et techniques, les doctorants que les chercheurs (…). Nous ferons reculer la précarité des doctorants et nous soutiendrons l’avancement de l’âge du recrutement des docteurs. L’explosion du nombre de CDD est un handicap. Comment se lancer dans des projets scientifiques audacieux quand on doit en permanence chercher le contrat suivant ? La priorité sera donc de favoriser l’intégration des CDD sur des emplois stables. Les crédits servant à payer ce personnel seront convertis en emplois budgétaires en respectant les modalités et le niveau des concours. C’est d’abord une question de justice pour ces personnels ».
Non bien sûr, il ne s’agit pas d’une déclaration de Valérie Pécresse (vous l’aviez deviné). Ces citations sont extraites de la déclaration du forum du parti socialiste. Nous en discuterons en temps utile.
La vraie déclaration de la très sarkozyste ministre est celle-ci : «Hier, j’ai eu un choc, parce que j’ai lu le programme du Parti socialiste pour l’université en 2012, qui vise à conforter l’autonomie des universités ». (…) « Alors, je suis extrêmement heureuse de voir qu’aujourd’hui vous en venez à soutenir cette réforme », a-t-elle poursuivi, concluant que, selon elle, « le programme du Parti socialiste (…), c’est un bel hommage au bilan de Nicolas Sarkozy ».
Lisant cela, certains doux rêveurs attendent, paraît-il, de Valérie Pécresse l’ouverture de négociation sur la révision de la LRU et sur la mise en œuvre d’un plan pluriannuel de l’emploi scientifique. Mais, je l’espère, tout de même sans illusion, car la politique de Sarkozy-Pécresse est le plus grave échec du quinquennat, puisqu’il sacrifie l’avenir.