Catégories
Pierre Dubois

Dresser la carte des IES

Les Instituts d’enseignement supérieur, projet porté par ce blog depuis sa création début 2009, organisent deux voies d’études post-bac, préparant à la licence en trois ans : voie préparant à la poursuite d’études et voie professionnelle permettant l’accès au marché du travail. Pour un résumé de ce qu’est un Institut d’enseignement supérieur et comment le financer, lire les chroniques : “Des IDEFI sans défis” et “Pour un corps professoral unique en licence“.

La chronique d’aujourd’hui esquisse la méthodologie pour construire la carte de l’implantation des IES. L’outil pertinent pour ce faire est l’Atlas des formations en région (le dernier paru concerne l’année 2009-2010). L’Atlas dresse un véritable inventaire de l’implantation des différents types de formation supérieure dans les villes et des effectifs inscrits dans chacune des filières.

Les filières de formation sont très inégalement réparties sur le territoire régional. Les plus disséminées sont les STS et les plus concentrées, les CPGE. Les formations universitaires (DUT et licences) se situent en position intermédiaire. Prenons l’exemple de la région Alsace : des BTS existent dans 22 villes alors que 3 villes seulement (Strasbourg, Colmar et Mulhouse) possèdent des CPGE. Les IUT sont présents dans 5 villes (les 3 précédentes plus Haguenau – 2 IUT à Strasbourg). En plus des formations universitaires dans les trois grandes villes de la région, il existe une formation universitaire à Sélestat (centre de formation de musiciens intervenants, CFMI).

La composition sociale des filières supérieures est fort différente, chacun le sait, dans les STS et dans les CPGE. Les STS, formations de proximité, permettent l’accès des enfants des classes populaires (ouvriers et employés) à l’enseignement supérieur. Les STS minimisent les coûts d’accès à l’enseignement supérieur (moins de frais de transport et de logement). Les IES qui visent à diplômer 50% des jeunes générations, grâce en particulier à l’accès et à la réussite d’un plus grand nombre de bacheliers professionnels dans le supérieur, se doivent d’être disséminés sur le territoire régional. Les IES, y compris leurs voies longues, doivent être des établissements de proximité, être répartis dans les villes grandes et moyennes.

Mais il y a évidemment des contraintes organisationnelles et financières. L’IES, étant un établissement d’enseignement supérieur autonome et distinct des lycées et des universités, il doit accueillir au minimum plusieurs centaines d’élèves. Je pars ainsi du principe qu’il doit organiser au minimum deux voies longues parmi les cinq et deux voies professionnelles. Ces ”deux fois deux voies” doivent se situer dans des champs de formation complémentaires, pour permettre et faciliter le passage éventuel de la voie longue à la voie professionnelle et inversement en cours de licence.

Ceci donne l’effectif minimal d’un IES : 35 étudiants x 2 fois 2 voies x 3 années de licence = 420 étudiants. Les IES les plus importants pourraient atteindre l’effectif de 1.890 étudiants (35 x 3 groupes x 3 fois 2 voies x 3 ans = 1.890). Bien évidemment, il n’est pas question que chaque IES organise chacune des 5 voies longues et des 5 voies professionnelles ! La spécialisation relative permet des économies d’échelle !

Revenons à l’Alsace et à ses 24 villes qui accueillent des formations supérieures. 15.465 bacheliers en 2009 (8.089 bacheliers généraux, 3.856 bacheliers technologiques, 3.520 bacheliers professionnels) ; le nombre de bacheliers a progressé de 14,2% depuis 2004 ; il pourrait donc y avoir 17.000 bacheliers en 2013. 70,6% des bacheliers 2009 ont poursuivi immédiatement des études supérieures ; ce taux devrait progresser avec la montée en puissance des bacheliers professionnels et la création des IES ; supposons un taux de 75% à la rentrée 2014. L’effectif d’entrants en 1ère année de la licence IES serait alors de 17.000 x 0,75 = 12.750.

Effectifs étudiants pour 3 années d’IES = 12.750 x 3 = 38.250 arrondis à 40.000 (les taux de redoublement diminuent en IES mais ne disparaissent pas). Il ne s’agit évidemment que d’une “fourchette” : une hypothèse basse pourrait être retenue si les établissements privés n’adoptent pas le modèle des IES et si l’Alsace est peu attractive (nombre de bacheliers quittant la région après le bac < ou > bacheliers d’autres régions s’y inscrivant après le bac). 

A terme, il pourrait y avoir 30 IES en Alsace, répartis dans 15 villes (soit une moyenne de 1.300 étudiants par IES). 20 dans le Bas-Rhin et 10 dans le Haut-Rhin. 11 à Strasbourg, 4 à Mulhouse, 2 à Colmar, 2 à Illkirch, 1 à Haguenau, Sélestat, Schiltigheim, Brumath, Erstein, Wissembourg, Saverne, Guebwiller, Altkirch, Saint-Louis, Rouffach. Quel planning ? Celui des prochains contrats de projets entre l’Etat et la Région (2014-2020). Un défi : ouverture des 10 premiers IES d’Alsace à la rentrée 2014 ! A débattre !