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Pierre Dubois

L. Collet et la prime des présidents

Lionel Collet a été nommé Directeur de cabinet de la Ministre de l’enseignement et de la recherche, Geneviève Fioraso. Ce n’est pas vraiment une surprise : l’ancien président de Lyon 1 et de la Conférence des présidents d’université, 57 ans, professeur des universités et praticien hospitalier, faisait partie des conseillers de François Hollande durant la campagne présidentielle. Il connaît et maîtrise sans conteste les dossiers du SUP.

Dans le contexte de la diminution des salaires du président et des ministres de la République, je suggère à Lionel Collet de demander l’abrogation du décret du 16 juin 2010 “instituant une prime d’administration et une prime de charges administratives attribuées à certains personnels de l’enseignement supérieur” dont les présidents d’université.

Dans ma chronique du 25 juin 2010, j’écrivais : “tout président touche une indemnité annuelle de fonction de 20.000 euros. Le décret permet de majorer de 50% cette indemnité en cas de passage aux responsabilités et compétences élargies : on en est à 30.000 euros. Article 1 II : “en outre, les montants individuels de prime peuvent être augmentés, par décision du ministre chargé de l’enseignement supérieur, dans la limite de 20 % du montant de la prime majorée, en fonction de la réalisation d’objectifs et des résultats d’indicateurs fixés et notifiés en début d’année par ce même ministre“. 30.000 euros + 20% = 36.000 euros par an, soit 3.000 euros par mois. Une prime liée aux objectifs fixés par le ministre ! Autonomie des universités ?

Bertrand Monthubert, membre du PS, élu récemment président d’université à Toulouse, avait vertement critiqué sur son blog une “nouvelle étape de la vassalisation des universitaires”. “Le ministre pourra intervenir sur cette rémunération [des présidents], les plaçant dans une position analogue à celle des directeurs d’administration centrale, par exemple. Alors que ce sont des élus, ils deviennent des vassaux”.

Dans ma chronique du 27 juin 2012, je faisais référence à un article de Libération, “quand les primes des Présidents d’université passent mal“. Lionel Collet s’y déclarait hostile à la modulation de la prime prévue par le décret. Il poursuivait : “nous demandons au ministère de trouver une autre solution, par exemple que cette part soit incluse dans la prime fixe”. L’article de Libé concluait : “Les présidents estiment ne pas abuser : la moitié de leurs homologues britanniques gagnent plus de 210.000 euros par an”.

En juin 2010, Lionel Collet était président de la CPU et professeur des universités / praticien hospitalier ; “avec les primes instaurées par le décret, son revenu mensuel sera d’environ 13.000 euros par mois, soit 156.000 euros par an.

La CPU, sous la présidence de Lionel Collet puis de Louis Vogel, n’a jamais dénoncé officiellement la partie de la prime attribuable directement par le Ministre… Cette “affaire” est tombée ensuite dans les oubliettes. Les présidents d’université élus cette année connaissent-ils le décret de juin 2010 ?

Le nouveau directeur de cabinet devrait donc répondre aux questions suivantes : “Valérie Pécresse puis Laurent Wauquiez ont-ils fixé des objectifs aux présidents ? Ont-ils fait évaluer les résultats atteints ? Des présidents ont-ils perçu la part variable de la prime” ? Si cette part variable de la prime est restée “lettre morte”, il sera facile pour Lionel Collet de faire abroger le décret. Le plus tôt sera le mieux !

Il n’empêche que la nomination de Lionel Collet comme directeur de cabinet me laisse songeur. Dans son université en tant que président puis en tant que président de la CPU, il a appliqué la LRU, le passage aux responsabilités et compétences élargies, les investissements d’avenir, et ce sans sourciller. Il doit donc répondre à une autre question : “Lionel Collet, êtes-vous partisan de l’abrogation de la LRU, de son titre qui concerne la gouvernance des universités, ou ne comptez-vous que la modifier à la marge ?”