A l’occasion de la reprise des débats de la concertation, ce lundi 20 aout, je publie ces quelques remarques.
Lors du dernier débat sur l’éducation (« le Grand débat » de 2004) il fut très peu question d’orientation. Lorsqu’elle était abordée, c’était essentiellement du côté du manque d’information. La lecture des premières contributions et de quelques autres apports montre un autre angle d’attaque du problème.
Le SGEN-CFDT
Ce syndicat général a publié sur le site de la concertation un long document.
Dans la fiche 2, consacrée au Socle commun et à la scolarité obligatoire, page 6, on trouve : « L’objectif de l’acquisition d’un socle commun de connaissances et de compétences par tous entraîne une modification de la structure en aval et a pour première conséquence la fin du dispositif de sélection qui organise la répartition des flux d’élèves vers les trois voies du lycée, puis dans le supérieur. La construction des parcours de formation s’effectue à partir de la seconde qui est une classe de découverte. ». Mais la fiche 5 consacrée au Collège ne reformule pas ce thème. Et dans la fiche 6, l’organisation par module est évoquée….
La fiche 12 consacrée explicitement à l’Orientation me semble présenter un compromis :
« À l’issue du parcours en collège qui valide l’acquisition du socle commun, l’élève et sa famille décident du parcours de formation. Ils sont accompagnés dans ce choix par l’équipe éducative et notamment par le conseiller d’orientation psychologue.
Au lycée, la modularité des parcours de formation et des modalités d’évaluation au service de la validation des acquis permettent d’ajuster tout au long du cursus les choix des parcours vers des diplômes professionnels, technologiques ou généraux, en fonction des unités de formation choisies et des niveaux validés. »
Donc s’il semble qu’il y ait un accord sur la suppression de la procédure d’orientation en fin de troisième, rien n’est dit sur les paliers précédents (6ème et 4ème). Le SGEN-CFDT insiste sur la notion de cycle, avec l’évaluation des acquis pour accompagner l’apprentissage et la validation pour la certification. Mais que devront choisir les parents et les enfants à l’issue de la troisième ? De quel parcours s’agit-il ?
La FSU
Cette fédération renvoie sur un document installé sur son site.
Je relève un passage dans la déclaration importante à mes yeux, mais qui me semble également ambiguë :
« La Fsu pose la question de la prolongation de la scolarité à 18 ans. Cela non seulement parce que 90% des jeunes sont scolarisés jusqu’à 17 ans mais surtout parce qu’on ne peut viser l’élévation du niveau de qualification sans prendre en charge leur scolarité dans ce cadre. Ceci permettrait à tous les jeunes d’entrée dans l’une des trois voies du lycée. Une telle mesure aurait par ailleurs l’avantage de dégager le collège de la contrainte de l’orientation, la seule restante étant le choix de l’une des voies du lycée en fin de troisième, lui ouvrant enfin réellement la possibilité de devenir le collège de tous. »
Ici la position semble clair quant au post-troisième qui reste en l’état : on maintien les trois voies actuelles, professionnelle, technologique, générale. Mais reste une interrogation : qui fait le « choix » de ces voies en fin de troisième ?
La FCPE
Dans sa fiche « Orientation », la Fédération fait les propositions suivantes :
- Respecter le choix des élèves et l’avis de leurs familles en matière d’orientation, choix qui ne peut intervenir qu’après une information de qualité sur les métiers, les branches professionnelles et les voies de formation.
- Mettre en place une éducation à l’orientation tout au long du collège pour tous les élèves, avec des temps de découverte des métiers et des voies de formation. La formation à l’orientation n’est pas un cours, mais un temps d’échange et de rencontre.
- Créer un véritable service public de l’information et de l’orientation.
- Dispenser à tous les enseignants une information sur les enjeux de l’orientation.
- Créer des lycées polyvalents, lieux uniques réunissant tous les types parcours permettant d’accéder au baccalauréat, avec de réelles passerelles favorisant le passage d’une voie à l’autre ou d’une filière à l’autre. »
L’AFAE
L’AFAE (association des administrateurs de l’éducation) se définit comme un « espace d’échanges, de libre expression et de proposition rassemble en dehors de tout dogmatisme et de toute préoccupation politique ou syndicale TOUS LES personnels de l’éducation nationale qui, par leur action professionnelle ou leurs recherches, veulent concourir à la qualité, à l’efficacité et au renouveau du service public d’éducation ».
Cette association ne s’est pas encore exprimée dans le cadre de la concertation, mais elle a consacré le n° 2 de sa revue de 2012 au socle commun : Le socle dans tous ses états.
François Jaraud sur le Cafépédagogique ouvre sa présentation de la manière suivante : « Après tant d’innovations opaques, après tant de mouvements peu coordonnés, voire contradictoires, est-il fondé de poursuivre ? ». La question du maintien du socle commun est ainsi posée.
Je retiens le dernier paragraphe qui termine cette présentation :
« Un débat franco-français ?
On rejoint dans cette vision du pilotage par les examens du système éducatif une vision française classique de l’Ecole qui, par la suite, forcément, est la limite de ce numéro. Face au souci légitime d’élever le niveau de qualification de la jeunesse et de limiter le gâchis des sorties sans qualification, le débat s’organise sur les questions de pilotage, celles du socle et de l’école du socle. Les débats de la concertation nationale ont rappelé que, si l’accord existe sur l’objectif, cette approche est toujours fortement minée. Par contre peu d’intérêt est accordé aux questions de savoir comment on fait pour évaluer le niveau réel des élèves, quelles pratiques pédagogiques peuvent être recommandées et comment former les enseignants. Trois questions qu’il faut souhaiter voir invitées au débat. »
En effet, se focaliser sur la « diplomation » évite de s’interroger sur la circulation dans le système, comme la centration sur l’évaluation-notation évite la question de l’identification des acquis et des modalités de leur apprentissage. La question des procédures d’orientation semble ainsi évacuée.
Mais je m’interroge également sur le questionnement final de François Jarraud. Pourquoi mettre en interrogation les pratiques d’évaluation du niveau réel des élèves dans le cadre du socle commun, alors que ces « pratiques » exercées au sein du conseil de classe n’ont jamais été remises en question ? Cette évaluation pour l’orientation a pourtant de lourdes conséquences pour les élèves, en tout cas beaucoup plus que celle permettant l’obtention du DNB ou celle du socle actuellement.
Bernard Desclaux