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Henri Audier

Pour couler une nation : mode d’emploi

Le 1er juin, Valérie Pécresse va « présenter les premiers appels à projets des investissements d’avenir » du Grand emprunt.  Ses shows médiatiques et ses contrevérités ne masqueront plus très longtemps la réalité : la France coule.

D’après l’OCDE, la France a pris un grave retard entre 2002 et 2008. Alors que TOUS les pays progressaient de 10, 30 voire 70 %, les dernières données de l’OCDE montrent qu’en monnaie constante les dépenses de la recherche publique française ont baissé de 1,4 % entre 2002 et 2008. Bien davantage encore par rapport au PIB (1). Pour 2008, malgré le « 1,8 milliard de plus » claironné par Pécresse et Sarkozy, l’OCDE n’a d’ailleurs détecté aucun centime dépensé de plus. Au cours des mêmes années, les dépenses des entreprises (investissements + aides) ont aussi baissé, malgré 4 milliards de plus d’aides de l’Etat (CIR), aides qui sont de loin les plus fortes au monde. Dans le même temps, pourtant, TOUS les pays progressaient : le Royaume-Uni de 14 %, l’Allemagne de 17 %, les Etats-Unis de 27 %, la République Tchèque et la Corée de 67 %, la Chine de 180 % (2) .

Cette situation est d’abord le fait des gouvernements depuis 2002. Ils ont vidé les caisses par une fiscalité favorable aux couches aisées et par la multiplication des niches fiscales, creusant ainsi déficits et dette. Ces déficits ont servi de prétexte à la démolition du service public (via la RGPP) et au sacrifice de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR). Comparée aux 10 à 15 milliards/an du paquet fiscal (loi TEPA), la création de 5000 emplois par an dans l’Enseignement Supérieur et la Recherche aurait coûté de l’ordre de 300 millions annuels. Alors que les étudiants se détournent de ces métiers, rien n’a été fait pour les attirer. Pire, 2000 suppressions d’emplois sont programmées dans les EPST.

Cette situation est aussi imputable aux grands groupes qui ont diminué le financement de leur recherche quand l’aide de l’Etat augmentait : ainsi 4 milliards d’aides ont été recyclés en profits. De ce fait, la France se désindustrialise. Non seulement dans les activités traditionnelles, comme tous les pays développés, mais elle perd désormais du terrain sur ses domaines jadis forts comme le nucléaire civil ou les transports. A fortiori dans les technologies nouvelles. Conséquence : l’emploi et le déficit chronique du commerce extérieur depuis 2002.

Le Grand emprunt (3,4) est une sinistre plaisanterie par rapport aux enjeux mondiaux. Ce sont deux milliards de plus par an qu’il faudrait consacrer à l’ESR pour les mettre à niveau et espérer atteindre les 3 % du PIB … en 2020. Malheureusement, les modestes intérêts des 16 milliards de l’emprunt destinés à l’ESR se substitueront aux moyens budgétaires « normaux » comme l’a annoncé l’Elysée. Des paroles aux actes : dès janvier dernier, 125 millions ont été annulés sur le budget 2010 de l’ESR. Et Fillon vient de confirmer, après Eric Woerth, que les « opérateurs de l’Etat » devront économiser en trois ans 5% des emplois et 10% des crédits.

L’emprunt est un moyen supplémentaire de prise en main par le pouvoir. Dans le cadre de quelques thèmes finalisés prioritaires, le choix des sites qui bénéficieront de la manne de l’emprunt se fera par des comités ad’hoc entièrement nommés. Les premiers appels d’offre porteront successivement sur les équipements, les laboratoires « d’excellence », les instituts de recherche technologique et les instituts hospitalo-universitaires. Quant aux campus d’excellence, qui officialiseront la disparité entre universités, « ces projets demanderont un temps de maturation » dit V. Pécresse, qui précise : « c’est une logique d’emboîtement et de maturation progressive des différents appels d’offres ». Logique qui consiste en réalité à pousser tous et chacun, les gagnants comme les nombreux futurs perdants à ces lotos successifs, à s’inscrire dans la logique des priorités affichées pour se préserver une petite chance de gagner.

Tout ce qui a trait au progrès et à la transmission des connaissances est davantage dévoyé. L’autonomie des universités se réduit à la préparation et à la transmission des dossiers, car ce sont les Comités Nicéphore ou Cunégonde qui décideront de qui sera financé. De même pour les organismes qui sont, de plus, coiffés par des « Alliances » finalisées qui pourraient à terme recruter, bafouant ainsi toujours plus les instances scientifiques représentatives.

En quelques années, de 2002 à 2008, du point de vue de la place de la recherche et de la technologie, la France est passée du statut d’une nation développée à une situation intermédiaire entre un pays développé et un pays en voie de développement. Le fait que les médias reproduisent souvent en coupé-collé les papillonnages anesthésiants de Valérie Pécresse ne change rien à l’affaire : depuis 2002, la France coule.

(1) http://www.sncs.fr/article.php3?id_article=2347

(2) http://www.sncs.fr/article.php3?id_article=2348

(3) http://www.sncs.fr/article.php3?id_article=2295

(4) http://www.sncs.fr/article.php3?id_article=2335

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Henri Audier

Le gouvernement programme la suppression de 2000 emplois pour les seuls EPST (CNRS, INSERM, INRA etc.)

Les Echos viennent d’en faire l’annonce : il y aura pour « les opérateurs de l’Etat » (dont Pôle Emploi, mais aussi le CNRS, l’Inserm, etc…) 1,5 % par an de suppressions d’emplois chaque année pendant trois ans et 10 % de baisse des crédits en trois ans (texte en annexe). Cela représente deux milles postes supprimés pour les seuls établissements de recherche (les EPST). Merci pour les précaires !

http://www.lesechos.fr/info/france/020533991304-matignon-veut-realiser-6-milliards-d-economies-sur-les-depenses-d-intervention-de-l-etat.htm

En fait, la presse gouvernementale présente le choix de l’austérité comme une conséquence de la crise grecque, alors qu’il n’en est rien. La preuve : il y a six mois, à l’occasion de l’annonce du « Grand emprunt » (on rappelle que seuls les intérêts du dit emprunt seraient utilisables par les heureux bénéficiaires), Sarkozy avait averti : « Les intérêts de l’emprunt seront compensés par une réduction des dépenses courantes dès 2010 et une politique de réduction des dépenses courantes de l’Etat sera immédiatement engagée ».

http://www.elysee.fr/president/root/bank_objects/09-12-14dossierdepresseEmpruntnational.pdf

Mieux, milieu février, Eric Woerth, alors au budget, annonçait exactement les chiffres donnés aujourd’hui : une baisse de 5 % de l’emploi des opérateurs d’Etat et de 10 % des crédits, sur trois ans.

http://www.sncs.fr/article.php3?id_article=2232

Le but est clair : remplacer encore davantage les crédits de base – c’est-à-dire les dotations normales – par des appels d’offre tenus en main par le pouvoir, et remplacer les emplois statutaires par des CDD. Le choix fait par Sarkozy de maintenir le paquet fiscal (13 à 15 milliards par an) et de réduire impôts et taxes pour les plus riches, n’est pas seulement un choix destiné à satisfaire une partie de sa clientèle électorale. C’est aussi le moyen de démolir le service public. Alors qu’on avait, à force d’obstination, obtenu un « gel » des suppressions d’emplois pour 2009 et 2010 dans l’enseignement et la recherche, la Grèce fournit au gouvernement l’occasion de faire sauter cette digue.

Le texte des Echos

« L’augmentation [du budget] sera limitée à l’inflation pendant trois ans (« zéro volume »), mais, « compte tenu de la dynamique inéluctable de la charge de la dette et des dépenses de pensions, cet objectif se traduira, dès 2011, globalement par une stabilisation en valeur de l’ensemble des autres dépenses de l’Etat. Certaines missions verront donc nécessairement leurs crédits diminuer en euros courants », indique le courrier que « Les Echos » se sont procuré. Pour y parvenir sont confirmés le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ainsi que la diminution de 1,5 % par an des effectifs des opérateurs (Météo France, CNRS, Pôle emploi, etc.). Le Premier ministre demande aussi à l’Etat comme aux opérateurs de réduire de 5 % dès 2011 les dépenses de fonctionnement courantes (10 % d’ici à 2013).

« L’ampleur du redressement budgétaire exige en outre que les dépenses d’intervention de l’Etat soient systématiquement réexaminées […]. Pour l’ensemble des dispositifs d’intervention, notre objectif doit être de réaliser le même effort que sur les dépenses de fonctionnement, soit une baisse en valeur de 10 % », indique le courrier. Le champ de dépenses visé représente cette fois plus de 60 milliards d’euros (contre moins de 10 milliards pour le fonctionnement courant). L’objectif d’économies sur trois ans dépasse donc 6 milliards. Il n’est pas chiffré pour 2011 ».

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Henri Audier

L’EPAURIF : la dernière trouvaille du gouvernement pour tenter d’administrer en direct l’Ile-de-France

Telles les troupes coloniales entrant jadis dans Yaoundé, le gouvernement a fait main basse sur l’Ile-de-France. Madame 43 % feint d’ignorer, tout comme Nicolas Sarkozy, que les électeurs de la région Ile-de-France ont voté et qu’ils ont rejeté le « Grand Paris », avec son mode de décision technocratique, sa conception absurde et son coût faramineux.

Au moment où le gouvernement annonce la rigueur (pour le service public), le coût de l’opération se chiffre à 36 milliards au bas mot, rien que pour les transports. Autant, sinon plus pour le reste, via l’emprunt et les PPP (partenariats-publics-privés) bien sûr. Au moment où le gouvernement supprime 2000 emplois dans les EPST, les Campus fleurissent partout dans le projet, sans qu’on sache qui enseignera et qui cherchera : l’investissement, c’est pour Bouygues et Vinci, pas pour nos jeunes docteurs, qui seront bien sûr libres de s’expatrier.

L’Epaurif : un outils bureaucratique et centralisateur, pour mettre en œuvre un projet non discuté

Pièce importante de ce dispositif de prise en main de l’Ile-de-France : la création d’un Etablissement public d’aménagement universitaire en Ile-de-France (EPAURIF), suite au rapport de B. Larrouturou sur l’immobilier universitaire parisien. Ce rapport, qui a eu au moins le mérite de mettre sur la place publique des données qu’on cherchait en vain sur ce problème complexe et controversé, n’a, en vérité, ni été validé (hormis sans doute par la seule ministre), ni fait l’objet d’une quelconque discussion. De plus, comme le dit l’auteur lui-même, ce rapport ne concerne que Paris et non pas toute l’Ile-de-France, alors que la liste qui vient d’être élue au Conseil régional propose un développement plus équilibré et surtout qui permet de fortes interactions entre Paris et sa périphérie.

Mais la discussion n’aura pas lieu, car l’EPAURIF chapeautera toute la stratégie immobilière, tous les investissements immobiliers et même l’entretien du patrimoine immobilier des universités d’Ile-de-France, ce qui est de plus en contradiction totale avec la grande autonomie prétendument accordée aux universités par la LRU

Un conseil en « bonnes » mains

Cette manœuvre place des établissements pourvus, en général, de structures de décision au moins partiellement démocratiques, sous la tutelle d’une espèce de monstre qui n’a, lui, aucun organe de représentation démocratique interne. Car au conseil de l’EPAURIF, l’Etat s’assure la majorité absolue : onze représentants sur 21 membres, sans parler de la personnalité « désignée en fonction de ses compétences ». La représentation des nombreux établissements universitaires franciliens y est réduite à quatre personnes, tout comme les collectivités locales qui seront pourtant appelées à financer. Il n’est prévu qu’un seul représentant du personnel, encore ne s’agit-il… que du personnel de l’EPAURIF lui-même.

L’administration de cet établissement ne donne aucun pouvoir aux scientifiques, aux universitaires, aux étudiants et aux élus locaux. Cette structure, appelée à gérer des milliards, va être le centre de pressions affairistes dont le célèbre EPAD est l’exemple patenté.

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Au CTPM, tous les syndicats ont voté contre

Au Comité technique ministériel, le gouvernement n’a pas bougé d’un iota par rapport au rapport initial : tous les syndicats ont voté contre.

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Henri Audier

Pavane pour une infante défaite

« On a redécouvert les valeurs de la droite, le couple liberté-responsabilité, l’autorité, le respect de l’autre et de la loi, le travail. C’est sur ces thématiques du travail et du respect de la loi que la gauche a perdu les élections. Les gens en ont assez de l’ordre moral de Mai 68 : il est interdit d’interdire, le politiquement correct, c’est bien de ne pas travailler, on a toujours des excuses pour cracher à la gueule de son professeur … ».

Non, cette déclaration désinhibée de Valérie Pécresse n’a pas été faite au lendemain des régionales mais en 2003, au journal Le Progrès (le 11/03/03). Elle témoigne au moins du jugement erroné, du mépris, de la condescendance qu’elle avait déjà pour un milieu dont elle a été appelée à être la ministre. Ce ton contraste avec l’ampleur de sa défaite, dont elle sort profondément affaiblie, tout comme son président-donneur-d’ordres.

Car, n’en déplaise à Valérie Pécresse, ces résultats des régionales sont éminemment politiques. Certes le bilan et les projets des majorités régionales sortantes ont été appréciés. Mais la désillusion vis-à-vis des promesses sarkoziennes ont amplifié les résultats de 2004 : les écarts se sont creusés entre les populations qui ont été goinfrées grâce à la politique de Sarkozy, fiscale notamment, et celles qui en ont pâti. Pour bien comprendre, il faut comparer, à Paris, les scores de Valérie Pécresse dans le 7ème arrondissement (72,25 %), le 8ème (72,85 %) et le 16ème (78,15 %) avec ceux de Jean-Paul Huchon dans le 10ème (72,77 %), le 11ème (71,92 %), le 18ème (72,5 %), le 19ème (72, 98 %) et le 20ème (74,81 %).

Aujourd’hui, il faut en finir avec cette politique autoritaire et arrogante vis-à-vis de ceux qui travaillent dans la recherche et l’enseignement, contrastant avec ces numéros souriants, tout miel, tout sucre, lors des innombrables interventions dans les médias. Depuis près de trois ans, Madame 43 % refuse toute discussion globale avec les organisations représentatives, les cantonnant à corriger quelques virgules dans des textes d’application. Depuis trois ans, la ministre ne dialogue qu’avec elle-même et s’assoit systématiquement sur les avis des plus hautes instances consultatives, qu’il s’agisse du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie ou du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche. Elle se cache derrière une foultitude de Comités Nicéphore ou Théodule, impulse cette diarrhée de rapports confiés à des personnalités désignées par elle-même, rapports dont on peut sans mal deviner les conclusions rien qu’à travers le choix de leurs auteurs. Leurs conclusions sont d’ailleurs souvent mises en œuvre avant même qu’ils ne soient terminés.

Il faut en finir avec le mensonge systématique sur le prétendu 1,8 milliard de plus pour la recherche et l’enseignement supérieur, chaque année. Hors cotisations retraites, le budget de la MIRES, donc ANR comprise, a stagné depuis trois ans. Que la ministre accepte donc une commission parlementaire pour faire la vérité sur l’évolution des crédits budgétaires et de l’emploi depuis 2007 et même depuis 2002 ! Il faut arrêter de se gargariser avec l’excellence quand on laisse crever des dizaines de milliers de précaires sans avenir, arrêter d’amuser la galerie par des primes stupides, alors qu’un professeur d’université gagne moins, en fin de carrière,  qu’un HEC à la sortie de l’école (Le Point, 11/02/2010) ; quand aux rares chercheurs recrutés, niveau doctorat, ils le sont à un salaire trois fois moindre, fussent-ils aussi normaliens ou polytechniciens. Par cette politique étroite et bornée, la ministre fait le vide dans les filières conduisant au doctorat (30 % de moins de docteurs prévus dans 10 ans), vouant la France à choisir pour modèle d’avenir soit la finance, comme la City, soit le tourisme, comme les Maldives.

Il faut en finir avec la démolition de notre système de recherche, d’enseignement supérieur, de formation de maîtres, avec cette vision étroitement utilitariste qui considère en fait que le stock des connaissances est bien suffisant et que le seul problème est de les exploiter, nous vouant ainsi à devenir un pays de deuxième zone. Il faut arrêter la destruction de tout ce qui crée des solidarités scientifiques et humaines, les organismes, les laboratoires, et renoncer à mettre toutes les universités, tous les laboratoires, tous les individus systématiquement en concurrence. Visiblement, la ministre ne sait même pas que la dominante du fonctionnement de la science internationale aujourd’hui, c’est la coopération. Comment ne pas voir qu’il faut laisser aux chercheurs une large part d’initiative scientifique, avec le droit afférent à la prise de risque, et donc qu’il convient de dynamiter toutes les structures technocratiques qui les pilotent, l’ANR, l’AERES, qui vont progressivement devenir le refuge des recasés et des recalés de la recherche, mais qui auront droit de vie ou de mort sur chaque équipe.

Si notre système avait grand besoin de moyens, mais aussi de réformes, c’était pour le rendre plus cohérent, plus simple, plus réactif.  Or, en voulant tout piloter et régenter dans le détail, avec pour but de marginaliser toutes les instances où les scientifiques représentatifs pouvaient y avoir une expression, la ministre a créé un embrouillamini de structures dans lequel même l’entomologiste le plus averti ne retrouverait pas ses petits : ANR, AERES, SNRI, Alliances, Instituts, Instituts Carnot, RTRA, RTRS, Fondations de droit bidule ou chose, FCS, PRES, EPCS, EPCSCP, pôle d’excellence, pôle de compétitivité, Campus et aujourd’hui : «  Campus d’excellence » qui n’ont, bien sûr, rien à voir avec les précédents. Car la machine à déchiqueter est devenue folle et, tel Saturne, dévore désormais ses propres enfants. Les Campus d’excellence, d’un hyper-élitisme convenu, financés par ce qu’on retirera aux autres, seront constitués d’écoles doctorales, de lambeaux d’université, de (grandes) écoles sur un périmètre donné, découpant horizontalement les universités et faisant exploser les PRES, pourtant souvent accouchés dans la douleur. Et ce gadget démoniaque brise même la LRU, encore trop démocratique, en laissant le pouvoir à un CA peuplé d’administratifs et de financeurs, un Sénat académique étant ravalé au rang de conseiller.

Il faut enfin en finir avec cette dilapidation de l’argent public par des aides à la recherche privée, les plus élevées du monde : plus l’Etat paye, plus les grands groupes se désengagent dans leurs financements propres, inférieurs de 60 % à ceux de l’Allemagne et des Etats Unis, presque trois fois inférieurs à ceux du Japon. Des milliards du Crédit d’impôt recherche distribués, sans évaluation, ni efficacité, aux gros requins et aux petits oiseaux. Milliards qui manquent cruellement à nos organismes et universités.

Car il faut  mettre l’étudiant au centre du dispositif, parce c’est là une question qui conditionne l’avenir du pays et la justice sociale. Et il faut avoir une vision hautement élitiste du système éducatif. Non de cet élitisme rabougri, misérabiliste, malthusien qui, au nom de « la sélection des meilleurs », crée une véritable barrière protectionniste à l’accès au savoir aux classes démunies, aux banlieues, aux petites villes de régions. Sélection sociale du fait des conditions de vie, des moyens de subsistance ou des conditions de logement des étudiants ; sélection à coup de filières  spécifiques, payantes et ségrégatives, qui se dédouanent en offrant quelques bourses-oboles aux couches pudiquement appelées « démunies ». Non ! l’élitisme devrait être un formidable mouvement de toute la société pour promouvoir et faire réussir dans l’enseignement supérieur un beaucoup plus grand nombre de jeunes, ce serait orienter chacun en fonction de ses goûts et de ses aptitudes, créant par là-même un accroissement de la qualification de tous et une élite, plus nombreuse, plus forte, plus diversifiée dans ses origines et ses capacités.

Pour ce, il faut donc renoncer aux pitreries sur la proportion de boursiers dans les (grandes) écoles. Pour s’en tenir à ce seul aspect, il faut mettre en place, non ce misérable « plan licence » sur heures complémentaires, voire réalisé par des moniteurs, mais se donner comme priorité d’assurer un suivi individualisé en alignant le taux d’encadrement des premiers cycles universitaires sur celui des classes préparatoires. On en est très, très loin.

Pour rester objectif, reconnaissons que Valérie Pécresse a eu au moins un grand succès, la conduisant à battre un record historique : celui du plus fort et du plus long mouvement de contestation que l’université ait jamais connu. Valérie Pécresse a toujours eu besoin d’un mentor, Chirac puis Sarkozy, qu’elle admirait, qu’elle servait, qu’elle suivait. Sarkozy étant désormais dévalué, pourquoi Valérie Pécresse ne suivrait-elle pas aujourd’hui le chemin de Xavier Darcos !

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Henri Audier

« Faire de Paris la plus belle métropole universitaire du monde, c’est possible ! »

Tel est le sous-titre lyrique du rapport de Bernard Larrouturou (BL) sur l’immobilier universitaire parisien. Ce rapport a été commandité l’an passé par Valérie Pécresse (VP), au moment même où elle décidait de se présenter aux élections régionales. Il faut lire ce rapport Larrouturou sur le site du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche, au moins ses premières pages, “synthèse et résumé”, car, au-delà des désaccords que chacun peut avoir avec son contenu, il a trois mérites.

Le premier, qui est de taille, est d’informer chacun sur les trois PRES et le Campus en constitution à Paris, et de mettre sur la place publique les opérations immobilières envisagées dans la capitale. Ce n’est pas rien car depuis trois ans, le ministère opère en catimini, en opposant les universités les unes aux autres, sans qu’à aucun moment il ait été donné aux élus dans les conseils, aux syndicats, aux étudiants ou aux personnels une quelconque vue globale de la situation. Pourtant le rapport affirme : “Cette rénovation implique d’avancer avec l’ensemble des acteurs – avec les établissements d’enseignement supérieur, leurs personnels et leurs étudiants, et avec les collectivités territoriales – dans plusieurs directions.” Il serait temps que VP entende cette recommandation !

Le deuxième mérite est d’avoir tenté de préciser, avec succès, le contenu des nouveaux concepts sur les structures. Félicitons la ministre pour le choix du rapporteur, et ce n’est même pas de l’humour. En effet, il fallait au moins un administrateur chevronné, major de Polytechnique, ingénieur du corps des mines, ancien DG de l’INRIA puis du CNRS, pour tenter d’élucider, en seulement quelques pages, la chienlit dans laquelle Valérie Pécresse a plongé l’enseignement supérieur par la multiplication des structures : universités, écoles, PRES, Campus, Campus d’excellence, Pôles d’excellence, fondations, FCS, EPCS, etc. ; sans parler, pour la recherche, des Instituts, Alliances, SNRI, ANR, AERES, RTRA, et bien d’autres.

Le troisième mérite est d’avoir posé un diagnostic, sévère mais véridique, de la dégradation de la situation universitaire parisienne, particulièrement au cours des dernières années durant lesquelles Valérie Pécresse a été conseillère de Jaques Chirac, puis ministre. On ne peut à la fois embrouiller les structures, distribuer des milliards postiches (voir les précédents articles sur ce blog), opérer sans négociations et améliorer la situation. Citons quelques passages du rapport de BL

“Sept principaux facteurs de difficultés pèsent sur l’enseignement supérieur parisien :

– la grande taille et la complexité du dispositif, morcelé, cloisonné intellectuellement (…) ;

– la coupure entre universités et grandes écoles – plus vive à Paris que partout ailleurs (…);

– un certain manque d’émulation et d’ouverture (…) ;

– les problèmes spécifiques du domaine des sciences de l’homme et de la société (…) établissements sous-dotés en locaux et en encadrement administratif, manque de liens avec les autres domaines scientifiques, (…) difficultés pour l’insertion professionnelle des étudiants ;

– l’absence de vision régionale et la complexité de la prise de décision politique en Ile-de-France ;

– (…) la situation immobilière avec, pour la plupart des établissements, des implantations très dispersées et des locaux en mauvais état, voire délabrés, et souvent suroccupés;

– les grandes difficultés de la vie étudiante à Paris (…) pour les conditions de travail ou d’accès aux ressources documentaires, pour le logement, la restauration ou la pratique sportive (…)”.

Qu’à cela ne tienne, notre spécialiste de la com’ a plus d’un tour dans son sac : elle a déjà adopté le rapport. Mélangeant à souhait son rôle national et sa candidature régionale, elle a fait précéder la publication du rapport de BL, sur le site ministériel, d’une longue déclaration dans laquelle la candidate régionale Valérie va promettre tout ce que n’a pas réalisé la ministre Pécresse.

Ce sera l’objet de notre prochain article.

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Budget 2010 : erreur de la banque en votre défaveur

Somme toute, Xavier Darcos a eu une idée géniale quand il a exigé que l’école mette l’accent sur les acquis fondamentaux : lire, écrire, compter. Oui, les trois à la fois, et ce n’est pas de trop ! Car prenez l’exemple de Valérie Pécresse, il est incontestable qu’elle sait lire et écrire. Plus encore, elle sait parler, surtout quand il y a des micros ou des télés. Mais sait-elle vraiment compter ? On peut en douter.

Déjà pour l’opération la plus simple, l’addition, elle n’est pas encore au point. Et de loin ! Si vous considérez le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche, chaque année elle se trompe de un ou deux milliards dans le calcul de l’augmentation. Cela fait tout de même une erreur importante sur un accroissement réel qui, au mieux, tourne autour de quelques petites centaines de millions (voir sur ce blog : Budget2010@Pécresse.com).

Pour la soustraction, c’est bien pire : là, elle est quasiment nulle. Au point que, de peur de se tromper, elle n’ose même pas en parler, ce qui pour elle doit être très, très dur. Tenez, en janvier dernier, 125 millions ont été supprimés du budget 2010 de l’enseignement supérieur et de la recherche … budget pourtant voté trois semaines plus tôt. Mais elle l’a joué modeste : pas de conférence de presse, pas de passage à la télé, pas même de rapport de l’Académie des sciences ou de professeur à Harvard sur ce sujet. Pourtant, cette première annulation ramène la croissance de son budget 2010 à 1,9 % seulement. Cela à supposer qu’il n’y ait ni inflation, ni nouvelles suppressions en cours ou en fin d’année (ces dernières sont devenues traditionnelles), ni annulation des nombreux crédits déjà « mis en réserve » à cette fin.

Bon, pour cette année, elle a une excuse : elle est en campagne électorale, campagne où la candidate régionale Valérie promet tout ce que n’a pas financé la ministre Pécresse, ce qui lui donne un très vaste champ de propositions à faire. Mais en décembre 2008 ? Elle n’avait pas cette excuse. Pourtant, 379 millions ont été annulés du budget 2008 dans le silence-radio le plus total. Une paille transformant le budget initial en légère progression en un budget final en récession. Et en décembre 2009 ? 150 millions ont été annulés du budget 2009 (ramenant sa « forte croissance » à seulement 0,9 %). Valérie Pécresse a souffert alors d’une nouvelle crise d’aphonitude.

Mais faut-il la critiquer pour cela ? Ne pourrait-on y voir au contraire une formidable innovation, dans un pays où l’on nous dit que l’innovation est trop faible ! En fait Valérie Pécresse s’est inspirée de la météo, où les spécialistes distinguent la température « exacte » et la température « ressentie ». Elle a astucieusement découplé le concept de « budget réel » vécu par les scientifiques et les étudiants, en croissance autour de zéro, du « budget ressenti » par la presse et l’opinion en progression de 1,8 milliard chaque année. Si bien que quand vous avez 50 000 précaires, grelottant dans le blizzard, le grand public les imagine dans un paradis douillet, sous les cocotiers ; ça, c’est de l’innovation !

Tout compte fait, Valérie Pécresse est donc une excellente ministre et il faut tout faire pour la garder à ce poste.

Gardarem lou Pécresse !

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Enseignement et recherche : un exemple de démagogie populiste sur la fiscalité des régions

La démocratie, la confrontation des idées et des propositions, est une chose ; la démagogie populiste en est une autre. Cette dernière est même le plus court chemin pour tuer la première. Sous cet aspect, la fiscalité et la sécurité sont les recettes préférées et inépuisables pour rallier les poujadistes de tous poils. C’est malheureusement sur ces thèmes que la droite française mène la campagne électorale des régionales.

En cas de victoire aux régionales, l’UMP promet de ne pas augmenter la fiscalité des régions, ce qui est un choix, ce qui est son droit. Par contre, la campagne dénonçant les dépenses “somptuaires” des régions sortantes, coupables d’avoir “fait exploser la fiscalité” et même, d’après la Président de la République, d’être responsables d’une part importante de la dette, est lamentable. Lamentable, d’abord, parce que c’est faux. En effet, la fiscalité des régions représente 2 % de la fiscalité nationale et la dette des régions ne pèse que pour 1 % dans la dette nationale. L’accroissement des impôts régionaux, inéluctable vu les charges que leur transfère l’Etat, correspond en réalité à trois euros par personne et par an. Qu’importe : la croissance de cette fiscalité, au demeurant très modeste en valeur absolue, est l’argument privilégié de l’UMP pour discréditer les majorités sortantes.

Pourtant, heureusement qu’il y a eu les régions pour maintenir l’animation économique de leurs régions. Avec leur petit budget, les régions ont contribué pour moitié au plan de relance. Mais aussi au logement étudiant, aux bibliothèques universitaires, à l’équipement mi-lourd des laboratoires, à la construction de bâtiments, etc. Et c’est mieux ainsi !

Avec un budget national de la recherche en stagnation, voire en régression, depuis des années, c’est avec un plaisir gourmand que Valérie Pécresse est allée inaugurer le nouvel Institut de biologie génétique bio informatique de l’université d’Evry, le 10 décembre dernier. Quand il y a des caméras, des radios, la presse, elle est toujours là. Surtout pour les inaugurations et les premières pierres de bâtiments. Façon de faire oublier que ce sont les collectivités locales (région, département) qui ont tout payé. Pas le ministère qui n’a pas versé un kopek. Mais Valérie Pécresse pourra toujours dire dans sa campagne électorale que la fiscalité des régions est trop lourde. C’est ça la com’.

Plus grave encore est le problème des pôles de compétitivité. Quelles que soient les réformes à apporter à ces structures, elles sont importantes pour promouvoir un tissu économique modernisé. Sous cet aspect, le récent rapport à l’Assemblée nationale (23/09/09) des députés A. Claeys, J-P. Georges et P. Lasbordes, est très instructif. Au-delà du désintérêt qu’a eu l’Etat pour ces pôles, le financement spécifique de cette structure par le “Fonds unique interministériel” (FUI) s’élève à 765 millions pour la période 2006-2008, celui des régions à 385 millions. Une participation d’autant plus importante que, d’après ce même rapport, l’Etat n’a pas respecté ses engagements. Ainsi, l’Etat n’a toujours pas honoré 50 % des modestes engagements du FUI pour 2005, plus encore pour les années suivantes, mais il dilapide 4 milliards par an pour le sulfureux Crédit d’impôt recherche. Les régions se seraient-elles désengagées de ces pôles, comme l’Etat l’a fait, que les impôts auraient baissé. Et l’emploi avec.

Les régions ont rénové les lycées avec succès. Dans le même temps, le gouvernement supprimait des dizaines de milliers de postes d’enseignants. En prenant exemple sur lui, les régions auraient-elles dynamité un lycée sur dix au lieu de le rénover, que les impôts auraient baissé. Fallait-il suivre cet exemple ?

Les régions sont financièrement étranglées parce que l’Etat leur transfère des compétences sans le financement correspondant. C’est exactement le même problème pour les universités. Ainsi, pour la Conférence des présidents d’université, les augmentations de charge en faveur du personnel ne sont pas compensées : “Les universités devront faire face en 2010 à un surcoût évalué à au moins 130 millions et correspondant notamment à l’équivalence TP-TD ou à la gratification des étudiants stagiaires en labo”.

Alors pourquoi cette attitude malhonnête du gouvernement. Simplement parce qu’il faut bien tenter de compenser, notamment par le transfert de charges vers les régions et de multiples autres procédures, les 15 milliards du “Paquet fiscal”, les 3 milliards de baisse de la TVA sur la restauration, les 4 milliards de Crédit d’impôt, etc.

Le problème fiscal ne découle pas de la politique des régions, mais bien de l’abandon par
le gouvernement d’importantes ressources fiscales de l’Etat

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« Le CNRS enfin 1er sur le podium mondial de la recherche » : réponse à Laurent Bouvet

Dans son article « Le CNRS enfin 1er sur le podium mondial de la recherche » (1), Laurent Bouvet (LB), traite avec une certaine condescendance, voire un certain mépris, le fait qu’un Institut espagnol ait classé le CNRS à la première place mondiale pour le nombre des publications (2). C’est son droit : l’anti-CNRS est aigu et tenace chez certains universitaires, particulièrement en SHS. Mais il est par contre moins en droit d’affirmer « qu’on peut légitimement se demander si on ne peut pas faire dire n’importe quoi aux chiffres de la recherche, de publications, etc. Le collectif Sauvons la recherche (SLR) et les défenseurs de la recherche en organisme(s), pourtant réticents vis-à-vis des classements, se félicitent ainsi d’un tel retournement par rapport à la doxa du classement de Shanghai ». D’abord, parce qu’il n’est pas absurde de montrer la duplicité du gouvernement qui, d’un côté, ne jure que par les indicateurs de classement et, de l’autre, ne cesse de vouloir démolir le CNRS malgré ses « bons classements » mondiaux. Mais surtout du fait que l’article incriminé, écrit par François Jouve, professeur à Paris VI, et reproduit sur le site de Sauvons la recherche (3), est d’une grande finesse et ne correspond en rien à la caricature qu’en fait LB qui, à l’évidence, s’est arrêté au titre : « Le CNRS premier ! ». J’invite chacun à le lire.

L’article posté sur le site de SLR commence en effet par une citation d’Einstein qui donne le ton : « On ne peut pas compter tout ce qui a de la valeur, et ce que l’on peut compter n’a pas forcément de valeur. » L’article poursuit : « Toutes disciplines confondues il est à peu près admis que les indicateurs bibliométriques, qu’on veut nous imposer à marche forcée au niveau des individus, des laboratoires et des universités, n’ont pas grande valeur. Parmi les critiques principales que l’on peut leur faire, citons le manque de fiabilité des différentes bases de données et les nombreux effets pervers qui sont attachés à la recherche de l’amélioration individuelle de ses indices bibliométriques. »

Alors, jamais d’indicateurs, même s’il faut toujours relativiser leur portée ? L’article en question en débat : « Toutefois, agrégés sur de gros échantillons, ces indicateurs peuvent reprendre un semblant de pertinence si les bases de données utilisées sont suffisamment complètes pour couvrir l’ensemble des champs disciplinaires ». Le nombre de publications est un critère objectif qui, au niveau d’un pays, d’une discipline, d’un gros établissement, donne simplement une « indication » parmi d’autres, indication que l’on doit critiquer et relativiser.

Pourquoi y a-t-il contradiction apparente entre le classement qui résulte de cet indicateur et le classement de Shanghai ? S’il avait lu l’article qu’il incrimine, LB aurait su la réponse : « Tout d’abord le classement de Shanghai ne prend en compte que les établissements d’enseignement supérieur, donc le CNRS, l’INSERM et le CEA n’en font pas partie. D’autre part il base sa notation sur des critères absurdes. (…) 30% de la note s’obtient en comptant le nombre total de prix Nobel et médailles Fields, y compris ceux vieux de plus d’un siècle. 20% de la note est basée sur le nombre de “Highly cited authors” en référence à une liste discutable et peu à jour. (…) Enfin 20% supplémentaires proviennent du nombre de publications dans “Nature” et “Science” ce qui est particulièrement réducteur du point de vue disciplinaire, entre autres ».

Et si le nombre de publication n’était qu’un indice productiviste ? C’est ce que laisse entendre LB : « En effet, si le CNRS est bel et bien premier sur le podium, ce sont les académies des sciences chinoise et russe qui occupent les deux places suivantes ! (…) Le vieil argument anti-CNRS : il a été fondé sur le modèle de l’académie des sciences soviétique revient donc par la fenêtre à l’occasion de ce classement ». Pas de chance ! L’article qu’il cloue au pilori avait répondu par avance, en indiquant que plus les critères sont élitistes, plus le classement de la France sur le critère des publications s’améliore : « En 2007, la France se classe 6eme au nombre de publications et 4eme au nombre de citations et à l’indice H (h-number) : elle a moins de publications que la Chine et le Japon mais elles sont plus citées. »

Le fait qu’un Institut espagnol ait classé le CNRS premier dans le monde ne tient pas du hasard, n’en déplaise à Laurent Bouvet. Car cela fait des années que le CNRS occupe une bonne position mondiale. Pour s’en tenir au présent, sur d’autres critères, il figure au 4e rang mondial et au 1er rang européen selon le classement mondial “Webometrics” en 2009 (4) ; il précède la Max Planck Gesellschaft allemande. Au 1er rang européen aussi pour ses succès aux appels d’offre de l’European Research Council, également en 2009. De plus, dans le domaine complémentaire de la valorisation de la recherche, la situation est tout à fait correcte comme le reconnaît Le Figaro (10/12/09) : « Qui l’eût cru ? Encore considéré par nombre de ses détracteurs comme un inutile et coûteux repaire de chercheurs fonctionnarisés, le CNRS vient d’intégrer le « top ten » des organismes publics de recherche qui déposent le plus de brevets aux États-Unis. La société Intellectual Property Today a placé le navire amiral de la science française en dixième position, pour la période juillet 2008-juin 2009. C’est la première fois qu’un organisme européen figure dans les dix premières places ».

Certes, répétons-le, tous ces classements sont à relativiser, en fonction de leurs critères, de la taille des établissements, de leurs finalités, etc. Il reste qu’ils démontrent qu’il est criminel de la part du gouvernement de torpiller ce que l’article cité du Figaro appelle « le navire amiral de la science française ». Car c’est bien de la science française qu’il s’agit : il y a plus d’enseignants-chercheurs que de chercheurs CNRS dans les laboratoires qui dépendent du CNRS. Car au travers des instances scientifiques, ceux-ci ont (avaient ?) un rôle dans les grands choix scientifiques. Aujourd’hui, ce système est remplacé par un système quasi-totalitaire, avec la prise en main, par le pouvoir, de toutes les équipes – y compris et d’abord universitaires – au travers « d’alliances », de « fondations », et aussi grâce à l’hégémonie du fonctionnement sur « projets ».

Faut-il souligner que ces bons résultats sont obtenus en dépit de moyens stagnants, voire décroissants ? Car les faits sont là, malgré la campagne de Valérie Pécresse – ça en devient grotesque – qui fait, avec constance, pleuvoir chaque année des milliards postiches sur la recherche. Depuis 2002, chaque année, les moyens accordés à la recherche en fonction du PIB diminuent en sorte que l’on est en 2008 à 2,02 %du PIB, bien loin des 3 % prévus pour 2010.



(1) http://laurentbouvet.wordpress.com/2009/12/11/le-cnrs-enfin-1er-sur-un-podium-mondial/

(2) http://www.scimagoir.com/pdf/sir_2009_world_report.pdf

(3) http://www.sauvonslarecherche.fr/spip.php?article2931

(4) http://research.webometrics.info/.

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Budget.2010@Pécresse.com

Le budget 2010 de l’enseignement supérieur et de la recherche est dans la lignée de ceux qui ont conduit l’effort de recherche français à tomber à seulement 2,02 % du PIB … et la recherche publique civile à 0,53 % du PIB. Il ne marque aucun effort par rapport à la croissance escomptée. Cela n’empêche pas le gouvernement de claironner qu’il y a 1,8 milliard de plus, et une forte croissance des dépenses par étudiant.

Une présentation destinée à tromper

Depuis trois ans, le seul problème budgétaire de Valérie Pécresse est de parvenir à montrer que l’engagement de Sarkozy d’accroître de 1,8 milliard par an le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche a été tenu, et au-delà. Or, bien sûr, comme les années précédentes, il n’en est rien. Et de très très loin. Comment Pécresse s’y prend-elle pour brouiller ainsi les chiffres ? Comment se fait-il que les médias n’en disent rien ?

Première méthode : comme le reprochent parfois les enseignants du primaire aux enfants, elle additionne “les chapeaux et les lapins “, à savoir les Crédits budgétaires et le Crédit d’impôt pour les entreprises, les emprunts des Partenariats public-privé (PPP) et les revenus des dotations en capital de l’Etat servant à les payer, les « vrais » Crédits de paiement (CP) et des Autorisations d’engagements (AE), etc.

Deuxième méthode : corriger les chiffres si besoin. Plusieurs commentateurs (dont S. Huet de Libération) ont ainsi relevé qu’alors même qu’il s’agit des mêmes données, les chiffres varient considérablement entre le diaporama de présentation du budget 2010 et celui de 2009 ; des chiffres qui auraient dû être les mêmes ont été « révisés ».

Troisième méthode : taire quelques changements de périmètre (parfois justifiés) dans le budget. Ainsi le très médiatisé budget des universités est artificiellement gonflé par le transfert des Allocations de recherche et de la PEDR de la ligne “salaires” à la ligne “moyens” et le transferts du programme “Vie étudiante” au programme “Recherche et formations universitaires”. De plus, pour la Conférence des Présidents d’université (CPU), les augmentations de charge en faveur du personnel ne sont pas compensées : “Les universités devront faire face en 2010 à un surcoût évalué à au moins 130 millions et correspondant notamment à l’équivalence TP-TD ou à la gratification des étudiants stagiaires en labo”.

Décryptage : les vrais crédits budgétaires

Les crédits budgétaires de la Mission Interministérielle pour l’enseignement supérieur et la recherche (MIRES) sont en progression de 710 millions : + 2,9 %. Toutefois cette croissance inclut 130 millions affectés aux retraites, qui ne sont pas des mesures “nouvelles”. La croissance réelle est donc de 580 millions, soit 2,4 %, c’est-à-dire un peu plus que les 2 % de croissance du PIB (en € courants) initialement prévue par le gouvernement. C’est maigre.

Le point central est qu’il n’y a pas de créations d’emplois, même si, acquis du mouvement du printemps dernier, les suppressions prévues ont été annulées. Or, comme montré dans le précédent article, on ne peut fonctionner en développant les heures supplémentaires, ou la précarité, là où il faudrait de vrais emplois : mission d’insertion, plan licence, équivalence TP-TD, etc. Cette méthode comprime le temps de recherche et dégrade la qualité de l’enseignement, tout en privant les étudiants de débouchés pourtant utiles.

L’opération Campus et les Partenariats public-privé

Comment atteindre le “1,8 milliard de plus” ? Pour le ministère, “s’ajoutent à cet effort [les crédits budgétaires] des financements innovants en faveur de l’immobilier des universités : les partenariats public-privé (PPP) pour 421 millions d’euros et les produits financiers destinés à l’opération Campus pour 164 millions d’euros“.

Il faut rappeler que l’opération Campus est une dotation de l’Etat de cinq milliards, provenant de la vente d’actions EDF, à dix “campus” universitaires. Les intérêts de cette dotation serviront à rembourser les emprunts des PPP (voir plus loin). En 2010, les 164 millions d’intérêts pourraient être considérés comme de vraies ressources, qu’on pourrait formellement additionner aux crédits budgétaires. Mais il y a si peu de PPP signés qu’il n’y a encore rien à rembourser. Où vont aller ces 164 millions ?

Les Partenariats public-privé (PPP) consistent à sous-traiter au secteur privé le financement, la conception, la construction et la grande maintenance de bâtiments neufs ou rénovés. En contrepartie, l’Etat s’engage à leur verser des loyers pendant une période de 20 ou 30 ans. C’est une forme de “leasing” ou d’emprunt. Compter ces 440 millions pour atteindre “1,8 milliards de plus” suppose trois manipulations.

Première manipulation : on ne peut additionner les vraies ressources avec ces 421 millions d’emprunts liés aux PPP dont il faudra payer les intérêts, année après année, sur le budget du ministère ou par les intérêts du plan Campus. Faire cette addition est aussi futé que si vous additionniez votre salaire et vos emprunts, pour calculer vos revenus.

Deuxième manipulation : en comptant à la fois les 421 millions de PPP et les 164 millions qui servent à les rembourser, on compte deux fois la même chose. Mais compter les PPP permet au ministère d’afficher, sans vergogne, une forte croissance “des dépenses par étudiant”.

Troisième manipulation : ces 440 millions de plus en PPP sont fictifs pour 2010. En effet, le “jaune” du budget indique que 220 millions sont un report de 2009 (déjà décomptés cette année-là pour atteindre le “1,8 milliard de plus”). Quant aux autres 220 millions, d’après la CPU, il n’y a aucune chance qu’ils puissent être utilisés en 2010, vu la longueur des procédures.

Le Crédit d’impôt recherche

Dans la répartition du “1,8 milliard de plus” présenté par le ministère, le Crédit d’impôt recherche (CIR) se taille la part du lion avec un progrès de 565 millions. Pourquoi ne faut-il pas le décompter ? Tout simplement parce que l’augmentation de ce dégrèvement d’impôt sur les dépenses de recherche des entreprises n’est pas lié à l’augmentation de ces dépenses, mais à un mode de remboursement plus avantageux. Depuis la réforme du CIR de 2008, l’Etat rembourse 30 % des dépenses sans aucune évaluation. Le montant du CIR va donc tripler en peu d’années. Il est à noter que, sur ce point, la présentation du ministère est modeste. En effet, en plus de ces 565 millions, 1milliard du CIR de 2010 ont déjà été payés par anticipation en 2009 d’après le “jaune” du budget (1,5, d’après la déclaration de Valérie Pécresse au Sénat le 24/06/09). Pourquoi cette discrétion sur le CIR ? Parce qu’un rapport de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale et un autre de la Cour des Comptes, ont émis des sérieux doutes sur l’efficacité de cette procédure. Nous y reviendrons.

Au total, ce budget est donc plus que médiocre. En particulier, l’absence de développement de l’emploi scientifique et l’absence de mesures à long terme sur ce terrain rendent complètement inopérant “le grand emprunt national”, comme montré dans le précédent article.

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Grand emprunt national : pas ça ou pas vous !

Craignant que le montant proposé pour un “grand emprunt national” ne soit trop bas, 63 députés de la majorité ont lancé un appel pour que son montant se situe entre 50 et 100 milliards, à dépenser dans les cinq à dix ans à venir. L’idée de l’emprunt national peut séduire, tant il est vrai que depuis 2002 et a fortiori depuis 2007, la structure industrielle française fout le camp, le retard sur les technologies de pointe s’accroît, le commerce extérieur chute, l’effort de recherche (public et privé) plonge. Autrement dit, si le système social français a freiné l’impact de la crise et masqué l’impéritie de la politique économique suivie, la reprise risque fort de révéler la faiblesse de notre tissu industriel et technologique, laissant la France dans ses starting-blocks, contrairement à sa voisine, l’Allemagne. “Année après année, les investissements publics de l’Etat ont reculé” affirment les pétitionnaires. Et c’est vrai. Au moment où le pays risque de découvrir la note de la politique passée, on comprend la panique qui s’empare du Président de la République, du gouvernement, de la majorité. Mais enfin, “année après année”, ces budgets, ces “réformes”, les membres de la majorité, y compris les pétitionnaires, les ont voulus, les ont défendus et les ont votés !

Mais, ce qui est plus choquant encore c’est que ces parlementaires, tout comme le gouvernement, motivent le recours à cet emprunt par la nécessité “d’une société de création, d’intervention, d’innovation résolument tournée vers l’avenir”, par le besoin de bâtir des “universités, des laboratoires, des entreprises (…) de premier rang mondial demain”. Mais si leurs propos sont sincères, alors pourquoi n’ont-ils rien dit en 2003 quand les crédits des laboratoires chutaient de 30% ? Pourquoi cette absence de réactions, en 2004, quand on a commencé à supprimer des emplois publics dans la recherche ? Pourquoi, en 2005, cette approbation massive du “Pacte pour la recherche”, qui pourtant en programmait la stagnation ? Pourquoi avoir accepté la fermeture de l’Agence pour l’innovation industrielle ? Pourquoi ce mutisme face à l’absence d’initiative sur la politique industrielle, l’université ou la recherche lors de Présidence française de l’UE ? Pourquoi avoir voté, sans s’interroger, la suppression de 280 millions pour les pôles de compétitivité ? Pourquoi cet engouement si tardif pour les éco-technologies ? Pourquoi avoir approuvé un plan de relance qui, d’après l’OCDE, était proportionnellement vingt fois inférieur à ceux de l’Allemagne ou des Etats-Unis pour la recherche et les technologies de pointes ?

On n’aurait pas besoin d’un emprunt si ces secteurs avaient, budget après budget, reçu du gouvernement le soutien nécessaire. Or, il n’en a rien été, non pas parce que ces secteurs ont “été sacrifiés sur l’autel de l’urgence et de l’immédiat”, mais d’abord parce que, pour des raisons de clientélisme électoral, l’Etat a renoncé à ses ressources : quatorze milliards par an avec le “paquet fiscal”, trois avec la TVA sur la restauration, quatre (dont trois inutiles) avec le Crédit impôt recherche, etc. Soit une vingtaine de milliards par an. Si bien que la bataille entre les partisans du “petit” emprunt et ceux du “grand” se résume à savoir si l’on compense par l’emprunt l’argent gaspillé durant la première partie du mandat présidentiel (50 milliards) ou jusqu’en 2012 (100 milliards).

Le plus grave est que cet emprunt n’est qu’une composante d’une gabegie généralisée des fonds publics : déficits colossaux, partenariats public-privé qui sont des emprunts sur 30 ans (pour les infra-structures ou les universités), dette record, jusqu’aux bâtiments publics qui sont bradés et qu’il faudra pour certains racheter un jour à prix d’or.

Faut-il rappeler que ce sont les mêmes qui ont justifié les suppressions d’emplois dans l’éducation, la santé, la recherche, les universités, accroissant ainsi le chômage des jeunes diplômés, par “l’impératif de ne pas reporter sur les générations futures, via la dette publique, l’insouciance de la génération actuelle” ! Et ce n’est pas sans paradoxe qu’il faut bien constater que c’est la petite frange de hauts revenus, dont l’impôt a été ainsi allégé, qui va, directement ou indirectement, souscrire à cet emprunt, empochant au passage les intérêts. Preuve, accessoirement, que le concept général de “génération future” n’a aucun sens : il inclut ceux qui vivent d’abord de la rente, qui toucheront les intérêts de l’emprunt, comme ceux qui vivent d’abord de leur travail, et qui, via leurs impôts, le rembourseront.

Enfin et surtout, peut-on compenser huit années de carence budgétaire par un gros emprunt ? Certainement pas. L’enseignement supérieur, l’innovation, la recherche ont besoin d’un effort continu, régulier et programmé, d’abord dans leur potentiel humain. Car dans des activités de matière grise, le progrès découle d’abord de la qualité et la quantité des hommes et des femmes qui s’y investissent. C’est avant tout un effort considérable de formation, d’attraction des meilleurs étudiants vers ces métiers qu’il faut promouvoir. Pour cela, il faut créer des débouchés ce qui nécessite notamment l’engagement d’un plan pluriannuel de l’emploi scientifique public ; il faut aussi édicter des mesures draconiennes afin que les aides de l’Etat (directes et fiscales) à la recherche privée s’accompagnent de recrutement de docteurs, d’ingénieurs de techniciens. Et ce, dès le budget 2010. Sans quoi l’emprunt sera un gaspillage supplémentaire.

Peut-on suggérer aux pétitionnaires, s’ils veulent être efficaces, de faire parvenir au Président, dont on dit qu’il lit désormais Flaubert, la recommandation de remonter plus avant vers la source de sagesse antique. Et de faire sur le chemin un petit arrêt à Jean de la Fontaine pour méditer cet admirable vers: “Rien ne sert de courir, il faut partir à point”.

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Henri Audier

OCDE : la France en deuxième division pour le financement de la recherche

“La France en deuxième division de la science mondiale ne serait plus la France” . Nicolas Sarkozy

La recherche conditionne les débouchés des étudiants, à tous les niveaux de qualification, et dans les diverses activités du pays. L’OCDE a publié récemment son dernier recueil de comparaisons internationales pour la recherche, avec les données 2007. Il est intéressant d’y jeter un coup d’œil.

Pour le financement total consacré à la recherche (recherche publique et privée, civile et militaire) rapporté au PIB des différents pays étudiés, avec 2,08 %, 2007 marque encore un recul pour la France, malgré l’engagement de Chirac de nous porter à la tête de l’Europe en 2007 (cf. mon article précédent). On en est bien loin comme le montre le tableau ci-dessous. Car la France est en quatorzième position mondiale, très loin des pays de tête, malgré le fait que la recherche ait été depuis 2002 “une priorité des gouvernements”.

La France est même en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE. Pire, comme le montrent les évaluations pour 2007 et celles pour 1995, elle est l’un des rares pays où l’effort a significativement baissé. La situation est encore plus grave si on prend en considération la seule recherche civile : on recule alors de deux à trois places supplémentaires dans le classement mondial.

Comme encore récemment pour l’analyse du projet de budget 2010, en 2003, en 2004, comme en 2005 ; en 2006, ou encore en 2007 et en 2008 voire en 2009, la grande majorité de la presse a salué “l’effort prioritaire fait pour la recherche”. Serait-ce le seul domaine où elle prend à la lettre la communication des gouvernants ?

La recherche, c’est tout à la fois, et de manière imbriquée, le progrès des connaissances, la qualité de l’enseignement supérieur, l’aptitude à l’innovation, la possibilité de mettre en œuvre un mode de développement plus écologique, la capacité de répondre aux grands défis de la santé à la ville, en passant par le niveau de qualification et de culture du pays.

La recherche conditionne la qualité et la quantité des débouchés offerts aux étudiants. Ce n’est pas “la mission d’insertion” donnée aux universités qui les créera, mais bien une autre politique ayant une ambition pour le pays.

Pays

Tx Rech/PIB2007

Tx Rech/PIB2005

Evolution

Israël

4,68

2,57

82%

Suède

3,6

3,26

10%

Suisse

2,9

2,57

13%

Finlande

3,48

2,26

54%

Corée

3,47

2,37

46%

Japon

3,44

2,92

18%

Islande

2,75

1,53

80%

Etats-Unis

2,68

2,51

7%

Singapour

2,61

1,15

137%

Autriche

2,56

1,55

65%

Taipei (Formose)

2,63

1,72

53%

Danemark

2,55

1,82

40%

Allemagne

2,54

2,19

16%

OCDE (total)

2,29

2,06

11%

France

2,08

2,28

-9%

Australie

2,01

Canada

1,88

1,7

11%

Belgique

1,87

1,67

12%

Royaume-Uni

1,79

1,91

-7%

Pays-Bas

1,7

1,97

-14%

Rep. Tchèque

1,54

0,95

62%

Chine

1,49

0,57

147%

Espagne

1,27

0,79

61%

Italie

1,13

0,97

16%

Portugal

1,18

0,54

118%

Russie

1,12

0,85

32%

Hongrie

0,97

0,71

37%

Turquie

0,71

0,28

153%

Pologne

0,57

0,63

-10%

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Henri Audier

Pour la droite, l’enseignement supérieur et la recherche ont toujours été (verbalement) prioritaires

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D’après les données statistiques de l’OCDE, la France se traîne en queue des classements internationaux, comparée aux autres pays développés. Et ce n’est pas sans conséquences. Troisième pays scientifique en 1970, cinquième en 1985, encore septième en 1995, la France est désormais à la quatorzième place mondiale pour la “dépense intérieure de recherche et de développement” par rapport au “produit intérieur brut”. Cet effort représente 2,08 % du PIB en 2007, environ 1,90% hors recherche militaire. Il faut revenir vingt-cinq ans en arrière pour trouver un taux aussi bas.

Après la dégringolade fantastique de notre effort (par rapport au PIB) entre 1993 et 1997, suivie d’une trop faible remontée entre 1997 et 2002, l’élection de J. Chirac en 2002 aurait dû ouvrir, du moins d’après ses promesses, une période faste pour la recherche. Ainsi déclarait-il à Euroscience avant son élection : “Avec moins de 2,2 % du PIB, la recherche française ne peut plus faire face à la compétition internationale. Le temps d’un simple rattrapage est révolu ! L’engagement doit être à la mesure d’un tel défi : le montant des dépenses consacrées à la recherche et au développement doit être porté à 3 % du PIB avant la fin de cette décennie. La France pourrait ainsi, dès 2007, se trouver en tête des pays de l’Union Européenne”. Or, on connaît le chiffre de 2007 : c’est 2,08 %. La France a encore régressé.

Comment se fait-il, qu’à de rares exceptions près, les médias se sont faits les porte-paroles des déclarations officielles, sans regard critique, sans même faire le plus souvent le moindre effort pour en savoir un peu plus? En 2005, presque tous furent élogieux sur le “Pacte pour la recherche” qui programmait, en la chiffrant, “une croissance de l’effort de recherche pour atteindre 3 % du PIB en 2010″.

L’auteur de ces lignes n’est ni mathématicien, ni économiste. Il n’est que chimiste, et sait donc faire les règles de trois. Aussi, reprenant la programmation prévue par le Pacte, l’auteur a écrit dès cette époque “qu’avec le Pacte, nous serons plus proches de 2 % du PIB pour la recherche en 2010 que des 3 % claironnés”

(http://www.sauvonslarecherche.fr/spip.php?article1335&var_recherche=audier, le 16/12/05). Les syndicats de l’enseignement supérieur et de la recherche, l’association Sauvons la recherche, de nombreuses personnalités scientifiques et politiques, ont fait la même analyse. Même le Sénat a eu plus que des doutes. Cela n’a reçu pratiquement aucun écho dans les médias. Et pourtant c’était vrai. Si vrai, qu’en 2007, Nicolas Sarkozy a dû reporter ce même objectif… pour 2012 !

La France en deuxième division de la science mondiale ne serait plus la France” a lancé Nicolas Sarkozy, comme un défi. A l’évidence, personne ne lui avait dit que c’était déjà le cas. Il n’en promet pas moins, du moins avant son élection, un milliard d’euros de plus par an pour l’université et 800 millions de plus pour la recherche. Qu’en est-il ? Une première réponse dans le prochain article : budget@pecresse.com.

Pour vous mettre l’eau à la bouche, une indication : en 2010, il y aura 33 millions de plus pour améliorer la vie étudiante : bourses, santé, logement. A comparer au milliard que la BNP (parmi bien d’autres) destine à ses traders.

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Elargir le débat

La place et les structures qu’un pays donne à son enseignement supérieur et à sa recherche, les moyens et les structures dont il les dote, sont hautement significatifs de la façon dont ce pays envisage son avenir. En ce sens, si une politique du savoir ne saurait se faire sans les scientifiques, ses enjeux concernent toute la société, et tout particulièrement les étudiants.

Par exemple, le problème n’est pas d’adapter, au travers d’une “mission” des universités, l’insertion des étudiants à un marché du travail dont nul d’ailleurs ne sait prévoir les fortes fluctuations. Il est de fixer des objectifs en matière de mode de développement, de réponse aux grands enjeux de la société (environnement, santé, ville …), de technologies de pointe et d’innovation, d’élévation du niveau culturel et des connaissances, d’où découleront une politique de qualification et de formation.

Pourtant, il n’y a pas eu le moindre débat sur l’enseignement supérieur et sur la recherche au Parlement, encore moins dans le pays. Dans ces secteurs, comme dans les autres, le gouvernement a avancé masqué en nommant une pléthore de commissions Théodule ou Nicéphore, qui ont fait des rapports dont on pouvait prévoir les conclusions à la seule lecture de leur composition. Ils ont servi ensuite de prétexte à des décisions qui étaient déjà prises, ou ont servi à imposer des bornes de béton à des prétendues négociations, qui, de ce fait, n’ont en réalité jamais eu lieu. C’est parce qu’en ” bonne élève appliquée” Valérie Pécresse a poussé cette méthode jusqu’à l’absurde, que le mouvement universitaire que l’on sait a éclaté l’an passé.

Pour autant, il ne s’agit pas de s’installer dans une posture de pure dénonciation. Comme on ne rassemble dans la durée que sur des valeurs et des propositions, l’auteur n’en sera pas avare !