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Michel Kalika

A trop regarder les étoiles…. les Business Schools (BS) ne risquent-elles pas de perdre pied ? (*)

‘ Pourquoi notre manuel de cours est-il une traduction d’un livre anglophone réalisé par des auteurs d’une BS concurrente ?
Ainsi s’exprimait une étudiante d’un programme de MBA qui se demandait si elle n’aurait pas du choisir le programme de la BS concurrente.
Une telle situation traduit, à notre sens, l’évolution connue par les BS durant ces dernières années.
La course aux accréditations (AACSB, EFMD) et la logique des classements ont conduit les BS à investir massivement dans la recherche et les étoiles. Les BS ont fait évoluer profondément leur faculté en privilégiant l’académique (doctorat, publications, etc.) et ont mis en place des systèmes de promotion avec une organisation privilégiant la recherche pour s’aligner avec les standards du secteur.
Les conséquences sont connues et l’on peut citer :
des enseignants qui ne sont pas encouragés à publier des livres ou des cas, seuls les articles étant valorisés (notre situation d’introduction) ;
des investissements coûteux pour le recrutement de chercheurs qui ne croisent jamais des étudiants (ni en formation initiale, ni en formation continue) ;
des recherches déconnectées de la pédagogie ;
des recherches déconnectées des entreprises et dont l’utilité managériale est discutable ;
des achats d’étoiles ou l’externalisation partielle de la recherche avec pour seul motif la progression dans les classements ;
la prééminence d’un modèle de publications anglo-saxonnes; il faut lire à ce sujet la critique récemment adressée à nos institutions par le linguiste Claude Hagège dans son dernier ouvrage[].
Que l’on ne se méprenne pas, l’auteur de ces lignes n’est pas en train de vilipender les processus d’accréditations et la recherche. Il a eu lui-même le loisir de reconnaître ‘manager par les accréditations’, celles-ci constituant de puissants leviers de changement. Il a aussi mis en place des systèmes de primes (qui ne concernaient cependant pas que les articles étoilés). Les processus de management de la qualité ont sans conteste permis d’améliorer le fonctionnement des BS.
On peut toutefois se demander si la culture du ‘A journal’ et ‘la course aux étoiles’ n’ont pas des effets pernicieux et si le balancier qui oscille entre le managérial et l’académique n’est pas allé trop loin du coté de l’abscons.
Dès lors, plusieurs questions se posent :
  • La mission d’une BS est-elle d’investir dans la publication d’articles de recherche qui ne seront lus que par quelques initiés ?
  • Quel lien réel existe-t-il entre la recherche réalisée dans les BS et la pédagogie ?
  • Quelle est la mission des BS ? Additionner les étoiles ou former de futurs entrepreneurs, des managers, innovateurs et développeurs de l’économie ?
  • La mission des BS se limite-t-elle, ce qui est déjà bien, à l’insertion professionnelle ? N’ont-elles pas aussi une mission de développement économique ?
  • N’est-il pas paradoxal que notre économie et notre balance des paiements soit dans la situation que nous connaissons avec un tel maillage de notre territoire par des BS ?
Il est bien sûr aisé de critiquer, et par la-même de feindre d’ignorer les effets d’isomorphisme et de mimétisme qu’imposent les logiques d’évaluation, les classements et les accréditations.
La clé se trouve probablement dans l’ajustement du pendule du balancier et dans la différenciation comme le suggèrent Dameron et Durand. Les BS devront à l’avenir apporter des éléments de réponse à ces questions. La réintroduction des étudiants et des entreprises au cœur des préoccupations des BS est de ce point de vue déterminante.

Comme il est d’usage de le préciser, ‘toute ressemblance avec la réalité serait totalement fortuite’ J ! http://www.amazon.fr/Contre-pens%C3%A9e-unique-Claude-Hag http://www.aacsb.edu/publications/researchreports/currentreports/

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Michel Kalika

A trop regarder les étoiles…. les Business Schools (BS) ne risquent-elles pas de perdre pieds ? (*)

‘ Pourquoi notre manuel de cours est-il une traduction d’un livre anglophone réalisé par des auteurs d’une BS concurrente ?
Ainsi s’exprimait une étudiante d’un programme de MBA qui se demandait si elle n’aurait pas du choisir le programme de la BS concurrente.

Une telle situation traduit, à notre sens, l’évolution connue par les BS durant ces dernières années.

La course aux accréditations (AACSB, EFMD) et la logique des classements ont conduit les BS à investir massivement dans la recherche et les étoiles. Les BS ont fait évoluer profondément leur faculté en privilégiant l’académique (doctorat, publications, etc.) et ont mis en place des systèmes de promotion avec une organisation privilégiant la recherche pour s’aligner avec les standards du secteur.

Les conséquences sont connues et l’on peut citer :

des enseignants qui ne sont pas encouragés à publier des livres ou des cas, seuls les articles étant valorisés (notre situation d’introduction) ;

des investissements coûteux pour le recrutement de chercheurs qui ne croisent jamais des étudiants (ni en formation initiale, ni en formation continue) ;

des recherches déconnectées de la pédagogie ;

des recherches déconnectées des entreprises et dont l’utilité managériale est discutable ;

des achats d’étoiles ou l’externalisation partielle de la recherche avec pour seul motif la progression dans les classements ;

la prééminence d’un modèle de publications anglo-saxonnes; il faut lire à ce sujet la critique récemment adressée à nos institutions par le linguiste Claude Hagège dans son dernier ouvrage[].

Que l’on ne se méprenne pas, l’auteur de ces lignes n’est pas en train de vilipender les processus d’accréditations et la recherche. Il a eu lui-même le loisir de reconnaître ‘manager par les accréditations’, celles-ci constituant de puissants leviers de changement. Il a aussi mis en place des systèmes de primes (qui ne concernaient cependant pas que les articles étoilés). Les processus de management de la qualité ont sans conteste permis d’améliorer le fonctionnement des BS.

On peut toutefois se demander si la culture du ‘A journal’ et ‘la course aux étoiles’ n’ont pas des effets pernicieux et si le balancier qui oscille entre le managérial et l’académique n’est pas allé trop loin du coté de l’abscons.

Dès lors, plusieurs questions se posent :

  • La mission d’une BS est-elle d’investir dans la publication d’articles de recherche qui ne seront lus que par quelques initiés ?
  • Quel lien réel existe-t-il entre la recherche réalisée dans les BS et la pédagogie ?
  • Quelle est la mission des BS ? Additionner les étoiles ou former de futurs entrepreneurs, des managers, innovateurs et développeurs de l’économie ?
  • La mission des BS se limite-t-elle, ce qui est déjà bien, à l’insertion professionnelle ? N’ont-elles pas aussi une mission de développement économique ?
  • N’est-il pas paradoxal que notre économie et notre balance des paiements soit dans la situation que nous connaissons avec un tel maillage de notre territoire par des BS ?

Il est bien sûr aisé de critiquer, et par la-même de feindre d’ignorer les effets d’isomorphisme et de mimétisme qu’imposent les logiques d’évaluation, les classements et les accréditations.

La clé se trouve probablement dans l’ajustement du pendule du balancier  et dans la différenciation comme le suggèrent Dameron et Durand. Les BS devront à l’avenir apporter des éléments de réponse à ces questions. La réintroduction des étudiants et des entreprises au cœur des préoccupations des BS est de ce point de vue déterminante.


Comme il est d’usage de le préciser, 
‘toute ressemblance avec la réalité serait totalement fortuite’ J ! 

http://www.amazon.fr/Contre-pens%C3%A9e-unique-Claude-Hag

http://www.aacsb.edu/publications/researchreports/currentreports/

(*) International Dean’s programme, EFMD-ABS, Dauphine, 27/03/12
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A trop regarder les étoiles…. les Business Schools (BS) ne risquent-elles pas de perdre pieds ?

‘ Pourquoi notre manuel de cours est-il une traduction d’un livre anglophone réalisé par des auteurs d’une BS concurrente ?
Ainsi s’exprimait une étudiante d’un programme de MBA qui se demandait si elle n’aurait pas du choisir le programme de la BS concurrente.

Une telle situation traduit, à notre sens, l’évolution connue par les BS durant ces dernières années.

La course aux accréditations (AACSB, EFMD) et la logique des classements ont conduit les BS à investir massivement dans la recherche et les étoiles. Les BS ont fait évoluer profondément leur faculté en privilégiant l’académique (doctorat, publications, etc.) et ont mis en place des systèmes de promotion avec une organisation privilégiant la recherche pour s’aligner avec les standards du secteur.

Les conséquences sont connues et l’on peut citer :

des enseignants qui ne sont pas encouragés à publier des livres ou des cas, seuls les articles étant valorisés (notre situation d’introduction) ;

des investissements coûteux pour le recrutement de chercheurs qui ne croisent jamais des étudiants (ni en formation initiale, ni en formation continue) ;

des recherches déconnectées de la pédagogie ;

des recherches déconnectées des entreprises et dont l’utilité managériale est discutable ;

des achats d’étoiles ou l’externalisation partielle de la recherche avec pour seul motif la progression dans les classements ;

la prééminence d’un modèle de publications anglo-saxonnes; il faut lire à ce sujet la critique récemment adressée à nos institutions par le linguiste Claude Hagège dans son dernier ouvrage[].

Que l’on ne se méprenne pas, l’auteur de ces lignes n’est pas en train de vilipender les processus d’accréditations et la recherche. Il a eu lui-même le loisir de reconnaître ‘manager par les accréditations’, celles-ci constituant de puissants leviers de changement. Il a aussi mis en place des systèmes de primes (qui ne concernaient cependant pas que les articles étoilés). Les processus de management de la qualité ont sans conteste permis d’améliorer le fonctionnement des BS.

On peut toutefois se demander si la culture du ‘A journal’ et ‘la course aux étoiles’ n’ont pas des effets pernicieux et si le balancier qui oscille entre le managérial et l’académique n’est pas allé trop loin du coté de l’abscons.

Dès lors, plusieurs questions se posent :

  • La mission d’une BS est-elle d’investir dans la publication d’articles de recherche qui ne seront lus que par quelques initiés ?
  • Quel lien réel existe-t-il entre la recherche réalisée dans les BS et la pédagogie ?
  • Quelle est la mission des BS ? Additionner les étoiles ou former de futurs entrepreneurs, des managers, innovateurs et développeurs de l’économie ?
  • La mission des BS se limite-t-elle, ce qui est déjà bien, à l’insertion professionnelle ? N’ont-elles pas aussi une mission de développement économique ?
  • N’est-il pas paradoxal que notre économie et notre balance des paiements soit dans la situation que nous connaissons avec un tel maillage de notre territoire par des BS ?

Il est bien sûr aisé de critiquer, et par la-même de feindre d’ignorer les effets d’isomorphisme et de mimétisme qu’imposent les logiques d’évaluation, les classements et les accréditations.

La clé se trouve probablement dans l’ajustement du pendule du balancier  et dans la différenciation comme le suggèrent Dameron et Durand. Les BS devront à l’avenir apporter des éléments de réponse à ces questions. La réintroduction des étudiants et des entreprises au cœur des préoccupations des BS est de ce point de vue déterminante.


Comme il est d’usage de le préciser, 
‘toute ressemblance avec la réalité serait totalement fortuite’ J ! 

http://www.amazon.fr/Contre-pens%C3%A9e-unique-Claude-Hag

http://www.aacsb.edu/publications/researchreports/currentreports/

International Dean’s programme, EFMD-ABS, Dauphine, 27/03/12
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Michel Kalika

BEM – Euromed : fusion ou absorption?

Le secteur des ESC a à cœur d’appliquer ce qui est enseigné à leurs élèves dans les cours de stratégie !

L’annonce de la récente fusion entre Euromed et BEM en constitue une nouvelle illustration. La dynamique du secteur est caractérisée par une très forte intensité de la concurrence entre les Ecoles qui s’explique notamment par la caractéristique française des concours nationaux commun de sortie de classes préparatoires et d’admissions parallèles. Ce système, où les étudiants choisissent chaque année leur école, confère aux classements un rôle déterminant. Or ces classements donnent aux données de taille (effectifs étudiants et professeurs) et de budget, un rôle explicite et implicite primordiale. Il faut donc croitre et pour ce faire, après avoir développé la croissance interne (hausse de la taille des promotions, développement de programmes), les ESC s’orientent, compte tenue de la maturité de leur marché, vers la croissance externe !

Dans le contexte français, deux alternatives s’offrent alors à elles ; soit se rapprocher des universités, soit fusionner (ou s’allier) entre elles. Les relations souvent tendues entre Ecoles et Universités, les différences fondamentales de culture qui rendent le management des fusions Ecole-Université délicat poussent donc plutôt les Ecoles à se rapprocher entre elles. Cette solution s’impose aussi dans la mesure où les autorités et agences d’accréditation (AACSB, EFMD) approuvent ces mouvements stratégiques, que la pression des coûts académiques de recherche résulte des logiques d’accréditation et que les ressources des CCI décroissent.

Le mouvement est engagé et va profondément modifier le secteur. SKEMA (Nice, Lille) a initié le mouvement, Reims et Rouen ont suivi, Marseille et Toulouse ont évoqué une alliance, FBS annonce la fusion de plusieurs écoles. Ce qui est frappant, c’est l’accélération du mouvement et le retournement d’alliance, comme si la pression s’accentuait. Il est vrai que Bordeaux avait été très sévèrement jugé par un rapport AERES (PDF) sur le plan académique et se trouvait fragilisé.

Quels sont les avantages attendus d’une fusion ? Deux types de synergies sont escomptés : sur le plan des coûts (communication, concours, international, relations entreprises, alumni…) des économies d’échelle peuvent être attendues. Sur le plan de la création d’image et de valeur (recherche, classement, notoriété, …) des bénéfices sont envisageables.

Quand il y a fusion, la taille augmente mécaniquement, mais l’amélioration des performances n’est pas, elle, automatique. Comme dans les entreprises où l’on considère que plus de la moitié des fusions ne créent pas de valeur, les résultats vont dépendre de la façon dont la fusion est gérée. Les fusions se traduisent dans les faits par des absorptions posant des problèmes organisationnels qui minent l’amélioration de la performance et les synergies escomptées. On résume parfois les problèmes de fusions par des questions de chaises : il y en a deux avant, et… une après ! J Attendons donc les résultats et, en attendant, Bravo à « l’Homme du jour » : Bernard Belletante.

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Michel Kalika

Ecoles de commerce : fusions, alliances ….le mouvement va continuer !

L’annonce par Educpros d’un projet intitulé ‘France Business School’, qui pour l’instant ne correspond qu’à une marque déposée, n’est pas en soi étonnante.

Ce projet, se situerait ainsi dans la lignée des alliances (ESC Toulouse et Euromed : partage de campus à l’étranger), des rumeurs de projets de fusion (Rouen et Reims), de la fusion complète réalisée entre Nice et Lille, ou de celle projetée entre Dauphine et l’IAE de Paris.

Ces mouvements stratégiques sont normaux, compréhensibles dans un secteur en maturité au plan national, et en pleine mutation internationale.

Les professeurs de stratégie se régalent à l’idée de pouvoir illustrer ainsi leurs concepts ! Les données du secteur sont connues : intensification et globalisation de la concurrence, exigences de qualité croissante, rôle des « agences de notation » du secteur (organismes d’accréditation), raréfaction des ressources financières et académiques, etc.

Les alliances et fusions peuvent permettre des mises en commun de ressources et des synergies au plan global.

Elles seront bénéfiques pour les étudiants (ce qui est l’essentiel en termes de mission) si elles reposent sur un projet stratégique ambitieux et mobilisateur, un projet pédagogique novateur qui répond aux attentes des étudiants et des entreprises (ce qui primordial pour les écoles), et si les cultures sont compatibles.

Il est clair que dans les années à venir, les enseignants et les étudiants en management vont devoir se faire à l’idée que les cas d’application ne seront pas seulement dans les entreprises….mais aussi dans leurs propres écoles ! -)

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Michel Kalika

Ecoles de Commerce : professeurs et gouvernance

Au cours des derniers mois, dans trois Ecoles de commerce, les professeurs ont manifesté leur désaccord avec leur autorité de tutelle ou la direction générale.

Dans le cas le plus ancien[1], les enseignants, par le biais du comité d’entreprise, s’étaient émus publiquement contre la manière dont la Chambre de Commerce gérait le processus et choisissait les critères de recrutement d’un nouveau directeur.

Dans le deuxième cas[2], les enseignants de l’Ecole ont voté une motion de défiance à l’égard de la direction générale quant aux choix stratégiques et aux conditions de nomination du doyen du corps enseignant. Ils dénonçaient par ailleurs l’absence de représentant des enseignants au conseil d’administration de l’Ecole.

Dans le troisième cas[3], le plus récent, les enseignants ont exprimé leur mécontentement en se mettant symboliquement en grève de 12h à 14h (une première) pour protester contre ‘l’absence de toute collaboration constructive avec la Direction Générale’ et leur mauvaise représentation dans les instances de gouvernance.

Chaque cas est bien évidemment spécifique et correspond à un contexte bien particulier qu’il ne nous appartient pas de commenter.

En revanche, la juxtaposition de ces événements doit conduire à s’interroger sur l’existence de causes communes à ce qui peut être analysé à la fois comme une tension entre la gouvernance et les professeurs, mais aussi et surtout comme une demande des enseignants d’Ecoles d’une participation plus réelle à la gouvernance des Ecoles.

Il faut en préambule préciser que la gestion des enseignants dans une Ecole (ou une Université) n’est pas chose facile (c’est un professeur qui s’exprime… en connaissance de cause !).Il faut ensuite noter qu’il est normal dans une organisation que des tensions apparaissent entre les acteurs ayant des perspectives et des cultures différentes.

Mais la difficulté relationnelle habituelle a probablement été renforcée du fait de l’évolution en profondeur d’un certain nombre d’Ecoles de Commerce : la course aux ‘étoiles’ engendrée par les classements et le renforcement de la recherche visant à répondre aux exigences des accréditations (Equis, AACSB, EPAS, AMBA) ont conduit les Ecoles à modifier le rôle du corps enseignant. Le statut des enseignants a changé et les vacataires (professionnels ou non) ont été remplacés en partie par des permanents. Leur fonction a également été remodelée, les enseignants devant aussi (surtout ?) devenir des ‘produisants’ (producteur d’articles dans les revues académiques internationales). Sur ce plan, les Ecoles se sont un peu rapprochées du modèle universitaire.

De simple ‘facteur ou ressource de production’, dans une chaine de valeur où l’on attend avant tout des enseignants qu’ils donnent des cours, ils sont devenus une véritable ressource stratégique qui influence le positionnement, le classement et l’attractivité des Ecoles.

Ce changement de rôle n’a pas été toujours accompagné d’une évolution dans la gouvernance des Ecoles et cette situation pourrait expliquer les crises observées.

On ne peut pas changer un élément d’un système sans s’interroger sur la cohérence entre les parties. Les écoles se sont rapprochées du modèle académique international[4] sans en adapter leurs structures. Elles ont connu de profondes mutations, sauf dans leur gouvernance.

On peut d’ailleurs s’étonner que les processus d’accréditations, si sensibles aux questions d’alignement stratégique, n’intègrent pas dans les nombreux aspects évalués, le rôle du corps professoral dans la gouvernance des Ecoles.

Mon propos n’est pas de dire que la stratégie d’une institution doit être définie par la Faculté, ou que le Directeur Général doit être élu par les seuls enseignants…, mais plutôt de considérer que sans associer ses parties prenantes, il sera difficile pour la gouvernance des Ecoles de mettre en œuvre ses décisions.

Sans le soutien de leurs ressources, les Ecoles se trouvent fragilisées. Cette remarque vaut d’ailleurs pour toutes les organisations, y compris pour les universités.



[1] http://www.aef.info/public/fr/abonne/depeche/depeche_detail.php?id=139063.

[2] http://www.educpros.fr/detail-article/h/6b7df6b24c/a/patrick-molle-va-quitter-l-em-lyon-en-2012.html.

[3] http://www.educpros.fr/detail-article/h/91300eaf1a/a/pierre-tapie-essec-a-lorigine-du-vote-de-defiance-il-y-a-eu-une-maladresse-1.html.

[4] C’est une autre question de savoir si elles ont bien fait !

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Michel Kalika

Ecoles et universités : les conditions de la réussite

Le rapprochement en France des Ecoles de Commerce et des Universités relève de ce que l’on appelle une tendance lourde. Les synergies sont nombreuses. L’université peut apporter son potentiel de recherche et sa visibilité internationale ; les Ecoles leur expertise en matière d’insertion professionnelle et de communication. Si besoin en était, le Financial Times souligne tout l’intérêt pour les Ecoles de travailler avec (au sein ?) des universités.
Le succès de la fusion à Strasbourg, entre la Grande Ecole (ex IECS) et l’ex IAE et le spectaculaire développement de l’EM Strasbourg (recherche, attractivité étudiante, notoriété, classements…), apporte un témoignage de l’intérêt d’une telle opération.
Mais, en management, on enseigne à nos étudiants que les modèles ne sont transposables qu’avec prudence.

Les conditions de la réussite de l’EM Strasbourg
Il convient donc dans le cas de Strasbourg de bien identifier les conditions de la réussite qui permettent de mieux comprendre le modèle développé. Il faut tout d’abord savoir que les deux institutions ayant fusionné étaient de statut universitaire (ex art. 33-art 713.9), la Chambre de Commerce qui avait créé l’IECS en 1919 ayant ‘vendu’ pour le Franc symbolique celui-ci à l’université après la deuxième guerre mondiale. Ce premier point est un élément facilitateur non négligeable. Ensuite, le succès a été rendu possible par un exceptionnel soutien des parties prenantes, à savoir les CCI, au premier rang desquelles celle de Strasbourg, la Région Alsace et la Mairie de Strasbourg. Ce soutien a été matériel, mais aussi politique. Les acteurs locaux ont eu l’intelligence collective, au-delà de leurs divergences, de comprendre que le développement de leur Ecole de Commerce était à leur yeux primordial. L’intégration de l’extension des locaux dans le plan Campus en est l’illustration. Enfin, et cela est parfois ignoré, la fusion qui a donné naissance à l’EM Strasbourg a précédé de plus d’une année la création de l’Université de Strasbourg: l’EM Strasbourg a donc eu tout le loisir de développer son plan stratégique pendant que les trois universités strasbourgeoises étaient occupées à fusionner.

Les risques d’incompatibilité Ecole et Université
Le succès et le développement de l’EM Strasbourg ne doivent pas occulter les risques d’incompatibilité entre une Ecole de Commerce et une Université.
Le premier est stratégique. Parce qu’elles sont dans un environnement extrêmement concurrentiel notamment sur le plan de l’attractivité étudiante, les Ecoles se doivent d’avoir des stratégies dynamiques et réactives. Les Universités digèrent la Loi relative aux Libertés et Responsabilités des Universités (LRU) et n’en sont pas encore au stade des projets stratégiques. La stratégie de développement d’une Ecole n’est pas obligatoirement compatible avec celle d’une université confrontée globalement à un autre environnement.
Le deuxième risque d’incompatibilité est culturel et il n’est pas des moindres. Sans caricaturer, on peut dire que les Ecoles possèdent une culture de la sélection, des droits de scolarité, de la réactivité et de la communication. Est-il nécessaire de préciser que sur ces aspects, les antinomies avec la culture dominante des universités ne sont pas mineures ? Les risques d’incompréhension et de conflits sont donc très importants.
Le troisième risque majeur porte sur la gouvernance. La gouvernance d’une Ecole (Président, Directeur Général, Conseil) est en général focalisée sur un projet stratégique de développement et sa mise en œuvre. La gouvernance d’une université est caractérisée par le fonctionnement de ses conseils (Conseil des Etudes et de la Vie Universitaire, Conseil Scientifique, Conseil d’administration) où sont représentés à la fois les différentes composantes, les différentes catégories de personnels, des étudiants et des personnalités extérieures. Le fonctionnement de ces conseils est parfois marqué par des coalitions politiques plus où moins instables et imprévisibles ayant peu à voir avec une vision stratégique. Les antinomies culturelles mentionnées ci-dessus peuvent conduire à des oppositions ‘non raisonnées’ aux projets d’une Ecole.

Les conditions du succès d’une Ecole dans une Université
La condition du succès d’une Ecole dans une Université passe donc par une autonomie stratégique et financière matérialisée par un statut garantissant la maîtrise de la stratégie (sans laquelle les accréditations [AACSB-EFMD] sont inenvisageables et la maîtrise du budget permettant à l’Ecole de mettre en œuvre son projet. Imagine-t-on une Ecole dont le budget autofinancé, en croissance forte, ne serait pas validé par son université ? Une Ecole qui devrait attendre trois ans pour créer un nouveau programme répondant aux attentes du marché ? Etc.

A défaut, ce qui a fait la spécificité, le succès et l’attractivité des Ecoles de Commerce Françaises risque fort d’être annihilée lors de l’intégration dans les Universités.

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Michel Kalika

Histoire de Noël et leçons de management

Histoire de Noël et leçons de management

Pour des raisons familiales,  j’ai décidé de mettre fin à mon mandat de directeur de l’EM Strasbourg.

Aujourd’hui, je tire quatre leçons de management et une recommandation boursière que je souhaite rappeler à nos étudiants.

1ère leçon : Un manager, et un directeur est aussi un manager, n’est pas seulement une machine à manager, c’est aussi un être humain devant trouver les équilibres dynamiques entre vie professionnelle et vie privée. Ce n’est pas une découverte alors que l’un de nos deux laboratoires de recherche s’appelle HuManiS. Les étudiants appelés à gérer de la mobilité professionnelle et internationale doivent en être conscients.

2ème leçon : Une Ecole se gère avec une stratégie et des ressources en cohérence. Dans une Ecole, les ressources fondamentales sont d’abord académiques et ensuite financières. La mission et le métier d’une Ecole étant la formation, la recherche, l’académique prime, c’est ce sur quoi l’EM Strasbourg  a d’abord investi. Les CCI d’Alsace, la Région, la CUS et EM Strasbourg Partenaires ont apporté leur soutien financier et relationnel.  Le succès de l’EM Strasbourg s’explique par l’association de ces ressources, l’une apportée par l’université, les autres par les partenaires de l’Ecole, mais aussi par la mobilisation exceptionnelle de toutes les équipes sur un projet fédérateur.

3ème leçon : Quand la stratégie est bonne et que les ressources sont disponibles, les résultats sont spectaculaires et procurent à l’Ecole un avantage concurrentiel durable. L’EM Strasbourg n’a pas investi dans la cosmétique, l’Ecole a travaillé sur les fondamentaux. Elle est aujourd’hui attractive tant pour les étudiants que pour les enseignants. Sa situation se caractérise par des progrès dans tous les domaines, et tous les clignotants sont au vert : classements (progrès de 10 places en 2010), recherche (7eme position en 2011), attractivité PGE (+70% de candidats en 2010), rang au sein de l’université de Strasbourg (3ème en effectif, 2ème en formation continue, 1ère pour les Masters Universitaires, l’insertion professionnelle et l’international), extension de 10 000 m2 des locaux (plan Campus) et la reconnaissance par l’Université de Strasbourg du rôle éminent joué par son Ecole de Management.

4ème leçon : Le marché est lucide et réactif. En prenant mes fonctions, l’échec m’avait été prédit au motif que les étudiants et les prescripteurs, à savoir les professeurs de classes  préparatoires et les classements, n’évoluaient que très lentement et que rien ne changerait avant trois générations. Les faits ont démenti cette prophétie !

;-) Une recommandation boursière, assortie d’un regret : si  l’EM Strasbourg était cotée en bourse, la valeur de son action baisserait en début d’après midi (les financiers sont parfois sots), j’achèterai beaucoup d’actions pour ma retraite (avec le risque de délit d’initié), car le développement de l’EM Strasbourg va se poursuivre pour la simple raison que nous avons tous travaillé sur ses fondamentaux.

Michel Kalika, Professeur, Directeur de l’EM Strasbourg Business School

Le vendredi 7 janvier 2011, 13h45.

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Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur… les classements… sans jamais oser le demander

Une anecdote personnelle récente m’a interpellé : il y a quelques semaines un spécialiste du secteur des Grandes Ecoles m’interrogeait sur les raisons de l’exceptionnelle progression de l’EM Strasbourg dans tous les classements et me dit qu’il avait formulé l’hypothèse que nous ‘avions payé’ pour améliorer notre position. Tétanisé par l’assertion, je réponds qu’en effet l’EM Strasbourg a payé dans le recrutement d’un nombre considérable d’enseignants-chercheurs !….

Désormais, lorsque l’on me parle de classements, plusieurs formules me viennent à l’esprit :

-‘Couvrez ce sein que je ne saurais voir’    -‘Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe… (Tartuffe, Acte III, Scène 2)                          sans jamais oser le demander’ (Woody Allen)

Compte tenu de l’importance déterminante des classements sur les choix d’une école de commerce par les élèves, le choix de la seconde formule, c’est-à-dire de la transparence s’impose.

Nous savons tous en effet que les classements réalisés par les quotidiens ou magazines sont extrêmement lus par les familles et jouent un rôle essentiel dans le secteur des Ecoles de Commerce.

Dans un contexte de crise morale du management provoqué par la crise financière, où l’éthique devient une valeur mise en avant par les Ecoles, la crédibilité de celles-ci, mais aussi des média, va dépendre de la capacité à renvoyer aux publics une image de transparence.

La transparence doit à notre sens porter sur :
– Les données communiquées par les Ecoles et leur validité,
– Les critères retenus par les média pour établir les classements,
– La pondération des critères,
– Le mode de calcul du classement.

Les Ecoles et média ont tout intérêt à aller dans ce sens ! Il y va du respect des publics.

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Montre moi ta culture, je te dirai si on peut se marier !

Quels sont les facteurs qui renforcent les chances de succès d’une fusion entre institutions académiques ? On sait bien sûr que dans nos Ecoles (ou institutions universitaires) une fusion peut, comme dans les entreprises, échouer, laisser des séquelles coûteuses et durables ; et au final ne pas créer la ‘valeur’ attendue.

Au regard, des expériences observées, il ressort que c’est peut être là la première condition du succès: savoir clairement quel est le projet stratégique qui porte et justifie la fusion ? Quelles sont les synergies attendues ? Pour qui ? S’agit-il juste d’additionner des divisions, de réduire des coûts ? La place de la fusion dans un cadre stratégique de développement semble essentielle.

La deuxième condition du succès réside dans la proximité des institutions que l’on fusionne. Mais de quelle proximité parle-ton ?

Géographique ? NON ! )

Statutaire ? NON ! (

Culturelle ? OUI ! Car dans nos institutions, comme dans beaucoup d’autres, la ressources essentielle, que l’on peut considérer comme stratégique, est humaine et les échecs de fusions ont souvent pour explication des incompatibilités culturelles. Le succès de la fusion de Strasbourg (ex IAE et ex IECS) tient peu à la proximité géographique ou statutaire ; elle réside dans la proximité sur les traits culturels essentiels du métier d’enseignant chercheur dans une Business School : le souci de l’insertion professionnelle, la relation avec les entreprises, la professionnalisation. Une fusion entre une école post-bac et une Grande Ecole ou entre des départements de Gestion et d’Economie, peut être plus délicate à réussir qu’une fusion entre deux Grandes Ecoles de statuts différents et éloignées géographiquement.

La troisième condition est plus managériale et tient à la préparation en amont du projet, à la MOBILISATION des équipes : les fusions ne se décrètent pas et les fusions imposées se digèrent souvent mal !

Lien “How to merge a business schools?”

En anglais :

http://www.em-strasbourg.eu/docs/global_focus.pdf

En français :

http://www.em-strasbourg.eu/docs/global_focus_fr.pdf

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Michel Kalika

Bon week-end d’intégration !

Les incidents graves qui se sont déroulés lors des WEI d’Ecoles nous rappellent que le regroupement de plusieurs centaines de personnes de 20 ans dans un contexte de bizutage d’un autre âge présente de très graves risques. Risque tout d’abord pour les jeunes qui subissent des sévices susceptibles de les traumatiser très longtemps, risque pour les coupables, risque pour les organisateurs étudiants susceptibles d’être poursuivis au titre de leur responsabilité d’organisateurs, risque enfin pour les Ecoles et leur directeur, même s’ils ne sont pas organisateurs directs du WEI. A ceux qui en doutaient, Madame la Ministre rappelle que les Ecoles sont responsables.

Le concept d’intégration dans une Ecole, de création d’un groupe, de diffusion d’une culture commune devant faciliter le travail futur est aux antipodes de ces excès. Aussi bien dans l’environnement académique, que dans les entreprises, on utilise des techniques d’intégration qui n’ont rien à voir avec un exercice collectif de défoulement.

Il appartient à mon sens aux Ecoles, avec leurs Bureaux Des Elèves (BDE), de définir le cadre de ce qui est acceptable et de contrôler de A à Z le déroulement des activités si l’Ecole est impliquée. Organise-t-on des manifestations de spectacles, de sports, réunissant des foules sans maîtriser l’organisation ? L’on sait tous que le risque zéro n’existe pas, mais il nous appartient d’en finir avec des pratiques qui ne sont pas l’honneur des Ecoles. Cela signifie que dès les oraux d’admissibilité, l’Ecole doit clairement afficher sa politique en matière de consommation d’alcool, de bizutage et de WEI ; ensuite, elle se doit d’assurer la sécurité de l’organisation.

Si, l’Ecole n’en est pas capable, elle ne devra en aucun cas cautionner le déroulement des WEI !

Ceci étant, il faut être clair et cesser de stigmatiser de façon démagogique les directeurs d’Ecoles. Il faut savoir que les étudiants (majeurs) et leur associations (autonomes juridiquement) ont la possibilité d’organiser (et organisent) week-end, soirées, etc., en dehors des locaux de leur Ecole, et sans aucune forme de contrôle de la direction de celles-ci.

Au-delà de l’organisation de la sécurité, il ne fait pas de doute que l’Ecole a aussi une responsabilité morale et éducative qu’il ne faut pas abandonner : celle de transmettre des valeurs et de montrer qu’elles ne font sens que si elles sont appliquées.

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Alliances, Fusions, soyez tendance !

Les universités fusionnent, les alliances se multiplient au plan national et international. Dans le monde de la gestion, le sujet préoccupe les directeurs comme le montrent les résultats de la récente enquête de la FNEGE présentée au congrès des IAE organisé par l’EM Strasbourg. Les manœuvres stratégiques ne sont pas en reste : à l’est, un IAE et une Grande Ecole fusionne ; au centre, au sud et au nord deux Grandes Ecoles font de même, à l’ouest, gestionnaires et économistes s’allient, une Grande Ecole absorbe des Ecoles de CCI, etc.

Pourquoi tant de manœuvre et avec quelles chances de succès ?

Pourquoi ? Les raisons sont connues : mondialisation, classements, accréditations, masses critiques, visibilité, etc. ; toutes ces raisons renvoient à l’environnement concurrentiel qui caractérise nos institutions.

Quelles sont les chances de succès ? On sait que dans les entreprises les fusions et alliances ne se passent pas toujours bien…on enseigne même à nos étudiants que plus de la moitié des fusions ne créent pas de valeur, ce qui évite de dire clairement combien sont des échecs. Il n’y a aucune raison pour que dans notre secteur des business school il n’en soit pas de même. J’ai même la conviction que cela pourrait être pire compte tenu de la difficulté à gérer les académiques ! Il faudra étudier les raisons des succès et des échecs… (à suivre).

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Bienvenue sur le blog de Michel KALIKA

Les raisons pour ne pas faire un blog et ne pas en lire sont très nombreuses. Le développement des TIC a en effet multiplié les canaux de communication et les managers comme les universitaires sont désormais sollicités simultanément par leur intranet, leur forum, leurs emails, les réseaux sociaux, etc. La surcharge informationnelle, la vérification de la théorie du Millefeuille, ‘l’infobésité’ nous menacent tous.

Alors pourquoi se lancer dans un blog? Par malice académique pour accroître la surcharge informationnelle des collègues ? ! Non tout de même pas !

La vraie raison est probablement ailleurs. L’environnement des Grandes Ecoles, des IAE, des universités se transforme profondément. Et quand au fil de sa carrière on a connu la mobilité institutionnelle et géographique, on peut ressentir le besoin d’écrire et de contribuer au changement des organisations. Deux précisions avant de commencer : mon propos sera celui de l’académique que je demeure quelle que soit la fonction exercée ; ensuite, je ne prends, pour les raisons évoquées dans le premier paragraphe, aucun engagement de fréquence !