Si l’on en juge par un récent sondage IPSOS, la ‘’crise’’ paraît difficilement envisageable puisque 64% des Français encourageraient leur enfant à devenir enseignant s’il le souhaitait ( 16% « tout à fait », 48% « plutôt », 29% « plutôt pas » et 6% « pas du tout » ). Quid, alors, de ce que l’on a pu constater ces derniers temps, en particulier cette année, quant à la forte diminution des candidats ( et plus encore de leur présence effective ) aux concours de recrutement ?
Ce sondage IPSOS sur « Les Français et l’école » ( réalisé fin juillet 2011 auprès d’un échantillon représentatif d’un millier de personnes pour le magazine « L’Histoire » ) est paru dans le Hors-Série Marianne-L’Histoire de samedi dernier.
Il apparaît même que, selon les réponses faites par les sondés, 62% ont largement mis en tête parmi les 6 raisons proposées ( ils avaient à en choisir deux ) « le fait de transmettre des savoirs », largement devant « le rythme de travail : horaires, vacances… » ( 38% ), « la sécurité de l’emploi » ( 33% ) ou « le fait de travailler avec des enfants » ( 32% ), et très loin devant « le fait de contribuer à la réduction des inégalités sociales » ( 15% ) et « la rémunération » ( 11% ).
On le sait, après s’être le 21 août dernier « réjoui que les métiers de l’enseignement continuent d’attirer les jeunes diplômés », Luc Chatel s’est permis – à l’inverse – de juger « irréaliste » la récente proposition faite par François Hollande de recréer 60000 postes d’enseignants en raison du peu de candidats se présentant actuellement aux concours d’enseignants.
Les réponses au récent sondage d’IPSOS semblent lui opposer un démenti cinglant et entretenir l’espoir. Reste cependant qu’il ne faudrait pas crier ‘’victoire’’ trop vite, car on ferait bien de prendre la mesure de la complexité de la situation actuelle, de la situation ‘’paradoxale’’ dans laquelle on se trouve, et ne pas se focaliser sur ce type d’annonce sans l’insérer dans une politique scolaire beaucoup plus vaste et déterminée ( notamment en matière de cursus de recrutement et de formation, et aussi de revalorisation matérielle et morale des personnels de l’Ecole ) sous peine d’être confronté rapidement à d’amères déboires. Et c’est d’ailleurs sur cela que Martine Aubry ( qui apparaît comme ayant une vision nettement plus globale de la situation réelle de l’Ecole et des réponses à lui apporter ) attire à juste titre l’attention
Car les faits sont là. Et doivent susciter bien des interrogations. Dans le primaire, le nombre de postes offerts aux concours de professeurs des écoles est passé de 11 700 en 2006 à 3100 en 2011. Et le nombre d’inscrits aux concours de recrutement est passé de 94 000 en 2005 à 42 000 pour 2012 ( soit une baisse de 55% en 7 ans, plus forte encore que dans le secondaire ).
Dans le secondaire, le nombre d’inscrits aux différents concours de recrutements est passé de 136 000 en 2005 à 69 000 pour 2012 ( soit une baisse de moitié en 7 ans ). En corrélation avec la tendance à la baisse continue des postes offerts aux concours de recrutement, et à la mise en place récente des nouvelles conditions pour se présenter aux concours ( cf la ‘’mastérisation’’, telle qu’elle a été faite ), on a assisté à un effondrement des présents aux épreuves des concours, notamment pour le CAPES externe ( qui est central pour le recrutement des professeurs du secondaire ) En 2010 il y a eu 5006 postes offerts et 5006 admis pour 22074 présents aux CAPES externes. En 2011, il y a eu 4881 postes offerts et 4055 admis pour 12 491 présents ( presque moitié moins de présents aux concours du CAPES externe en un an ! )
En raison notamment d’un nombre suffisant de candidats, presque un millier de postes d’enseignants en collège et lycée ne pourront être pourvus par la voie des concours en cette rentrée 2011. Pour les CAPES externes, 574 candidats ont été admis pour 950 postes offerts en mathématiques, 659 pour 790 en anglais, 77 pour 185 en lettres classiques, 72 pour 120 en musique ( soit un déficit d’un tiers pour l’ensemble de ces quatre disciplines ).
Il faut en sortir, de tout urgence ; et en prenant la mesure de la profondeur ( et de la complexité ) du problème.
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Les écrits des concours ayant (je pense) tous eu lieu, connait-on le nombre de présents (par discipline)? Quelle votre interprétation de ces chiffres?
Bonjour,
les critères pour se présenter aux concours me semblent personnellement inadaptés:
– avec un master de sciences de l’éducation, je n’ai aucune chance de réussir le concours face à des candidats titulaires de masters plus spécialisés dans une matière. Or, je maitrise, je pense, mieux qu’eux la pédagogie, dont on manque beaucoup en collège notamment.
– avec une dizaine d’années d’expérience dans le domaine de l’éducation populaire où la formation à la pédagogie et l’ouverture culturelle sont énormes, je dois tout de même avoir un niveau BAC+5 pour enseigner en maternelle !!!
ça me semble vraiment déplacé.
La maternelle est plus proche de l’animation éducative que de l’enseignement supérieur… De plus, ce type d’expérience donne une connaissance des familles, des enfants de différents milieux sociaux… ce qui n’est pas du luxe.
Cordialement
Complétement d’accord avec vous Sophie. Il est temps que ça change.