Une leçon d’histoire : cette loi d »’exception » va être de fait »tournée » pour l’essentiel, et va diviser le »camp républicain laïque ».
Une »législation d’exception » a de fortes chances d’être »tournée’‘ car si la loi refuse à une catégorie de citoyens des droits qu’elle reconnaît à d’autres, il suffit de changer de catégorie pour disposer à nouveau des droits perdus. Le »congréganiste » se prétend simplement prêtre, ou même » laïc », et le tour est joué. L’enseignement congréganiste interdit se »sécularise » tout simplement. Selon la statistique, les « écoles privées congréganistes » passent de 1257 000 à 188000 élèves de 1901 à 1906 ( les congréganistes ayant un délai de dix ans pour fermer toutes les écoles congréganistes), tandis que les «écoles privées laïques » gagnent 695000 élèves dans le même temps.
Mais cette question divise fortement le »camp républicain laïque ». Nombre d’entre eux, comme le dit clairement Ferdinand Buisson ( l’ex-lieutenant de Jules Ferry) dans son rapport sur la loi de 1904, considèrent qu’une fois »sécularisé », le »congréganiste » doit retrouver tous les droits communs, et qu’il n’est donc pas question de lui retirer alors le droit d’enseigner.
Cependant, moins sensibles aux droits juridiques, de nombreux autres républicains considèrent que même »sécularisé » le »congréganiste » doit être interdit d’enseignement. Cela conduit, pour des raisons pratiques et d’efficacité, à la revendication du « monopole d’enseignement » de l’Etat, le parti radical se prononçant en ce sens. Mais, comme même les écoles d’Etat peuvent être l’objet de pressions d’origines cléricales, cela conduit aussi à vouloir leur insuffler un nouvel esprit vigilant et combatif ( il faut « laïciser la laïque »), et à un nouveau mot d’ordre :« L’Etat sera enseignant ou ne sera pas » ( Lintilhac).