« Il faut que vous appreniez aux enfants à lire avec une facilité absolue. Savoir lire vraiment sans hésitation, comme vous et moi, c’est la clé de tout ».
« Est-ce savoir lire que de déchiffrer péniblement un article de journal, comme les érudits déchiffrent un grimoire ? Vous ne devez pas lâcher vos écoliers tant qu’ils ne seront point par la lecture aisée en relation familière avec la pensée humaine. Qu’importent vraiment à côté de cela quelques fautes d’orthographe de plus ou de moins? Ce sont des vétilles dont les programmes, qui manquent absolument de proportion, font l’essentiel ».
« Les enfants qui vous sont confiés n’auront pas seulement à écrire et à déchiffrer une lettre, à lire une enseigne au coin d’une rue, à faire une addition ou une soustraction […]. Ils seront citoyens et ils doivent savoir ce qu’est une démocratie libre, quels droits leur confère et quels devoirs leur impose la souveraineté de la nation. Enfin ils seront hommes et il faut qu’ils aient une idée de l’homme, il faut qu’ils sachent ce qu’est la racine de toutes nos misères : l’égoïsme aux formes multiples, quel est le principe de notre grandeur : la fierté unie à la tendresse. Il faut qu’ils se représentent à grands traits l’espèce humaine domptant peu à peu les brutalités de la nature et les brutalités de l’instinct, et qu’ils démêlent les éléments principaux de cette œuvre extraordinaire qu’on appelle la civilisation.
Eh ! Quoi ! Tout cela à des enfants ? Oui tout cela, si vous ne voulez pas fabriquer simplement des machines à épeler»
Jean Jaurès, « Aux instituteurs et institutrices de France », « La Dépêche de Toulouse », 15 janvier 1888.
Pingback: Faire parler les morts ? | Enseigner au XXI siècle