C’est ce que préconise très fermement un référé de la Cour des comptes publié le 14 avril, en remarquant que les enseignants des pays de l’OCDE ont en moyenne 8 jours de formation continue par an contre seulement 3,5 jours en France.
Et pourtant, il fut un temps, du moins dans le primaire, où la France n’était pas en reste, loin s’en faut. Elle était en effet bien partie, et ‘’au quart de tour’’, après un accord historique conclut en mars 1972 entre le ministère de l’Education nationale et le Syndicat national des instituteurs ( FEN ).
Cet accord s’inspirait de la loi du 16 juillet 1971 sur la formation continue (établie sous l’impulsion notoire d’un certain Jacques Delors). Et cet accord fut le premier à être passé entre un ministère et un corps de fonctionnaires, en précédant la publication des textes d’application de cette loi pour la fonction publique (un accord jugé donc « exemplaire » par le ministère et le syndicat).
Le principe essentiel de cet accord est que la formation permanente est un droit pour tous les instituteurs. Chacun d’eux pourra disposer pour cela de 36 semaines à temps plein – soit une année scolaire – à répartir sur toute sa carrière. Il est prévu que dans une première période de six ans, les stages dans les écoles normales seront de six semaines ou de trois mois ; et que, pendant la durée des stages, les classes de ces maîtres seront assurées par des instituteurs remplaçants (en principe titulaires).
Le ministère de l’époque insiste sur le fait que cette action de formation continue fait partie d’une politique d’ensemble de « rénovation pédagogique », amorcée avec l’institution du « tiers temps ». Il s’agit notamment de « développer chez les maîtres l’aptitude au changement » et de favoriser ainsi une « politique d’innovation dans le système éducatif ». Le ministère fait ressortir que la formation permanente doit s’articuler sur la formation initiale dont elle est « le prolongement et le complément indispensable » tout en soulignant que « le changement souhaité doit être rendu possible et toléré par l’organisation scolaire, par les textes qui réglementent le travail, ainsi que par l’opinion ».
On comprend, après ce passé qui n’est pas un passif, que c’est dans le primaire que s’exprime le plus fort la revendication de revoir et d’amplifier nettement la formation continue des enseignants, compte tenu en particulier de la refondation de l’Ecole en cours.
Et on ne sera pas autrement surpris, par exemple, de trouver aujourd’hui sur le site du SNUipp, cette conclusion : « La vraie refondation de l’école, ce doit être celle de la formation continue. C’est la ligne adoptée par tous les pays qui ont réformé avec succès leur système éducatif. C’est cette voie que notre pays doit absolument emprunter au plus vite. Sinon, rien ne bougera et on demandera encore aux enseignants de tout porter sur leurs épaules et de se débrouiller tout seul avec le risque de créer du découragement. La formation continue, c’est ce qui permet aux enseignants de réactualiser leurs connaissances sur les apprentissages des élèves, de faire évoluer les pratiques professionnelles, de travailler autrement. Formation continue, il y a urgence.»
Compte-tenu de l’importance et de l’ampleur du sujet, il devrait être clair qu’il relève ( par delà les attributions du ministère de l’Education nationale) du plus haut sommet de l’Etat (du Premier ministre et du Président de la République).
A la même époque (1974) et toujours dans la foulée de la loi de 1972, le SNEP (syndicat national de l’éducation physique) de l’Académie de Lyon signait avec la direction régional de la jeunesse et des sports (son ministère de tutelle d’alors),l’Université (IREPS de Lyon à l’époque), un accord pour lancer une formation continue de masse qui avait, entre autres, pour ambition affichée « La lutte contre la sclérose… ».
Jusqu’en 1985, plus de 800 enseignants sur 1000 (en gros) se sont impliqués tous les ans dans cette « aventure », qui portait sur des volumes horaires importants, avec des stages, soit décentralisés, soit « en internat »… Un réseau d’animateurs FC de secteurs a été créé… et une FC quasi « autogérée » s’est mise en place.
Tout ceci a fonctionné jusqu’à l’invention de la MAFPEN… qui décidé (sans le dire) que le « petit innovant » (l’EPS) devait rentrer dans le moule du « gros » (éducation nationale) qui n’avait (dans le secondaire) presque aucune expérience de la FC de masse… et puis le SNEP était trop « Communiste » au yeux d’un pouvoir « socialiste »… Mais ça il ne faut pas le dire.
La question du remplacement dans le premier degré est essentielle. La politique de suppression de postes dans le cadre de la révision générale des politiques publiques a beaucoup réduit les marges de maneuvre des autorités académiques en la matière et notamment les moyens spécifiques destinés à la formation continue. Cette politique a été menée avec l’idée que les enseignants pouvaient se former en dehors de leur temps de travail, éventuellement grâce à la formation à distance et en y intégrant les heures dites d’animation pédagogique des inspecteurs de l’éducation nationale. Or, à mon avis, la formation en présentiel est indispensable pour répondre aux enjeux pédagogiques de ce secteur.
Le contexte des années 1970, pour le premier degré était néanmoins celui d’un recrutement massif de suppléants, recrutés le samedi et qui prenaient la classe le lundi matin. Ils allaient le jeudi matin régulièrement « chez l’inspecteur » pour des animations pédagogiques qui ont justifié/accompagné le développement du corps des conseillers pédagogiques. Cette formation continue massive se faisait donc dans un contexte d’absence de formation initiale.
L’OCDE dit par ailleurs qu’il ne faut pas opposer la formation initiale à la formation continue, ce que tous les politiques français ont fait en réduisant la FC à chaque fois qu’ils élevaient le niveau de recrutement.
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