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Mai 68 : un corps universitaire chamboulé bien avant – Le blog de Claude Lelievre
Le blog de Claude Lelievre

Mai 68 : un corps universitaire chamboulé bien avant

On ne peut pas comprendre Mai 68 (et sa possibilité) à l’Université sans prendre la mesure de la transformation profonde du corps des universitaires qui avait eu lieu durant la décennie précédente. Et nous sommes à cet égard, cinquante après, dans une situation bien différente.

Dans l’enseignement supérieur, la croissance des effectifs est encore encore plus rapide que dans le primaire et dans le secondaire, sous l’effet en particulier de la politique volontariste de Charles de Gaulle.(le budget du supérieur, en francs constants, est multiplié par quatre sous sa présidence). De 1959 à 1968, le nombre des étudiants est multiplié par deux et demi (de 200 000 à 500 000) et celui des enseignants du supérieur fait plus que tripler (il passe de 7200 à 22 500). Il n’y a jamais eu, avant ou après, une telle accélération.

Mais cette croissance est diversifiée selon les ordres d’enseignants qui constituent l’encadrement universitaire. L’effectif des professeurs et assimilés ne fait que doubler tandis que celui des maîtres-assistants et assistants quadruple. Alors qu’en 1959 les effectifs de professeurs et ceux des maîtres assistants et assistants s’équilibraient presque (3100 contre 4100), le corps des assistants et maîtres-assistants l’emporte largement en nombre sur celui des professeurs et assimilés en 1968 (16300 contre 6200).

La croissance s’est d’abord faite par l’augmentation des assistants aux statuts juridiques hétérogènes (titulaires en sciences, contractuels en droit, souvent titulaires mais détachés du second degré en lettres). Pour leur donner une perspective de carrière (singulièrement obérée du fait de l’augmentation beaucoup plus lente du nombre des professeurs que de celui des assistants) le décret de septembre 1960 crée le corps des maîtres-assistants. Les assistants n’ont plus pour vocation normale de remplacer à terme les professeurs (dont ils étaient généralement dépendants) ; la plupart d’entre eux deviendront désormais maîtres-assistants. Ils y gagnent en indépendance par rapport aux professeurs ; mais, en ‘’échange’’, leurs espérances sont réduites. Cela change à l’évidence le rapport des uns aux autres, et pèse de fait sur la répartition des pouvoirs qui prévalait jusqu’alors.

Par ailleurs ces maîtres-assistants et surtout assistants recrutés massivement et depuis peu sont beaucoup plus jeunes que les professeurs et assimilés. Recrutés dès la fin de leurs études universitaires, ils ont seulement quelques années de plus que leurs élèves. Ils seront en Mai 68 beaucoup plus proches des étudiants en mouvement (surtout en lettres et en sciences) que les professeurs (qui sont et se sentent partout très minoritaires dans les assemblées d’amphis). Le syndicalisme universitaire enregistre ces mouvements et ces différences : les syndicats dits autonomes, attachés aux anciennes coutumes universitaires, touchent alors surtout les professeurs tandis que le SNESup (le syndicat national de l’enseignement supérieur, membre de la FEN) groupe surtout des assistants et des maîtres-assistants. Il a d’ailleurs en 1968 pour secrétaire général un maître–assistant à la faculté des sciences de Paris – Alain Geismar – qui va jouer un rôle important à la tête de ce syndicat, très actif lors des événements de mai-juin.

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