Deux ouvrages au même titre ( »Apprendre! ») sont parus à vingt ans d’intervalle. Et ce n’est nullement anecdotique.
Le premier ouvrage est paru en 1998, il y a tout juste vingt ans. Il a été écrit par André Giordan , une figure historique de la mouvance dite »pédago’‘. Plus précisément, André Giordan est agrégé en biologie, spécialiste de la physiologie des régulations et de la didactique des sciences. Il est surtout connu pour son nouveau modèle de l’apprendre, le modèle »allostérique ». En 2015, il a publié aux éditions Librio un ouvrage qui a eu un grand succès de librairie: »Apprendre à apprendre
Le second ouvrage vient de paraître. Il a été écrit par Stanislas Dehaene, directeur de l’unité de neuroimagerie cognitive, unité mixte INSERM-CEA à NeuroSpin5 dans l’Essonne et professeur au Collège de France à la chaire de psychologie cognitive expérimentale4. Depuis janvier 2018, il préside le Conseil scientifique de l’Education nationale créé à l’iniative du ministre de l’EN Jean-Michel Blanquer (dont il est considéré comme un proche) . Ce conseil scientifique est censé éclairer les décisions du ministre concernant les apprentissages, et la pédagogie ad hoc à mettre en place.
Sur son compte »Facebook », Andé Giordan a réagi d’une façon plus humoristique que polémique: ‘‘Je suis fier et très honoré que Stanislas Dehaene, la star des neurosciences comme le nomme l’Express, président du Conseil scientifique de l’éducation nationale, « confirme » nombre d’idées que nous avions développées sur l’apprendre… il y a plus de 20 ans ! En a-t-il été très inspiré implicitement puisqu’il a repris dans son dernier livre le même titre Apprendre ! avec le même… point d’exclamation !!! Point d’exclamation que nous avions mis en avant pour affirmer la complexité du processus !… Il ne lui reste plus qu’à citer ces sources… Non pas les recherches sous IRMf (imagerie par résonance magnétique fonctionnelle) mais André Giordan, Apprendre !, Belin 1998… »
Par delà la »provocation humoristique » d’André Giordan , on peut percevoir en l’occurrence un fond de réalité qui n’est pas sans valeur. Ainsi, dans son compte rendu de l’ouvrage de Stanislas Dehaene paru le 17 septembre 2018 dans « La Lettre de l’éducation » (du »Monde ») Luc Cedelle écrit: « S’attachant à expliquer ‘‘qu’est-ce qu’apprendre », »comment un cerveau appprend » et quels sont les »piliers de l’apprentissage », Stanislas Dehaene semble attribuer aux seules neurosciences, donc à des découvertes récentes, des principes qui puisent leurs racines dans l’histoire de la pédagogie. Il en va ainsi de ses »quatre piliers’‘ de l’apprentissage: l’attention , l’engagement actif, le retour sur erreur et la consolidation. De ce point de vue , le spécialiste du cerveau se trouve dans la même situation que maints sociologues, dont les études apportent souvent plus de confirmations que de découvertes. A noter que certains de ses avis […] vont à l’encontre de bien des discours conservateurs sur l’école »
A commencer par un objectif mis au premier plan par Stanislas Dehaene: « apprendre à apprendre » (et qui a fait l’objet, on l’a vu, d’un livre récent d’André Giordan); un objectif mis tout récemment à l’index par la nouvelle présidente du Conseil supérieur des programmes…. Où va-t-on? D’où vient-on?
Merci de cette analyse! Elle confirme ce que j’avais déjà perçu: certains aspects des thèses de Stanislas Dehaene sont proches de celles des « pédago » ou supposés tels. La différence est qu’il est certain que ses thèses sont à cent pour cent garanties par la science.