Les derniers scandales de violence sexuelle ou sexiste révélés par la presse ces jours-ci, et la parole des femmes enfin libérée sur les réseaux sociaux notamment, doivent nous rappeler que le harcèlement sexuel est une réalité dans le monde du travail dont on a du mal à mesurer l’ampleur et la gravité, tant elle est tue ou dissimulée.
Selon les résultats de l’enquête sur le harcèlement sexuel au travail menée en 2014 pour le compte du Défenseur des Droits, 1 femme sur 5 a dû faire face au cours de sa vie professionnelle à une situation de harcèlement sexuel. Près de 3 victimes sur 10 indiquent ne s’être confiées à personne. Seulement 5% des cas ont été portés devant la justice.
La loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel contient de nouvelles dispositions encourageant les victimes à dénoncer rapidement les faits, et l’entourage à témoigner des faits de harcèlement qu’il constate. Elle prévoit également des sanctions plus lourdes à l’encontre des auteurs de faits de harcèlement.
Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui :
- portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant,
- créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
Est également assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave, dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, pour soi-même ou pour un tiers.
La nouvelle loi couvre ainsi toutes les situations dans lesquelles des personnes peuvent faire l’objet de ce type d’agissements. Elle sanctionne les actes de harcèlement, qu’ils soient commis par un collègue, par un formateur, par l’agent d’une autre entreprise, par un.e doctorant.e, par un.e directeur.trice de thèse, par un supérieur hiérarchique…
Avec la nouvelle la loi, la qualification de harcèlement sexuel n’est plus seulement liée à la recherche d’un acte de nature sexuelle ; des propos ou comportements répétés à connotation sexuelle portant atteinte à la dignité de la victime ou créant pour elle une situation intimidante, hostile ou offensante peuvent désormais suffire.
De même, que cette pression soit exercée au profit de son auteur ou au profit d’un tiers, dans les deux cas, il n’est pas nécessaire qu’il y ait une relation hiérarchique entre l’auteur des faits et la victime pour que les actes puissent constituer une infraction.
Le harcèlement sexuel et les faits assimilés au harcèlement sexuel sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Ces peines ont été doublées par rapport à la situation antérieure. Des circonstances aggravantes portent les peines à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende (ainsi en cas d’abus d’autorité, lorsque le délit de harcèlement est commis à l’encontre d’une personne en situation de vulnérabilité…).
Il est de la responsabilité de l’employeur de prendre les mesures de prévention et de veiller à l’information des personnels en matière de harcèlement sexuel au travail, entre autres par l’affichage des dispositions légales relatives au harcèlement, de protéger les victimes et de sanctionner les auteurs du délit de harcèlement.
COMMENT AGIR EN CAS DE HARCELEMENT ?
La difficulté de démontrer la réalité du harcèlement vient de ce qu’il s’agit le plus souvent d’une addition de faits et comportements, dont certains ne laissent pas de traces, les harceleurs étant habiles. Mais si les paroles s’envolent, il y a aussi des éléments objectifs (rapport écrit, retrait de responsabilités).
Des témoignages aussi, si la solidarité des collègues joue.
Cette solidarité entre collègues est aussi essentielle que difficile dans une relation hiérarchique, donc inégalitaire, où des pressions peuvent aisément s’exercer. Elle sera souvent un élément majeur pour établir des faits dont le supérieur ne pourra prouver qu’ils entrent dans le cadre normal de la relation de travail. Le poids hiérarchique de la parole des responsables en place fait que l’on croit parfois plutôt ces derniers. D’autant plus que le harcelé donne souvent des signes de perturbations psychologiques (ce n’est pas étonnant), alors que le harceleur se porte à merveille. Il est important de détecter, dans les services, les situations de harcèlement et de ne pas laisser se créer un isolement autour des collègues incriminés.
QUI CONTACTER ?
Au sein de l’Université, tout membre du personnel, tout.e étudiant.e, tout.e doctorant.e ou toute postdoctorant.e peut saisir directement la présidence et/ou le groupe sur les risques psychosociaux. L’assistant social, l’assistant de prévention, la médecine du travail, la Direction des Ressources Humaines, le Comité Hygiène, Sécurité et Conditions de Travail (CHSCT), peuvent également être saisis.
Un dispositif externalisé d’écoute et d’accompagnement des victimes a également été mis en place en 2016. Il garantit l’anonymat des victimes et offre une première prise en charge extérieure à l’établissement, assurée par l’Institut en Santé Génésique (01 39 10 85 35), où exercent des médecins, des infirmièr.e.s, des psychologues, des assistant.e.s de service social et des juristes.
L’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT), entre autres, met en ligne des outils (ici et là) pour vous défendre ou pour agir si vous êtes témoin de violences sexuelles au travail, de même que CLASCHES, Collectif de lutte antisexiste contre le harcèlement sexuel dans l’enseignement supérieur.
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Textes de référence :
Loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel
Circulaire n°2012-0027 du 25 novembre 2012 relative au traitement du harcèlement sexuel
Circulaire n° SE1 2014-1 du 4 mars 2014 contre le harcèlement sexuel et moral dans la Fonction publique
Informations sur le site du Ministère de la Justice : STOP HARCELEMENT SEXUEL
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Fara Raliarivony
Secrétaire de la section Snasub-Fsu à l’Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle
Acquéreure en Sciences, Sciences de la Société et Sciences Economiques
Département de la Politique documentaire
Bibliothèque Sainte-Geneviève
10, place du Panthéon – 75005 Paris
Tél. : 01 44 41 97 70
Mél : fara.raliarivony@univ-paris3.fr
http://www-bsg.univ-paris3.fr/
PS : Doctrix avait déjà donné la parole à Clasches : http://blog.educpros.fr/doctrix/2012/12/20/esr-harcelement-sexuel-tribune-clasches/