A la veille d’un sommet qui devrait décider de nouvelles mesures pour enrayer le réchauffement du climat, j’ai souhaité, faire le point sur cet enjeu. En tant que directeur d’une grande école de commerce, cette question impacte nos façons de vivre et de consommer, d’étudier, nos modèles économiques. Une clarification me paraît nécessaire pour mobiliser toute les parties prenantes.
Quel constat ? Avant de proposer des vraies solutions aux problèmes environnementaux, il me semble essentiel de se mettre d’accord sur le constat. Quelle est la part de la responsabilité humaine dans ces dérèglements ? Y a-t-il un réel danger climatique ? De quelle nature ? Pour qui ? A quelle échéance ? Mêmes questions pour le pétrole. Certains experts parlent d’un « peak oil » dans moins de 20 ans, d’autres estiment que d’immenses réserves nous tendent les bras mais à des coûts d’exploitation prohibitifs. Pour prendre une métaphore médicale, sommes-nous dans la situation d’une personne qui a pris quelques kilos de trop ou dans celle d’un obèse qui met sa vie en danger ?
Bref, entre idéologie et science, une clarification s’impose pour proposer des solutions efficaces et partagées.
Un paradoxe. Côté citoyen, la prise de conscience est là. Pollution, biodiversité en danger et réchauffement climatique font écho. Côté consommateur/acteur économique, les choses sont moins claires. À quoi bon parler à un étudiant ou à un chef d’entreprise de développement durable si le concept ne l’aidera pas à trouver un job ou de nouveaux marchés… D’autres questions épineuses se posent : Est-on prêt à réduire, en occident, notre train de vie même inégal ? À limiter les effets pervers de la mondialisation : en ne consommant plus de tomates en hiver ou de produits low cost ? À l’accentuer quand cela paraît « plus écologiquement correct » en évitant de longs circuits de distribution coûteux en gaz à effet de serre ? Face à de tels enjeux de société, une école de commerce a pour mission de contribuer au débat public en apportant un éclairage original tant sur ses dimensions citoyenne que business.
Une pédagogie « universelle ». Beaucoup reste à faire en matière de pédagogie à l’environnement, au coin de ma rue comme à l’échelle planétaire. Au-delà de la seule « écologie », il s’agit d’une tendance de fond qui modifie profondément les règles du jeu économique et social. Des règles qui ne peuvent s’appliquer que si toutes les parties prenantes les ont intégrées, du nord au sud de la planète… Ce qui donne une dimension géopolitique aux questions environnementales et climatiques. Elles touchent à l’énergie, à l’eau, à la biodiversité, au développement économique des pays émergents ou non. Le champ d’application est à la fois local et mondial. La pédagogie sur ces questions doit intégrer ces deux dimensions qui entrent en conflit ou du moins en tension.
Diffuser le « savoir vert » dans nos écoles. Complexe puisqu’il s’agit, à la fois, d’enseigner de nouveaux savoir faire techniques et de nouveaux savoir être. Et comme toute matière transversale, elle diffuse déjà dans de nombreuses disciplines « historiques ». Modifier les comportements et les usages, acquérir de nouvelles techniques, inventer et s’approprier de nouvelles technologies, tel est notre rôle : accompagner ces mutations, les comprendre pour en capter les spécificités managériales et marketing. De nouveaux modèles économiques en découlent. Toute la chaîne de valeur est impactée, de la conception à la production en passant par la distribution. D’où l’importance de diversifier notre recrutement et nos partenariats pédagogiques avec d’autres écoles, pour développer d’autres manières de voir le monde pour les managers de demain. Comment apporter ces compétences à nos jeunes étudiants, comment les aider à développer l’entrepreneuriat « vert » ? Notre mission est de leur proposer les études de cas les plus pertinentes du « green business », de leur faire partager les meilleures pratiques managériales et de les sensibiliser en organisant des événements et des conférences sur les thématiques environnementales qui porteront le développement du monde de demain.
ouf, j’ai bien cru que Claude Allègre avait pris le clavier 😉
deux réflexions dans le paragraphe « paradoxe »:
– en sous-jacent on perçoit l’éternelle objection : plus d’écologie égale moins. Moins de croissance, moins de plaisir, moins de confort, moins de choix, moins de progression (et : plus d’efforts).
L’éternel : être écolo oui, mais pas revenir au temps de la charrue et des topinambours.
Or dans un monde où l’économie numérique bat son plein, où l’industrie pétrolière va arriver au taquet de ses possibilités, l’économie du durable, qui implique o combien de R&D et développement tout court en matière de technicité, est une vraie opportunité de croissance.
– de la même façon, on sent ici que tout repose sur le comportement éco-citoyen individuel (je refuse de manger des fruits qui ont parcouru 1000 km et coûtés X en émission de C02…).
Or les vraies mesures reposent sur les gouvernements (cf. Copenhague). Loin de me dédouaner de tout engagement individuel, bien entendu ils comptent, et je suis la première à trier, privilégier le marché bio, mettre des couches lavables à mon bébé etc.
Néanmoins qui va endiguer et lutter contre les lobbies industriels et agro-alimentaires qui polluent, et Areva qui nous raconte encore que le nucléaire, c’est l’avenir et c’est propre, à part Greepeace bien sûr? Aujourd’hui, le lobby du lait ça existe, le lobby de la viande, ça existe. Les élevages bovins sont les plus gros émetteurs de CO2 au monde, devant les voitures, les avions, les bateaux…
Les gouvernements vont ils prendre des mesures drastiques? j’en doute.
Tant que les gouvernements penseront « croissance » comme : croissance version 70’s, rien n’est envisageable.
Pas forcément… La démocratie est la prise en compte de l’avis de tous mais il faut bien que quelqu’un fasse le premier pas.
Peut-être que si l’opinion publique s’était plus mobilisée, peut-être que Copenhague ne laisserait pas ce goût amer… A bon entendeur…