Je démarre une série d’entretiens croisés sur des thèmes touchant à l’enseignement supérieur, bien sûr, mais au-delà, sur des thématiques d’actualité sociales ou économiques. Mon premier invité : Jean-René Talopp, président de Strate Collège Designers avec lequel nous avons lancé un double diplôme depuis trois ans.
1. La genèse
Jean-René Talopp (Strate Collège Designers) : Grenoble Ecole de Management a fait le premier pas. Et le courant est passé instantanément. Nous avions tenté des rapprochements avec d’autres écoles de management mais sans aboutir. Avec Grenoble, j’ai senti une approche métier originale, plus humaine dans la relation produit/utilisateur. C’est très important pour nous, designers, qui souhaitons exister à part entière dans une démarche de création et ne pas être simplement un prolongement marketing ou technique. Par ailleurs, notre credo, c’est de développer la transversalité des métiers et apprendre aux étudiants à travailler en équipe. Ce partenariat va dans ce sens.
Jean-François Fiorina (Grenoble Ecole de Management) : hormis quelques cours de design à l’école, il nous fallait proposer une démarche globale et certifiante dans ce domaine pour proposer une offre intéressante en direction des entreprises. Notre démarche a pour objectif de développer des managers designers capables de s’approprier de nouveaux usages pour créer de nouveaux produits, dans une démarche de développement durable. Comme école de l’innovation, il nous a semblé essentiel de construire ce partenariat.
2. Pourquoi ça marche ?
Jean-François Fiorina : Pour plusieurs raisons :
– nous avons placé l’étudiant au centre du dispositif.
– nos deux écoles fonctionnent sur un modèle de développement entrepreneurial. Nous sommes de jeunes écoles, en fort développement. D’ailleurs, au moment de notre première rencontre, nous étions tous les deux confrontés à une logique d’extension de nos locaux.
– chacun gère ses étudiants de manière indépendante, dans le respect des cursus. Il n’y a pas de rapport de force mais beaucoup de suivi et d’échanges. Nos équipes se rencontrent régulièrement. Nous participons aux jurys de sélection des uns et des autres.
– il faut également limiter le risque de cannibalisation en interne.
Jean-René Talopp : Tout à fait. J’ajouterais la notion de temps. Nous n’aurons jamais la rapidité d’une start-up en la matière ! Et dans un monde qui va vite, il faut savoir prendre son temps pour réussir de tels projets, et cultiver la confiance. Nous ne ferons, par exemple, pas de second double diplôme avec une autre business school, mais vraisemblablement avec une école d’ingénieur. Ce qui n’empêche pas des liens croisés au niveau master avec d’autres établissements.
3. Les apports
Jean-René Talopp : les anciens élèves applaudissent la démarche. Je remarque aussi de plus en plus d’hésitation quant au choix de métiers chez nos étudiants : créatifs purs, designers- ingénieurs, designers- managers ? Le fait d’avoir plus de choix, plus d’ouverture est un plus. Sans augmenter le nombre d’années d’études et donc la facture de la scolarité…
Nous partageons aussi nos partenariats. Strate Collège va apporter une dimension créative dans le cadre d’une association avec l’IFM, Institut Français du Merchandising pour la grande distribution. Et le croisement des compétences Grenoble/Strate est très fort sur ce type de sujet.
L’avenir est au partage des connaissances, à la créativité. En ce sens, le double diplôme est un véritable apport. Nous sommes en train de constituer un pôle Recherche au sein de l’école qui va croiser management, ingénierie et créativité.
Jean-François Fiorina : c’est vrai, à chaque fois que cela est possible, nous nous associons. C’est le cas pour la création du hub à Casablanca, Strate est partenaire. Notre offre de pédagogie différenciée en sort renforcée.
Mais au-delà, c’est la possibilité de présenter une offre globale aux entreprises. Renault, par exemple, ne pourra plus contractualiser avec des dizaines d’écoles mais avec celles qui lui apporteront des solutions globales. Nous leur fournissons des talents opérationnels aux savoir faire certifiés dans tous les domaines stratégiques.
Ces partenariats nous font réfléchir sur l’évolution de nos modes de conception, de production, de consommation. Et sur la chaîne de valeur aujourd’hui mondialisée.
4. L’avenir
Jean-François Fiorina : je le vois en positif bien sûr, à la seule réserve que nos équipes puissent y consacrer le temps nécessaire à son animation/développement. C’est le risque principal d’échec de cet exercice.
Autre élément important, l’international. Le concept des doubles-diplômes se développe à l’échelle monde. C’est le mode de fonctionnement naturel de nos concurrents. Les étudiants étrangers viennent chez nous aussi pour ces alliances. C’est un levier très utile pour le développement international.
Jean-René Talopp : même si les doubles-diplômes fleurissent, cet accord nous a permis de faire comprendre ce qu’est notre métier et de lui donner une nouvelle dimension. J’abonde dans le sens de Jean-François, c’est un moyen de développement international sans égal. Après trois ans de collaboration, certains de nos étudiants postulent chez nous dans la perspective du double-diplôme et je suis sûr de la réciproque à Grenoble Ecole de Management.
Double diplôme, d’accord. Ce serait cependant bien de préciser au lecteur dans quel pays se trouve le Strate College Designer, les conditions de mobilité d’un pays à l’autre (dont les bourses et les droits d’inscription). Par ailleurs, c’est toujours bien de préciser les points faibles du projet ou plutôt les axes de progrès. Cordialement. Pierre Dubois
Strate College Designers est à …. Sèvres !
Le plus dur pour les Dauphinois, c’est de quitter leurs montagnes.
Blague à part, merci pour votre commentaire : j’en tiendrai compte pour mes prochains posts.