Le blog de Jean-François FIORINA

De la géopolitique de l’enseignement supérieur (suite)

Je reviens sur les nombreux commentaires de mon billet centré sur la nouvelle carte géopolitique de l’enseignement supérieur. C’est un sujet qui interpelle ! Et je m’en réjouis. Je vous propose également de (re)lire sur cette thématique l’une de mes Notes d’analyse géopolitique hebdomadaires (n° 40). Voici quelques éléments de réponse et de discussion.

Sur l’attitude des pays émergents

Aujourd’hui, les émergents adoptent une posture d’attente vis-à-vis de l’Europe pour deux raisons :
– Elle manque d’unité. Elle n’est ni visible, ni audible. Et donc plutôt perçue comme un risque.
– La bataille est mondiale et la stratégie de développement des émergents est claire. Elle s’apparente à la stratégie conquête de l’industrie automobile construite autour de quatre phases :
o L’appel à l’extérieur pour attirer des universités étrangères sur son sol et l’envoi d’étudiants nationaux à l’étranger,
o L’optimisation du benchmarking : le pays prépare sa propre stratégie,
o La protection du marché intérieur : barrières à l’entrée et réglementation,
o L’installation à l’étranger des écoles et des entreprises nationales.
Cette logique de conquête, nous n’avons pas su la comprendre et l’appliquer de manière systématique. Comme je le dis souvent, notre « logiciel » fonctionne avec des données erronées : une ancienne carte du monde qui ne tient pas compte des mutations actuelles ! Faute de remise en cause, d’information et de sensibilisation massives des acteurs de l’enseignement supérieur, nos positions risquent de se dégrader.

Quelles conséquences pour nos écoles et nos entreprises ?

Elles sont bien sûr néfastes, la « circulaire Guéant » en est un exemple flagrant. Si les grandes entreprises françaises ne peuvent recruter des étudiants étrangers formés dans nos écoles pour leurs filiales internationales, ils se tourneront vers nos concurrentes !
Les ETI françaises, du fait de leur structure et de leur positionnement (produits à faible valeur ajoutée), se développent principalement sur les marchés européens alors qu’elles devraient s’ouvrir au monde. Faute de mondialisation de leurs talents, elles vont souffrir. Le modèle de développement international des PME qui est calqué sur celui des grandes entreprises depuis 30 ans n’est plus valable. Jadis, la conquête du marché national précédait un développement international. Aujourd’hui, les deux vont de pair et le national peut même ne plus être stratégique ! Le terrain de « jeu » est mondial par ses financements, ses partenariats, les équipes engagées… Je pense, ici, aux biotechs. Ne pas attirer les jeunes talents étrangers est donc bien une erreur stratégique qui limitera le réseau international de nos entreprises et leur création de valeur.

Commentaire (1)

  1. Pingback: Géopolitique de l’enseignement supérieur : un critère de puissance ou d’influence ? | Classe Internationale

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