Si ma vie de Directeur n’est ni « un long fleuve tranquille », ni « Apocalypse now » ou « Le Titanic », je la considère plutôt comme « La vie est belle » ! Vous l’aurez compris, cette semaine, le Festival de Cannes m’inspire un billet plus léger. Ma vie, c’est (ce n’est pas) du cinéma ? Silence… moteur, action !
Directeur de grande école et enseignant, ces métiers ont ceci en commun qu’il faut savoir faire le « show » pour faire passer les messages et la pédagogie, entrainer les équipes et les étudiants. Cela requiert des qualités proches de celles de l’acteur, savoir « jouer » dans des registres différents. Quant au professeur que ce soit dans un amphi traditionnel ou sur les vidéos de son MOOC, il met en scène des contenus (et se met en scène). Il joue devant des « spectateurs » étudiants, entre en classe comme un acteur entre en scène. Même si tout est parfaitement préparé, son cours réservera des surprises, surtout s’il suscite l’interaction. Il se passe toujours quelque chose d’inattendu dès que le rideau se lève – pardon – dès que la porte s’ouvre… Un peu comme un acteur ne sait pas ce que lui réserve son public au fil des représentations. N’est-ce pas le sel de nos métiers !
Dr Jekyll ou MR Hyde ?
Comme directeur, beaucoup de situations que je vis ressemblent à des films et réciproquement. La journée peut commencer dans le calme d’un petit matin alors que « Le cerveau » ou « Le professionnel » concocte de nouvelles stratégies, s’imagine en « Hibernatus » pour lire dans l’école du futur, puis être troublée par quelques importuns au téléphone, tentant de briser cette (courte) tranquilité. « Le samourai » entre alors en scène, épaulé par son équipe de « Men in Black ». Place nette SVP si rien d’intéressant ne justifie cette intrusion !
Plus avant dans la journée, il semblerait que « La boom » d’hier soir – bien que fort différente de sa version initiale de 1980… – se soit terminée un peu tard (tôt ?) pour cet « Harry Potter » accompagné de son Emma Watson. Me voici donc devenu « L’homme de fer », « Licenced to kill », pour un recadrage express ou « Une garde à vue » salutaire.
Les réunions s’enchainent, quelques-unes s’apparentent aux « Tontons flingueurs ». Je passe également du statut de « Parrain » à celui de « Marginal » ou même d’« Homme invisible » quand l’ennui me submerge (jamais à l’école !).
Quand « Le monde ne suffit pas » pour embrasser toute la mondialisation de l’Enseignement supérieur, James Bond se transforme en pèlerin pour la « Grande vadrouille » des classes préparatoires.
Nous abordons – déjà – le temps des concours avec quelques « Sueurs froides » ou « salaire de la peur » que vivent étudiants et organisateurs ! Et bien sûr, « Psychose » à la veille des classements .
« L’âge de glace 4 » ou « La dérive des continents » me rapprochent de ma passion pour la géopolitique.
Ah, j’oublias… quelques acteurs de l’Enseignement supérieur restent très efficaces en « Docteurs folamours ».
Je regrette cependant comme l’explique bien Émmanuel Davidenkoff dans l’entretien que vous découvrirez prochainement sur mon blog – à propos de son dernier livre « Le tsunami numérique » – qu’il manque un imaginaire et une culture de la valorisation de l’Enseignement supérieur dans le cinéma français. C’est le contraire aux USA avec des films comme « Le Lauréat » de Mike Nichols ou plus récemment « The Social Network », l’histoire du créateur de Facebook, Marck Zuckerberg.
Une explication du monde
Je remarque le développement des films documentaires y compris à Cannes. Le cinéma, c’est aussi l’explication du monde avec des films, cette année, sur la Syrie, la Tchétchénie ou l’Afrique. Le succès d’Abderrahmane Sissako, réalisateur mauritanien, pour son film « Timbuktu » en témoigne.
Professionnalisation et management
Pour revenir sur le terrain de la formation, nos étudiants sont préparés et aptes à gérer des équipes, des égos, des cultures et des origines diverses. Je pense qu’ils peuvent apporter ainsi une vraie valeur ajoutée à l’industrie du cinéma.
D’autant que certains étudiants de Grenoble École de Management veulent travailler dans le secteur. Le cinéma a besoin de bons professionnels du marketing, de la promotion, de la distribution, du financement. On le voit bien avec le développement du crowdfunding ou de l’ingénierie de montage de projets complexes, de nouveaux horizons s’ouvrent à cette industrie tandis que le numérique bouleverse – avec peut-être encore plus d’intensité que pour l’industrie des médias et du journalisme (cf notre Chaire Convergences) – son écosystème. Netflix en est l’exemple le plus probant.
Vous le constatez, ma vie, c’est (ce n’est pas) du cinéma ! Chaque année, nous décernons aussi nos palmes d’or (académiques) à nos étudiants. Que le meilleur gagne ! Il ne nous reste qu’à installer les marches et le tapis rouge, seules différences entre Cannes et notre gala de fin d’année ! Mais rassurez-vous, je ne suis ni invité aux légendaires soirées cannoises ni aux afters…
Bon palmarès !