Alors que la rentrée laisse derrière elle quelques jours de vacances, je reprends au bond le lancement du compte personnel de formation (CPF) qui remplace le DIF depuis le 1er janvier. Une actualité qui va impacter nos écoles, nos entreprises et, en théorie, quelque 40 millions de salariés en France ! Quand la formation tout au long de la vie commence à devenir réalité. Mais à quelles conditions ?
Le CPF, comment ça marche ?
- Le dispositif s’adresse à tous les salariés, demandeurs d’emploi, ainsi qu’aux jeunes à partir de 15 ou 16 ans (s’ils sont sortis du système scolaire),
- Il est attaché « à vie » à la personne quel que soit son parcours professionnel,
- Le salarié décide de l’utilisation de son CPF (150 heures) sans l’accord préalable de l’employeur s’il est effectué hors temps de travail. Dans le cas contraire, il demande l’accord de l’employeur,
- Il est mobilisable pour l’acquisition d’un socle de connaissances et de compétences ou pour l’accompagnement à la validation des acquis de l’expérience (VAE).
Si l’intention est louable, elle appelle deux remarques de ma part.
Une positive : le dispositif ouvre de nouveaux marchés dont les perspectives sont infinies compte tenu de la diversité des offres de formation. Mais comment répondre efficacement à la demande croissante des entreprises et des salariés ? Le bon modèle de développement passera par des alliances et des partenariats entre les acteurs de la formation pour proposer des offres globales avec 3 clés de succès :
- La simplicité de l’accès à l’offre,
- La diversité de l’offre,
- La qualité pédagogique.
Une négative : la croissance et la complexité de ces mêmes offres risquent de créer une nouvelle usine à gaz. Où seuls, les plus informés (les plus qualifiés !) et les plus accompagnés, y auront accès et bénéficieront, à plein, du dispositif. Je pense, ici, aux salariés des grandes entreprises. Quid pour la PME de 10 à 100 salariés, ou des personnes en grande difficulté ? Je rappelle que 76% des actifs n’ont jamais utilisé leur DIF selon une récente étude Afpa-Opinion Way.
Formation certifiante
La bonne nouvelle, c’est que seules les formations labellisées et répertoriées sur le site cncp.gouv.fr ouvriront les droits du compte personnel de formation. Mais pour l’instant « la CNCP ne dispose actuellement d’aucune des listes de formation éligibles au compte personnel de formation citées par le décret 2014-1119 du 2 octobre 2014 ».
Quoi qu’il en soit, une offre de 150 heures de formation requiert une ingénierie pédagogique de qualité afin de fournir ou de compléter un panel de compétences précis et leur certification. On peut imaginer des opérations communes avec guichets uniques communs. Pour exemple :
- Plusieurs business schools pourraient s’associer selon leurs spécialités et domaines d’expertise.
- Une business school pourrait s’associer avec des organismes de formation spécialisés dans l’inter-entreprises.
- Une business school et une branche professionnelle en tension pourraient former à une compétence spécifique comme la fédération de la plasturgie le propose avec le MEDEF.
- On peut également imaginer une business school et des universités s’allier pour répondre à une problématique, des alliances avec l’écosystème des EdTech et autres start-up, la réponse groupée à des appels d’offres.
Ces associations feront sens si les contenus, l’évaluation et la certification sont également au rendez-vous. Il faut personnaliser, industrialiser, automatiser les processus. Au final, même si le salarié s’inscrit au cœur du dispositif, ce dernier doit tenir compte de toutes ces exigences.
Les besoins de formation aux compétences du XXIème siècle sont immenses. J’en ai souvent parlé dans ce blog : coopération, travail collaboratif, analyse critique, transition numérique… La qualification est la base de l’employabilité et le moteur de la croissance.
Exigence et pertinence
Le compte personnel de formation pour rester une belle idée doit normaliser et labelliser les formations avec un risque, celui de devenir trop complexe. Mais comment imaginer que des organismes pourraient proposer l’acquisition de la même compétence pour des volumes horaires variant de 1 à 100 ?
La question de l’adaptation de l’offre à la cible va se reposer. Tout comme cette question taboue et très française de l’utilité d’un cursus pour tel ou tel métier ? Je plaide pour des critères de performance, de pertinence et de rentabilité. Des mots encore trop souvent considérés comme des « gros mots » !
Chaque année, nous découvrons un « dossier » sur la formation professionnelle, des fonds alloués de manière opaque ou détournée de leur objet… Nous n’avons pas le droit et encore moins les moyens de gaspiller cet argent. Le système de la formation professionnelle doit permettre l’accès à l’emploi ou le maintient dans l’emploi. C’est une priorité : faire simple et efficace.