Dernier épisode de la série avec cette contribution (aussi éclairante que brillante) que m’a fait parvenir l’écrivain Michel Dansel :
« Ce n’est, semble-t-il, qu’à partir des années 1960 que les espaces scolaires, essentiellement en milieux urbains, et plus spécialement périurbains, ont fait l’objet d’une conception autre qui allait préfigurer une démarche architecturale novatrice. Les espaces scolaires extérieurs commencèrent par se métamorphoser en créant une approche différente des lieux de savoir. Des espaces verts, des enclaves feuillues, de larges allées contribuèrent à rendre plus acceptables, plus sécurisants et plus accueillants les lycées, les écoles maternelles et primaires, les écoles professionnelles, les grandes écoles, et même les facultés. Ce souci de socialisation se développa tout particulièrement dans des municipalités à dominante ouvrière. Ce fut le cas, notamment, dans certaines communes de la banlieue parisienne. Quant à l’architecture, parfois émancipatoire ou souvent empreinte de modernité, de ces lieux de savoir, tout comme les espaces scolaires intérieurs, ils n’apparurent que quelques décennies plus tard.
Autrement dit, ce sont les espaces scolaires extérieurs qui ont amorcé une ouverture plus sociale et plus humaniste de l’école, donc une conception autre de l’enseignement, ou plus exactement de la relation professeur/élève. La désacralisation de lieux, austères et recroquevillés sur eux-mêmes, a contribué à déverrouiller certains clapets, derrière lesquels se lovaient des esprits dotés de potentialités et d’aptitudes à l’ouverture. La transformation de bon nombre d’espaces scolaires a souvent permis de faire tomber les redoutables garrots de la pensée, générateurs de dogmatisme, d’absolue certitude et de culte de la vérité absolue ! Les espaces scolaires auraient-ils été, selon les cas, les signes avant-coureurs d’un état d’esprit autre qui allait considérablement modifier la cartographie du champ relationnel et socio-éducatif entre l’enseignant et l’élève ?
Les premiers espaces scolaires intérieurs qui subirent de notables aménagements, et sur lesquels soufflèrent les premiers vents de modernité, furent, très certainement, les classes des écoles maternelles, alors que les premiers espaces scolaires extérieurs qui connurent une ouverture, au deux sens du terme, concernèrent prioritairement les universités et les lycées.
Les réfectoires, dans les pensions ou les institutions, les cantines, ou les self-services, sont également à prendre en compte dans le regard que l’on porte sur les espaces scolaires. Autrefois, dans certains établissements, les maîtres, assis à une table séparée, à qui étaient servi un repas différent, déjeunaient tout en coiffant de leur regard autoritaire et pesant les élèves qui osaient à peine chuchoter entre eux ! Fort heureusement, des espaces scolaires autres ont permis de concevoir la relation maîtres/élèves avec un kaléidoscope différent. »
Pour rappel donc, à l’origine de cette série, le numéro de la Revue internationale d’éducation de Sèvres, édité par le Centre international d’études pédagogiques (CIEP) et consacré aux « espaces scolaires » coordonné par Luca Paltrinieri et Maurice Mazalto [http://www.ciep.fr/ries/ries64.php].