L’un de notre credo au CIRPP est que le changement doit être accompagné pour qu’il puisse vraiment avoir lieu. Les équipes enseignantes des écoles de la Chambre de commerce et d’industrie Paris Île-de-France qui souhaitent mettre en place un dispositif pédagogique expérimental et qui sollicitent, pour ce faire, une aide auprès du CIRPP sont donc suivies durant tout le processus par un chercheur-accompgnateur. Son rôle ? Réaliser un diagnostic, apporter un regard extérieur et proposer des pistes, sans jamais toutefois se positionner en tant qu’expert détenteur de la solution miracle. Ce qui suppose de notre côté la mise en place d’outils de supervision. C’est l’objectif associé à nos réunions de recherche qui ponctuent tous les dispositifs : les chercheurs-accompagnateurs s’y retrouvent pour évoquer leurs réflexions, leurs doutes, mais aussi les éventuels conflits auxquels ils ont été confrontés sur le terrain. C’est la définition même de la recherche par le tâtonnement : s’il y a, en amont, contractualisation de la collaboration, la relation évolue au gré des interrogations.
J’aime à dire qu’en tant que chercheurs-accompagnateurs, nous devons être « au-delà des héros ». Dans tous les groupes, notamment dans les entreprises, il y a souvent un individu leader, un « héros », qui arrive à innover et surtout à convaincre les autres de le suivre. Or précisément, le rôle de la recherche est, me semble-t-il, de comprendre ce que dit le héros, de quoi son action est le nom. Le chercheur-accompagnateur doit ainsi se comporter comme un catalyseur : chimiquement neutre, il doit faciliter la réaction, sans pour autant apparaître comme tel dans le produit final. Autrement dit, il s’agit d’être tout à la fois savant, en apportant à la réflexion le support des théories, et maître ignorant, capable d’émerveillement et de surprise.
Et les étudiants dans tout ça ?
Beaucoup de chercheurs-accompagnateurs nouent aussi des relations très riches avec les étudiants, du fait de la position singulière qu’ils occupent vis-à-vis de l’institution. Leur posture de tiers leur permet de jouer le rôle de « tuteur de résilience », pour reprendre la très belle expression de Boris Cyrulnik, et de faire émerger les revendications.
D’une manière générale, je pense qu’on pourrait éduquer tous les élèves à l’accompagnement. Aujourd’hui, les dispositifs de tutorat repose bien trop souvent sur la bonne volonté des uns et des autres. Or la démarche serait certainement plus efficace si elle était reconnue comme un travail en tant que tel nécessitant une véritable formation. On pourrait ainsi imaginer de créer un brevet d’accompagnement un peu à l’image du brevet de secourisme. Ce serait une façon intelligente de valoriser un certain nombre de savoirs sociaux essentiels (comme l’écoute, la capacité à faire et à donner confiance) et pourtant souvent encore complètement absents des dispositifs d’évaluation.
Je pense que ça pourrait aussi être l’objectif de n’importe quel séminaire de rentrée, que de proposer à la fois des ateliers d’écriture pour apprendre à parler de soi (voir billet précédent) et des ateliers sur l’intelligence collective. Il s’agit d’apprendre à être attentif autant à l’obtention des résultats (évaluant l’efficacité du dispositif) qu’à la manière dont ces résultats ont été atteints (mesurant son efficience).