Dans la culture du common knowledge, « hacker » renvoie à cette idée fondamentale de liberté et d’autorisation qui m’est si chère. « Fais les choses, n’attends pas qu’on te donne l’autorisation de les faire » : tel pourrait être le slogan du parfait hacker. D’autant que dans le monde numérique, contrairement à « la vraie vie », on peut tout faire. C’est un monde sans gravité, sans temporalité, qui peut devenir autant le monde de l’insignifiance (Castoriadis) qu’un monde de tous les possibles.
Certains « hackers » commencent d’ailleurs à développer une véritable éthique censée organiser les échanges dans ce monde de la libre circulation des connaissances qu’ils appellent de leurs vœux. Le Manifeste des Barbares (à retrouver ici) porté notamment par l’enseignante multi-cartes et militante Thanh Nghiem me semble constituer une formidable tentative de fixer des règles dans un monde sans règles, à la manière dont le feraient des Robins des bois se mettant au service de tous et garantissant l’expression de chacun. Tels sont les objectifs qu’ils se fixent :
– Stewardship: dépasser le cadre limitant des luttes d’ego, se mettre au service du collectif;
– Jouer, prendre la permission, retrouver un esprit d’enfant pour favoriser l’innovation;
– Véhiculer un état d’esprit optimiste;
– Prendre conscience que l’évolution principale est intérieure;
– Croire en l’homme.
Nous sommes portés par cette cause qui nous transcende, et nous nous engageons à :
– Vivre en paix avec nous mêmes, et en accord avec les principes que nous défendons, afin de favoriser à notre échelle cette évolution positive ;
– Accompagner et soutenir les plus téméraires dans leurs combats au nom de cette cause (compagnons de guilde) ;
– Accompagner nos semblables dans la découverte de leurs capacités, et leur permettre de réaliser leurs propres choix, de manière éclairée (devenir de petits Magellans).
Cette éthique du « hacker » repose sur une logique d’échange symbolique de « don et contre don » : chacun doit grandir à partir de la contribution de l’autre. Ce type de règles me semble important à transmettre à nos étudiants, le prof devenant alors garant du respect de cette éthique. Surtout à l’heure où l’on parle d’inviter des étudiants à « hacker » leur éducation. Cette formule portera ses fruits seulement après une profonde réflexion sur l’éthique de ce « hacking ».
Pingback: Quel pourrait être le visage du campus numérique de demain ? | Parlons pédagogie ! Le blog de François Fourcade