À quand la mort du cahier des charges de formation ?

Tout programme de formation se présente aujourd’hui comme une traduction d’un cahier des charges établi par une direction des ressources humaines, une direction de la formation ou une université d’entreprise. Or cet écrit est très souvent construit de manière top down à partir d’une anticipation des besoins supposés des futurs participants au programme. Dans ces conditions, le cahier des charges se résume à un listing de critères soit disant objectivables et de contraintes techniques. Avec cette approche standardisée de la formation, on est dans le syndrome du marteau cher à Kathleen M. Eisenhardt, à savoir que chaque problème devient un clou sur lequel on tape en espérant le régler. Quant aux réelles problématiques, elles ne sont jamais vraiment abordées.

Pire, le programme de formation quand il ne prend pas suffisamment en compte le contexte de sa mise en œuvre peut entraîner un réel sentiment de frustration. À titre d’exemple, on peut évoquer ce programme centré sur les pratiques managériales qui a été vendu à des responsables pédagogiques d’une école à la recherche d’outils pour animer une équipe d’intervenants extérieurs. Or à défaut d’avoir été pensée au plus proche des besoins des collaborateurs, la formation s’est révélée complètement dés-ajustée à leur réalité quotidienne. Et pourtant, tous attendaient beaucoup de cette formation.

Il est ainsi légitime de se demander à quel moment les participants expriment aujourd’hui réellement un désir de formation singulier? De même qu’il n’est plus à prouver les effets bénéfiques du « renversement » dans la production de connaissances, via par exemple le dispositif de la classe inversée, il serait bénéfique de renverser enfin la manière dont on établit le diagnostic de la demande de formation. Dans cette perspective, les outils technologiques peuvent faciliter la mise en œuvre d’une procédure de co-construction de la formation avec les participants en leur offrant la possibilité d’exprimer leurs attentes concrètes. Le processus pourrait alors être vraiment bottom-up et s’affranchir de tout cahier des charges préétabli.

Un tel retournement de perspective supposerait certainement aussi de réorganiser le marché foisonnant des prestataires. Aujourd’hui, le plus souvent, ce n’est pas le même prestataire qui établit le diagnostic et qui dispense une formation. Tout le système est basé sur de la mass-customisation, c’est-à-dire qu’on essaye de vendre du sur-mesure à partir de modèles standard. Or s’il revenait au même acteur de procéder au diagnostic clinique de la situation et de prendre ensuite en charge la formation, on pourrait espérer être au plus près des besoins des participants. On gagnerait ainsi tout à la fois en pertinence et en coûts de transaction. Tel pourrait être mon plaidoyer en ce début d’année pour que cesse (enfin !) le gâchis des formations mal ajustées.

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