Un petit monde

Complément sur les effectifs à l’Université

Tout d’abord, un bref mot sur les tragiques événements de la semaine passée: je suis profondément ému et je tiens à apporter mes plus sincères condoléances aux familles des victimes, mais je ne m’étendrai pas plus en ces pages sur le sujet. Je considère n’avoir aucune légitimité pour commenter ce qui s’est passé, et encore moins dans ce blog qui se veut le plus factuel, et le moins dans l’émotion, possible.

 

 

Je souhaite ici simplement apporter quelques éléments complémentaires à l‘article précédent, suite à deux suggestions en commentaire. L’une, demandant de regarder les évolutions d’effectifs de 1968 à nos jours, pour mieux cerner peut-être la relation de ces évolutions avec les politiques publiques. L’autre, justement, donnait un lien d’archives de rapports gouvernementaux, permettant de traiter (au moins partiellement) cette question.

Suivent donc l’évolution des personnels enseignants (figure 1), des effectifs étudiants (figure 2), et du taux d’encadrement (figure 3).

Les jeux de données d’une même couleur mais de symboles différents (pleins ou creux) sont pour signaler que les sources d’obtention sont différentes (pour les données pré-2000, il s’agit de rapport DEPP RERS plus anciens que ceux utilisés précédemment). Il y a quelques différences parfois, qui ne semblent pas modifier significativement l’allure des courbes.

Dans la figure 1, il faut signaler avant 2000 la présence d’un corps depuis « disparu » d’enseignants, les maître-assistants titulaires, a priori majoritairement dédiés à l’enseignement (dont le recrutement a cessé en 1984). Sur la figure 1, ne manquent que les professeurs du secondaire, dont l’apparition est simultanée à celle des enseignants non-titulaires et dont la progression est similaire (passage de 3000 à 10000 entre 1980 et 1995, de 10 à 13000 depuis 20 ans).

 

évolution effectif enseignants 1978-2015 2

Figure 1

Les données concernant le nombre d’étudiants sont partielles: je n’en ai pas, contrairement à celles pour les enseignants, trouvées de complètes. Il semble que le nombre d’étudiants à l’Université au milieu des années 90 était très élevé, avant de baisser au début des années 2000 et de repartir fortement à la hausse depuis 5 ans.

Il y a par contre eu un quasi-doublement des étudiants en 15 ans à partir du début des années 80. Quelle en est la cause, je ne sais pas. « Démocratisation » de l’enseignement-supérieur? Cette augmentation drastique n’est pourtant pas en phase avec celle des personnels enseignants, celle-ci ayant plutôt eu lieu pendant la décennie suivante, soit 90-00.

évolution effectif étudiants 1978-2015

Figure 2

Le taux d’encadrement pré-1995 était donc très élevé (supérieur à 1 enseignant pour 20 étudiants). Il me semble également qu’avant 1984, la charge d’enseignement des enseignants-chercheurs était plus faible qu’actuelle (ce qui n’est pas pris en compte dans la figure 3). On peut donc se demander quelles étaient les conditions d’enseignement à l’Université dans les années 80…

évolution taux d encadrement 1980-2015

Figure 3

Commentaires (6)

  1. L.

    Voilà pour les chiffres sur l’augmentation des effectifs étudiants :

    http://www.vie-publique.fr/politiques-publiques/condition-etudiante/etudes-superieures/

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    1. Guillaume Miquelard-Garnier (Auteur de l'article)

      Sinon, une autre référence concernant les vacations est donnée dans le tableau ici http://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/statistiques/47/6/Non_permanents_2013-2014_FINAL_386476.pdf (p.79 et suivantes).

      On compte 95000 vacataires, dont environ 8000 assurent au moins un demi-service, et le reste moins.
      Un petit calcul pour ramener en ETP, en comptant 20HED de moyenne pour les uns et 128HED pour les autres, amène à environ 14000 ETP (ce qui confirme que le rapport IGAENR semble sous-estimer la proportion de vacataires).

      Cela se répartit en 20% pour le droit, 30% pour les LSHS, 20% pour les sciences. La santé n’est pas complètement renseignée et il y a des « vacations non affectées » dans le rapport…

      En ce qui concerne les « non-titulaires » (toujours par opposition aux vacataires, eg les ATER, 1/2 ATER, doctorants moniteurs, PAST etc), on a en ETP 45% pour les sciences, 33% pour les lettres et 22% pour le droit, ce qui est assez bien corrélé à la répartition des enseignants titulaires dans les différentes sections (45% pour les sciences, 27% pour les LSHS et 14% pour le droit et la santé pour les EC; 33% pour les sciences, 50% pour les LSHS, et 15% pour le droit en ce qui concerne les enseignants du secondaire affectés dans le sup).

      Si l’on regarde le ratio « vacataires + non titulaires » versus « enseignants titulaires » en fonction des disciplines et en ETP, on arrive à environ
      36% des enseignements effectués par des non-titulaires ou vacataires en droit (5250 ETP vacataires ou non-titulaires versus 9250 EC + enseignants du secondaire titulaires)
      26% en LSHS (7800 ETP vs 22000)
      20% en Sciences (7500 vs 29500)
      non renseigné en pharma santé.

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  2. Eric

    « Il y a par contre eu un quasi-doublement des étudiants en 15 ans à partir du début des années 80. Quelle en est la cause, je ne sais pas. »

    Sans doute la volonté politique à partir de cette époque d’amener 80% d’une classe d’âge au Bac. CQFD, c’est pas compliqué. Il ne reste maintenant plus qu’à amener tous ces étudiants au niveau doctorat…

    Pour ce qui est des évolutions des effectifs enseignants-chercheurs, on a toujours fonctionné en courant alternatif: on rationne le recrutement pendant des années puis on recrute à tout va (comme au début des années 90). Même dans les périodes fastes, cela n’a jamais compensé l’accroissement des effectifs étudiants.

    Bien cordialement

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    1. Guillaume Miquelard-Garnier (Auteur de l'article)

      Bonjour,

      Il est en effet possible que cette massification de l’enseignement supérieur puisse être corrélée à l’augmentation du taux de succès au baccalauréat: il y a bien quelque chose de ‘brutal’ entre 1980 et 1995. voir par exemple http://enseignement-latin.hypotheses.org/1027 (figure 2)
      Oui, le côté « opposition de phase » ne me surprendrait pas (ne rien faire, puis agir en réaction assez longtemps après etc), tant cela me semble souvent être le cas dans beaucoup d’autres situations.
      Après, c’est un sentiment que je ne peux étayer par des arguments solides, donc j’essaie dans ce blog de m’en tenir au factuel 🙂

      Répondre
  3. Guillaume Miquelard-Garnier (Auteur de l'article)

    Bonjour,

    On me signale que le rapport IGAENR que je n’avais pas réussi à trouver est en fait disponible, non directement dans la base de données de l’IGAENR, mais sur le site du MESR: http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid89116/la-gestion-des-heures-d-enseignement-au-regard-de-la-carte-des-formations-superieures.html

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