Créons des innovateurs ! Soutenons la créativité et l’innovation ! Progressivement, le message commence à se faire entendre en France par un plus grand nombre d’entreprises et d’organismes de formation, même si tout le monde n’a pas attendu aujourd’hui pour s’en préoccuper. Cela est une bonne nouvelle, mais nous n’en sommes qu’au début. Certains pays comme les Etats-Unis, le Japon ou la Corée ont pris de l’avance. L’Union Européenne les talonne de près. A l’échelle hexagonale, le chemin est encore long… mais petit à petit, le fossé se comble.
Un consensus se dégage chez ceux qui se soucient de l’avenir de nos sociétés et qui n’ont de cesse que de le lier au développement de l’économie. Il n’y a plus de temps à perdre,… nous avons absolument besoin de créateurs, d’inventeurs, d’innovateurs ! Les marchés de demain et les activités qui leur sont associées naissent de l’innovation. Ils remplacent progressivement ceux qui les ont précédés. Non seulement de nouveaux métiers apparaissent continuellement, mais d’autres disparaissent pour toujours. Pour ces derniers, il est illusoire de penser qu’ils pourront être préservés. Dures lois que celles de l’évolution !
Pour sortir du marasme économique dans lequel elles sont engluées, les entreprises doivent miser sur la créativité. Il s’agit pour elles d’imaginer de nouveaux produits, services, modes de commercialisation,… mais aussi de nouvelles méthodes d’organisation, de management. Cela est particulièrement urgent dans le domaine du numérique comme le souligne le dernier rapport de l’Institut Montaigne. Les entreprises, les institutions, les organisations au sens le plus large, mais aussi les organismes de formation dont font parties les universités doivent investir massivement dans l’innovation faute de voir s’éloigner le train de la modernité sans elles et se laisser distancer par leurs concurrents, ceux qui auront su anticiper. La dynamique est lancée, bien que tout le monde n’en ait pas encore pris conscience.
A l’échelle d’une société, tout cela se prépare, s’anticipe de génération en génération. Innée chez certains, l’innovation nécessite d’être stimulée (acquise) chez d’autres. Tout le monde n’est pas doté du même capital. Alors puisque cette aptitude à inventer est primordiale, pourquoi ne pas l’enseigner dès l’école ? C’est que préconise Tony Wagner, spécialiste de l’enseignement à Harvard. Dans un ouvrage récent, il s’adresse au monde de l’enseignement et à celui des entreprises. Son livre intitulé Creating Innovators : The making of young people who will change the world (Créer des Innovateurs : former les jeunes qui vont changer le monde) critique le système éducatif américain qui n’arrive pas, selon lui, à enseigner les compétences nécessaires à l’insertion professionnelle ou à la création d’entreprise. Pour lutter contre cela, l’auteur propose des pistes de réflexion sur les moyens à mettre en place pour favoriser l’enseignement de l’innovation dans le système éducatif, le tout à partir d’exemples concrets. Il explore des pistes que les éducateurs, enseignants et parents compris, peuvent suivre pour susciter l’innovation chez les jeunes et les préparer de manière plus efficace à affronter plus tard le monde du travail dans un contexte économique qui sera forcément axé sur la production de nouvelles idées.
Dans nos universités au périmètre large, c’est-à-dire des écoles d’ingénieurs aux facultés en passant par les business schools, les expériences en matière d’enseignement de l’innovation émergent. Par l’innovation pédagogique, on commence à organiser quelques enseignements de manière différente afin de stimuler la créativité des étudiants et non plus à chercher uniquement à leur apporter le savoir. On cherche à développer leurs compétences dans la manière d’aborder une problématique ou de monter un projet. L’interactivité par le travail collaboratif remplace progressivement l’attention et la compréhension en cours. Ce n’est pas chose facile, car il faut changer progressivement les pratiques d’enseignement et donc former à cela les enseignants. Ces derniers qui doivent passer d’une posture de livreur de connaissances à animateur du savoir n’ont pas tous la même réceptivité au changement. A l’avenir, un cours en présentiel ne se fera plus complètement de manière magistral, en utilisant un tableau noir ou un Powerpoint. Il faut dès à présent s’engager dans de nouvelles méthodes de transmission (d’échange) de savoirs. Et comme si tout cela ne suffisait pas, avec l’arrivée des MOOC (Massive Online Open Courses), lancés récemment par les plus grandes universités américaines, les écoles et les facultés sont maintenant invitées à repenser en profondeur la façon dont elles dispensent le savoir et l’adéquation de ce dernier avec les attentes et les exigences du marché du travail. Un mixte intelligent entre le « présentiel » et le « à distance » s’impose à elles.
Dans le monde de l’entreprise, l’innovation peut être source d’oxygène. Elle permet de réfléchir sur ses propres pratiques, sur ses méthodes de travail bien sûr, mais aussi… managériales. Elle pousse à s’interroger sur ses valeurs et sa culture. Cela va de la façon de collaborer (partager ou tout simplement échanger) à celle d’encourager ou pas l’initiative et la créativité. Sur ce dernier point, elle se différencie assez clairement de la démarche qualité et de l’amélioration continue.
Ceci-dit, soyons vigilants. Il ne faut pas chercher à être innovant uniquement pour… être innovant ! Ce n’est pas un phénomène de mode, mais bien une nécessité. L’innovation dans l’entreprise doit nécessairement être réaliste. Elle doit servir à la vision de ses dirigeants, les aidants à définir une stratégie durable et responsable. Elle doit enfin permettre à ceux qui la pratiquent d’atteindre leurs objectifs.
L’innovation est liée tout naturellement à la curiosité. C’est une caractéristique qu’elle partage avec la recherche, elle-même source d’innovation. Pour autant, il n’est pas facile de la promouvoir dans ce domaine car les laboratoires et les équipes de recherche ont un quotidien qui les éloigne souvent d’une dynamique créative. De plus, la course aux classements avec l’exigence de publication à haut niveau les cloisonnent encore davantage dans leur domaine d’expertise. Alors comment créer des chercheurs innovants ? Comment placer l’innovation au cœur de la recherche, un peu plus en amont des réflexions et non plus comme une suite logique des retombées de la recherche fondamentale ? Comment passer de la R&D (recherche et développement) à l’I&R (l’innovation et la recherche) ? Pour cela, il faudra imaginer de nouvelles méthodes d’interaction entre chercheurs de disciplines différentes. Il faudra créer de nouveaux espaces, des lieux qui invitent ces chercheurs à quitter temporairement leurs laboratoires… des lieux qui stimulent la réflexion transdisciplinaire…
A suivre, très certainement dans un prochain billet !
je suis d’avis que la créativité ne peut venir de la course à la publication qui n’intéresse en fin de compte qu’une communauté jalouse de son intellectualisme. Je ne comprends pas d’ailleurs pourquoi les busness school en demandent trop à ce niveau là, alors que la recherche féconde demande sans doute des intuitions, des percés qui viennent souvent des marginaux. Autre élément qui pose question est la course vers les enseignements en anglais comme s’il suffisait de maitriser cette langue pour devenir un innovateur pur jus. On peut innover en maitrisant seulement l’hébreu comme c’est le cas d’Israël, ou encore en parlant seulement l’arabe à l’époque médiévale, ou l’allemand pour nous sortir les géants de la philosophie et de la physique au 19e siècle..
Bref, deux écueils peuvent être relevé : la course à l’anglais et la course à des publications savantes qui ne servent à rien si ce n’est pour faire plaisir au CNU et à l’AERES, etc. Je suis étonné que l’on reste dans la posture de la reproduction sociale , posture qu’avais dénoncé Pierre Bourdieu : il suffit de lire les milliers d’articles en gestion pour se rendre à l’évidence que l’on fait de répéter ce que les autres faisaient (anglosaxons notamment) il y quelques années. Parfois même à la stupéfaction des étudiants, certains ouvrages de gestion sont des pures traductions de l’Américaine au Français: où est la liberté académique, la liberté de pensée tout court. On n’en sortira pas des Bruno Latour ou des Serge Haroche comme ça!
« …il faut créer des innovateurs ! »
Cela me fait irrésistiblement penser à un dessin de la revue satirique Punch. Ce dessin, publié dans les années 70 si ma mémoire est bonne, montrait un groupe de hippies en pleine contemplation, et l’un deux sort sa montre et dit « Il est l’heure d’être spontané ».
Je ne crois pas que le problème soit de sortir des Bruno Latour, mais plutôt de laisser vivre tous les petits Bruno Latour qui naissent un peu partout, et même ceux qui auraient moins de talent ou moins de rage d’exister. Du coup, rien de nouveau, il faut juste ne pas assassiner les Mozart.
Merci Olivier, j’avoue que le dessin m’intéresse. Si vous pouviez me l’envoyer ?… cela me ferait plaisir. Sinon, je suis d’accord avec votre remarque. Faisons en sorte à la fois de laisser les innovateurs se révéler par eux-même (ils le font déjà très bien sans l’aide de personne) et d’aider les autres à empreinter cette voie si souvent semée d’embûches (c’est dans ce cas où nous avons à progresser). Cordialement, JC2
Je n’ai plus ce dessin qu’en mémoire, mais j’ai vu qu’il existe des archives de Punch Magazine.
il ne faut pas assassiner les mozart , mais comment ? Il faut peut être aller au bout du raisonnement en faisant en sorte que certaines pratiques que tout le monde dénonce en catimini soient revues en fond en comble. J’ai indiqué dans le commentaire précédent, et tout les historiens de sciences le savent, les découvertes, les inventions et les innovations sont le fait des créatifs marginaux aux esprits libres. On ne peut donc pas évacuer les pratiques institutionnalisées qui polluent la liberté de pensée!
Tous les historiens des sciences devraient le savoir, il y a des phases de science normale, pas vraiment contestataires et très institutionnalisées dont l’objectif est juste de faire mieux : ex. connaître mieux la charge de l’électron, compléter une classification. Et il y a des phases de révolution durant lesquelles des esprit plus libres, moins dans le sérail, sentent le besoin de faire autrement : ex. inventer une nouvelle classification, imaginer que la charge électrique est portée par un élément de charge élémentaire, toujours la même.
Les deux phases sont utiles, et les institutions sont utiles à la première, et ne peuvent pas grand chose pour la seconde. On le sait, et il faudrait juste faire en sorte qu’elles ne nuisent pas. Et là je suis d’accord que ce n’est pas exactement le chemin pris avec les évaluations normalisantes et soutien à la recherche de plus en plus acrobatique.
Ces lieux existent déjà. Ils vont des tiers-lieux de type Cantine aux IRT Instituts des Recherche Technologique. Ils passent aussi par des lieux/rencontres éphémères, comme par exemple Museomix : http://www.museomix.com/ .
Ce n’est pas tant les lieux qu’il faut créer, que les moyens qu’il faut trouver pour changer les mentalités et faire sortir les chercheurs et les thésards de leurs labos. Et les étudiants et leurs professeurs de leurs classes. Et les ados et leurs profs de leur lycées. etc.
Cela me fait un peu penser à Xavier Niel qui innove sans cesse et qui a financé une nouvelle école justement destinée à créer des « innovateurs » dans le domaine du web.
Certaines choses sont faciles à faire dès le plus jeune âge. Laissons les enfants jouer, invitons les à bricoler, fabriquer leurs trèsors dont ils sont si fiers de nous montrer comment ça marche!
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