De la créativité à l'innovation

Open Science et Codesign,… vers de nouvelles pratiques pour une recherche mieux partagée !

Texte complet sous PDF avec illustrations à télécharger sur : Open science et codesign au Ouishare Fest

A l’occasion du « OUISHARE Fest » organisé à Paris (Parc de la Villette) du 5 au 7 mai 2014 sur la thématique « The Age of Communities », Jean-Charles CAILLIEZ (Ecole des Doctorants) et Célya GRUSON-DANIEL (Hack Your PhD) ont co-animé (in English, isn’t it !) un mini-atelier de codesign lors d’un workshop consacré à l’économie collaborative et ses relations avec la recherche. Officiellement, un Platform Design Workshop : « Building a global collaborative economy research ecosystem relying on open science and codesign methodologies ». Après une succession de témoignages provenant du monde de l’entreprise ou de la recherche (plus ou moins académique), les participants se sont répartis en quatre ateliers de dix à douze personnes, dont celui de HYPhD et ED2. Objectif : formuler une problématique et tenter d’y répondre (rien d’original !). Thématique : les pratiques de recherche et leurs interactions avec l’open science et le codesign (moins évident !). Le décor était alors planté et les hémisphères allaient pouvoir fumer….

Ouishare Plan

Au bout de quelques minutes d’échanges et de discussions, une question est formulée : « En quoi les méthodes de travail collaboratif issues de l’intelligence collective et le phénomène de l’open science peuvent-ils transformer les pratiques de recherche ? ». La méthode choisie est celle du brainstorming, tout en remplissant une feuille de papier format A0 de nos principales réflexions, dont celles –ci :

Calls for fundings (competitive or collaborative) – Transparency – Create a network : l’open science et notamment l’open data devraient permettre de favoriser la mise en réseau des informations et de créer des groupes de chercheurs et/ou d’utilisateurs (dont les entrepreneurs) capables de répondre ensemble à des appels d’offres. Un décloisonnement des mondes de la recherche et de l’entreprise pouvant ainsi mieux s’articuler autour de projets communs. Le mode d’interaction collaboratif (méthodes de codesign) peut ainsi compléter (voire contrecarrer !) celui de la pure compétition. On passe ainsi des pure actors aux pure partners. Cela pourrait se faire avec une plus grande transparence, ne serait-ce que pour mettre à niveau égal de connaissance les parties prenantes et les financeurs (dont les citoyens par leurs impôts).

Crowd evaluation : who has the background to evaluate ? Pourquoi ne pas imaginer avec l’open peer review une évaluation complémentaire de celle des pairs traditionnels (qui sont les autres chercheurs) ? Une évaluation par les citoyens, ceux-ci donnant leur avis sur les travaux de recherche et leurs résultats. Ce ne serait sans doute pas une mauvaise chose. Bien sûr, tout le monde ne possède pas le « background » nécessaire pour comprendre le fond d’une recherche, ni argumenter en positif ou négatif sur la validité des résultats, mais personne ne parle de remplacer les comités d’évaluation avec reviewers compétents par un referendum. Il s’agit juste d’ouvrir la porte à des avis extérieurs (de personnes à compétences inférieures, sans doute, mais à égalité de dignité). On pourrait imaginer par exemple de recueillir des avis en économie, éthique, droit ou sciences humaines sur des travaux de recherche en sciences et technologies… et par de « simples » citoyens (internautes). Dans une économie de plus en plus participative, quoi d’anormal ?

Applicability of research questions – Bottom up ways of defining research questions. Qui participe au choix des thématiques de recherche ? Qui les finance ? Qui les réalise ?  Qui se préoccupe de leurs domaines d’application à courts, moyens et longs termes ? L’open science nous donne l’opportunité de réfléchir ensemble sur les applications possibles de certaines découvertes en recherche, voire de les anticiper au moment de la construction des projets. Pourquoi n’y impliquer alors que les acteurs de cette recherche et ne pas bénéficier, bien plus en amont des réflexions, d’avis d’usagers ou de contributeurs. En cela, les méthodologies et les outils du travail collaboratif (codesign ou autres) peuvent nous aider à faire émerger des idées nouvelles, transdisciplinaires, et bien souvent plus innovantes que celles obtenues par les voies classiques de la réflexion.    

Start-ups and labs : create more values – Collaborative workshops – Transdisciplinatory research. Comment créer de nouvelles activités économiques qui utilisent les fruits de la recherche et du développement, et qui créent de nouveaux gisements de valeurs ? Sans doute, les méthodes de travail transdisciplinaires peuvent aider à cela. Elles nécessitent des méthodes et des outils adaptés car il n’est pas facile de travailler ensemble (coproduire) avec des personnes aux connaissances, domaines d’expertises, expériences et compétences, mais aussi des langages aussi différents. De nouveaux axes de recherches, davantage transdisciplinaires (interdisciplinaires, co-disciplinaires) que multi- ou pluridisciplinaires devraient pouvoir émerger de ces nouvelles pratiques. Pour cela, le monde de l’open science, via l’open innovation (dont le crowdsourcing), peut apporter sa contribution. Il ne s’agit pas que de méthodes, mais aussi d’un environnement propice à la collaboration la plus ouverte.

Research of methodologies – Impact – Reflexivity. Les méthodologies de travail collaboratif sont  efficaces. Les utiliser est important pour susciter l’interdisciplinarité, mais pas seulement. On peut aussi les appliquer dans n’importe quel secteur de recherche pour créer de nouveaux projets. Elles nécessitent bien sûr qu’on laisse aussi du temps à la réflexivité et aux mesures de l’impact de ce que produit la recherche sur les usages. On notera que sur le plan des outils, l’utilisation d’imprimantes 3D, présentes sur un stand en annexe du workshop, permet de visualiser les objets issus de ces réflexions et passer ainsi de leur représentation en 2D à leur existence (même  sous forme de prototypes).

Common data base and platform : issue of privacy. Le développement de nouvelles plateformes (jusqu’au big data) et la disponibilité des ressources sont des enjeux fondamentaux pour les acteurs de la recherche et leurs parties prenantes. Il convient de trouver de nouveaux espaces, plutôt numérisés, pour mettre à disposition « gratuite » (pour rendre accessible à tous) les informations issues de la recherche qui puissent être utilisées par les chercheurs et leurs équipes de recherche. Quid de la propriété intellectuelle, des brevets et des licences ? Comment imaginer de nouveaux modes de protection de ces données qui soient davantage participatifs et non plus au service de grands monopoles ? La question reste posée.       

Facilitation by scientific journalism to citizen and companies : quality ? Il est important de continuer à diffuser les connaissances issues de travaux de recherche et par tous les moyens possibles. Cela doit notamment se faire en vulgarisant, de manière à contribuer à l’éducation de tous les citoyens et de leurs organisations, qu’elles soient privées ou publiques. De nouvelles méthodes de diffusion de ces informations et connaissances, peuvent être issues du journalisme scientifique. Elles doivent être construites. Cela peut se concevoir comme cela se fait dans le domaine de l’innovation pédagogique. Comment transformer alors le jargon scientifique en termes assimilables par les non spécialistes tout en contrôlant la véracité (la qualité) de ce qui est transmis ? L’économie de la connaissance doit faire partie aussi de l’économie participative.

Open Science & Codesign (from codesign to co-search). Share skills & share informations. Finalement, le monde de l’open science et les méthodologies du travail collaboratif semblent aller de pair. Il s’agit pour notre société de favoriser le transfert des connaissances tout en favorisant l’interdisciplinarité. L’idéal, ou tout simplement l’évolution naturelle, serait alors de passer du codesign au cosearch ! Comment apprendre à chercher ensemble et de manière beaucoup plus interactive ? Comment partager à la fois les fruits de nos recherches, mais aussi les compétences qui nous ont permis de les produire ? Des questions qui pourraient amener HYPhD et l’ED2 à imaginer ensemble un « Share your  PhD » ? A creuser… 

Building the university of the future. Parmi les tables rondes ayant fait suite à ce collaborative workshop, l’une d’entre elles a évoqué une problématique en lien direct avec la réflexion sur les nouvelles pratiques de recherche. Il s’agit de la même question, mais cette fois-ci déplacée sur le terrain de l’éducation. Qu’en est-il des nouvelles méthodes d’enseignement ? Comment imaginer l’innovation pédagogique de manière à ce qu’elle réponde davantage aux aspirations des apprenants et ceci dans notre période post-moderne ? Les questions sont posées au début de la table ronde, intitulée : « Building the university of the future » et organisée de manière originale dans les cales d’une péniche transformée en bar et salle de spectacle. Quel accès à la formation ?… à l’éducation ? Est-il encore nécessaire d’aller à l’école ?  Quel format pour le système éducatif ? Quid de l’open education ? Qu’en est-il du développement des compétences et de l’utilisation de nouveaux outils ? Peut-on codesigner sa propre éducation ? Quelle nouvelle université pour demain ?  

Parmi les réflexions et remarques les plus intéressantes, auxquelles HYPhD a apporté sa contribution, on notera (en vrac et sans ordre d’importance) : On devrait donner aujourd’hui le pouvoir aux étudiants et sortir des méthodes d’enseignement purement académiques – on pourrait imaginer de nouvelles méthodes pédagogiques, davantage participatives, qui soient créées par des étudiants (apprenants) pour des étudiants – les universités (facultés, écoles d’ingénieurs, comme celles de business et de management) devraient se poser les mêmes questions – il existe déjà des méthodologies et des outils innovants qui permettent cela – les mères de familles comme leurs enfants pourraient retourner à l’école (à l’université) ou pouvoir étudier chez elles (home school) – les MOOC (Massive Open Online Courses) devront s’ouvrir davantage et se démocratiser, car ils ne sont pas si ouverts que cela – les contenus des MOOC sont accessibles, mais cela est très rarement le cas pour leurs ressources (non partagées) – dans le monde de l’open, les ressources sont placées sous des licences ouvertes qui permettent leur réutilisation – dans le monde des MOOC (Coursera et EdX par exemple), les ressources sont sous des copyrights et ne sont donc pas réutilisables – pourra-t-on imaginer le futur des écoles de business et de management ? Ce sont des « Ali Baba caves » : pleines de ressources et pour 50% d’étudiants étrangers ; mais il n’y a pas vraiment de feed-back, ni de collaborations réelles avec les professeurs – on est loin, très souvent, du mode de conversation et de réflexion des disciples de Socrate – le monde de l’open est souvent une question d’élite, un « entre soi » ! – Ils faut ouvrir les murs des établissements d’enseignement et de recherche (open the schools and break the walls) – quelle vision de l’éducation pour le futur ? A learning center for everybody ? – la séparation des générations n’est pas une bonne chose en éducation ; il faut mélanger les âges ! – on devrait permettre aux retraités de réintégrer le monde de l’éducation, ce qui permettrait de pouvoir profiter de leur expérience et de la partager avec eux – au Portugal, par exemple, il existe des méthodes d’apprentissage dans lesquelles les projets menés par les étudiants permettent de recherche les compétences attendues – au Brésil, les non-scolarisés apprennent à survivre en s’adaptant et donc en développant leurs compétences (cela développe leur sens de la liberté, contrairement à l’école). Anyway, ceux qui ne vont pas à l’école finissent souvent en prison – on devrait organiser des réunions sur les MOOC et apprendre ainsi comment les utiliser – il existe des « tiers-lieux » en France où l’on peut apprendre des choses différentes qu’à l’école ou à l’université : pourquoi ne pas les explorer davantage ? – There is so many different ways to learn ; we need to reinvent school ! – au retour de l’école, certains élèves ne savent plus quoi faire… ils s’ennuient comme certains retraités ; il faut les aider à explorer de nouvelles passions ! – parmi les futurs de l’éducation, on notera : l’innovation – la créativité – la transdisciplinarité – l’entrepreneuriat –le co-working – les universités dans la ville (comme « Sex in the city ») – les interactions avec la société (avec la ville) – l’organisation de projets (un endroit où les gens étudient) – le social learning – l’Homme au centre de ces projets (social skills) –

Pour en savoir plus, retrouvez les messages sous Twitter avec #osfst14

Note de Jean-Charles Cailliez, 15 mai 2014

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