De la créativité à l'innovation

Classe renversée et licence inversée,… la faculté d’innover ! (Partie 2)

La licence inversée en droit

Objectifs de la licence en mode OWOC

La méthode de licence inversée, telle que nous la menons depuis deux ans, est une approche qui cherche à optimiser l’acquisition des connaissances des étudiants en fonction de leur propre mode d’apprentissage. Elle leur propose de travailler les matières fondamentales par thèmes, chacun d’entre eux n’étant développés que sur une seule et même semaine. C’est l’approche OWOC (« one week, one course »). La théorie est couplée à la méthodologie et à la mise en pratique par le biais de séances de travaux encadrés. Le découpage de la semaine est construit pour permettre à l’étudiant d’avoir le temps de passer d’un apprentissage en surface (réalisé par la lecture d’un pré-read) à un apprentissage en profondeur (qui donne ensuite du sens à la connaissance acquise). Ce mode d’apprentissage doit être déployé progressivement sur tous les cursus de la première année de licence aux masters. Aujourd’hui, engagé en L1, L2 et M1, il s’appliquera dès l’année prochaine à plus de 1300 étudiants.

droit

A chaque cours, sa semaine !

La licence inversée en droit, à ce jour unique en France, est innovante pour plusieurs raisons. Elle met l’accent sur le rôle de l’étudiant dans sa propre formation, lui permettant de se projeter vers son objectif final à savoir son insertion professionnelle et sa place dans la société. Elle ouvre son esprit à des expériences diverses de recherche, davantage accès sur le monde professionnel. Tout ceci suppose que les étudiants soient bien préparés à cette nouvelle forme de pédagogie. C’est pourquoi 3 semaines sont programmées en début de semestre pour les préparer, pour qu’une transition s’opère entre les méthodes qu’ils ont utilisées au lycée et celles qui les attendent dans ce nouveau cursus inversé. Cela se fait par des séances de travail en groupes de 25 étudiants sur l’initiation à l’utilisation des outils juridiques, sur les méthodes d’apprentissages (« apprendre à apprendre »), sur des « affaires réelles » dans lesquelles les enseignants leur montrent à partir d’articles de journaux, que différents éléments sont pris en compte dans l’application du droit (le droit, les contextes économique, sociologique, politique…). Il est également proposé aux étudiants d’améliorer leurs compétences en orthographe, grammaire… afin d’obtenir une certification qui est aujourd’hui considérée par certaines entreprises comme un élément important dans leurs programmes de recrutement. Les étudiants sont également formés à l’utilisation des ressources de la bibliothèque numérique en réseau grâce à un serious game qu’ils peuvent utiliser depuis la rentrée 2015-2016.

La semaine de chaque année d’enseignement est organisée de la manière suivante. La première journée est consacrée au cours fondamentaux. Chaque enseignement est scindé en 9 thèmes préparés par l’enseignant en charge de la matière et en corrélation avec les programmes nationaux. Pour chacun d’entre eux, l’enseignant prépare un document (le pré-read). Ce document peut correspondre au cours de l’enseignant, à un chapitre d’un manuel ou à une consultation d’un site internet. Il peut renvoyer à d’autres documents à lire ou à des vidéos à consulter. Lors du face à face d’une durée de trois heures avec l’enseignant en amphi, les étudiants doivent avoir lu le document proposé. L’enseignant vérifie qu’ils ont lu et compris ces documents par différents moyens, notamment par la mise en place de quizz avec des questions ciblées. Celles-ci permettent à l’intervenant de réagir sur les réponses proposées par les étudiants et ainsi de préciser les points qui posent problèmes. Ce document est un point de départ dans la discussion qui doit s’instaurer sur le thème proposé et qui doit permettre d’aller au-delà des apparences. L’enseignant doit conduire ses étudiants vers une réflexion en les accompagnant sans leur donner tout de suite les réponses aux questions qu’ils posent. C’est l’étudiant qui construit son savoir par son propre questionnement et les réponses qu’il y apporte ou que les autres (l’enseignant et les étudiants) lui donnent. Cette phase d’interactivité permet de développer la responsabilité et l’autonomie des étudiants puisqu’ils sont tenus de comprendre et d’apprendre les fondamentaux avant les cours, ceux-ci servant de lieux d’échange. L’enseignant explique les notions non comprises. Il donne des exemples et fixe les objectifs d’apprentissage (savoirs/compétences/savoir-faire…).

La méthode d’enseignement change fondamentalement. L’enseignant en amphi n’est plus celui qui dispense le savoir, mais celui qui lui donne du sens, qui explique son utilité, sa pertinence et qui crée du lien pour ce savoir. Une même règle peut avoir des implications dans différents domaines du droit et l’enseignant doit montrer ces implications et les expliquer. Les deux journées suivantes sont consacrées à l’ouverture d’esprit de l’étudiant. Il travaille sur la culture générale organisée en humanités, sur les langues, sur des matières optionnelles. Il peut également préparer son parcours professionnel futur avec des temps spécialement consacrés à la professionnalisation. Les deux dernières journées de la semaine sont consacrées aux travaux encadrés. Ce sont des séances de 3 heures au cours desquelles les étudiants vont, avec l’aide d’intervenants, travailler à l’utilisation des données récoltées lors de la séance de face à face en amphi. Ces travaux sont encadrés, et non plus dirigés, car l’objectif est d’accompagner l’étudiant dans sa réflexion et non pas de lui imposer un mode de réflexion. Ces séances de Travaux Encadrés doivent être le lieu d’échanges mais surtout cette fois le lieu de concrétisation de l’information. Il faut ici donner du sens aux connaissances et mettre en place des apprentissages spécifiques pour les futurs juristes que seront ces étudiants. Il n’est donc pas question d’abandonner les exercices classiques du droit (commentaires d’arrêts, dissertation, consultations et commentaires d’articles de loi …), mais il faut les travailler différemment. Le tutorat a été renforcé à cet effet pour conduire nos étudiants vers l’excellence. Les évaluations des étudiants sont diversifiées : travaux de groupes / examens écrits / examens oraux (exposés / restitutions / utilisation des médias) ; ce qui permet d’évaluer diverses compétences, savoir-faire et connaissances. Un impératif doit être respecté : ces évaluations doivent être en conformité avec les objectifs d’apprentissage fixés par l’enseignant. La licence inversée suppose une méthode d’évaluation différente pour que l’enseignement puisse véritablement s’organiser autour de d’apprentissage de l’étudiant. Celle-ci doit permettre de vérifier que les objectifs visés sont atteints et de mesurer que les étudiants sont capables de développer les compétences requises. Plusieurs méthodes sont envisagées pour cette évaluation. Elles sont expliquées aux étudiants dès le début de chaque semestre par l’enseignant en charge de la matière, qui leur précise leur utilité. Certaines de ces évaluations sont réalisées dans une perspective de développement des apprentissages, d’autres gardent leur fonction de contrôle de connaissances. Enfin, un dispositif d’évaluation a été intégré qui permet un apprentissage en profondeur en imposant deux « galops d’essai » (devoirs sur table) par semestre, ce qui oblige les étudiants à s’approprier les connaissances de manière régulière et à pouvoir les développer tout au long du semestre.

Conclusions

Ces méthodes de pédagogie inversée, qu’elles soient expérimentée au niveau d’un cours spécifique (la classe renversée) ou d’un parcours complet (la licence inversée) permettent d’avoir un contact beaucoup plus interactif avec les étudiants. Elles permettent de mieux découvrir leur potentiel en matière de réflexion, de collaboration et d’implication dans une nouvelle démarche, chose impossible à déceler dans un enseignement académique. La stratégie pédagogique est développée autour de cette volonté de conduire les étudiants à se questionner, à ne pas considérer qu’il n’y ait qu’une seule solution possible à une question posée. L’enseignant n’est plus là pour diriger les étudiants, mais pour les accompagner dans leur apprentissage. Les équipes pédagogiques travaillent en collaboration encore plus étroite. Elles se réunissent de façon plus régulière et plus resserrée dans le temps. L’adaptation de l’enseignant à l’apprentissage de l’étudiant suppose une certaine réactivité et le fait de pouvoir s’adapter à la réussite des objectifs fixés. L’étudiant devient donc l’acteur principal de ce projet. Il doit s’impliquer et comprendre ce qu’il fait, plutôt que d’apprendre mécaniquement ce que dit l’enseignant. Finalement, c’est une méthode qui permet à l’enseignant de participer pleinement à un travail d’équipe avec ses étudiants, le transformant davantage en manager de projet qu’en expert scientifique.

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