Doit-on apprendre aux étudiants à gérer leurs émotions? (2/3)

Ce billet est le second sur le thème de l’apprentissage de la gestion émotionnelle pour des élèves ou étudiants.  J’aimerais traiter ici du point de vue des enseignants, avant de traiter dans un prochain billet celui des établissements.

Agir en classe

Dans les classes, un enseignant va de fait gérer l’état émotionnel de sa classe ou de ses élèves. Que ce soit quand on encourage un étudiant qui n’a pas compris, quand les étudiants coopèrent, quand on canalise un groupe d’étudiants dont le projet se disperse, ou simplement quand on construit un cours en gérant les temps de frustration et de détente, l’enseignant s’appuie sur le ressenti émotionnel de l’apprenant. Mais puisque la régulation émotionnelle est importante pour les apprentissages, peut-on aider l’apprenant à reconnaître seul ses émotions, et à lever les blocages s’ils existent?

Nombreux sont les enseignants qui vont intuitivement mettre en place des choses simples, comme quelques minutes de respiration silencieuse en classe pour aider leurs élèves à se calmer et se concentrer. Aider un enfant à se calmer en jouant sur la respiration n’est pas anodin. En effet, dans l’erreur de Descartes, Antonio Damasio explique que les émotions se vivent dans le corps par une modification d’un certain nombre de paramètres physiologiques (rythme cardiaque, transpiration, respiration, … ). La respiration est l’un des rares paramètres qu’il est facile de contrôler facilement pour changer d’état émotionnel, ce qui explique sa prévalence dans les techniques de gestion des émotions (cf. cette conférence de Dara Ghahremani ‘23 min).

Un certain nombre d’études ont formalisé cette pratique intuitive, en prouvant que des exercices de pleine conscience (comme prendre 10 minutes par jour pour respirer calmement et être à l’écoute de ses émotions) permet de réduire la violence à l’école dans les quartiers difficiles tout comme d’améliorer la réussite scolaire.

Pour autant, il n’est pas forcément aisé d’appliquer ces méthodes en classe.

Plusieurs articles comme ceux du journal The Atlantic (ici et ) relatent les avantages mais aussi les réticences d’une pratique méditative à l’école. Les réticences proviennent aussi bien des étudiants (bien que les étudiants les plus réticents semblent être ceux qui en bénéficient le plus) que des parents (qui doutent du fondement laïc de l’exercice).

À cela peut s’ajouter la méconnaissance des enseignants sur les façons de procéder existantes et validées. L’année dernière, nous avions envie de proposer aux étudiants qui le souhaitaient de faire 15 minutes de méditation pendant la pause déjeuner. Mais faute de connaissances suffisantes sur le sujet, l’initiative est tombée à l’eau. Une séance de relaxation est proposée à nos étudiants toutes les semaines, et une dizaine d’entre eux se sont inscrits. Nous sommes convaincus du bienfait de cette activité et aurions souhaité que tous les étudiants s’en saisissent. Bien qu’adultes, je pense que nos étudiants ne comprennent pas toujours comment une pratique de relaxation peut être reliée à leur agitation en classe, leur capacité à se concentrer, leur réussite aux examens ou la qualité de leurs relations interpersonnelles.

Les outils existants ne peuvent donc être exploités que si les enseignants sont accompagnés dans leur mise en place.

Le prochain billet parlera des perspectives que ces questions ouvrent aux établissements intéressés par le sujet.

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N’étant pas spécialiste du sujet, j’ai essayé, dans la mesure du possible, de documenter ces billets en citant et variant mes sources. Malgré mes efforts, ces billets restent bien loin d’un bilan exhaustif sur le sujet et ne sont qu’une invitation à poursuivre la réflexion et les débats.

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