Durant notre première année d’enseignement, mon collègue Jean Lécureux et moi-même, qui enseignions ensemble les mathématiques au premier semestre de L1, faisions ce que la plupart des gens qui enseignent en parallèle font : nous nous mettions d’accord sur le contenu à étudier r à chaque séance, puis nous essayions de couvrir à peu près le même contenu avec les mêmes activités, chacun, pendant notre séance.
Très vite, nous nous sommes rendus compte du paradoxe de la situation : nous avions des étudiants aux besoins très différents, et bien qu’étant deux, nous proposions un contenu et un format unique pour leur apprentissage.
Par chance, nos créneaux étaient programmés en même temps. Nous avons commencé à faire ce que nous avons appelé du “TD différenciés”. Dans ce format, puisqu’il y a deux enseignants, au lieu de faire deux fois la même chose, nous proposons deux activités et/ou contenus différents. Les étudiants peuvent ensuite choisir librement d’aller dans une classe ou l’autre au début du cours. Les deux formats au choix pour les étudiants pouvaient être multiples : j’écoute une explication au tableau (choix 1) ou je cherche des exercices en autonomie et un enseignant répond à mes questions si j’en ai (choix 2); je commence par l’explication puis je fais des exercices (choix 1) ou je cherche des exercices puis j’écoute des explications (choix 2); ou encore j’apprends les explications en écoutant un cours structuré (choix 1) ou je fais une activité de groupe pour assimiler les notions (choix 2)…
Après avoir proposé ces variations de manière ponctuelle pendant un ou deux ans, Jean Lécureux, Tony Février, l’enseignant qui nous a rejoint l’année suivante, et moi avons fini par stabiliser notre offre en proposant à tous nos cours le même choix : dans une salle, un enseignant fait une explication au tableau sur la notion du cours d’aujourd’hui (choix 1) tandis que dans l’autre, les étudiants travaillent en autonomie sur le contenu du cours qui les intéresse, un enseignant étant là pour répondre aux questions (choix 2). L’important, pour l’enseignant, est de choisir un format adapté à son contexte d’enseignement. Dans notre cas, cela s’est fait naturellement, nous avions déjà deux cours programmés en parallèle dans deux salles adjacentes et cela ne demandait pas beaucoup plus de travail aux enseignants (une fois les feuilles de TDs avec solutions préparées).
Donner le choix aux étudiants augmente leur sentiment d’auto-détermination. Sans surprise pour ceux qui étudient la motivation, les étudiants sont ainsi plus motivés et plus engagés dans l’activité qu’ils ont choisie.
Dans notre expérience, certains étudiants restent toujours dans leur format préféré, mais la plupart d’entre eux changent en fonction du sujet abordé.
Plus précisément, il y a en général ⅓ d’étudiants dans un format et ⅔ dans l’autre, les proportions variant en fonction de la nouveauté et de la difficulté des sujets. Ce que je trouve aussi très confortable, c’est que l’enseignant aussi peut choisir un format d’enseignement dans lequel il se sent bien et qui lui donne du plaisir à enseigner. Il n’y a pas que les étudiants qui y gagnent !
Ce mode de fonctionnement pose quelques défis qui demandent un peu d’anticipation, en particulier en terme de logistique (programmer les cours en parallèle, si possible dans des salles proches). Mais quel bonheur de pouvoir proposer des activités différenciées dans lesquelles chaque étudiant peut trouver un format qui répond à son besoin !
Cet exemple s’appuie sur la diversité des enseignants. Pourquoi ne pas profiter de cet atout pour gérer l’hétérogénéité des classes ?
Si vous avez déjà enseigné à plusieurs, en proposant chacun des activités différentes entre lesquelles les étudiants pouvaient choisir à tout moment, n’hésitez pas à partager votre expérience dans les commentaires !
PS/ merci à Julien Bobroff pour sa venue dans notre classe et la création des photos et de la vidéo 🙂