La phase d’admission Parcoursup vient d’ouvrir, et durera plus de 3 mois, pendant lesquels les candidats seront appelés à rejoindre l’enseignement supérieur. A l’issue de la procédure, certains n’y trouveront pas de place. Mais pourquoi ces places sont-elles en nombre limité ? Explorons ensemble cette question en jouant à Evil Genius 2.

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Comprendre les places Parcoursup en regardant les places de Master
Dans le cadre de la publication du rapport sur l’évaluation de la loi n° 2016-1828 du 23 décembre 2016 portant adaptation du deuxième cycle de l’enseignement supérieur français au système Licence‑Master-Doctorat, la rapporteuse Sylvie Charrière et le rapporteur Philippe Berta, députés LREM et Modem de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale discutent des limites de places en Master :
https://twitter.com/SylvieCharriere/status/1395025645529337859
Sylvie Charrière : « La question du partenariat avec le mode économique dans la définition des diplômes aussi est essentielle et je pense qu’un travail a commencé à être entamé au niveau du ministère pour voilà rendre au diplôme peut-être une coloration et une possibilité d’insertion plus favorable. Dans certains cursus les jeunes ne pouvant poursuivre en master doivent redoubler en Licence Professionnelle pour pouvoir espérer s’insérer dans le monde du travail. »
Philippe Berta : « Force est de constater que, en tout cas pour celles que je connais, les Licences Professionnelles -qui est finalement un outil assez récent ça date de mémoire du tout début des années des années 2000- rencontrent un vrai succès en terme d’insertion. Ça prouve que finalement il y a une appétence pour le Bac+3 sur le marché du travail. Donc il faudrait effectivement -moi j’appelle ça une espèce de version parachute des L3 Générales- donner un minimum de professionnalisation en L3 Générale qui permet effectivement si besoin est pour des raisons personnelles, des raisons matérielles, des choix culture que le futur licence générale, qui a obtenu sa Licence Générale, puisse s’insérer sur le marché de l’emploi. »
Commentaire : Face à la pénurie de places en Master, les députés ne cherchent pas augmenter les places en Master, mais à les substituer par d’autres places, en Licence Pro (LP), donc d’un niveau de qualification moindre. Ils cherchent donc explicitement un moyen de limiter le niveau de qualification de la tranche d’âge. On peut y voir une volonté de restratification sociale. Cette volonté n’est pas discutée ouvertement, mais s’appuie sur un raisonnement contestable : les diplômés de LP ayant une bonne insertion professionnelle, augmenter les effectifs LP augmentera l’insertion professionnelle.
Ce raisonnement ne tient que si les LP actuelles ne jouent pas pleinement leur rôle, en clair s’il reste des emplois non pourvus sur le secteur de formation des LP. Or, rien n’indique que ce soit le cas. D’abord, les taux d’insertion pro des LP sont hauts, mais sans indiquer un plein emploi stable ou dans les catégories d’emplois adaptées.
Ensuite, selon Pôle emploi, les LP et Masters ne sont pas sur les secteurs présentant des difficultés de recrutement :
Tout indique donc qu’augmenter les effectifs en LP ne fera que diminuer l’insertion professionnelle de cette formation. Cette stratégie fait donc sens seulement dans une situation où il faudrait choisir entre la baisse de l’insertion pro des Masters et la baisse de l’insertion pro des LP. Mis au pied du mur, face à une pénurie croissante d’emplois (notamment dûe à la crise actuelle), on pourrait décider de préserver la valeur des Masters en terme d’insersion pro, éventuellement au détriment de la valeur des autres formations ayant actuellement de bonnes performances (LP et DUT/BUT).
Ce constat éclaire de façon différente le discours dominant sur l’orientation dans les flux Bac-3/Bac+3, qui se limite dans l’espace public aux « désirs et ambitions » des jeunes. On peut douter de la pertinence, sinon de la sincérité, de ce discours dès lors qu’on considère des choses aussi sérieuses que la qualification des générations entrants dans l’appareil économique national.
Pour aller plus loin…
[#VeilleESR #Parcoursup] Rapport d’information sur l’évaluation de la loi n° 2016-1828 du 23 décembre 2016 portant adaptation du deuxième cycle de l’enseignement supérieur français au système licence‑master-doctorat,
par @PBertaGard et @KarineLebon https://t.co/SD0pD18uNT pic.twitter.com/jhPkmwecDY— Julien Gossa (@JulienGossa) May 28, 2021
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