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Parcoursup

Parcoursup : le rapport « Fin du game » de la Cour des comptes

La Cour des comptes vient de publier « Un premier bilan de l’accès à l’enseignement supérieur dans la cadre de la loi Orientation et réussite des étudiants » (Février 2020) à destination comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale. Parcoursup et la loi ORE ayant fait l’objet de lourds désaccords dans la communauté, ce rapport sonne comme un arbitrage « Fin du game » de presque deux ans de débats. 

Attention : ce billet ne vise pas à rendre intégralement compte des informations du rapport de la Cour, mais seule à mettre en perspective les promesses et éléments de langage du ministère avec la réalité constatée par la Cour. Ainsi, la plupart des critiques rapportées ici s’accompagnent de modérations et de propositions d’améliorations dans le rapport. De plus, certaines critiques, parfois très dures, notamment sur le système d’information, ne sont pas rapportées ici.

L’affaire n’est pas mince, il s’agit de la réforme du « -3/+3 », c’est-à-dire des études de 80% des françaises et français ayant entre 15 et 21 ans. La loi ORE/Parcoursup et la réforme du Lycée/Bac2021 (E3C) sont une seule et même réforme, comme l’indiquait Mme Vidal, Ministre de l’enseignement supérieur en audition au Sénat :

Jean-Michel Blanquer et moi avons bien évidemment débattu de l’articulation de Parcoursup avec la réforme du baccalauréat. La décision a été prise de commencer par l’accès à l’enseignement supérieur, notamment parce qu’on ne pouvait pas continuer à tirer au sort pendant trois ans, mais, in fine, l’articulation devra être complète. Si l’on réussit le pari de la construction d’un lycée adossé à cette orientation vers le supérieur, on ne posera même plus la question de la hiérarchisation des vœux.

La réussite de Parcousup est donc critique pour la réussite de toute la réforme du système d’éducation national. Le principe de la loi ORE est présenté ainsi par la Cour, rapportant la position du ministère :

La loi ORE établit ainsi une perspective cohérente et unifiée dans le continuum « -3/+3 », c’est-à-dire de la classe de seconde à la 3ème année de licence, en posant le principe qu’une meilleure orientation suivie d’une affectation prenant davantage en compte le profil de l’élève permettra d’améliorer sa réussite dans l’enseignement supérieur.

Dans la suite, toutes les citations sont extraites du rapport de la Cour des comptes, sauf une qui est explicitement indiquée.

Aide à l’orientation

« Il n’y a pas de décision éclairée sans une pleine information, c’est le sens des attendus »

Seule une moitié des élèves et une minorité des professeurs principaux sont satisfaits des attendus dans leur forme actuelle.

Il apparaît cependant que la bonne information des candidats sur les critères de classement des formations auxquels ils prétendent n’est pas complète. Les attendus publiés, dont les énoncés mériteraient une nouvelle revue, ne correspondent pas toujours aux paramétrages retenus in fine par les commissions d’examen des vœux.

Voir aussi : Parcoursup : Petit manuel de formulation des vœux à l’usage des candidats à l’enseignement supérieur

« Il y aura un dédoublement des professeurs principaux dans toutes les classes de terminale pour un meilleur accompagnement, une meilleure orientation des lycéens »

En effet, la mise en place d’un second professeur principal s’est parfois heurtée dans certains lycées à la difficulté de recruter des volontaires, faute d’un vivier suffisant. Si, dans la moitié des classes, la nomination des professeurs a suivi une logique de complémentarité de disciplines afin d’apporter aux élèves une information plus large sur les débouchés, elle a été faite sans logique apparente dans l’autre moitié des cas.

En la matière, les élèves ne sont pas en situation d’égalité.

« Nous allons ancrer l’orientation dans le temps scolaire avec la mise en place de deux semaines d’orientation »

Pour conclure, une partie significative des élèves n’a pas bénéficié des avantages attendus des semaines de l’orientation. Dans ce domaine également, la politique d’orientation est encore disparate et inégalitaire.

Discriminations

« Les dossiers des candidats seront anonymisés, le lycée d’origine restera »

La prise en compte de l’identité des candidats par certaines CEV [Commission d’examen des vœux] correspond au lycée d’origine, y compris dans les licences non-sélectives en tension où ce critère joue à plus de 1 % pour environ 20 % de ces licences. Certains cas, rares, de discrimination positive portant sur le sexe ont été observés.

[Recommendation] 10. Anonymiser le lycée d’origine et lui substituer une mesure de l’écart entre les résultats au
baccalauréat et la notation au contrôle continu (MESRI).

Voir aussi : Parcoursup : Quelle place pour le lycée d’origine dans le tri des dossiers ? et Parcoursup et Lycée d’origine : Une difficulté (technique) de moins pour une difficulté (philosophique) de plus

Quotas de boursiers : « c’est la fin du fatalisme face aux inégalités d’accès à l’enseignement supérieur »

Les études statistiques menées par la Cour montrent que ces quotas de boursiers, qui ont été davantage respectés en 2019 en comparaison de 2018, ont eu un impact faible sur l’accès aux filières en tension, qu’elles soient sélectives ou non.

Ainsi, à la rentrée 2019, la part de boursiers admis est inférieure à la part de boursiers candidats dans 13 des 40 CPGE les plus demandées et qui se voyaient appliquer un quota.

Les quotas n’ont pas, par ailleurs, entraîné une plus grande diversité sociale dans les formations de l’enseignement supérieur où les boursiers étaient peu représentés

« Nous poursuivons nos efforts pour accompagner la mobilité géographique & sociale »

L’analyse statistique de la Cour montre que les quotas géographiques, à la différence des quotas de boursiers, ont eu des effets significatifs (cf. graphique et développement dans l’Annexe n° 12). Cela signifie qu’en l’absence de quotas, un certain nombre de candidats non-résidents auraient pris la place de candidats résidents.

Voir aussi : Rapport au parlement du Comité Ethique et Scientifique de Parcoursup

Tri des candidatures

« Tout a été pensé dans Parcoursup pour remettre de l’humain dans la procédure »

 

Sur la base d’un ensemble d’indicateurs, la Cour a pu mettre en évidence une automatisation croissante du système en 2019. Ainsi, le nombre de candidats bénéficiant de bonifications automatiques est passé de 148 477 en 2017 à 462 015 en 2019.

Pour l’ensemble des filières, les critères relatifs aux résultats ont eu une importance déterminante sur les pré-classements opérés par les CEV [Commission d’examen des vœux]. À l’opposé, la motivation des élèves n’est presque jamais prise en compte. À titre d’exemple, parmi les 191 licences non-sélectives analysées, seule une formation de sociologie a tenu compte de ce critère de façon importante (poids de 20 % environ).

Voir aussi : IA for Parcoursup : l’orientation des bacheliers enfin révolutionnée !

« L’idée de la lettre de motivation sur Parcoursup est de penser des parcours de formation qui permettent aux étudiants de garder confiance en eux et de réussir. »

Par ailleurs, le projet de formation motivé, communément appelé « lettre de motivation », semble n’être presque jamais pris en compte .

CEV « chaque établissement réunit […] une commission d’examen des vœux »

Finalement, leur travail s’apparente plus à celui d’une commission administrative chargée de trier, de classer et le cas échéant de compléter des dossiers, afin d’établir des listes provisoires. Il y a certes délibération des membres de la commission lors de la prise en main de l’outil, au moment de la fixation des éléments de pondération, mais toute forme de discussion peut ensuite disparaître, ou n’intervenir que de manière anecdotique pour le réexamen de quelques dossiers spécifiques (notes manquantes ou dossier incomplet, par exemple).

« Secret des délibérations » des CEV

Le cinquième alinéa de l’article L. 612-3 1 du code de l’éducation intègre les mêmes dispositions protectrices à propos des CEV [Commission d’examen des vœux], qui se trouvent de facto assimilées à des jurys de concours, même si elles ne sont pas qualifiées ainsi dans le texte. Cette assimilation pose toutefois question, car les travaux réalisés par ces deux instances ne sont pas réellement comparables.

Dans ce contexte, dans la perspective d’une plus grande transparence, rien ne devrait s’opposer à ce que tous les éléments de paramétrages de l’outil que les CEV utilisent soient rendus publics.

Voir aussi : Parcoursup : Les obligations légales des universités dans le traitement des dossiers de candidatures

« Quand Mme Vidal nous expliquait que les « algorithmes locaux » n’existaient pas »

La publication des éléments de paramétrages utilisés par les commissions d’examen des vœux répond d’abord à un objectif pédagogique évident. Les « algorithmes locaux » peuvent servir de base informative intéressante pour les usagers utilisant Parcoursup et leur permettre de comprendre la manière dont les différentes disciplines de leur année de terminale, voire de première, les fiches Avenir, le projet de formation motivé, la filière d’origine etc. sont, ou non,
pris en compte dans le classement de leurs candidatures

La publication des « algorithmes locaux » répond ensuite à un impératif de transparence, dont le Conseil constitutionnel a pu rappeler qu’il constitue, en toutes circonstances, un objectif d’intérêt général

L’utilisation « d’algorithmes locaux » pour opérer des classements ne saurait être remise en cause, au regard du volume des candidatures, mais le fait de ne pas les publier et d’en refuser la communication crée un risque de défiance.

Voir aussi : Parcoursup : petit manuel de tri des candidatures à l’usage des enseignants du supérieur

« Nous avons fait le choix de la transparence »

En dépit des actions de mise en transparence du ministère, le code source de Parcoursup reste à 99 % fermé. La partie publiée demeure d’un intérêt limité pour comprendre, expertiser, et évaluer le processus d’affectation des candidats dans les formations.

Il apparaît toutefois que, bien que censées opérer de façon ouverte et transparente, les commissions d’examen des vœux obéissent en réalité à un mode de fonctionnement souvent hétérogène et peu transparent

[Recommendation] 11. Rendre publics les « algorithmes locaux » utilisés par les commissions d’examen des vœux pour l’ensemble des formations proposées (MENJ et MESRI).

Voir aussi : Parcoursup : Transparence des algorithmes locaux vs. Secret des délibérations

Affectation des candidats

« Réaffirmer le droit de tout bachelier d’accéder à l’enseignement supérieur, de choisir sa filière et son établissement »

Au total, la réforme pâtit d’un manque d’ambition qui l’empêche d’atteindre son objectif principal : faire davantage dépendre les choix d’orientation du résultat d’un projet individuel librement mûri par chaque élève.

Voir aussi : Parcoursup : Petit manuel de réponse aux propositions à l’usage des candidats à l’enseignement supérieur

« Il n’y a pas de sélection à l’entrée des filières universitaires » (le dernier mot au bachelier)

Les formations non sélectives sont principalement les licences universitaires. Cette définition purement organique atteint toutefois ses limites car, en réalité, une formation devient sélective lorsque la demande des candidats est plus forte que la capacité d’accueil de la filière concernée. Cela a été le cas en 2019, pour près de 20 % des formations non sélectives en tension, représentant près de 30 % des candidats admis.

Voir aussi : Parcoursup : l’épreuve de vérité

« La dynamique fonctionne et Parcoursup fait toutes ses preuves »

La performance est mesurée par la capacité du système d’accès au supérieur à proposer une formation qui convienne au candidat dans le sens où il choisit de la rejoindre, y réussisse et y reste après une année de formation. La Cour a choisi d’aborder la performance de manière complète : elle intègre l’ensemble des candidats et couvre la totalité du processus couvert par la loi ORE.
Le MESRI quant à lui mesure la performance d’affectation d’APB et de Parcoursup uniquement sur la part de propositions acceptées par les néo-bacheliers en classe de terminale.

En outre, la performance d’affectation des candidats a été surestimée de 16 % dans Parcoursup par rapport à APB en raison de défaillances du système de suivi des évolutions du SI commun à APB et Parcoursup.

Les résultats de performance de Parcoursup sont pour l’heure identiques à ceux d’APB, hormis à l’université où de premiers signaux positifs, mais encore modestes, sont observés.

Voir aussi : Parcoursup est-il « grippé » ?

La phase complémentaire : « mobilisés aux côtés des candidats pour replacer l’humain au cœur de la procédure »

La réponse peut être expéditive, de nombreuses formations interrogées reconnaissent avoir recours à un traitement automatique des dossiers faute de responsables qualifiés pour les traiter durent cette période. La plupart des candidats obtiennent donc de façon mécanique, dans l’ordre d’arrivée, les places restantes afin de « remplir » les formations, quel
soit le dossier et le niveau scolaire, en application du principe « premier arrivé, premier servi ».

« Avec les équipes de la Commission d’accès à l’enseignement supérieur la mobilisation est totale pour accompagner les candidats sans proposition »

Les commissions travaillant dans l’urgence, leurs réunions ne font généralement pas l’objet de compte-rendu, les propositions d’admission se faisant directement en séance sur la plateforme Parcoursup. Il n’est donc pas possible de disposer d’éléments pouvant expliquer le choix des propositions faites, et de mener une analyse fine pour comprendre le sens des propositions adressées aux candidats. Les académies tirent toutefois, dans l’ensemble, un bilan plutôt positif

Réussite après l’affectation

« Nous sommes persuadés qu’il faut aller vers plus d’orientation et arrêter la sélection par l’échec, c’est tout l’objet des « oui si » »

Pour que l’efficacité des dispositifs « oui si » déployés puisse être mesurée, les universités doivent identifier leurs étudiants « oui si » en fonction du type de dispositif suivi et de leur profil. Mais cet objectif apparaît difficile à atteindre en raison d’outils de mesure de la réussite, telle que définie actuellement, inefficaces dans la plupart des universités car inadaptés ou non utilisés.

Les universités ont transmis aux rectorats l’estimation de leurs besoins financiers pour mettre en place des dispositifs d’aide à la réussite. Or, certaines d’entre elles ont uniquement reconduit des dispositifs de remédiation qui existaient déjà car créés dans le cadre de plans ministériels précédents, et qui étaient donc préalablement financés.

La Cour s’interroge sur l’absence de réduction voire de suppression de ces crédits, l’objectif de la loi n’étant pas de
financer les universités mais d’aider les étudiants à mieux réussir.

Voir aussi : La loi ORE : un formidable terrain d’étude pédagogique. J’y écrivais, en septembre 2018 :

« Il existe donc un initiative qui ne coûte rien, qui est facile à mettre en œuvre et est indispensable pour progresser… Pourtant il est possible qu’elle ne soit pas concrétisée. Deux risques se font face : D’un côté, il existe le risque de se diriger vers une réforme bancale, impossible à faire aboutir, faute de disposer des outils permettant de l’améliorer et d’en tirer le meilleur. D’un autre côté, il existe un risque de découvrir que les bénéfices de la réformes sont faibles en regard de ses défauts, qu’elle est un échec, et non pas en raison d’un défaut de mise en oeuvre, mais d’un défaut structurel. »

« A tous ceux qui refuseront de répondre « oui si », ils regarderont leurs étudiants en face… »

En 2019-2020, 807 formations, soit 33 % des formations en licence sur Parcoursup, ont proposé à 172 260 candidats une proposition d’admission à condition de suivre un dispositif « oui si »241. Seuls 22 205 ont accepté cette proposition dans 771 formations. Ce taux de 13 % d’acceptation pourrait indiquer que l’étudiant préfère toujours rejoindre une formation pour laquelle il reçoit une proposition d’admission sans « oui si ».

Parmi les étudiants ayant accepté en 2018 un parcours « oui si », seuls 85 % se sont présentés à l’université à la rentrée.

En outre, la plupart des étudiants s’étant inscrits dans ces parcours se sont montrés peu assidus

Finalement, l’université d’Évry a décidé en cours d’année universitaire d’ouvrir le dispositif à l’ensemble des étudiants de L1 sur volontariat, quel que soit leur niveau. Si cette orientation a permis d’améliorer les taux de présence, elle ne répond pas aux objectifs de la loi ORE

« Un dispositif qui a fait ses preuves et qui satisfait les étudiants qui en ont bénéficié cette année. »

 

Ces chiffres semblent confirmer que les parcours aménagés favorisent la réussite pour les étudiants présents aux examens du premier semestre, sans toutefois permettre d’atteindre les taux de réussite des étudiants hors remédiation. Par ailleurs, ces chiffres masquent des écarts importants de réussite entre les universités.

En droit, trois universités (Dijon, Montpellier et Strasbourg) ont enregistré un taux de réussite de 0 % pour leurs étudiants en parcours aménagé,ce qui peut révéler également un déploiement trop restreint du dispositif.

Si on ne peut tirer de conclusion sur l’amélioration à long terme du taux de réussite des étudiants en licence, il apparaît toutefois que le taux de présence aux examens du premier semestre est inférieur d’au moins 20 % pour les étudiants inscrits en parcours aménagé.

« Avec la loi Orientation et réussite des étudiants ORE, la démocratisation de notre enseignement supérieur est revenue au centre du débat »

L’analyse globale de la performance menée par la Cour suggère que, pour l’instant, les augmentations de réussite dans certaines formations en tension sont compensées par des diminutions équivalentes dans d’autres formations.

Voir aussi : Bilan 2018-2019 (I) : Parcoursup, année 2

L’ouvertures de nouvelles places

« Nous travaillons avec les établissements à l’ouverture de 22 000 places supplémentaires dans les filières en tension »

Outre un coût de la place très variable, le nombre de places nouvelles à financer a été déterminé par les rectorats à partir des engagements pris par les universités. Or, il s’avère que les augmentations de capacités déclarées a priori n’ont globalement pas été respectées par celles-ci. Ainsi, en 2018, sur 21 239 places financées, 8 107 sont restées vacantes dans Parcoursup.

Ainsi, malgré un nombre significatif de nouvelles places créées, le taux de pression des filières sélectives et non sélectives a augmenté entre 2018 et 2019, comme l’indique le graphique qui figure en Annexe n° 15. Cela signifie que les places supplémentaires n’ont pas été créées dans les filières qui avaient le plus de demandes de la part des candidats.

Voir aussi : Parcoursup : le compte n’y est pas…

« C’est pour accompagner les bacheliers technologiques et professionnels que nous ouvrons des places en BTS et IUT »

Toutefois, ces mesures apparaissent insuffisantes au regard des 5 000 bacheliers professionnels qui, à la rentrée 2018, étaient encore orientés par défaut à l’université

Les quotas n’ont pas pour l’instant l’effet escompté. La part des bacheliers professionnels en STS est resté stable entre 2017 et 2018222 alors que l’objectif des quotas est d’élever leur proportion parmi les élèves de ces formations. La situation s’est détériorée en 2019.

Au final, l’accueil des bacheliers technologiques et professionnels dans l’enseignement supérieur est en voie d’amélioration grâce à une gestion des capacités d’accueil des différentes filières qui prend davantage en compte leurs spécificités.

« Pour les bacheliers pro pas prêts à s’engager dans des études nous avons imaginé avec JM Blanquer les classes passerelles »

Par ailleurs, le dispositif de classes passerelles créé en 2018 pour accueillir les bacheliers professionnels apparaît peu attractif aux yeux de ces lycéens compte tenu du faible taux de remplissage de ces classes. Il est également particulièrement coûteux pour les finances publiques (3 000 € par étudiant)

La transformation globale de notre système -3/+3

« Il ne contient aucune disposition permettant que soit conduite une politique malthusienne de réduction des capacités d’accueil »

Dans une logique d’attractivité, certaines formations pourraient utiliser la variable de la capacité d’accueil afin d’augmenter leur sélectivité et accroître ainsi leur taux de réussite, en attirant les meilleurs candidats.

Il n’est donc pas exclu, à terme, que Parcoursup exacerbe des situations d’émulation entre établissements, déjà à  l’œuvre en matière de recherche, et qui pourraient se généraliser désormais au niveau des formations de premier cycle.

L’académie de Paris, qui concentre la majorité des filières en tension, illustre ce phénomène. La part d’admis ayant eu une mention très bien au baccalauréat dans les filières non sélectives y est passée de 29 % en 2017-2018, dernière année d’APB, à 40 % en 2018-2019, première année de Parcoursup.

Cet accroissement de la concurrence entre les établissements, s’il venait à se confirmer, nécessiterait de réinterroger les équilibres, sauf à laisser s’ériger, dès les formations de premier cycle, un système universitaire à deux vitesses, au détriment des étudiants inscrits dans des universités moins prestigieuses, ou bénéficiant de moins de visibilité.

Voir aussi :

Parcoursup : les universités font leur marché

Parcoursup : Petit manuel de formulation des vœux à l’usage des candidats à l’enseignement supérieur

Vous êtes en Terminale cette année, et vous allez devoir bientôt formuler vos vœux d’admission dans l’enseignement supérieur sur la plateforme Parcoursup. Ce petit manuel a pour vocation de vous donner quelques indications relatives à la bonne utilisation des informations que vous trouverez sur cette plateforme, de vous proposer une méthode de définition et de hiérarchisation des vœux, et de dissiper les principales incertitudes qui entourent généralement ces vœux et leur traitement. 

Comment trouver les formations qui vous intéressent ?

Le site parcoursup.fr est un moteur de recherche des formations du supérieur qui vous permettra de faire une première sélection en fonction de vos préférences. 

Par défaut, les formation sont triées par « Taux d’accès » : à 100%, tous les candidats sont admins ; à 50%, seul la moitié des candidats sont admis. Attention cependant, ce chiffre peut parfois être trompeur (nous y reviendrons).

Chaque formation dispose d’une fiche, et nous allons voir quelles informations vous seront utiles ou non.

Que considérer dans l’entête ?

  • Intitulé de la formation : en plus de la discipline, vous y trouverez les mentions spéciales (à distance, aménagements particuliers). Par exemple, si vous ne faites sport ni musique de haut niveau, cette formation n’est pas pour vous.
  • Pastille « formation sélective » : attention, cette indication peut être trompeuse. Des formation dites « sélective » admettent tous les candidats, alors que des formation dites « non-sélectives » en refusent. Il est conseillé de ne pas regarder cette information.
  • Epreuves/Entretiens : cette information peut-être est cruciale. Si vous savez déjà que vous ne vous déplacerez pas pour ces épreuves dans une formation éloignée, il est inutile de candidater.
    De telles épreuves peuvent aussi être de simples tests de motivation (pour voir qui va faire le déplacement) ou relever d’une pratique commerciale (pour faire croire que vous êtes parfaitement adapté au cursus). Vous n’aurez aucun moyen de le savoir par avance, sinon le bouche-à-oreille.
  • Chiffres clés : nous y reviendrons.
  • Certification : les formations contrôlées par l’Etat apportent une garantie de moyens et de qualité, mais il vous sera difficile de savoir dans quelle mesure. Il est conseillé de rester prudent.

En outre, cette rubrique vous indiquera si une épreuve supplémentaire est prévue. 

Que considérer dans la rubrique « Formation »

La première rubrique, « formation », présente des informations générales, avec souvent des liens plus utiles que le texte présenté sur la plateforme : n’hésitez pas à les suivre.

Certaines formation indiquent aussi les frais, dont certains peuvent être particulier, dans le privé comme dans le public. Les études peuvent coûter cher et représenter un investissement. Cependant, le marché des formations est très particulier : le coût n’y fait pas la valeur. En clair, ce n’est pas parce qu’une formation est plus chère qu’une autre qu’elle sera mieux pour autant. Les frais ne doivent donc pas être un critère d’adoption, mais un critère d’élimination si vos moyens ne suivent pas. Ne postulez pas à des formations dont vous ne souhaitez pas payer les frais demandés. 

De plus, certaines formations demandent des frais de dossier pour pouvoir postuler. Il est recommandé d’avoir la plus grande prudence : cette pratique n’est globalement pas normale en France.

Faut-il considérer la rubrique « Connaissances et compétences attendues » ?

Les « attendus » sont des indications des prérequis nécessaires à la réussite dans une formation. Ils peuvent être intéressants pour voir s’ils vous parlent. Malheureusement, leur rédaction est parfois ambiguë, vous empêchant de savoir s’ils vous correspondent vraiment. Ils couvrent aussi souvent tous les champs possibles de façon générique, pouvant laisser l’impression que seuls les étudiants parfaits peuvent réussir : il faut être travailleur, curieux, autonome, structuré, réfléchi, mature, régulier, moteur en groupe, etc… Sauf que personne n’a toutes ces caractéristiques. Il est donc normal que vous non plus.

En clair, les « attendus » doivent être considérés comme une description de la formation, et non comme une façon de savoir si vous allez y réussir. Prenez-le avec recul.

Faut-il considérer la rubrique « Critère généraux d’examen des vœux » ?

La rubrique « Critère généraux d’examen des vœux » donne des indications vagues sur la façon dont les candidatures seront triées. De plus, les formations n’ont aucune obligation de déclarer la totalité des critères utilisés (elles peuvent par exemple utiliser le Lycée d’origine sans avoir à le dire).

La méthode exacte étant tenue secrète, et ne connaissant pas les dossiers des autres candidatures, ces informations vous seront de peu d’intérêt. Encore une fois, vous devez les considérez comme une description de la formation et non pour une évaluation de vos chances d’admission ou de réussite.

Faut-il considérer la rubrique « Informations complémentaires sur le processus d’examen des vœux » ?

Cette rubrique vous donne deux information : le taux minimum de boursier et le taux maximum de candidats résidant en dehors du secteur géographique. Cependant, si vous êtes boursier par exemple, vous pouvez parfaitement avoir plus de chance d’admission dans une formation ayant un taux de boursier de 5% que dans une formation ayant un taux de 20% : cela dépend seulement des autres candidatures. Ces informations vous sont donc parfaitement inutiles, et il est recommandé de les ignorer.

Faut-il considérer la rubrique « Débouchés »

Cette rubrique présente les possibilités de poursuite d’études et/ou débouchés professionnels de la formation. C’est à la fois une indication forte si vous avez déjà une profession en vue, et assez inutile si vous n’en avez pas encore une bonne idée.

En revanche, il est fortement déconseillé de considérer la partie « données nationales », dont les chiffres ne vous donneront aucune indication fiable : un taux de passage/réussite bas peut tout aussi bien indiquer des études difficiles qu’ennuyeuses ou encore l’absence de sélection à l’entrée ; un taux haut peut tout aussi bien indiquer un accompagnement pédagogique efficace que l’absence d’exigence pédagogique ou encore une sélection dure à l’entrée.

En outre, lorsque les données sont nationales, elles peuvent très fortement varier d’un établissement à l’autre. Les données sont donc non seulement inexploitables mais en plus parfois non fiables.

Que considérer dans la rubrique « Contact, coordonnées et chiffres clés » ?

La rubrique « Contact et coordonnées » pourra vous être utile si vous avez un profil très particulier, par exemple une reprise d’étude, ou une formation secondaire éloignée ou à l’étranger. Dans ces cas là, se présenter à la formation pour indiquer que votre candidature est réfléchie et solide peut être une bonne idée. Cependant, ne contactez pas abusivement la formation, cela pourrait être mal reçu et même diminuer vos chances d’admission.

La rubrique « Chiffres clés » vous indiquera le nombre de places et le nombre de candidats dans la formation l’an dernier. Ces informations peuvent varier d’une année à l’autre, notamment le nombre de candidats. Cependant, même sans variation, elle ne vous seront d’aucune utilité : vous n’avez aucune idée de comment vous serez classé, et selon votre dossier vos chances d’admission peuvent être 100% comme nulles, sans possibilité de prédiction.

Attention ! Les deux formulations « la formation a-t-elle accepté tous les candidats… » et « La formation a-t-elle fait une proposition d’admission à tous les candidats… » sont trompeuses : des formations sélectives indiquent « oui », malgré l’éviction de candidats. Il est recommandé de ne pas tenir compte de ces informations.

Concernant vos chances d’admission, mieux vaut se reporter à la page de recherche des formations. Cette dernière indique le Taux d’accès, qui lorsqu’il est à 100% indique que la formation n’est pas sélective, et que vous y serez probablement admis si vous candidatez. 

Attention cependant à ne pas confondre avec les trois chiffres « Général | Techno | Pro », qui ne sont pas des taux d’accès, mais les proportions parmis les admis de l’an dernier. Globalement, ces trois chiffres ne vous serviront à rien, et mieux vaut les ignorer.

Enfin, la dernière rubrique propose un « Rapport public Parcoursup session 2020 », qui contient en réalité les informations présentées précédemment. Le lire ne vous apportera probablement rien. 


Quelle stratégie de formulation des vœux ?

En premier lieu, il convient d’éliminer toute stratégie de choix des formations qui viserait à augmenter vos chances pour une candidature précise. Vos vœux ne seront pas connus des formations qui classeront vos candidatures. Vous pouvez donc les formuler de la façon la plus sincère possible sans désagrément.

Quels sont les catégories de vœux ?

On peut grossièrement classer les vœux en trois catégories :

  • Les vœux de cœur : ce sont les formations que vous rêvez de faire, indépendamment de votre niveau ou de vos chances d’admission. Pour les sélectionner, il convient donc de ne considérer que votre envie et les contraintes matérielles (coût, facilité de logement et éloignement géographique), à l’exclusion de tous les autres critères de choix. 
  • Les vœux de raison : ce sont les formations que vous estimez pouvoir réussir et qui vous intéressent sans nécessairement vous faire rêver. Pour les sélectionner, il convient de vous baser sur vos résultats scolaires : ce sont les disciplines où vous êtes bons sans trop fournir d’effort.
  • Les vœux de sécurité : ces sont les formations où vous êtes quasiment certains d’être pris, dans une discipline que vous exploreriez volontiers. Il s’agira généralement d’une Licence dans l’université la plus proche, sur un intitulé qui vous attire (ou ne vous rebute pas), après avoir vérifié qu’elle n’était pas « en tension » (généralement : STAPS et psycho, éventuellement Droit).

Veillez à avoir au moins un vœu dans chacune de ces catégories, quitte à piocher un peu au hasard si une catégorie ne vous inspire pas plus que ça. 

Comment hiérarchiser ses vœux ?

La hiérarchisation des vœux n’est plus obligatoire. Cependant, sans hiérarchisation, vous resterez en permanence dans le doute. Or, il est facile de hiérarchiser les vœux par catégorie : d’abord les vœux de cœur, ensuite les vœux de raison, enfin les vœux de sécurité. Inutile de hiérarchiser vos différents vœux dans chaque catégorie pour l’instant, vous pouvez attendre les réponses des formations.

Faut-il utiliser le « répondeur automatique » ?

Oui. Le répondeur automatique a le double avantage de vous décharger d’un stress durant toute la procédure, et de limiter drastiquement le risque d’erreurs, que l’on constate en grand nombre dans toutes les campagnes Parcoursup.

De façon contre-intuitive, moins vous êtes sûr de votre choix, plus vous avez intérêt à utiliser le répondeur automatique : si vous changez d’avis tous les deux jours, vous n’atteindrez probablement pas une certitude à 100% par vous-même avant la fin de la procédure. C’est tout simplement que, pour vous comme pour la majorité des candidats, il n’y a pas de « meilleur » choix, et c’est tout à fait normal. Configurer le répondeur vous évitera juste de stresser inutilement en vous reposant de nombreuse fois la même question, sans réelle chance d’obtenir une réponse certaine. 

Faut-il faire un surplus de vœux ?

A partir du moment où vous avez 1 ou 2 vœux de sécurité, il est inutile d’en faire plus. En conséquence, il est inutile de postuler à des formations dont vous savez pertinemment que vous ne voulez ou ne pouvez pas y aller. Cela concerne les « vœux multiples » pour les formations dites sélectives (prépa, DUT, BTS) : inutile de postuler dans toute la France si vous n’êtes pas réellement mobile géographiquement. Cela concerne aussi les vœux « au cas où », qu’on formule mais avec l’envie de les refuser.

Vous devez être conscient qu’à partir du moment où vous formulez un vœu, on pourra vous en imposer l’affectation sur le mode « à prendre ou à laisser (mais avec rien d’autre) » . En clair, vous risquez d’être considéré comme satisfait et sans possibilité de recours, mais avec une affectation trop loin de chez vous et sans possibilité de logement, ou dans une formation que vous n’avez vraiment pas envie de suivre, . 

Pour aller plus loin…

Comment évaluer vos chances de réussite dans une formation ?

Vous n’avez strictement aucun moyen d’évaluer avec certitude vos chances de réussite. Les formations sélectives exigeantes n’arrivent jamais à un taux de 100% de réussite, ce qui prouve bien qu’on ne sait pas prédire la réussite des étudiants. De nombreux événements vont impacter vos études, qui n’ont a priori rien à voir avec vos études, et vous ne pouvez pas les connaitre à l’avance. Utiliser les nombreux indicateurs disponibles sur la plateforme Parcoursup à cette fin serait une grave erreur.

Cependant, un critère va lourdement peser : celui de devoir travailler pour financer vos études. Il s’agit là du premier critère d’échec dans les études. Pesez scrupuleusement votre motivation avant d’accepter une affectation qui vous obligerait à cumuler un emploi avec vos études. 

Enfin, vous devez être conscient que par réussite/échec, on entend « obtenir/rater le diplôme ». Or, échouer à un diplôme peut vous apporter beaucoup (par exemple par la découverte d’une autre discipline), et l’obtenir peut vous faire perdre beaucoup (par exemple par vous retrouver dans une voie professionnelle qui vous ennuie).

Comment évaluer vos chances d’être admis à une formation ?

Hormis pour les formations qui indiquent que tous les candidats sont admis, vous n’avez strictement aucun moyen d’évaluer avec certitude vos chance d’admission. Une formation peut sembler bouchée et en réalité être très fluide (beaucoup de candidats qui renoncent) comme sembler ouverte mais être en réalité bouchée (très peu de candidats mais qui acceptent). 

De plus, les critères de tri des candidatures sont tenus secrets, et vous ne connaîtrez pas les dossiers des autres candidats. En conséquence, tout pronostic de votre part serait illusoire. Utiliser les nombreux indicateurs disponibles sur la plateforme Parcoursup à cette fin serait une grave erreur.

Cependant, les journées portes ouvertes sont de très bonnes occasions de discuter de votre profil avec les équipes pédagogiques qui classeront les candidatures. C’est donc un moment privilégier pour obtenir quelques indications. De plus, l’expérience de vos enseignants et PsyEN pourra vous être utile. Ne considérez pas ces avis comme des certitudes, mais ne vous en privez pas non plus.

Est-ce que l’admission dans les formations dites « non-sélectives » est garantie ?

Non. Les formations dites « non-sélectives » classent les candidatures et les admissions sont limitées au nombre de places disponibles, exactement comme les formations dites « sélectives ». 

Il y a néanmoins deux différences :

  • si vous n’êtes pas suffisamment bien classé pour être admis, les formations dites « sélectives » peuvent vous répondre « non » tout de suite pour vous éviter d’attendre pour rien ;
  • les formations dites « non-sélectives » peuvent vous imposer une mesure d’accompagnement « oui si », généralement selon votre filière d’origine. Cette mesure peut être une opportunité et/ou une contrainte, à vous d’en juger.

Est-ce que votre lycée d’origine va jouer dans vos chances d’admission ?

Vous n’avez aucune possibilité de le savoir : certaines formations « redressent » les notes en fonction du lycée d’origine, d’autres non, et elles n’ont aucune obligation de l’annoncer. En clair, votre lycée d’origine pourra jouer en votre faveur ou votre défaveur, mais vous ne pourrez jamais savoir dans quelles formations ni dans quelle mesure. 

Il convient donc d’ignorer cet aspect, et de rester conscient que si vous perdez d’un côté, vous gagnez forcément de l’autre. 

Faut-il utiliser la possibilité de discuter avec un « étudiant ambassadeur » ?

Des boites mails sont mises en place pour vous permettre de poser vos questions à des étudiants dans les formations que vous visez. Cependant, si certaines information obtenues ainsi seront très utiles, d’autres seront très trompeuses, ne serait-ce que par une forme inévitable d’incompréhension : vous ne connaissez pas votre interlocuteur, et il ne vous connait pas non plus. « J’ai des difficultés dans telle matière » n’aura pas du tout le même sens pour vous deux. Vous n’aurez donc aucun moyen d’évaluer la pertinence des informations ainsi obtenues.

Il convient donc, si vous utilisez cette possibilité, de prendre une distance critique avec les réponses qui vous seront apportées. 

Enfin… 

La plateforme Parcoursup est un formidable outil de recherche des formations du supérieur. Cependant, il ne remplacera jamais le bouche à oreille, les discussions avec le profs, CIO et les PsyEN et surtout les visites aux journées portes ouvertes. Les avis et conseils que vous recevrez de part et d’autres seront parfois contradictoires. C’est normal. Aucun n’a raison, aucun n’a tort : personne ne peut prédire votre avenir. A vous de vous débrouiller.

Lorsque c’est trop beau pour être vrai, c’est sans doute que ce n’est pas vrai. Les formations sont en concurrence pour recruter les meilleurs élèves ou pour remplir leurs places. Il peut donc arriver qu’elles embellissement la réalité. Une présentation sobre ne cherchant pas à vous séduire devrait retenir prioritairement votre attention.

Vos doutes ne se limiterons pas tous seuls (et ne seront jamais réduit à néant). Il est tout à fait normal de ne pas avoir de certitude sur son avenir, voire de n’avoir strictement aucune idée de ce que vous voulez faire. Plus vous vous intéresserez, moins vous resterez dans le doute, mais vous ne pourrez jamais rien prédire avec certitude pour autant.

Et le plus important : Vous n’êtes pas en train de jouer votre vie. Le système français est celui qui propose le plus de passerelles et de rebonds au monde. Engagez-vous dans une voie qui ne vous convient pas, et vous aurez de multiples occasions de vous réorienter.

C’est au cours de vos études que votre parcours se fera, pas sur quelques clics sur Parcoursup.

 

 

Archive : l’ancienne interface

Du DUT au BUT : les portes-au-nez

La porte-au-nez est une méthode de manipulation normalement utilisée par les ministères pour faciliter l’acceptation des réformes. Elle consiste à mélanger, aux mesures voulues dans le projet de réforme, des mesures inacceptables et parfois même fantaisistes. Dans un premier temps, ces mesures fantaisistes cristallisent les attentions et évitent les discussions de fond. Dans un second temps, les ministères les retirent, avec plusieurs effets positifs : faciliter les négociations, apparaître comme à l’écoute, donner l’occasion d’une victoire de façade aux opposants, rassurer les spectateurs, et au final favoriser l’impression d’une réforme globalement acceptable, indépendamment de la réforme en elle-même.

Un exemple récent et éclairant, parce que particulièrement grossier, est l’augmentation des frais d’inscriptions pour les doctorants étrangers (auxquels on aurait donc demandé de payer pour travailler). Cette mesure était parfaitement fantaisiste, mais elle a facilité l’acceptation finale d’une réforme objectivement contraire aux valeurs et intérêts des universités.

« La hausse ne s’appliquera toutefois pas aux doctorants étrangers, comme l’avait indiqué la ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal fin février. La ministre avait en revanche refusé d’augmenter de 10 à 15% le nombre d’étudiants que les universités peuvent décider d’exonérer de frais, comme le permet un décret de 2013. »

Université: l’augmentation des frais d’inscription pour les étrangers a été inscrite au journal officiel,
Le Figaro, 23/04/2019

Mais quels sont les portes-aux-nez de la réforme du DUT ?

Le projet de réforme du DUT sera bientôt finalisé pour une mise en œuvre à la rentrée 2021 (en même temps que le nouveau baccalauréat général). Il contient plusieurs mesures qui s’apparentent à des portes-aux-nez. Les principales sont, des plus évidentes aux plus pernicieuses :

  • « L’objectif d’insertion professionnelle des diplômés de licence professionnelle est être fixés au minimum à 50% » : fixer un objectif d’insertion professionnelle pour une formation n’est pas sérieux, car les formations ne peuvent agir directement dessus.
  • « au moins 75% de ces activités de formation seront dirigées et encadrées » : ce passage permet, selon l’interprétation, de réduire 25% l’encadrement des heures de cours, abaissant ainsi le nombre d’heure des trois ans de BUT à moins que les deux ans de DUT.
  • « Les parcours de formation sont structurés en blocs de compétences » : il s’agit ici d’un ingérence dans la pédagogie, qui doit relever exclusivement de l’équipe pédagogique.
  • « Ces programmes permettent l’accueil d’au moins 50% de bacheliers technologiques en première année d’un IUT et la réussite d’au moins 70% d’entre eux » : fixer un taux de réussite dans un Arrêté est fantaisiste… Mais on est là au cœur, et supprimer cette phrase vide presque intégralement la réforme de sa substance.

Les trois première mesures seront sans doute très largement remaniées, sinon supprimées, ce qui confirmera leur statut de porte-au-nez. La quatrième est plus intéressante car elle est parfaitement applicable même sans être inscrite dans l’Arrêté : les quotas sont contrôlés par le rectorat, et les personnels des IUTs sont conscients que l’objectif de 50% sera poursuivi, inscrit ou pas dans l’Arrêté. Cette préoccupation sera donc inévitablement au cœur des nouveaux programmes, même en étant retirée du texte.

Supprimer les quotas d’admission et de réussite des bacheliers technologiques seraient donc un sacré coup politique ! Les personnels des IUTs s’en trouveraient largement rassurés, alors que la réforme et sa mise en application resteraient strictement inchangées : gérer les flux de bacheliers en créant une filière adaptée aux moins bien préparés, donc par l’abaissement du nombre d’heures et des exigences pédagogiques, tout cela essentiellement dans le but de palier les échecs des réformes du secondaire.

Du DUT au BUT : 50% de bacs technos, et après ?

A propos de l’articulation avec les réformes du secondaire, je suis co-rédacteur d’une tribune, signée au moment de la rédaction de ce billet par plus de 1700 personnes, dont 1000 personnels d’IUT :

Ce commentaire, laissé par un des signataires, résume assez bien ce que cette tribune soutien :

« C’est la suite logique de la réforme du lycée ( création des bac STI 2D) avec tout ce qu’elle a engendré de négatif. L’objectif de cette réforme (malgré ce qu’on a voulu nous faire croire) était de supprimer 2/3 des postes d’enseignants en technologie au lycée. Ces suppressions ont naturellement entraîné une baisse du niveau des bacheliers technologiques qu’il faut bien insérer (de force si c’est nécessaire) dans le supérieur aujourd’hui. Bravo aux cosignataires extrêmement lucides de cette tribune. »

On ajoutera ce passage intéressant des emails fuités de la campagne de M. Macron :

Mises à jour

La version du 28 novembre 2019 de l’Arrêté issu des travaux du CNESER confirme les portes aux nez décrites ici.

Photo de couverture par Daniel von Appen on Unsplash

Du DUT au BUT : 50% de bacs technos, et après ?

Dans son projet, le BUT (bachelor universitaire de technologie) diffère du DUT (diplôme universitaire de technologie) actuel par : son nombre d’heures, son organisation pédagogique, son programme, son public, sa finalité, son accréditation, son évaluation, ses modalités d’évaluation des connaissances, son adaptation locale, sa nature et même son nom [projet d’Arrêté].

Il ne s’agit donc pas d’une évolution, mais de la refondation d’une toute nouvelle formation. Pour s’y préparer, il est nécessaire de faire des projections sur le futur recrutement des bacheliers en BUT, notamment face à l’objectif de 50% de bacheliers technologiques. Contrairement à ce qu’on pourrait attendre, ces projections montrent un affaiblissement de la mixité des étudiants en IUT, s’accompagnant d’un clivage entre deux populations distinctes. Comment les formations vont-elles s’y adapter ?

Habituellement, l’objectif des réformes de formations est d’améliorer le taux de réussite, les taux de poursuite d’étude et d’insertion professionnelle, ou la visibilité. Cependant, ces objectifs ne sont pas avancés pour la réforme du DUT, sinon que très timidement et sans conviction. Le ministère n’a d’ailleurs pas communiqué du tout sur cette réforme.

On comprend pourquoi : tous ces indicateurs sont au beau fixe pour le DUT, et il n’existe en réalité par de marges d’amélioration à moyens constants. Il existe même un grave risque du côté de la visibilité, le DUT jouissant d’une très bonne réputation : sa réduction à un « diplôme intermédiaire » du BUT, délivré « sur demande de l’étudiant », sans Arrêté propre, ni visibilité sur Parcoursup, lui fait courir le risque d’être rapidement oublié. Il rejoindrait alors le DEUG, qui existe encore sous une forme équivalente.

Le besoin, parfois exprimé, de former plus de cadres intermédiaires est hautement dubitable : il est très difficile de trouver une quelconque étude montrant un tel besoin sur le marché du travail.

L’objectif de cette réforme est donc à chercher ailleurs.

L’hypothèse de la gestion des flux

L’hypothèse qui s’impose est celle de la gestion des flux. Parcoursup et la loi ORE étant des outils d’orientation des bacheliers par les formations, des évictions sont inévitables. On pense en premier lieu aux bacheliers professionnels, dont l’éviction a déjà commencé dans les filières en tension [Bilan 2018-2019 : Parcoursup, année 2]. Cette éviction risque de s’étendre aux futurs bacheliers généraux ayant choisi des ensembles de spécialités exotiques, ne correspondant à aucun attendu.

L’objectif de cette réforme serait donc de modifier les flux de néo-bacheliers dans le supérieur pour endiguer cette éviction, tout en travaillant à moyens constants, donc sans ajout de places. Pour ce faire, il est possible d’utiliser le levier des quotas. Nous allons voir comment.

Grâce à ce jeu de données récemment mis en ligne, on peut modéliser les flux de néo-bacheliers admis dans le supérieur en 2018. On y remarque que le flux de bacheliers professionnels allant en Licence est significatif, malgré leur faible taux de réussite.

Sur ces flux, il est possible d’appliquer les modifications suivantes :

  1. augmentation du flux de bacheliers technologiques en IUT par le détournement du flux allant en BTS (vert) ;
  2. grâce aux places laissée libre en BTS, récupération du flux de bacheliers professionnelles des Licences (bleu) ;
  3. pour faire des places en IUT, détournement du flux de bacheliers généraux vers les Licences/PACES/CPGE (rouge).

Cette opération permet d’obtenir les nouveaux flux suivants :

Ainsi, on jouant sur les flux, il est possible, à moyens constants :

  • d’abaisser la pression sur les Licences ;
  • d’enrayer la crise du recrutement en CPGE ;
  • d’augmenter les taux de réussite des bacs pros et des Licences.

Cette hypothèse de gestion des flux parait donc tout à fait convaincante. Sur le papier, elle pourrait même être efficace. Cependant, un vue plus fine donne un éclairage supplémentaire et plus inquiétant.

Le BUT : projection de l’effet 50% de bacheliers technologiques

Suivant la même modélisation, il est possible de faire un focus sur le flux de néo-bacheliers admis en DUT, afin d’établir une projection de l’effet du quota de 50% de bacheliers technologiques.

Pour avoir une vision plus fine, nous allons également modéliser les bacheliers ayant obtenu une mention au bac (M) et ceux sans mention (S). Cela permet d’observer la mixité des admissions en DUT :

  • 40% de bacheliers généraux avec mention ;
  • 25% de bacheliers généraux sans mention ;
  • 25% de bacheliers technologiques avec mention ;
  • 10% de bacheliers technologiques sans mention et de bacheliers professionnels.

Voyons maintenant les conséquences d’une augmentation à 50% des bacheliers technologiques :

  • cette augmentation devraient se faire essentiellement sur les bacheliers technologiques avec mention (TechnoM) auparavant en BTS ;
  • pour leur faire de la place, le classement Parcoursup conduira mécaniquement à l’éviction des bacheliers généraux sans mention (GénéralS) ;
  • ces évincés se répartiraient entre CPGE, PACES et surtout Licences.

dut.flux-1.png

Au final, on obtiendrait donc le recrutement suivant :

  • 40% (=) de bacheliers généraux avec mention ;
  • 10% (-15%) de bacheliers généraux sans mention ;
  • 40% (+15%) de bacheliers technologiques avec mention ;
  • 10% de bacheliers technologiques sans mention et de bacheliers professionnels.

Il s’agit en réalité d’un recrutement beaucoup moins mixte : au lieu d’avoir un continuum allant des bacheliers généraux avec mention jusqu’au bacheliers technologiques sans mention, on obtient deux groupes distincts. Ce changement majeur de public va entraîner des changements majeurs de formation.

Quelle adaptation des formations universitaires de technologie ?

Cette abaissement de la mixité pourrait représenter un défi pédagogique intéressant, si on était dans un contexte différent. Actuellement, il représente surtout un défi politique. Deux perspectives grossières sont identifiables : le commun ou l’adaptation personnalisée.

Le commun

Dans cette perspective, les cours restent en commun pour tous les publics. La loi indiquant un objectif de 70% de réussite pour les bacheliers technologiques, les exigences pédagogiques doivent être lourdement abaissées. Sans avoir à fournir d’efforts, les bacheliers généraux obtiennent donc des résultats excellents.

Rapidement, les filières d’insertion (employeurs, écoles, masters) réalisent que le niveau du BUT est sans rapport avec celui du DUT. La réputation du BUT ne rejoint pas celle du DUT, et impacte l’attractivité. Les meilleurs bacheliers généraux se détournent progressivement du BUT, laissant la place aux bacheliers généraux les moins bien préparés aux études supérieures en raison d’un choix exotique de spécialités.

Ainsi, une homogénéité du public des IUT se reforme, à la baisse.

L’adaptation personnalisée

Dans cette perspective, les étudiants suivent des cursus adaptés à leur profil : les étudiants de moins bon niveau suivent un cursus « normal », et les étudiants de meilleur niveau suivent un cursus dit « renforcé » ou « accéléré ». Le passage aux compétences supprimant la notion d’UE et de semestres, il est même possible d’organiser un BUT en 2 ans pour ce public. Ce cursus aurait environ le même nombre d’heures que le DUT actuel, et des cours pourront facilement être mutualisés.

Ainsi, les IUT deviendraient porteurs de deux filières distinctes : le BUT/prépa en 2 ans, formation exigeante et très sélective à visée de poursuite d’étude, et le BUT/pro en 3 ans, formation plus ouverte, destinée aux bacheliers les moins bien préparés. Cette perspective est parfaitement conforme à la politique ministérielle, qu’on retrouve avec les « oui si » en Licence notamment. Elle est aussi conforme à la politique des établissements qui développent des Licences « renforcées » adossées aux Licences « normales ».

En réalité, pour bien des départements, cela reviendrait à une continuité. La différence réside essentiellement dans la ségrégation interne des publics, privant une part des étudiants d’un haut niveau d’exigence et limitant le nombre de bonnes surprises. Cela pourrait même arranger les équipes pédagogiques, et on ne manquera pas de prévoir des « passerelles » légitimant cette ségrégation.

Conclusion

Sur le papier, le BUT est la refondation d’un nouveau diplôme, dont le sens peut se trouver dans la gestion des flux de bacheliers. Contrairement à ce que l’augmentation du quota de bacheliers technologiques peut laisser penser, la projection des flux d’admission en BUT montre un abaissement de la mixité du public admis en IUT : le classement Parcoursup conduira à l’éviction des bacheliers généraux les plus faibles, brisant le continuum actuel des promotions.

La suite sera définie par l’ADIUT (Assemblée des Directeurs d’IUT) et les ACD (Assemblées de Chefs de Département), notamment au moment de la construction des PN (Programmes Pédagogiques). Sans position commune, alors les équipes pédagogiques seront amenées à faire leurs propres choix, ce qui conduirait à un inévitable affaiblissement du réseau national des IUTs.

Pour aller plus loin

  • Les données pas-à-pas et le code source
  • Un exploitation plus générale de ces données
  • Certain département estiment qu’ils n’ont pas le bassin de recrutement nécessaire pour atteindre 50% de bacheliers technologiques.
    C’est peut-être vrai, mais les DUT ne représentent que 17% des listes de vœux des bacheliers technologiques, contre 50% pour les BTS [SIES-NF-2019-8]. Et c’est encore 17% des bacheliers technologiques qui acceptent une proposition en DUT, contre 42% en BTS [SIES-NF-2019-20].
    Ces chiffres indiquent que candidatures reçues en DUT peuvent être trompeuses sur la réalité du bassin de recrutement. Nonobstant les situations locales, la situation globale indique bien l’existence d’un réservoir de bacheliers technologiques qui pourraient candidater en BUT si on leur proposait des chances d’admission et de réussite décentes.

  • Il est souvent reproché aux IUT d’avoir progressivement modifié leur finalité en se détournant du recrutement des bacheliers technologiques.
    Cependant, il est difficile de trouver trace écrite de cette finalité originelle. Plus intéressant : le DUT a été imaginé dans les années 60, à une époque pré-massification. L’objectif à l’époque était d’augmenter toutes les poursuites d’étude dans le supérieur, et absolument pas de s’occuper de bacheliers sans perspective (population qui n’existait alors pas).

 

 

 

 

 

Projets d’arrêtés : il est venu le temps des Bachelors

Ils étaient fort attendus, les projets d’arrêtés réformant le premier cycle universitaire entrent maintenant en discussion au CNESER, au milieu de 21 textes. Le Projet d’arrêté portant réforme de la Licence professionnelle instaure une LP en trois ans (LP180) et supprime le DUT en l’incluant dans une LP180 appelée « Bachelor Universitaire de Technologie ». Le Projet d’arrêté relatif au cahier des charges des grades de Licence et de Master fait la part belle à la certification et permet que les grades universitaires puissent être accordée à d’autres diplômes, dont les Bachelors privés. 

Cet engouement soudain du ministère pour les bachelors devrait abaisser les frontières entre formations publiques et privées, et ouvrir la voie à une restructuration totale du premier cycle de formation supérieure.

Textes intégraux

La Licence Pro en trois ans (LP180) et la fin du DUT

D’un côté, les universités pourront construire des parcours complets de Licence Pro, dès le bac, distincts de leurs Licences. Ces LP180 sont sans contraintes sur les admissions mais sans garantie d’heures d’enseignement. Seule l’insertion professionnelle est fixée par le texte (« au moins 50% », sans qu’ils soit expliqué comment une formation peut fixer un taux d’insertion professionnelle, ne décidant ni des emplois, ni des poursuites d’étude).

De l’autre, le DUT est réduit à un « diplôme intermédiaire » sans arrêté propre, octroyé seulement aux étudiants qui en font la demande. Les IUT devront donc construire des LP180 ayant pour « nom d’usage » « Bachelor Universitaire de Technologie » (BUT), mais qui sont avant tout des LP. Les BUT auront en théorie 1800 ou 2000 heures (dont « au moins 75% […] seront dirigées et encadrées », plus 600 heures de projets tuteurés, et la spécification CM/TD/TP disparait) mais des contraintes d’admission (« au moins 50%  » de bacs techno), et de réussite (« au moins 70% » des bacs techno admis), en plus du taux d’insertion professionnelle propre aux LP.

Enfin, alors que le DUT était essentiellement géré et évalué par le réseau national des IUT, le BUT sera géré au niveau local par les CFVU (qui définiront les 30% d’adaptation locale des enseignements, les modalités de contrôle des connaissances, et les passerelles) et évalué par l’HCERES.

Deux formations se retrouvent donc en concurrence sur le segment universitaire de l’insertion professionnelle à Bac+3, fixée à au moins 50% par le texte, mais pour des profils de bacheliers différents et avec des services différents.

Cela confirme l’hypothèse de la gestion des flux de bacheliers : ces réformes ne sont pas guidées par des considérations pédagogiques ou de formation de la population, mais par la seule urgence de fournir des filières aux différents profils de bacheliers à un coût adapté.

« C’est de surcroît une façon politiquement viable de prendre acte de la baisse du niveau du Bac, et en quelque sorte de pallier les lacunes du secondaire » – Philippe Aghion et Élie Cohen, Éducation et croissance, 2004.

Le DUT, droit au BUT.

Il est venu le temps des bachelors

L’utilisation du « nom d’usage » « Bachelor Universitaire de Technologie » légitime un terme utilisé à l’étranger pour les diplômes de niveau Licence, mais sans aucune reconnaissance nationale. En effet, contrairement aux diplômes nationaux, les bachelors ne sont soumis à absolument aucune régulation. Certains sont accrédités par des organismes comme la CTI (Commission des Titres d’Ingénieur), mais pas tous : l’utilisation du terme « bachelor » en soi est absolument libre.

Son utilisation est à même d’induire une confusion dans l’esprit des familles, ce qui est sans doute la raison pour laquelle les écoles privées, parfois prédatrices, en abuse. On a d’ailleurs pu constater le goût pour cette confusion lorsque certaines écoles prétendent délivrer des “Mastères”, que les familles sont censées ne pas confondre avec les Masters.

On passe ainsi d’un système où :

  • « Licence » = public gratuit régulé
  • « bachelor » = débrouillez-vous pour savoir

à un système où :

  • « Licence » = de public gratuit régulé, à privé payant moins régulé
  • « bachelor » = de public gratuit régulé, à privé payant dérégulé

Ainsi, pour un « bachelor », les familles pourront avoir : un (ex-)DUT, une Licence++, une Licence–, un diplôme top niveau de polytechnique, un diplôme normal d’école de commerce, une formation pro de proximité ou une arnaque totale (liste non exhaustive).

Cette confusion est évidemment très efficace d’un point de vue commercial. Dans un marché où la réputation des formations publiques est très largement en deçà de leur qualité et performance réelles, des famille imaginent qu’un diplôme appelé « bachelor » sera nécessairement international, et nécessairement d’une meilleure qualité puisque payant. C’est objectivement faux : certains le sont, d’autres non. Il n’existe aucune garantie.

« Certains ont de la visibilité parce qu’ils sont bons en communication et ont des prix très élevés. »
(Laurent Champaney, vice-président de la Conférence des grandes écoles)

Des grades pour les gouverner tous

Le Projet d’arrêté relatif au cahier des charges des grades de Licence et de Master dispose que :

« Les grades universitaires peuvent également être accordés à d’autres diplômes délivrés au nom de l’Etat ou à des diplômes d’établissements publics ou privés, dès lors qu’ils contribuent aux objectifs du service public de l’enseignement supérieur définis à l’article L. 123 -­‐2 du code de l’éducation. Ces diplômes sont soumis soit à la réglementation nationale qui les définit , soit lorsqu’il s’agit de diplômes d’établissement par les règlements d’études publics arrêtés par les instances compétentes . »

Ainsi, pourront avoir le grade de Licence ou Master des diplômes qui ne sont pas des Licences ou des Masters : le ministère joue à plein sur la confusion entre les grades et diplômes, qui portent opportunément le même nom de Licence et Master.

Les diplômes d’établissements, donc payants, privés ou publics, vont donc gagner en légitimité ce que les diplômes d’Etat vont perdre à lisibilité. Un bachelor pourra se prévaloir du grade de Licence sans respecter l’arrêté Licence. Les universités pourront aussi développer leur propres bachelors sans perdre le grade de Licence, échappant ainsi aux cadrage nationaux et notamment à celui des frais d’inscription.

Dans la même logique, les certifications aussi devraient pouvoir conférer les grades de Licence et de Master, et l’expression « diplôme ou certification » se retrouve dans tout le document :

« Article 1

Le cahier des charges définissant les critères pris en compte par le ministre chargé de l’enseignement supérieur lors de l’examen d’une demande visant à ce qu’un diplôme ou une certification confère le grade universitaire de licence ou de master est défini à l’annexe du présent arrêté »

Si l’abaissement de la frontière public-privé semble inévitable, tant entre les établissements qu’au sein des établissements publics, il ne s’agit pas pour autant d’une dérégulation. Il pourrait même s’agir au contraire d’une reprise en main par le ministère de tout l’enseignement supérieur. Il exige ainsi une transparence sur les cohortes :

« Quel que soit l’objectif visé prioritairement par la formation, un dispositif de  suivi de cohorte et d’insertion des diplômés est mis en place. »

On connait par ailleurs l’obsession de la ministre pour que toutes les formations, y compris privées, soient sur Parcoursup. Le Projet de loi de finances 2020 est d’ailleurs explicite : l’augmentation du financement privé s’accompagnera d’un renforcement des contrôles.

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L’Etat semble se donner les moyens de trier les formations privées, selon qu’il les reconnait ou pas, au même titre que les formations publiques, y compris si elles ne sont pas d’Etat. Le grade Licence/Master ne viendrait alors plus ni d’une exclusivité publique, ni du respect d’un arrêté, mais de cette reconnaissance. Ainsi, l’Etat se transforme en organisme certificateur, considérant les formations indifféremment de la nature de l’opérateur. 

Un scénario hypothétique

Ce flou autour des termes Licence et Master, pouvant être aussi bien des diplômes d’Etat régulés que des diplômes d’établissements privés ou des certifications, permet de tracer le scénario hypothétique suivant :

  1. Les écoles privées prédatrice se contentent du minimum pour monter des bachelors très loin de la qualité des Licences, mais délivrant un grade de Licence. Les frais d’inscription leur fournissent plus de moyens pour moins de dépenses, qui peuvent être avantageusement réinvestis dans le marketing à destination des familles. 
  2. Aux yeux des familles, ces bachelors semblent donc avantageux, ayant l’apparence d’un double diplôme. Les frais d’inscription peuvent donc apparaître comme un bon investissement, indépendamment de la qualité réelle du diplôme. Cela séduira aussi ceux sensibles à l’argument « ce qui est gratuit n’a pas de valeur », entretenus directement par le gouvernement notamment dans le plan #BienvenueEnFrance.
  3. La Licence, qui elle ne délivre pas le grade de bachelor, apparaît comme un simple diplôme et se retrouve naturellement affaiblie. Les établissements publics ont donc tout intérêt à développer leur propres bachelors. Mais plutôt que de simplement appeler leurs Licences ainsi, ils ont intérêt à développer leur propre offre de formation commerciale.
  4. L’approche par compétence permet de vendre des modules d’enseignement à la découpe, par « blocs de compétence », sous forme de D.U. additionnels au cursus traditionnel. Licence (pro) + D.U. forment alors un bachelor, payant mais représentant un avantage concurrentiel par rapport aux étudiants ayant une « simple » Licence.

Ainsi, on aura achevé de rendre floue la frontière entre formations privées dérégulées et payées par les familles, et formations publiques fortement régulées et payées par l’impôt. L’Etat conserve le contrôle sur cette dérégulation afin d’éviter que des pans entiers de bacheliers soient exclus du supérieur faute de places gratuites, ou que des branches professionnelles se retrouvent en famine de main d’œuvre formée faut de la rentabilité de la formation.

Mais quels sont les bénéfices attendus ?

  1. Rien n’indique que les formations publiques en sortent renforcées : le coût du marketing et la culture de la concurrence pèsera sur les formations publiques.
  2. Rien n’indique non plus que les formations privées en sortent gagnantes : la concurrence des formations publiques pèsera lourd, et peu d’écoles privées pourraient résister à une concurrence frontale face à une université déterminée à occuper le marché. De plus, le contrôle exercé par l’Etat pourrait bien conduire à un affaiblissement du secteur privé non reconnu par l’Etat. 
  3. Il est certain que les familles sortiront perdantes, avec une augmentation inévitables des frais et un abaissement structurel de la qualité. 

Au final, seul un gouvernement souhaitant « rééquilibrer l’effort des familles / effort de l’Etat » peut bénéficier de cette mesure, c’est-à-dire souhaitant diminuer les dotations provenant de l’impôt. C’est là une explication de cette restructuration du premier cycle : diminuer l’impôt tout en augmentant les charges des familles.

Une autre lecture ne doit pas être esquivée : celle de la restructuration des flux d’étudiants internes aux universités, entre insertion pro à bac+3, insertion pro à bac+5 et excellence académique. Ces trois voies ne représentant pas, aux yeux de notre gouvernement, des investissements aussi intéressants.

Pour aller plus loin…

Le mouvement est déjà lancé

Contraint par des moyens publics de plus en plus insuffisants, des formations universitaires diminuent progressivement leur nombre d’heures d’enseignement. Les mesures nationales manquent, mais certaines formations annoncent avoir diminué le nombre d’heures par ECTS (European Credit Transfer Scale) de 15% sur les deux dernières années. La matière pédagogique pour ces 15% existe, et un financement par les étudiants permettrait de la transmettre de nouveau.

Exemple notable : cette année, des Cursus Master Ingénierie (CMI) sont convertis en D.U. payants. Les étudiants en CMI suivent donc les cours normaux de Licence, mais payent des cours et avantages supplémentaires par rapport aux « simples Licences ».

D’un côté, les financements publics s’appauvrissent. De l’autre, le gouvernement ouvre des façons de commercialiser les formations. De façon mécanique, cela conduit à affaiblir les formations financées par l’impôt :

Parcoursup : les universités font leur marché

La question a été ouvertement posée

La question du conflit Licence/bachelor a été ouvertement posée. Mais plutôt que d’imposer aux écoles qui souhaitent délivrer des Licences un certain niveau de qualité garanti par le respect du cadrage national de l’arrêté, le ministère a fait le choix d’autoriser le grade de Licence aux bachelors. C’est un véritable désaveu de la CPU, mais aussi peut-être des grandes écoles. 

« Il est temps de tout remettre à plat pour que le ministère tranche. »
(2016, J.-L. Salzmann, alors président de la CPU. )

En échange, le ministère fait miroiter un contrôle du grade par les « chefs de file » des regroupements universitaires, et une opportunité de grossir encore :

« 5– Inscrire son offre de formation dans la politique de site

Pour participer au développement de l’attractivité et du rayonnement des territoires au niveau local et régional, l’établissement développe des synergies avec ses partenaires, notamment par l’inscription dans une politique de site.

L’établissement présente la cohérence et la complémentarité du diplôme dont il souhaite qu’il puisse conférer le grade avec d’une part ses autres diplômes, notamment les diplômes nationaux pour lesquels il est accrédité, et d’autre part avec l’offre de formation des différents établissements du site. Il fait par ailleurs état despartenariats développés pour la mise en œuvre de la formation avec ses partenaires publics ou privés et autres collaborations qu’il entretient avec ces derniers : conventions, travaux de recherche, formations conjointes. »

Le rapport Biot-Lévy

Ce rapport, non public, identifie quatre alternatives : interdire l’usage de la dénomination bachelor, laisser faire, donner un contenu normé au bachelor, ou réguler la qualité des bachelors. Il opte pour cette dernière et propose trois modes d’action : inscription au RNCP, visa délégué à une conférence d’établissements, délivrance du grade de licence par une université dans le cadre d’une politique de site, ou directement par l’État selon un cahier des charges bien défini.

« La mission Lévy / Biot conduira à la reconnaissance du bachelor, comme formation post-bac aux droits d’inscription libres, en multipliera le nombre et en affaiblira d’autant plus la licence universitaire. Pauvre licence. Pauvre université publique. », Pierre Dubois : Faire mourir l’université à petit feu

« On voit sans peine, pour ces offreurs évoluant dans l’univers marchand, l’intérêt commercial qui résulte d’une captation d’élèves dès le post-bac », Jacques Biot et Patrick Lévy, via l’AEF : Bachelor : le rapport Biot-Lévy propose trois modes de reconnaissance possibles

Démarche qualité

7 –Mettre en œuvre une démarche qualité afin d’assurer l’amélioration continue de la formation

Des dispositifs d’évaluation de la formation sont mis en œuvre dans le cadre d’une démarche qualité au sein de l’établissement. Ils sont définis par l’établissement et procèdent notamment au moyen d’enquêtes régulières en cours et en fin de formation auprès des étudiants. Ils peuvent
faire appel à des experts extérieurs. […]

Aucun grade ne pourra être accordé en l’absence de cette démarche qualité.

Approche par compétences

Dans le cahier des charges pour les grades Licences et Master :

  • « Savoir » : 1 occurrence
  • « Connaissances » : 4 occurrences
  • « Compétences » : 11 occurrences

Dans l’Arrêté Licence pro :

« Article 11
Les parcours de formation sont structurés en blocs de compétences permettant la mise en place d’ensembles cohérents d’unités d’enseignement. Sont proposés aux étudiants des progressions pédagogiques adaptées qui prennent en compte leurs acquis antérieurs et leur
projet personnel et professionnel.

Les blocs de compétences de même que les unités d’enseignement sont capitalisables. »

A ma connaissance, aucune étude ne prouve l’efficacité de l’approche par compétences lorsqu’elle est imposée de façon massive. Il faut donc chercher l’explication ailleurs que pour des considérations pédagogiques.

Deux esquives majeures

Ces projets d’Arrêtés confirment les deux esquives majeures qui se dégageaient de la concertation sur la professionnalisation du 1er cycle post-bac : le rôle du diplôme dans l’insertion professionnelle, et le rôle de l’enseignement et de l’éducation.

Plutôt que de se demander « Quel doit être le rôle de l’enseignement supérieur dans une société ayant un chômage structurel de masse de 10% ? », ils se contentent de dire « Comment diminuer la dépense publique de production d’une main d’oeuvre qualifiée ».

Concertation sur la professionnalisation du 1er cycle post-bac : deux esquives majeures

 

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Le DUT, droit au BUT.

Après des mois de négociations houleuses, Frédérique Vidal vient de trancher l’avenir des DUT vers la création d’un BUT, Bachelor Universitaire de Technologie. Les reproches adressés au DUT sont incohérents, et cette réforme arrive alors que l’OCDE salue les performances des filières courtes françaises. Il faut donc s’interroger sur les motivations et finalités de cette réforme.

Avertissement : les considérations rapportées ici concernent le DUT en général, et ne correspondent donc pas aux expériences de chacun des départements, qui dépendent énormément des spécialités et bassins.

C’est par un mail circulant de proche en proche qu’on aura été averti de l’arbitrage de la ministre en faveur d’un BUT, Bachelor Universitaire de Technologie. Le DUT serait « revu mais conservé » en diplôme intermédiaire, toujours à Bac+2. Ainsi, les bacheliers s’engageraient directement dans un Bachelor vers un Bac+3 avec grade de Licence, mais avec la possibilité de bifurquer à l’issue de la deuxième année.

Un très grand flou entoure encore les nombreux détails de cette réforme. Cependant, on peut identifier les reproches adressés officiellement au DUT actuel. Le premier reproche est celui d’avoir dévié de sa finalité originale avec un fort taux de poursuite d’étude. Le deuxième reproche est son inadéquation avec le LMD (+3/+5/+8), puisque c’est un diplôme à Bac+2.

Or, les poursuites d’étude se font essentiellement en Licence Pro et Licence, menant précisément à un Bac+3 (Enquête « Devenir des DUT », ADIUT). Ces deux reproches sont donc parfaitement incohérents.

En réalité, depuis 50 ans, le DUT, ou plutôt les IUTs, se sont adaptés à la demande des étudiants et des employeurs, et démontrent d’un fort taux de satisfaction et de réussite. C’est d’ailleurs cette adaptation qui explique la très grande disparité entre les spécialités et départements. C’est elle aussi qui assure que, d’une façon générale, le DUT ne présente aucun problème de réputation, de recrutement ou d’insertion. L’OCDE vient d’ailleurs de saluer ses performances.

A moins de considérer que cette réforme puisse résoudre un problème qui n’existe pas, il faut donc s’attendre à un affaiblissement du DUT dans sa forme actuelle. Ainsi, c’est au delà des arguments officiels et d’une volonté d’amélioration de la formation qu’il faudra chercher les motivations réelles de cette transformation.

Une hypothèse de gestion des flux

Sous l’angle de la gestion des flux de bacheliers, le ministère est face à un grand défi. La loi ORE et Parcoursup permettent maintenant aux filières universitaires de sélectionner leurs étudiants dans la limite des capacités d’accueil. Or, le nombre de places augmente moins que la démographie. Des évictions sont donc inévitables.

Dès la rentrée 2018, le recrutement de bacheliers professionnels à l’université a baissé de 13%. S’ils ont pu être redirigés vers des BTS, cela réduit aussi le nombre de places disponibles dans ces filières pour les autres bacheliers, notamment technologiques. Se pose alors la question de leur accueil dans le supérieur.

Or, les bacheliers technologiques réussissent mal à l’université. Suivant la même logique de réussite par l’éviction l’orientation, ils devraient donc être progressivement exclus des Licences, soit par refus sec d’admission, soit par découragement face à des « oui si » inefficaces ou imposants de coûteuses années d’études supplémentaires. Devraient rapidement se joindre à eux des bacheliers généraux ayant un ensemble de spécialités insolite, inadéquates pour les filières universitaires comme pour les CPGE. D’ailleurs, le vidage progressif des filières technologiques vers les filières générales spécialisées semble déjà en œuvre (« Les filières STI2D ou ST2S sont en train de se vider »).

Ainsi, alors que les représentants des IUT se sont concentrés sur le risque de perdre l’arrêté spécifique, le programme pédagogique national, ou la sortie à Bac+2, le ministère est surtout resté inflexible sur l’augmentation des quotas de bacheliers technologiques et sur la baisse du nombre d’heures d’enseignement.

Si l’augmentation des quotas est mesure évidemment cohérente avec cette logique de gestion des flux, la baisse du nombre d’heures l’est également. En effet, la baisse des heures implique une baisse des exigences pédagogiques, donc une meilleure réussite pour des étudiants moins bien préparés aux études supérieures. La réforme est donc compatible avec une finalité de gestion des flux de bacheliers, et notamment des bacheliers au profil « ni BTS, ni Licence, ni CPGE ».

Une hypothèse d’adaptation de la dépense

Un reproche, moins officiel mais toujours très présent, adressé au DUT est son coût. En effet, un DUT représente entre 800 et 900 heures/an (1620h ou 1800h sur 2 ans). Pour comparaison, une Licence représente 500 heures/an (1500 heures en 3 ans). En mettant de côté l’obsession permanente des dirigeants pour la baisse de l’investissement dans l’enseignement, il est possible de considérer que la mixité des cohortes de DUT implique une sous-optimalité de la dépense.

En effet, en DUT on dépensera autant pour un étudiant visant une insertion professionnelle à Bac+2, que pour un étudiant poursuivant ses études à Bac+3, et même +5 et +8, et ce avec une mixité sociale remarquable (NF_2017_19, SIES) . Abaisser la mixité des promotions tout en diminuant la dépense permettra donc une meilleure utilisation des moyens, avec un véritable investissement calibré entre la Licence et la CPGE.

Un scénario de mise en œuvre

Si l’une ou l’autre de ces hypothèses était juste, on peut prévoir le scénario de mise en œuvre suivant :

  1. Dans un premier temps, le BUT ne fera que remplacer les Licences Pro, et cohabitera avec le DUT, toujours reconnu des étudiants et employeurs, malgré la baisse du nombre d’heures.
  2. Sous une pression permanente des rectorats, la proportion de bacheliers technologiques augmentera progressivement, de façon très diverses selon les départements, en fonction de leur vivier de recrutement. Peu importe que le quota de 50% (annonce actuelle) soit respecté de partout, seule importe qu’aucun bachelier technologique ne soit laissé sur le carreau.
  3. Les départements qui augmenteront le plus leur proportion de bacheliers technologiques abaisseront le plus leurs exigences pédagogiques, diminuant la réputation du DUT y compris pour les autres départements.
  4. Les exigences pédagogiques abaissées permettront d’augmenter le vivier de recrutement « ni BTS, ni Licence, ni CPGE », notamment avec les bacheliers généraux aux spécialités insolites.
  5. Les poursuite d’études en écoles d’ingénieur après le DUT se feront naturellement de plus en plus rares, abaissant la réputation générale du DUT, qui perdra rapidement de son sens en dehors de quelques niches professionnelles sans équivalent (type mesures physiques).
  6. Les étudiants ayant un profil d’ingénieur mais séduit par le côté pratique, qui tiraient vers le haut le niveau des promotions, n’auront plus aucun intérêt à venir en IUT, et se dirigeront plutôt vers les CPGE (lesquelles devraient développer en réaction ce côté pratique pour éviter que le privé s’en charge).
  7. Le DUT disparaîtra comme diplôme de référence, laissant progressivement place au BUT comme filière universitaire pour les recalés de Parcoursup.

Dans tout ce processus, l’attractivité des IUT pour les enseignants-chercheurs se trouvera encore abaissée, pouvant potentiellement entraîner une fuite des personnels vers les composantes normales, ce qui pourrait déclencher une crise du recrutement.

Un possibilité de sursaut

Le scénario précédent s’accommode bien d’une totale passivité des équipes pédagogiques. Des réactions sont en effet peu probables au vu de l’attachement déclinant des enseignants à leur métier. Cependant, il n’est pas impossible que certains départements ou certaines filières s’organisent pour conserver leurs exigences pédagogiques.

Plutôt que de jeter leurs anciennes maquettes pédagogiques exigeantes, les équipes pourraient en effet avoir intérêt à les transformer en des diplômes propres, toujours à 900 heurs/an et toujours à destination des étudiants se destinant aux écoles : c’est-à-dire avec une baisse de la mixité, mais à la hausse. La perte de la marque « DUT » ne devrait pas être un grand problème, dès lors que cette marque s’affaibli de toutes façons et que des écoles peine à faire le plein.

Bien sûr, conserver un tel nombre d’heures par an ne pourra pas se faire sans une contribution des familles, ce qui permettra d’obtenir la bienveillance du ministère et des présidences.

Conclusion (et pourquoi Bachelor, au fait ?)

Pour résumer, la survie du DUT semble illusoire. Un DUT mais avec d’autres étudiants, d’autres finalités et d’autres volumes horaires n’est plus un DUT. Même s’il en conserve le nom, sa réputation sera condamnée, hormis certaines exceptions propres aux spécialités et bassins.

C’est d’ailleurs le sentiment qui ressort clairement de l’enquête menée en juin 2019 sur la perception de la réforme par les enseignants en DUT, et n’ayant reçu que 112 réponses. Près de 80% des répondants se sont déclarés « très inquiets » ou « sans espoir » sur l’avenir du DUT. Le pourcentage de personnels « sans espoir » dépasse même le pourcentage cumulé d’« enthousiastes » et de « totalement confiants ».

Plus intéressant encore dans cette enquête, parmi différents aspects de la réforme, le passage au Bachelor est celui qui est perçu comme le moins compréhensible, présentant le moins d’opportunités favorables et le plus de risques. Il est même jugé « dangereux » pour la moitié des répondants.

C’est pourtant le choix qui vient d’être fait par Frédérique Vidal, et il doit également être interrogé.

L’enquête sur la perception de la réforme est toujours ouverte à la consultation.

Ajouts tardifs

  • Lors de sa conférence de presse de rentrée, Mm. Vidal a confirmé l’hypothèse de gestion des flux.

  • Confirmation dans un communiqué de l’ADIUT de l’hypothèse de gestion des flux : « Les programmes doivent permettre l’accueil d’au moins 50% de bacheliers technologiques en 1A d’IUT et la réussite de tous les étudiants et plus particulièrement d’au moins 70% des bacheliers technologiques. »

La formulation est intéressante, puisqu’elle assure que lors des évaluations, un taux de réussite des bacheliers inférieur à 70% pourra être attribué au non-respect des programmes, avec de possible conséquences financières.

  • En fouillant des publications relatives au deuxième Colloque de Caen de 1966, on peut trouver que les IUT étaient dès le départ envisagés comme une voie d’accès aux écoles.

 

Bilan 2018-2019 (I) : Parcoursup, année 2

La seconde édition de Parcoursup se sera donc déroulée dans des conditions parfaitement normales.

C’est à n’y rien comprendre

La nouvelle présentation des indicateurs de classement à destination des candidats n’a certes pas eu le succès espéré : « liste d’attente » ou « liste d’appel », ces informations ont démuni les candidats plus qu’elles ne les ont rassurés. Comment en serait-il autrement, alors qu’on fourni à des humains les valeurs intermédiaires d’une algorithme informatique, parfaitement inutilisables pour prendre une décision ?

Ajoutons la grande nouveauté de cette année : l’anonymisation des candidatures, décidée par le ministère au milieu de la procédure. Mauvaise idée sur le fond, mitée à la base (seules les filières dites « non sélectives » sont concernées, et encore ni pour les pièces complémentaires, ni pour les établissements d’origine –tiens-tiens !-), la nouveauté est déjà oubliée.

To bug or not to bug…

Plus inquiétant, dès les premiers jours de la campagne, le ministère a dû réinitialiser les propositions d’affectation pour quelques 400 formations. Des dizaines de milliers de candidats ont donc reçu une proposition d’affectation, avant qu’on leur la retire aussi sec. Combien exactement ? Nous le saurons jamais, et cela « amuse beaucoup » la ministre.

Mais doit-on parler d’un bug ? Frédérique Vidal regrette « une erreur humaine qui n’aurait pas dû se produire ». Mais lorsqu’on organise l’affectation de 900 000 candidats à 14 000 formations, l’erreur humaine est évidemment inévitable. De nombreux candidats ont mal cliqué, mal compris les consignes ; de nombreuses formations ont mal classé les candidats, mal configuré leur recrutement. Et ils continueront de le faire. Les informaticiens le savent bien, ce qui fait la solidité de la procédure, ce n’est pas l’absence d’erreur humaine, mais la somme des contrôles permettant de les corriger.

Or, ces contrôles ont été lourdement affaiblis. L’affectation d’APB était faite « offline » : les candidats hiérarchisaient leurs vœux, puis le ministère procédait à l’affectation entre ses murs, et prenait le temps de contrôler les résultats avant de les publier. Au contraire, Parcoursup est « online » : pour arriver au même résultat, on organise un dialogue constant entre les candidats et le ministère « en temps réel », démultipliant dramatiquement les interactions, quotidiennement pendant des mois. Or, chaque interaction est l’occasion d’une « erreur humaine ». Ces erreurs sont donc naturellement démultipliées, sans possibilité de contrôle à tête reposée. Cette année, la volonté politique d’accélérer la procédure en la faisant commencer plus tôt a encore réduit le temps consacré au contrôle, avec le résultat que l’on sait.

Parcoursup réussit donc le triple exploit d’être moins compréhensible, plus lent et moins fiable que la procédure qu’il remplace. Quel progrès ! Preuve ultime que cette procédure est fondamentalement mitée : l’organisation d’une campagne téléphonique pour résoudre les problèmes. En avait-on besoin du temps de RAVEL ? Gageons simplement que les « bugs » des prochaines années seront moins spectaculaires, à défaut d’être de moindre ampleur… Car nous ne pourrons pas nous en débarrasser.

… Là n’est pas la question.

Mais l’important est ailleurs. Certes, toute comparaison avec l’an dernier a soigneusement été rendue impossible par le ministère, d’abord par une modification de la présentations des chiffres (rendant les choses encore moins précises), puis par une modification directe des chiffres : 898 054 candidats et 6,9 millions de vœux le 17 mai, juste avant l’ouverture de la campagne, mais 788 845 candidats (-110 000) et 7,4 millions de vœux (+0,5) juste après son ouverture, le 21 mai.

Cette manie de manipuler les chiffres pour rendre tout suivi impossible finira par lasser les journalistes.

Parmi les disparus des chiffres, les adultes en reconversion ont été le « public surprise de Parcoursup » cette année. On aura sans doute mal compris les déclarations d’amour à la « formation tout au long de la vie ».

En regardant les bilans de l’an dernier, on comprend l’urgence à ne pas mesurer leur affectation. Car l’éviction y est d’ores et déjà constatée. Les fiches du SIES à ce sujet le prouvent : « Les bacheliers des années antérieures […] sont moins nombreux à s’inscrire pour la première fois en première année de cursus licence cette année, les universités ayant centré leur effort sur l’augmentation de la capacité d’accueil de néo-bacheliers » [NF_13] ou encore « Face aux contraintes de capacité, une partie des étudiants semble s’être reportée vers des formations non universitaires » [NI_2019-06].

On aura sans doute mal compris « Le principe, c’est de dire oui à tout le monde ».

Nuançons tout de suite : les admissions continuent de grimper de plus de 7% [NF_20], dans ce qui ressemble plus à une baisse d’attractivité qu’à une plus grande sélectivité. D’ailleurs, la spectaculaire baisse de 13% des bacheliers technologiques ne concerne en réalité que 1 600 lycéens. L’éviction est donc seulement symbolique, et le (secret) espoir des universités de contrôler leurs flux d’entrée a été douché.

Une éviction de principe, donc, ne rapportant aucun gain concret. Pas sûr qu’on doive en être fiers.

Bac to the future

Mais supposons, comme le prétend le ministère (se défaussant si inélégamment de ses propres responsabilités), que désormais « les universités » peuvent « centrer leur effort » sur telle ou telle population, indépendamment du droit à la poursuite d’étude conféré par le Baccalauréat.

Dès lors, que reste-t-il du Bac en tant que premier grade universitaire ? Plus rien, si l’on en croit la perspective adoptée par M. Blanquer, consacrant dans sa réforme du lycée et du bac la spécialisation des lycées, mais aussi des lycéens. Le bac national ainsi laminé laisse place à « un Bac par établissement », ou plutôt même « un Bac par lycéen ».

Que voulez-vous que nous fassions de « un Bac par lycéen » dans le supérieur ? Certainement pas l’utiliser comme garantie de l’acquisition d’un socle commun de connaissances, pré-requis à l’acquisition de connaissances universitaires…

S’il est difficile de comprendre en quoi cette réforme est « une opportunité absolument incroyable » (sic) pour les lycéens, au moins pour les universités l’opportunité est claire : elles peuvent désormais compter sur le tri continu mis en place de la seconde à la terminale pour préparer Parcoursup. La sélectivité de certaines spécialités -par leur rareté géographique, leur fort taux de demande ou leur difficulté (près de deux tiers des lycéens demandent mathématiques, dont le programme sera « plus exigeant »)- seront des indicateurs fort de « mérite » scolaire des candidats, fort pratiques pour trier les candidatures.

Alors nous trierons les lycéens selon leur filière, spécialités et établissement. Et les lycées les pré-trieront pour nous.

Mais n’est-ce pas déjà ce qu’on avait commencé à faire avec la « Fiche Avenir » et l’utilisation hasardeuse des notes de contrôle continu ? Certains y trouveront sans doute un progrès, mais chacun sait bien qu’in fine, ce n’est qu’une adoption de l’inégalité organisée des systèmes primaires et secondaires.

Et STAPS fut sport

Il faut reconnaître à la C3D STAPS une constance dans l’effort et une fidélité à l’esprit sportif : après avoir pris soin de définir et publier (et donc assumer) les règles du jeu, voici « un bilan de réussite de la première promotion ParcourSup en STAPS » chez Didier Delignières.

C’est, à ma connaissance, le seul bilan disponible actuellement. Saluons-le. Mais gageons aussi que si des résultats formidables avaient été obtenus nationalement en terme de passage des étudiants d’un semestre à l’autre, les clairons du ministère se seraient fait entendre.

Ce bilan STAPS est riche d’enseignement : si on peut observer une amélioration des taux de réussite de 8% au niveau national, il est impossible de l’attribuer pleinement à Parcoursup, sinon par le net accroissement du pourcentage de bacheliers généraux parmi les admis, c’est-à-dire l’éviction des autres candidats, moins bien armés pour réussir leurs études supérieures du fait d’un enseignement secondaire inadapté.

Pour peu que ces candidats se soient reportés dans d’autres filières universitaires, l’impact en terme de taux réussite global sera nul.

Les deux autres pistes d’amélioration de la réussite étudiante sont sèchement éliminées : les étudiants en « parcours de réussite » (ou « oui si »), tant vantés par la ministre, décrochent deux fois plus et réussissent deux fois moins que ceux en parcours normaux ; et la sélection « plus humaine », c’est-à-dire plus individuelle, n’a aucune pertinence autre que statistique.

Relation entre le rang de classement sur Parcoursup et la moyenne générale obtenue au premier semestre (données collectées et mises en forme par F. Favret pour la Faculté des Sciences du Sport de Strasbourg). Source : http://blog.educpros.fr/didier-delignieres/2019/08/04/un-bilan-de-reussite-de-la-premiere-promotion-parcoursup-en-staps/

Il est presque cruel pour les promoteurs du classement individuel de constater ainsi clairement que des étudiants classé en tête de peloton (oserais-je dire « premiers de cordée » ?) obtiennent des résultats inférieurs à des étudiants classés 1800 places derrière eux. En effet, et c’est bien peu pratique, chaque candidat Parcoursup se moque bien de la corrélation entre classement et réussite dans sa cohorte. Seul lui importe le fait d’être admis s’il peut réussir, ce que cette méthode ne garanti pas.

Mesurer l’ampleur de cette injustice se fait aisément sur ce graphique. En supposant qu’on ait limité les admissions au rang 1000, les candidats peuvent être partagés en quatre groupes, ou plutôt deux :

  • les recrutements réussis : les admis qui réussissent (rang < 1000, moyenne > 10) et les refusés qui échouent (rang > 1000, moyenne <10) ;
  • les recrutements ratés : les admis qui échouent (rang < 1000, moyenne < 10) et les refusés qui réussissent (rang > 1000, moyenne > 10) ;

Chaque paire de candidats dans ce deuxième groupe est une injustice, un échec du système à faire réussir ceux qui le peuvent, avant même de leur avoir laissé une chance. Leur nombre ne sera jamais mesuré puisque le groupe « refusés qui réussissent » n’existe par nature pas. Mais on voit là le caractère indéniablement faillible de cette méthode d’admission. On voit là également l’importance des capacités d’accueil : plus elles sont basses, plus le système est injuste.

L’intégration des IFSI (Institut de formation en soins infirmiers) n’a d’ailleurs pas manqué d’être accompagnée de son lot de malheurs : « Parcoursup : recalée de 48 IFSI après une classe prépa, elle écrit à Emmanuel Macron ».

Les universités mises sous tutelle pour les capacités accueil ?

On l’a vu, les capacités d’accueil des formations sont donc fondamentales à la justice du système. Rappelons, non sans lassitude, qu’avec des capacités d’accueil suffisantes, ni Parcoursup, ni la loi ORE ne sont nécessaires. Il s’agit donc objectivement d’organiser l’injustice du système, par des capacités d’accueil parfois généreuses, parfois restreintes.

Or, il a été facile de constater la perte d’autonomie de mon université (ne généralisons pas) sur la définition de ses capacités d’accueil. Symptôme de la gouvernance moderne, cet extrait de PV exposant les moyens obtenus auprès du ministère pour l’an prochain en est presque comique :

Il est clair à cette lecture que nous ne sommes plus du tout dans un contexte de subvention globale et de responsabilité locale des universités, mais dans un contexte de pilotage très fin, directement par l’Etat, de l’utilisation des moyens. Cette reprise en main est revendiquée par le ministère lui-même dans sa réponse adressée à la Cour des comptes pour la Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2018 de la Mission recherche et enseignement supérieur :

C’est donc désormais le ministère qui décide directement des places financées par les moyens publics, limitant la capacité de développement et de spécialisation pédagogiques des universités aux formations financées sur ressources propres, c’est-à-dire payées par l’étudiant, que ce soit directement en frais d’inscription, ou par sa force de travail avec l’alternance.

Et dans les territoires très très éloignés… Les Campus connectés

Cette allocation fines des moyens par l’Etat ne se limite d’ailleurs pas aux universités, mais s’étend à différents dispositifs, dont les « Campus connectés », sortes d’antennes universitaires implantés dans des territoires reculés, dépourvus d’infrastructures universitaires, et dont la mission est de s’occuper les candidats refusé de toutes les formations sur Parcoursup.

Ces antennes sont dépourvues d’infrastructures, et donc d’enseignants, universitaires. Elles sont, en revanche, mandatées pour délivrer des diplômes universitaires bien réels, mais encore avec « un ambitieux objectif de 100 % de réussite aux examens » ! Annoncer un futur taux de réussite aux examens avant même la création du dispositif, il fallait oser ! On mettra de côté ce que cela comporte de jugement pour le travail des universitaires, si tout le monde peut le faire avec un meilleur taux de réussite.

Au moins pourra-t-on expliquer simplement l’appellation « campus connectés » : étaient déjà pris « campus numériques » en  2002, puis « campus d’avenir » en 2015.

Résumons

Sur le plan de la formation, du côté positif, Parcoursup affecte des étudiants dans l’enseignement supérieur, et la prochaine rentrée, comme la précédente, aura lieu. Du côté négatif, Parcoursup est un système :

  • moins compréhensible, plus lent et moins fiable que le précédent ;
  • nécessitant beaucoup plus d’efforts, tant en terme d’accompagnement des candidats que de tri des candidatures ;
  • s’appuyant pleinement sur les inégalités du secondaire, grâce à une réforme du bac qui semble conçue en ce sens ;
  • mais dont la méthode d’admission est faillible et donc injuste du point de vue individuel en cas de pénurie de places, conduisant forcément à l’éviction de candidats qui auraient réussi ;
  • et dont le volet pédagogique (« parcours de réussite »/« oui si ») est inefficace ;
  • réduisant la seule efficacité en terme de taux de réussite à l’éviction des candidats provenant des filières les moins adaptées à la poursuite d’études supérieures ;
  • lesquels candidats ne se voient rien proposer d’autre que des campus sans universitaires ;
  • mais ne représentent qu’une minorité, et dont l’éviction est limitée par un contrôle fin du nombre de places directement par le ministère ;
  • réduisant ainsi l’autonomie des universités dans le domaine de la formation ;
  • au grand dam des universitaires qui ont accepté cette réforme dans l’espoir d’améliorer leur recrutement et leur condition d’enseignement.

On aurait sans doute tort de considérer tout ceci comme de simples échecs, conséquences de l’incompétence des décideurs ou des exécutants. On n’aurait pas plus raison d’y voir seulement un des résultats de l’hostilité officielle du gouvernement envers tous les services publics. 

Nous devons donc y chercher une logique, une réussite, une opération sensée, justifiant ces sacrifices, comme autant de prix à payer pour atteindre un objectif plus fondamental que la réussite des étudiants.

(A suivre)

 

Lycée : Petit manuel de choix des spécialités à l’usage des futurs candidats à l’enseignement supérieur

[ MAJ 17/11/2019 avec les spécialités pour les CPGE selon le ministère ]

Vous êtes au Lycée et vous devez choisir 3 spécialités pour votre Première, puis seulement 2 pour votre Terminale. Ce choix va conditionner vos chances de poursuite d’étude dans l’enseignement supérieur. Ce petit guide a vocation d’expliquer comment.

Comment votre candidatures sera étudiée dans Parcoursup ?

Après votre Bac, pour poursuivre vos études dans l’enseignement supérieur, vous devrez utiliser la plateforme Parcoursup. Vous y indiquerez les formations que vous visez, puis remplirez un dossier un ligne. Ce dossier, vos notes, bulletins scolaires et appréciations de votre équipe pédagogique seront transmis à chacune de ces formations.

Ensuite, chaque formation classera les candidatures en fonction de ces éléments et vous serez admis seulement si votre classement le permet, et ce pour toutes les formations, y compris celles dites « non-sélectives ».

Malheureusement, les méthodes de classement de candidature diffèrent entre toutes les formations, y compris pour une même filière dans les établissement différents. De plus, ces méthodes, appelées parfois « algorithmes locaux », sont tenues secrètes. Vous n’avez donc aucun moyen de savoir précisément comment votre dossier sera examiné, et par extension comment les spécialités que vous aurez choisi impacteront vos chances d’admission.

Cependant, une règle simple peut être établie : plus la formation que vous visez est sélective, plus le choix de vos spécialités aura de l’impact.

Comment peuvent être utilisées les spécialités dans les classements ?

Même si c’est techniquement possible, il est très peu probable que les spécialités soient ignorées dans les classements Parcoursup. Il y a deux façons de les prendre en compte :

  • les points bonus : dans cette approche, on va attribuer un certain nombre de points bonus à chaque spécialité, en fonction de son adéquation avec la formation supérieure. Par exemple, on va pouvoir ajouter 2 points à votre moyenne si vous avez pris des spécialités adaptées, ce qui vous fera passer devant les candidats qui ont la même moyenne mais pas les bonnes spécialités.
  • les spécialités obligatoires : dans cette approche, on va classer en premier toutes les candidatures qui ont pris les spécialités adaptées à la formation. Ainsi, quelle que soit votre moyenne, avec les bonnes spécialités, vous serez classé devant tous les candidats n’ayant pas ces spécialités.

Bien sûr, un mix des deux méthodes est parfaitement possible. Par exemple, on pourra classer en premier tous les candidats qui ont la spécialité A, puis ajouter 2 points à tous ceux qui ont la spécialité B.

Le choix des spécialités conditionne donc vraiment vos chances d’admission dans l’enseignement supérieur, au delà bien sûr du fait qu’elle vous prépare pédagogiquement à y réussir.

Concrètement, quelles spécialités choisir ?

Même si vous ne savez pas exactement comment les spécialités seront utilisées, les choix restent relativement logiques. Inutile d’espérer faire des études supérieures en sciences si vous n’avez pas pris la spécialité mathématiques.

Pour vous aider à choisir, vous pouvez consulter le site www.horizons2021.fr

En sélectionnant les spécialité à gauche, vous pourrez visualiser à droite vos avantages/handicaps indicatifs dans les classements Parcoursup : plus la filière est claire plus vous serez avantagé, plus elle est sombre plus vous serez handicapé dans les classements.

En consultant les sources du site, vous pourrez voir plus précisément les pondérations de chaque spécialité pour chaque filière. Pour rappel, ce sont seulement des indications, et en aucun cas la façon dont les candidatures seront réellement classées.

Pour quelques filières, vous pouvez aussi consulter les recommandations de L’Etudiant.

Diplômes universitaires de technologie (DUT)

Un travail conséquent a été fait pour identifier les spécialités adaptées à chaque filière des Institutes universitaires de technologie (IUT). Attention, ce document n’est ni officiel, ni contractuel. Comme toutes les informations ici, il est purement indicatif.

Pour bien interpréter ce tableau, il faut un peu traduire : « très adapté » = indispensable, « adapté » = pas éliminatoire, « complémentaire » = inutile pour candidater. Notez bien qu’il s’agit seulement des filières IUT, donc courtes et professionnalisantes, ce qui explique la colonne « Littératures, langues et cultures de l’antiquité ». Notez également la colonne « Mathématiques », qui reste la matière incontournable.

Prépas scientifiques

L’union des professeurs de classes préparatoires scientifiques indique qu’il faut « choisir trois spécialités scientifiques : Mathématiques, Physique-Chimie, et une parmi Numérique et sciences informatiques, Sciences de l’ingénieur, Sciences et vie de la terre ».

Plus complet, le ministère publie une liste précise pour toutes les spécialités de CPGE, mais indique clairement que ce sont des conseils qui « ne constituent pas des prescriptions et les établissements sont libres de leur recrutement ».

Première année commune aux études de santé (PACES)

Pour faire des études en santé, on sait seulement que la spécialité SVT va devenir « incontournable ».

Etudes scientifiques, Licences en particulier

La conférence des Doyens et Directeurs des UFR Scientifiques des Universités Françaises recommande « fortement à tous les lycéens qui envisagent des études scientifiques de choisir l’option “mathématiques” pour l’année de première » ainsi que « la conservation des mathématiques en terminale ».

La paire qui ferme le moins de portes est Mathématiques + Physiques Chimie, cependant un choix devra être fait entre Physique Chimie et SVT en terminale pour une poursuite d’étude en Sciences de la vie et/ou de la terre.

Faut-il changer de lycée pour obtenir une spécialité ?

Tous les lycées ne proposeront pas toutes les spécialités, et certaines spécialités ne seront disponibles qu’en changeant de lycée, voir d’académie. Vous pouvez consulter cette carte pour voir les spécialités offertes par les lycées.

Néanmoins, les spécialités les plus importantes seront probablement disponibles partout. Les spécialités plus rares seront moins avantageuses/handicapantes dans les classements Parcoursup. Changer de lycée pour cette seule raison ne semble pas, pour l’instant, recommandé.

Cependant, vous pouvez tout à faire prendre cette décision pour des raisons d’intérêt pédagogiques : si vous souhaitez absolument faire de l’informatique, pourquoi ne pas en faire tout de suite en allant dans un lycée qui propose cette spécialité ?

Gardez cependant en tête que les lycées sont de niveaux très différents : changer pour obtenir une spécialité au prix d’une baisse de niveau, tout comme choisir une option qui ne vous plait pas seulement pour changer de lycée, sont des choix qui doivent être scrupuleusement pesés. 

Faut-il choisir des spécialités dans deux domaines différents ou changer de spécialité entre la Première et la Terminale ?

Indécis, on peut être tenté de choisir des spécialités dans deux domaines différents, comme Arts et Sciences de l’ingénieur par exemple, ou de changer de spécialité. Du strict point de vue des chances d’admission dans l’enseignement supérieur, cela représentera un handicap certain. Cependant, d’un point de vue pédagogique, c’est un choix qui vous revient.

Le nouveau lycée vous offre plus de liberté, l’opportunité de construire votre parcours plus tôt… Mais cette liberté vient nécessairement avec les responsabilités afférentes : ces décisions qui vous sont demandées auront des conséquences.

Dont-on avoir peur ? Peut-on changer d’avis ensuite ?

Oui et non. Ce sont clairement des décisions importantes. Cependant, ce système est encore neuf, et jusqu’à présent le système de formation français tirait sa force de ses possibilités de ré-orientation. Ces possibilités de ré-orientation continueront de s’offrir à vous, y compris après votre admission dans l’enseignement supérieur.

De plus, l’Université reste encore très ouverte, et malgré ce que vous pourrez entendre, propose des formations d’excellente qualité. Quelles que soient les spécialités que vous choisirez, vous y aurez encore un large choix de formations.

Enfin, n’oubliez pas que les équipes pédagogiques sont là pour vous accompagner. Rapprochez-vous de vos enseignants pour recueillir leurs conseils puis forgez votre propre avis. Plus vous vous intéresserez à votre parcours, plus vos choix seront faciles à faire… Mais vous ne pourrez jamais contrôler totalement leurs conséquences. C’est peut-être votre premier choix d’adulte.

Rapport au parlement du Comité Ethique et Scientifique de Parcoursup

Publié ce jour, le rapport au parlement du Comité Ethique et Scientifique de Parcoursup est une lecture indispensable pour saisir les enjeux de notre nouveau système d’orientation, et par extension d’éducation nationale.

Le rapport se pose d’entrée de jeu un cadre strict : celui de ne pas discuter des orientations et dispositions de la loi Orientation et Réussite des Etudiants. Lu en regard de ce cadre, il est le document le plus complet et le plus transparent sur Parcoursup produit à ce jour. Les auteurs ont pu accéder à des données précises et les ont analysées avec rigueur, notamment pour étudier l’impact des quotas. 

Beaucoup trop long pour être entière résumé, on pourra cependant retenir quelques informations :

  • Un algorithme d’affectation n’est pas une solution à des problèmes structurels, tels que le manque de place dans les filières les plus demandées.
  • APB ne présentait pas réellement de problème structurel, mais des « « bricolages » divers et variés au fil des campagnes » (et du bashing) ont ruiné sa réputation à tel point qu’il n’était plus acceptable.
  • Sur le plan technique, la campagne s’est déroulée sans accroc ni bug majeur, ce qui témoigne de la compétence et de la mobilisation des membre de l’équipe de mise en oeuvre.
  • Parcoursup se distingue singulièrement des systèmes étrangers par la non hiérarchisation à priori des vœux des candidats, l’importance de « l’intervention humaine », son « calendrier qui se termine […] trois semaines après la rentrée universitaire« , ainsi que par l’absence de transparence sur les critères de classement des candidatures.
  • Si tous les bacheliers ont un droit théorique à une formation supérieure, une réelle sélection a été mise en oeuvre. Les territoires ont d’ailleurs établie leurs propres stratégies, qui se voit notamment dans les quotas de boursiers et de candidats hors académie.

Sélection

La sélection par filière se voit particulièrement bien sur la Figure 6 (p. 71) : on y voit clairement un détournement d’un flux étudiants des Licences vers les formations professionnalisantes courtes (BTS et DUT).

Un exemple de sélection territoriale se voit également très bien sur la Figure 14 (p. 93) : Paris a sensiblement réduit sa part dans les admissions (de 40% à 36%), répartissant le surplus sur Créteil et Versailles. La sectorisation en région Île-de-France vient d’ailleurs d’être supprimée, ce qui laisse désormais le champs libre à ces modifications.

Globalement, le rapport décrit bien comment les quotas ont été utilisés dans le cadre de ces transformations. Entre les lignes, les rapporteurs insistent sur la nécessité de limiter l’usage des quotas à cet effet, d’abord en les rééquilibrant puis en assurant leur transparence (Proposition 13, p. 94).

Transparence

Si les rapporteurs insistent sur le progrès incontestable que représente la publication de l’algorithme national Parcoursup et la création d’un traitement de données Parcoursup à des fins de recherche ORISUP, ils semblent regretter l’absence de transparence, notamment sur les quotas et les méthodes de tri des candidatures par les formations. Ils indiquent ainsi clairement que le « principe de transparence » est une des quatre conditions à l’acceptation d’une procédure « juste » par les citoyens.

A défaut de remettre en cause l’exception introduite dans la loi ORE pour (officiellement) « garantir la nécessaire protection du secret des délibérations« , les auteurs préconisent de rédiger un guide encadrant et publicisant la nature de ces méthode, ainsi que d' »inciter les établissements à élaborer un rapport annuel au rectorat rendant compte notamment des procédures locales (manuelles et informatiques) » (Proposition 5, p. 47). Il s’agit en effet des seules marges de manœuvre face au secret prévu par le Ministère.

Conclusion

En conclusion, les auteurs préconisent le développement du champ de recherche sur l’Enseignement supérieur, notamment en améliorant la collecte et l’accès aux données sur l’orientation et le devenir des bacheliers (Proposition 15, p. 107).

Il ne s’agit là que d’un petit échantillon des informations qu’on peut trouver dans ce rapport, aussi riche que détaillé. Ce billet n’en dispense donc en rien la lecture. Pour aller plus loin dans une ambiance plus décontractée, on pourra cependant aussi se reporter à mon fil twitter ou sa version déroulée.

Enfin, si les modifications introduites dans l’orientation par la loi ORE et son outil Parcoursup se voient déjà dans les statistiques d’admission dans l’enseignement supérieur, elles doivent avant tout être appréciées en regard de la réforme du Lycée qui se met en ce moment même en oeuvre. Le choix de spécialités par les lycéens et la spécialisation des lycées sur les territoires devraient en effet parfaitement s’articuler avec la double sélection montrée dans ce billet : à la fois par filière et par territoire.

 

La loi ORE : un formidable terrain d’étude pédagogique

Maintenant que les affectations sont (presque) finies dans l’enseignement supérieur, la communauté va pouvoir se concentrer sur le second volet de la loi Orientation et Réussite des Etudiants (ORE) : la réussite des étudiants, seul et unique objectif affiché de la réforme. Quelques minutes de travail par filière permettraient d’améliorer significativement ce volet. Pourtant, ce petit travail ne sera peut-être pas fait. Voilà comment.

Améliorer la réussite par l’orientation et l’acompagnement

L’amélioration de cette réussite s’appuie sur deux dispositifs : une meilleure orientation grâce à l’examen des dossiers de candidatures, et un meilleur accompagnement grâce aux mesures d’accompagnement personnalisé (ou « oui si »). L’absence quasi-totale de cadrage national en ce qui concerne ces deux dispositifs est très favorable à l’expérimentation et à la diversité des approches. En effet, chaque filière est totalement libre dans sa façon de classer les candidatures, comme dans l’élaboration des mesures d’accompagnement et la sélection des étudiants qui devront les suivre. La France est ainsi devenu un formidable terrain d’étude pédagogique : nous allons pouvoir, à l’échelle d’une nation, connaitre les techniques d’orientations et les mesures d’accompagnement qui fonctionnent et sous quelles conditions.

Cependant, faire émerger cette connaissance implique que soit, dès cette année, mise en oeuvre une méthode d’évaluation standardisée. Sans cette évaluation, nous commettrions la même erreur que pour le plan pour la réussite en Licence, dont aucun bilan n’a jamais été tiré et qui n’a jamais réellement permis de faire émerger de la connaissance à l’échelle nationale. Ce défaut de bilan explique en partie pourquoi la loi ORE en reprend encore les termes 10 ans plus tard.

Les connaissances à produire à l’échelle nationale

Dans l’idéal, il faudrait répertorier la totalité des techniques d’orientation, de sélection et d’accompagnement, et d’arriver à les caractériser en terme d’efficacité, sans manquer de les mettre en perspective avec les particularités locales et autres biais inévitables. Un tel travail serait profitable à l’ensemble de la communauté, en permettant à chaque formation d’améliorer ses propres procédures et pratiques, de découvrir de nouvelles idées, comme d’éviter les fausses bonnes idées qui sont légion dans le domaine.

C’est ambitieux. Trop sans doute, sauf à compter sur un important support du ministère. Il s’agit donc d’adopter une approche plus modeste.

Enquête de terrain ou statistiques nationales ?

Lorsqu’on en vient à l’enseignement, deux approches sont possibles.

D’une part, les enquêtes de terrain permettent d’avoir une vision fine, comprenant les trajectoires individuelles et prenant en compte les biais, mais limitée dans le temps et l’espace. Par exemple : [« Essai de mesure de l’efficacité différenciée d’un plan « Réussite en licence » selon les acquis initiaux des étudiants », Cathy Perret, Julien Berthaud et Stéphanie Benoist] ou [« L’Université n’est pas en crise. Les transformations de l’Enseignement supérieur : enjeux et idées reçues », Romuald Bodin et Sophie Orange].

D’autre part, les grandes enquêtes statistiques permettent de dégager des tendances et d’identifier des particularités, mais sans comprendre les biais, réalités locales et trajectoires individuelles. Par exemple: [Réussite et échec en premier cycle, note d’information MESR ] ou [Repères & références statistiques sur les enseignements, la formation et la recherche 2018, DEPP].

Pour caricaturer, on peut donc identifier des réalités à grande échelle mais sans les comprendre, ou les comprendre mais sans les identifier à grande échelle. Malheureusement, aucune de ces deux approches n’est satisfaisante

Statistiques nationales et enquêtes de terrain ciblées

Un enquête de terrain au niveau national étant impossible à mener, il faudra se limiter à une enquête statistique nationale, qui doit permettre d’identifier les filières qui ont obtenu des résultats particuliers. Cette identification permettra ensuite de mener des enquêtes de terrain ciblées, ou à défaut, d’obtenir des informations plus précises sur les mises en oeuvre qui ont conduit à des résultats remarquables.

Par chance, les statistiques nécessaires sont déjà disponibles ! En effet, les établissements font déjà remonter tous leurs taux de réussite au niveau national [#DataESR], déclinés en fonction du profil des étudiants. Il s’agit simplement de faire la même chose, mais décliné selon les filières et mesures d’accompagnement. Pour bien faire, il faudrait aussi simplement calculer le taux d’abandon, qui est une statistique dont dispose les établissements mais qui n’est pas remontée au national.

Très concrètement

Très concrètement, il suffirait donc que chaque filière fasse remonter, pour chaque parcours, ces trois informations :

  • Inscriptions : nombre d’inscrits dans la formation
  • Présences aux examens : nombre de présents aux examens (c’est la donnée manquante au niveau national)
  • Passages : nombre ayant validé leur année/semestre.

Ces trois informations permettent de calculer les :

  • Taux d’abandon = Présences aux examen / Inscription
  • Taux de réussite = Passages / Présences aux examen ou Passages  / Inscription

Pour démontrer la simplicité de ces informations, voici un document en ligne et une version téléchargeable (en version annualisée et semestrialisée), que tout un chacun peut réutiliser.

Ainsi, une comparaison entre les statistiques de cette année et celle de l’an dernier permettent d’identifier rapidement les techniques d’orientation, de sélection et d’accompagnement qui obtiennent des résultats hors du commun, dans la perspective de les étudier de plus près.

Si ces informations peuvent être facilement remontées au ministère et publiées en ligne, cela impliquera des délais prohibitifs, de l’ordre de deux ans. Or, c’est dès cette année qu’il nous faut des élément de décision, afin d’améliorer la rentrée prochaine. C’est pourquoi les établissements, au travers de leur commission de la formation (CFVU), devraient sans attendre mettre en place une telle collecte. Les premiers résultats peuvent être obtenus dès janvier prochain, à la fin du premier semestre, ce qui laisserait assez de temps pour préparer la rentrée de septembre 2019. La CPU pourrait également impulser cette action.

Quels sont les risques ?

Il existe donc un initiative qui ne coûte rien, qui est facile à mettre en œuvre et est indispensable pour progresser… Pourtant il est possible qu’elle ne soit pas concrétisée. Deux risques se font face :

D’un côté, il existe le risque de se diriger vers une réforme bancale, impossible à faire aboutir, faute de disposer des outils permettant de l’améliorer et d’en tirer le meilleur.

D’un autre côté, il existe un risque de découvrir que les bénéfices de la réformes sont faibles en regard de ses défauts, qu’elle est un échec, et non pas en raison d’un défaut de mise en oeuvre, mais d’un défaut structurel.

Ce sera aux acteurs des universités, du ministère aux équipes pédagogiques, en passant par la CPU et les CFVU, de peser le pour et le contre de ces deux risques et de prendre les décisions qui s’imposent.