Les stages en entreprise : alpha et omega de l’insertion professionnelle pour les jeunes ?

L’enseignement supérieur français a, depuis plusieurs dizaines d’années, massivement développé le principe des stages en entreprise; le stage est devenu le cœur de l’insertion professionnelle. A Centrale Paris par exemple, il y a 15 ans, il y avait en tout et pour tout 4 mois et demi de stage pendant les 3 années de scolarité : 6 semaines de stage opérateur en 1ère année, et 3 mois de stage de fin d’étude.

10 fev 13_1Aujourd’hui, la majorité des étudiants de Centrale Paris passent 22 mois en stage (8 mois de stage de fin d’étude, 12 mois en année de césure, et le stage opérateur), et certains atteignent le chiffre de 28 mois (2nde année à moitié en stage entreprise). La conséquence a été bien sûr une réorganisation de la scolarité, combinant à la fois étalement dans le temps et intensification.

 

Les stages s’imposent peu à peu dans toutes les années de formation supérieure, et sont désormais massivement pratiquées à l’Université. Les grandes écoles n’en ont plus le monopole, loin de là.

Notons d’ailleurs que le stage reste largement une spécificité française ; même si des équivalents peuvent se trouver en Grande Bretagne (summer internships), en Espagne ou en Allemagne (sous la forme assez différente de l’alternance), le recours massif à des périodes complètes en entreprise pendant les études reste encore particulier à la France.

Temps fort du dispositif : le stage de fin d’études, qui est un passage presque obligé pour la plupart des écoles, d’ingénieurs et de commerce. Il constitue un temps fort de la scolarité, et se présente comme un sas, une transition entre les études et la vie professionnelle.10 fev 13_4 entreprise

Souvent aussi, le stage focalise beaucoup d’inquiétudes chez les étudiants: comment vais-je trouver mon stage ? Comment savoir si ce stage sera intéressant et formateur ? Mon stage débouchera-t-il sur une embauche ? Ce stage va-t-il déterminer la suite de ma carrière professionnelle, notamment en m’engageant dans un secteur dont j’aurai du mal à sortir ensuite ?

 

Enfin, les stages restent critiqués, notamment à gauche, comme étant une manière pour les entreprises de se procurer de la main d’œuvre à bon marché ; selon ces critiques, bien des stages seraient du sous-travail, peu formateur. En somme le système des stages contribuerait à la précarisation du marché du travail.

Cependant, ces dernières années, j’ai observé, à partir de mon expérience à l’Ecole Centrale Paris, que d’autres modalités d’insertion en entreprise, distinctes du stage, se sont rapidement développées.

10 fev 13_2On voir apparaître en effet, parallèlement à l’allongement et à la multiplication des stages, un mouvement fort de diversification des formes de mise en relation entre les étudiants et les entreprises. Dans ce contexte, le stage garde sa place centrale, mais s’insère dans un dispositif plus large d’insertion.

 

La question clef à mes yeux est celle de l’orientation du jeune : dans quel secteur, quel métier, quelle position va-t-il se réaliser ? Et du coup réussir ?

Le stage est un puissant contributeur à cette orientation, mais il constitue un choix lourd, et doit être préparé. Il est dommage pour un étudiant d’engager 6 mois de ses études dans une voie choisie au hasard des rumeurs de campus, sans véritable décision, sur un effet de mode. C’est un cas que nous voyons malheureusement trop souvent.

Il nous semble, à Centrale Paris, que le stage doit être préparé par des actions de découverte en entreprise, plus légères, qui permettent au jeune de préparer le choix de ses stages ; dans cette perspective, le stage sert principalement à confirmer ou invalider des choix d’orientation préparés en amont.

10 fev 13_4 entrepriseParmi ces modalités plus nouvelles de mise en contact avec le monde professionnel, l’Ecole Centrale Paris a développé des ateliers de Développement Personnel et Leadership, qui permettent aux étudiants de réfléchir, individuellement et en groupe, sur leurs aspirations : quel secteur ? PME ou grand groupe ? Salarié ou entrepreneur ? Quel type de métier ?

Ensuite, l’Ecole propose un ensemble d’activités, qui permettent de valider les hypothèses et les choix qui sont posés en Atelier : projets réalisés avec des entreprises, qui mettent les jeunes en contact étroit avec des professionnels, et leur donnent un avant-goût d’une situation en entreprise. Et aussi un ensemble d’activités plus ponctuelles de mise en relation avec les entreprises : l’Ecole a contractualisé avec plus d’une centaine d’entreprises partenaires, à des degrés divers, qui s’engagent à intervenir sur le campus, présenter leurs métiers, proposer des visites de sites industriels, participer à des forums thématiques, des tables rondes etc … Ces activités se chiffrent en dizaines, et couvrent un très large éventail de métiers et de secteurs.

Face à cette abondance, les étudiants sont parfois perdus. Les ateliers de Développement Personnel jouent un rôle de fil rouge, pour aider ces étudiants à trier, prioriser, choisir.10 fev 13_3 étudiants

Les stages eux-mêmes participent à cette dynamique d’orientation progressive : court stage opérateur en 1ère année, stage international en 2nde année, souvent 2 stages de césure entre la 2nde et la 3ème année : ces périodes sont autant d’opportunités pour tester des voies, vérifier des hypothèses,  confronter rêve et réalité, se  frotter à des interlocuteurs différents.

Le stage de fin d’études, qui est souvent déterminant pour le premier emploi (en termes sectoriels et souvent d’entreprise, le stage de fin d’études se convertissant en contrat de travail dans la majorité des cas) apparaît ainsi comme l’aboutissement d’un long processus d’éclairage et d’orientation.

10 fev 13_6 main businessLe système est largement perfectible encore, beaucoup d’étudiants restant encore hésitants face à la complexité des voies possibles. Néanmoins, l’ensemble des ces actions préparatoires aux stages, plus légères et variées, contribuent à la maturité des étudiants, et humanisent les stages ; en effet, lors des contacts entreprises qui sont organisés tout au long des 3 années de la scolarité, les représentants des entreprises, se font connaître, échangent avec les étudiants dans un cadre informel ; les offres de stages sont présentées aux étudiants de manière personnalisée, commentée et qualifiée : rien à voir avec l’anonymat des sites de recrutement !

La recherche de stage devient alors surtout un processus de rencontre entre des personnes, une découverte humaine.

This entry was posted on dimanche, février 10th, 2013 at 23:08 and is filed under Non classé. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a response, or trackback from your own site.

3 Responses to “Les stages en entreprise : alpha et omega de l’insertion professionnelle pour les jeunes ?”

  1. Olivier Ridoux Says:

    Il est certain que le stage est devenu dans de nombreux cas la réponse réflexe, donc irréfléchie, à la question de la professionnalisation. Les familles, les experts, les tutelles, tout le monde évalue le niveau de professionnalisation d’une formation à son volume de stage.

    Il est devenu impossible d’expliquer que des enseignements par leur contenu même peuvent avoir un caractère professionnalisant. Il est devenu difficile d’assigner au stage un autre rôle que de pré-embauche.

    Cela ne pose aucun problème quand tout va bien : formation intrinsèquement professionnalisante, étudiants confiants en eux et employeurs confiants dans l’économie. Mais si l’un des ingrédients manque sévèrement, il est possible que d’autres solutions que le stage soient plus pertinentes, et pourtant on s’interdit d’y songer.

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