Le recrutement des participants représente l’un des principaux défis du lancement d’un MOOC. Nous sommes bien loin du modèle de l’université où le nombre d’étudiants inscrits est plus ou moins connu à l’avance . Pour un MOOC, c’est une surprise; cela peut aller de quelques centaines de participants à quelques milliers voire plusieurs dizaines de milliers de personnes. Vu que le cours coûte à peu près autant à organiser qu’il y ait mille ou dix mille participants, on comprend que la question du recrutement soit à ce point importante. Deux trois réflexions perso.
Outre le problème de la quantité de participants, il y a aussi la question de leur motivation. Ce problème est parfaitement illustré par les MOOC organisés sur Coursera, où il est rare que plus de 10% des étudiants aillent jusqu’au bout du cours. Autant il est relativement valorisant pour l’ego d’enseigner à 100.000 personnes, autant avoir un taux d’abandon de 90%, c’est plus discutable. Coursera est indiscutablement la méthode la plus sûre pour recruter, avec plus de trois millions d’inscrits au printemps 2013. En revanche, il est clair que nombreux sont ceux qui s’inscrivent à un cours de Coursera sans avoir l’intention de le terminer, et qui finissent par abandonner en voyant la charge de travail que le MOOC implique. En ce qui me concerne, je me suis inscrit à plus de quinze cours sur Coursera, je suis allé au bout de deux. En anglais, cette catégorie de participants porte le nom de lurkers; ce sont des consommateurs passifs, peu engagés dans le cours. Cela ne constitue en aucun cas un jugement de valeur négatif. Comme l’équipe de Coursera le souligne de plus en plus fréquemment, les personnes qui viennent avec l’objectif d’obtenir un certificat sont loin de représenter la majorité des participants. Nombreux sont ceux qui viennent par simple curiosité.
C’est un phénomène assez similaire qui se produit lorsque des médias généralistes – radios, journaux, etc – sont utilisés pour faire la publicité du MOOC. Ils apportent une audience conséquente, mais pas nécessairement des participants déterminés à terminer le cours. Si l’objectif est de pouvoir afficher un nombre d’inscriptions élevé, alors faire de la publicité pour le cours dans les médias est certainement l’approche plus pertinente. Dans ce cas, les communiqués de presse et les interviews joueront un rôle central. L’interview de Rémi Bachelet dans le Figaro l’Etudiant deux jours après le lancement de son MOOC a sans doute eu un impact important sur le recrutement. Le rythme d’inscription avait alors augmenté considérablement dans les heures qui ont suivi sa publication. En revanche, pour obtenir un taux de réussite élevé, quitte à avoir moins de participants, il faut recruter des participants motivés et donc mettre en place une stratégie adaptée.
Il n’y a évidemment pas qu’une seule manière de procéder car chaque MOOC a sa propre spécificité. Bien sûr, les réseaux sociaux et les médias jouent un rôle fondamental, mais encore faut-il savoir qui l’on souhaite toucher. Si l’on souhaite cibler des personnes motivées, il y a deux types de publics: les aficionados des MOOC et les personnes intéressées par la thématique traitée. On peut encore diviser les aficionados en deux catégories: d’une part les passionnés de l’apprentissage (les learnoholics comme disent les anglo-saxons) et d’autre part les professionnels de la formation à distance qui suivent de près l’évolution du phénomène. Pour les aficionados des MOOC, la question du recrutement ne se pose pas; au vu du faible nombre de cours francophones en développement, les annonces de nouveaux cours circulent très vite dans la communauté. Quelques tweets avec le mot-dièse #MOOCfr permettront de faire passer le mot rapidement.
Enfin, reste à trouver les autres personnes intéressées par la thématique. Petit à petit, la proportion de passionnés et de professionnels de l’enseignement en ligne va chuter pour laisser place aux participants venant avec d’authentiques besoins de formation dans le domaine traité. Une des méthodes possibles est de passer par des portails d’annonce de MOOC comme Class Central. Ces portails permettent de suivre l’apparition de ces nouveaux cours, toutes plates-formes et toutes langues confondues. Ils sont particulièrement intéressants pour les MOOC qui ne sont pas sur Coursera, car ils offrent une certaine visibilité à moindre coût (à coût nul à vrai dire). Un simple mail suffit à informer le propriétaire du portail et à faire référencer son MOOC. Difficile d’estimer l’audience qu’ils touchent ou la spécificité en termes de recrutement, mais dans le doute, mieux vaut ne pas négliger cette solution. Enfin, restent les médias et les réseaux spécialisés, revues en ligne, blogs, éditions papier. Nous ne passerons pas en revue l’ensemble des possibilités car il y a une bonne dose d’improvisation et chaque cours a sa propre spécificité. Peu importe la méthode utilisée, chaque opération de communication doit être suivie dès que possible par des outils de clic comme goo.gl ou bit.ly. Ces outils permettent d’estimer l’efficacité d’un tweet ou de tout autre moyen de communication en termes de recrutement et d’adapter en fonction sa stratégie de communication en temps réel. La mise en place d’une stratégie de communication est cruciale pour le lancement du cours.
Rares sont les enseignants qui ont l’opportunité de recevoir une formation en webmarketing, il faut bien l’admettre. Le problème ne se pose pas vraiment pour ceux qui ont la “chance” de se faire héberger par Coursera. Pour les autres, je crains qu’il ne soit pas possible de faire l’économie d’une stratégie de communication efficace. Ceci illustre bien la multiplicité des compétences requises pour organiser un MOOC: on est bien loin du modèle de de l’amphi traditionnel. Il n’est plus suffisant de bien préparer son cours. Maintenant, il faut aller chercher ses étudiants aux quatre coins de la planète, à grand renforts de publicité. L’annonce du MOOC Introduction to Biology d’edX s’apparentait davantage au teaser d’un blockbuster hollywoodien qu’à la simple présentation d’un cours. Une des conséquences frappantes de la mondialisation de l’enseignement: il y a désormais des campagnes du pub pour des cours. Verra t-on un jour des femmes légèrement vêtues nous vanter tel ou tel cours de physique comme on vanterait des produits cosmétiques? L’idée fait sourire. Pour le moment.
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