MOOC: quelle stratégie pour les établissements ?

stratLes établissements d’enseignement supérieur sont de plus en plus nombreux à vouloir se lancer dans l’aventure des MOOC, et se posent la question de la stratégie à adopter.  Compte tenu des moyens limités dont ils disposent, il faut faire des choix. Vaut-il mieux commencer par des cours généralistes pour attirer les internautes, ou se concentrer sur ses spécialités ? Mettre en avant ses stars, ou préférer des professeurs moins renommés mais enseignant des matières plus demandées ? Retour sur les stratégies des uns et des autres.

S’adresser au public le plus large possible en offrant des cours avec peu de pré-requis, c’est la stratégie qui domine pour le moment au sein des établissements américains, il n’y qu’à regarder les cours proposés. Sur Coursera comme sur edX, une grande partie des cours comportent le mot « Introduction »An Introduction to Financial Accounting (University of Pennsylvania), Introduction to Philosophy (University of Edimburgh), Introduction to Logic (Stanford), Introduction to Data Science (University of Washington). De même, l’EPFL a lancé quatre cours de programmation en français. La liste est longue; en suivant ce lien, vous trouverez l’ensemble des cours introductifs proposés par Coursera.

L’objectif sous-jacent est de gagner une base d’utilisateurs aussi vaste que possible, puis d’offrir des cours de niveau plus élevé en se basant sur le succès des précédents. Par exemple, après avoir proposé son cours Introductory Organic Chemistry, l’Université d’Illinois a récemment lancé un cours de niveau plus élevé: Intermediate Organic Chemistry. On observe une dynamique similaire avec les cours de l’Université de Toronto: Learn to Program, the Fundamentals, suivi de Learn to Program: crafting quality code.  En commençant par conquérir un public large puis en se spécialisant, ces établissements cherchent à se positionner comme leaders de leurs domaines à toutes les échelles.

Suivre cette stratégie a cependant un coût, car elle implique d’entrer en compétition avec de nombreux autres acteurs du domaine. Il est possible de jouer dans un premier temps sur les dates de lancement ou sur la langue d’enseignement. Mais au fur et à mesure que les établissements se positionneront sur le terrain des MOOC, il sera de plus en plus difficile de se faire une place au sein des cours introductifs. Certaines universités se positionnent donc d’entrée de jeu sur leurs terrain de spécialité. L’université Sapienza de Rome offre par exemple un cours sur l’architecture italienne: Early Renaissance Architecture in Italy: from Alberti to Bramante. La seconde option consiste à éviter l’anglais pour ne pas avoir à concurrencer sur leur terrain les machines de guerre américaines: c’est ainsi que l’on pourrait interpréter le choix de l’italien comme langue d’enseignement pour le cours La visione del mondo della Relatività e della Meccanica Quantistica.

Quelle que soit la stratégie adoptée, je pense qu’il faut mettre l’accent sur la cohérence des cursus proposés aux étudiants; Daphne Koller, la fondatrice de Coursera, insiste régulièrement sur ce point. Le risque en proposant un cours trop exigeants en termes de pré-requis est d’avoir un public restreint. Même en se plaçant dans  l’optique d’une recherche de visibilité, dans la situation actuelle la taille de l’audience touchée est le principal vecteur de visibilité.

La réputation ne suit pas sur Internet les mêmes règles que dans le monde académique, et certains professeurs peu connus dans le monde académique peuvent devenir des célébrités sur Internet si elles suivent une stratégie efficace. Cependant, rien n’empêche de combiner renommée et acessibilité du cours. A mon avis, le choix d’Eric Lander pour le cours du MIT Introduction to Biology est à interpréter de cette manière. Eric Lander est une sommité internationale en génétique; il représente l’une des personnalités majeures du consortium qui  a rendu public le contenu du génome humain. Il pourrait donner des cours particulièrement pointus dans le domaine, et les cours introductifs pourraient être laissés à des enseignants moins renommés.

Mais il n’en est rien, et le MIT a préféré confier ses cours introductifs à des sommités mondiales pour attirer un public aussi vaste que possible, en combinant la renommée de leur marque à l’accessibilité de leurs cours. C’est dans cette dynamique que nous nous sommes placés avec Rémi Bachelet pour son MOOC d’Introduction à la gestion de projet, et c’est également dans cette dynamique que nous travaillons avec plusieurs enseignants à la mise au point d’un cours d’introduction à la statistique avec R. Mis à part les quelques cours de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne, le terrain de la francophonie est encore relativement dégagé pour les cours introductifs. Profitons-en avant que les américains n’aient terminé de traduire tous les leurs en français.

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