Dans la continuité des MOOC : les académies numériques

Une fois n’est pas coutume, je souhaiterais revenir sur mon parcours, et notamment sur ce qui a été à l’origine de ma thèse sur les MOOC, le projet d’académie numérique Skillwiki. Académie de science, académie de langues, et bien d’autres. Depuis 2008, l’idée d’une plate-forme d’apprentissage où tout le monde pourrait se former gratuitement à n’importe quoi me trotte dans la tête. Retour sur un projet un peu idéaliste et plus si irréaliste …

L’un des principaux déclencheurs a été un stage de recherche de six mois effectué à l’Indian Institute of Science, à Bangalore, de 2008 à 2009. J’ai pu constater la chance que nous avons en France d’avoir accès à un enseignement supérieur gratuit et de qualité, et prendre la mesure de l’inégalité qui existe en termes d’accès à l’éducation entre les pays du Sud et les pays du Nord. Après ce séjour de six mois en Inde, la question de l’accès à l’éducation et à l’enseignement a fini par devenir une obsession, et un projet de site d’apprentissage en ligne gratuit m’a trotté dans la tête pendant plusieurs années. Il y avait deux volets pour commencer: une académie numérique de sciences et une académie numérique de langues. Contrairement aux MOOC qui portent uniquement sur un sujet donné, l’idée de l’académie est de couvrir un ensemble des compétences variées, une forme de socle commun nécessaire pour devenir un bon scientifique, ou pour maîtriser une langue. Un ensemble cohérent de MOOC pourrait ainsi former les bases d’une académie. En 2011-2012, à la fin de ma scolarité, nous prenons une année sabbatique entière avec un ami développeur pour monter le projet.

L’idée n’était pas tant de monter une start-up que de proposer un site qui marchait, et de tester le concept. Malheureusement l’idée n’a pas abouti, d’une part car je ne disposais pas des moyens nécessaires à sa réalisation, d’autre part parce que je manquais d’expérience. Par ailleurs, les américains se lançaient parallèlement dans la création de plates-formes de MOOC comme Coursera, Udacity ou edX. Plutôt que de combattre de front le MIT, Harvard, et des startups américaines dopées aux capitaux, j’ai préféré  me concentrer sur les usages des outils plus que sur leur développement, et j’ai donc enchaîné cette tentative ratée de monter un projet de plate-forme par une thèse sur les MOOC. Pourquoi vouloir créer une vague quand il suffit de surfer sur celle des autres ?

Pour l’académie de sciences, l’idée était de développer des cours en ligne portant sur des compétences transversales nécessaires à mon sens pour faire un bon scientifique : la gestion de projet et les statistiques, entre autres. C’est pour cette raison que je me suis impliqué dans le MOOC Gestion de Projet et que je travaille actuellement sur un MOOC de statistiques. Avec les centaines de MOOC en préparation dans le domaine, je pense que la dynamique est lancée, et qu’il sera possible de devenir un excellent scientifique en ligne d’ici quelques années. Pas besoin de s’inquiéter outre mesure donc. Pour l’académie de langues, l’objectif était de pouvoir apprendre rapidement n’importe quelle langue depuis n’importe quelle langue. Dans la continuité de Busuu ou Livemocha, mais avec plus de langues, plus de fonctionnalités, et totalement gratuits. Cela vaut-il toujours le coup dans le contexte actuel ? Et bien, contrairement à la question de l’académie de sciences, je dirais « oui ». Nous l’avons abordé dans un billet il y a quelques mois, il n’y a pas de véritable dynamique du côté des MOOC de langues, et tout reste à inventer.

Une académie de langues en ligne, gratuite, et basée sur des MOOC de langues, impossible ? C’est ce que l’on disait il y a encore deux ans sur les MOOC, et pourtant. Ce type de projet est bel est bien « impossible » si on développe soit-même le contenu et les outils, c’est un travail titanesque que seules des entreprises ou des Etats peuvent mener à bout. Mais si on ne développe rien,  si on ne fait que reprendre des outils existants, si on réutilise des contenus libres de droits, je suis persuadé que l’on peut faire de petites merveilles à condition d’avoir suffisamment de temps, de détermination, et de savoir-faire (et un peu de chance). Plutôt que de réinventer mille fois la roue, commençons par regarder ce que nous avons à notre disposition et cherchons à voir ce qui peut se combiner. Il faut chercher à détourner ce qui existe déjà, et ne développer qu’en dernier recours. C’est la loi du moindre effort.

D’abord, trouver les bons outils, puis les bonnes ressources pédagogiques, et enfin établir des synergies entre communautés qui ne se connaissent en général pas: les spécialistes des technologies éducatives, les communautés d’échanges linguistiques comme Polyglotte ou les créateurs de ressources pédagogiques libres comme Tatoeba. Des communautés travaillant en synergie, des outils gratuits, des ressources pédagogiques en licence libre. Un peu utopiste n’est-ce pas ? Certes, mais l’époque y est propice.

L’idée de ce projet a largement évolué depuis 2011, il faut continuer à déblayer le terrain. Comprendre mieux le contexte, comprendre le potentiel qu’offrent des outils comme edX (via le projet de Google mooc.org), Knewton et autres. Cela ne se fera pas tout seul, et tout au long de cette année, je réfléchirai à haute voix sur la voie à suivre. D’une part pour m’aider à clarifier mes idées, et d’autre part pour recevoir critiques et suggestions. C’est en discutant avec des amis et collègues que j’ai le plus avancé. Mais pourquoi se limiter à ses collègues alors qu’il est possible d’échanger avec une communauté d’experts via le blog ? De la même façon que des académies numériques de programmation comme Codecademy ont vu le jour il y a déjà quelques temps, les académies numériques de science et de langues finiront par voir le jour, c’est inéluctable. Il faut juste un peu de temps et de patience ….

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