Aujourd’hui, je vous propose un dernier petit billet sur la question du « bilan financier » de la première édition du MOOC. On va se concentrer maintenant sur la fin du projet et la question de la réédition. Nous allons parler bilan, valorisation des ressources de l’équipe (entre autres), et réédition de la formation. Comment termine-t-on un projet de MOOC ? Et quid de la suite ?
Tout d’abord, un bilan, cela se prépare. On n’arrive pas la bouche en cœur à la fin pour se dire, bon, comment ce s’est passé ? Il faut avoir préparé des questionnaires en amont, pour pouvoir caractériser le public, ses motivations, ses attentes, et les avoir lancés dès le début du cours et avec le plus grand bruit pour obtenir le maximum de réponses.
Ensuite, il faut avoir lancé un questionnaire à la fin de la formation si l’on veut des informations ou des retours (satisfaction, etc) sur la façon dont se sont déroulées les choses. Et il faut ensuite décortiquer les réponses dans les règles de l’art (et une bonne maîtrise de la statistique ne fait pas de mal). Ce travail peut prendre beaucoup de temps.
Ensuite, il y a bien sûr tout de travail d’analyse des usages. Combien de personnes ont participé à telle ou telle activité, combien ont visionné les vidéos, etc (environ une dizaine d’heures pour une analyse très basique, une centaine pour approfondir). Après, on peut vraiment creuser la question et faire de la recherche (comme je peux en faire …), mais là je ne vais pas mettre le nombre d’heures sinon ça pourrait en effrayer certains (après, c’est un job à plein temps).
Etape suivante, le bilan des dépenses (et vous y avez eu droit au cours des dernier billets) … une quinzaine d’heures si l’on inclue tout le travail de communication que j’ai réalisé à travers le blog (en fait j’ai sous-estimé, plutôt une trentaine). Enfin, il faut éventuellement gérer la question des attestations … Entre dix et quinze heures je dirais.
Pour terminer, il y a bien sûr tout le travail de réflexion sur l’évolution de la formation, et nous avons déjà fait quelques billets là-dessus, je ne sais pas si vous vous en souvenez. Quelles sont les améliorations possibles (une dizaine d’heures au bas mot si l’on prend en compte le travail de rédaction des préconisations) ? C’est un travail relativement incompressible, et il n’y a pas vraiment d’économie d’une édition sur l’autre en termes de tâches à faire, mais on peut toujours gagner en efficacité au fur et à mesure que l’on s’approprie les méthodologies.
Enfin, nous arrivons au dernier lot de travail, la valorisation … Vous avez dû vous rendre compte au cours des derniers mois que j’ai passé un peu de temps à diffuser les ressources du cours. Par exemple, les billets « Venez monter votre MOOC » et « Au menu du MOOC MOOC » sont tous les deux des adaptions de ressources d’accompagnement, respectivement un descriptif du fonctionnement du cours et un mini programme, semaine par semaine … Il fallait bien que je fasse la promotion du cours, et je n’avais pas vraiment le temps de concevoir des ressources dédiées. Et ça n’a pas trop mal marché.
Ensuite, une vingtaine de billets qui correspondent aux scripts de nos vidéos. Vous avez également des énoncés d’activité comme dans les billets « Du teaser à la scénarisation » ou « Cadrer son projet de MOOC ». Et même nos Hang Out y sont passés… L’idée n’était pas tant de gagner du temps – cela me prenait parfois autant de temps de transformer une ressource en billet que d’en recréer une de novo – que de faciliter l’accès aux ressources du cours. Je n’aime pas l’idée qu’il faille systématiquement s’inscrire pour pouvoir les consulter. Au final, c’est ni plus ni moins un Open Courseware que nous avons créé au fil des mois.
Par ailleurs, je pense que cela contribue à démystifier le concept de MOOC. A peu de chose près, vous avez eu le droit à toutes les difficultés rencontrés, les doutes, les erreurs, etc. Je ne dis pas qu’il faut systématiquement procéder ainsi – la transparence a un coût – mais c’est important pour la communauté en général de partager au maximum. Un certain nombre d’équipes se sont d’ailleurs attelées à cette tâche et cela bénéficie à toute la communauté enseignante.
L’édition de la première version a nécessité une énergie considérable, mais nous n’avons pas toujours pris les bonnes décisions et nous avons parfois manqué d’efficacité. Par exemple, nous avons probablement trop investi dans la réalisation des vidéos au regard de leur valeur ajoutée. Au feeling, je pense que nous aurions probablement pu économiser 25 à 33% (en heures) sur la V1, mais difficilement davantage.
Le graphique ci-dessus présente les différents lots de travail, avec en vert les lots qui ne sont a priori pas reconduits d’une édition sur l’autre, ou qui ne sont soumis qu’à des modifications mineures. Les lots de travail représentés en orange sont susceptibles de nécessité un certain travail, pour un investissement horaire inférieur environ 30 à 60% par rapport à la première édition, et les lots de travail en rouge sont presque entièrement reconductibles. L’investissement total nécessaire à la réalisation de la seconde édition du cours est estimé à environ 300 heures (+/- 20%), soit moins du tiers de l’énergie investie dans la première édition.
Malheureusement je ne pourrai pas vous confirmer de manière très précise, car je n’ai pas réalisé de suivi détaillé. J’espère que vous ne m’en voudrez pas. De toute façon, les résultats n’étaient pas vraiment extrapolables. Sur une édition totalement stabilisée, je suis persuadé qu’on peut s’en sortir avec à peine plus d’une centaine d’heure de travail (seulement de l’animation, de la gestion, du bilan, et quelques mises à jour). Pour un établissement d’enseignement supérieur, cela veut dire qu’une charge de monitorat (doctorant-enseignant) peut suffire pour animer jusqu’à deux éditions du MOOC (un bon rythme annuel). Un poste nécessaire si l’on souhaite voir le MOOC gagner en influence sur le long terme, mais un coût assez raisonnable somme toute.
Voilà qui conclue pour le moment notre série sur les questions de budgétisations. Je ne suis pas le premier à mener ce type de réflexion et en cherchant bien vous trouverez d’autres études de ce genre (Un autre concepteur, Ryan Baker, avait fait la même dans MOOC, expectations and realities). J’insiste sur le fait que cela correspond à un cas particulier, et qu’il faut raisonner au cas par cas. En espérant que ce type de contributions s’avérera utile pour d’éventuels concepteurs, je vous dis à très bientôt (et profitez bien de ce long week end pour ceux qui font le pont).
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