MOOC : créer des activités pertinentes et peu coûteuses

budgetAujourd’hui, je souhaiterais revenir brièvement sur le coût de la production des ressources d’un MOOC, et en particulier sur celui des activités. Après avoir traité de questions budgétaires, nous revenons sur quelques idées qu’il faut avoir en tête au moment de la conception d’une activité, et notamment sur le concept de « traduction culturelle ».

Pour la première édition du MOOC « Monter un MOOC de A à Z », nous avions investi environ une trentaine d’heures dans la conception des quizz, et à peu près autant pour les ressources d’accompagnement. Mais ce n’est pas nécessairement du travail pour l’enseignant en charge. Les quizz, on peut les confier à des gens qui ont une bonne connaissance du sujet enseigné comme des doctorants, si l’enjeu n’est pas crucial pour le MOOC et que le prof principal ne tient pas absolument à avoir la main dessus. Et pour les ressources d’accompagnement (tutoriels, FAQ, etc), il faut que ce soit une personne qui connaisse bien la formation, c’est tout, pas besoin de maîtriser le domaine.

A noter que presque personne n’a fait mes quizz au cours de la première édition (parce que c’était facultatif), et que tout le monde a râlé sur leur difficulté (à raison) quand je l’ai rendu obligatoire au cours de la seconde (pour rentabiliser un peu mon investissement). Cela m’a fait un peu réfléchir d’ailleurs, les gens voulaient vraiment des quizz qui permettaient de vérifier que l’on avait bien compris le cours. J’ai voulu être original et créer des quizz difficiles où il fallait aller creuser dans les tréfonds d’Internet pour aller trouver la réponse. Peu de gens ont apprécié. Que cela me serve de leçon. Il faut rester simple.

Contrairement à ce que j’aurais pu penser, l’intégration des ressources dans la plate-forme (le LMS) a pris un temps considérable (près de 80 heures). Ne vous laissez pas surprendre en pensant que vous pourrez tout intégrer à la dernière minute. Ce travail n’est à faire qu’une fois en revanche, et heureusement. Pour la deuxième et la troisième édition, on fait un « Export » du cours, puis « un Import » du fichier généré dans la nouvelle édition, et le tour est joué. Allez, une grosse minute de travail pour copier le cours sur une autres plate-forme de type open edX (c’est plus compliqué de faire des transferts sur des plates-formes de nature différente en revanche) …

Production

Enfin, dernier lot de travail, la rédaction des énoncés d’activités, qui a pris relativement peu de temps (30 heures environ au cours de la première édition), pour un retour sur investissement intéressant. En effet, ce qui a de la valeur dans un MOOC, ce ne sont pas que les ressources, c’est aussi et avant tout l’investissement de ses participants ; dans la mesure où l’essentiel (à mes yeux) de la valeur ajoutée du MOOC (le travail des participants) en découle. Et franchement, j’ai été ébahi de voir l’investissement des équipes-projet. Vous n’avez qu’à aller jeter un œil du côté de Learn-moocit pour avoir un aperçu du travail réalisé. Et de notre côté, c’est quoi, quelques énoncés, dont certains ne font guère plus d’une quinzaine de lignes … Ce qui m’a pris du temps, c’est tout le travail sur les grilles d’évaluations et les « guides de correction » pour permettre de cadrer un peu ce qui est attendu tant des participants (on donne les barèmes en amont) que des évaluateurs …

Les activités, c’est d’ailleurs un lot de travail sur lequel nous avons beaucoup investi pour la seconde édition du cours, peut être même trop. Vidéos d’introduction de parcours, de nombreux devoirs supplémentaires. Et je me suis aperçu que j’en avais vraiment trop fait. Pour la troisième édition, ce ne sont pas moins de cinq devoirs que je vais supprimer, comme je le soulignais la semaine dernière ! Je vous recommande donc d’y aller petit à petit avec les activités, d’étudier précisément ce qui marche et ce qui ne marche pas, d’aller parler avec les participants et tout ça.

Dans l’ensemble, je pense que la mise au point des activités est le point le plus important du MOOC. J’encourage vivement ceux qui hésitent à se lancer faute de moyens à minimiser l’investissement dans la conception de ressources vidéo (genre 2-3 heures de cours final maxi), et à mettre le paquet sur les activités. Faites quelques ressources bien sûr (et le texte c’est très bien aussi), mais insistez avant tout sur des activités intéressantes. De toute façon, vous n’arriverez sans doute pas à faire des vidéos aussi attractives et bien rythmées que ce qu’on peut trouver sur Youtube ou à la télé; dans ces conditions, il sera difficile de capter longtemps l’attention des MOOCers, qui sont aussi des internautes habitués à zapper d’une page à l’autre. La vraie valeur ajoutée du MOOC par rapport à de simples vidéos postées en ligne, c’est de permettre de mettre la main à la pâte, alors ne passez pas à côté de ça.

Concernant leur contenu, je vous recommande de vous mettre dans la tête de vos participants et de ne pas oublier que votre audience est très hétérogène. Imaginez des activités qui aient une signification et une pertinence pour tous (ou presque) vos participants. Il est très fréquent que l’on propose des études de cas ou des devoirs qui n’ont de sens que dans notre culture française (bon, à la limite si votre audience est aux trois-quarts française c’est pas trop grave), ou pire, dans le contexte de l’établissement dans lequel on travaille. C’est prendre le risque de démotiver une partie de son public.

Pour approfondir cette question, je vous conseille de lire cet article de Nkuyubwatsi, qui avait traité de cette question, sous le terme de « Traduction Culturelle ». Dès que c’est possible, permettez aux uns et aux autres de travailler sur leurs propres projets, de choisir leurs études de cas, leurs propres défis ou leurs propres problèmes … c’est particulièrement motivant et c’est la manière la plus simple à mes yeux de ne pas être à côté de la plaque quant aux besoins de ses « étudiants ». Concernant le niveau de difficulté, mieux vaut faire une activité courte et facile (5-10 heures de travail pour le commun des mortels, pas pour vous) si vous voulez avoir du monde qui s’implique, et longue et difficile  (20-30 heures, quitte à le découper en deux ou trois devoirs) si vous voulez que votre certificat de MOOC ait de la valeur, et/ou si vous voulez satisfaire ceux qui veulent vraiment s’investir. Rien n’empêche de faire les deux en parallèle pour satisfaire les deux types de public soit dit en passant.

Pour conclure, je dirais que pour la première version de votre MOOC, je vous conseille d’investir dans un format court (entre trois et cinq semaines maximum), avec peu de vidéos (2-3 heures au total), et une ou deux bonnes activités, pas plus. 300 heures de travail au total, animation comprise. Et si la sauce prend, alors vous pouvez envisager d’investir plus pour les nouvelles itérations. Après si vous êtes sûr que ça va cartonner vous pouvez mettre le paquet dès le début. Mais c’est prendre le risque de faire un flop coûteux, ne l’oubliez pas. A bon entendeur, salut.

Nkuyubwatsi (2014). Cultural translation in Massive Open Online Courses. Proceedings of European MOOC stakeholder summit 2014, p 122-129

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