Nous avons vu au cours des derniers billets que l’on pouvait distinguer au moins deux logiques concernant le public visé au sein d’un MOOC : celle de l’éducation formelle – en bref, les étudiants – et celle de l’éducation non formelle. Nous avons décliné, pour ce dernier cas, deux sous-catégories : la formation professionnelle et le développement personnel. J’aimerais dans le billet d’aujourd’hui nuancer quelque peu mes propos, en soulignant le fait qu’un certain nombre de concepteurs visent plusieurs publics à la fois, ou, à l’inverse, n’ont pas une idée précise du public qu’ils visent.
Certains dispositifs s’adressent simultanément à différents publics, avec en particulier des enseignants qui visent aussi bien le public de l’éducation formelle et le public de l’éducation non formelle, quite à organiser le dispositif de sorte à répondre à deux besoins de formation. C’est ce qu’illustrent les propos de cette enseignante de biologie, dont le MOOC s’adresse à la fois au grand public, et à la fois à des étudiants de médecine.
On s’adresse à la fois au grand public, et à la fois à un public d’étudiants de médecine. Le dispositif comporte une partie cours, adaptée au grand public et trop synthétique pour un public d’étudiants formés à la discipline, et une partie « laboratoire » traitant de pratiques pouvant difficilement être enseignées en classe, et qui a vocation à être utilisée comme base de travaux dirigés. […] Et je leur demanderai [aux étudiants] qu’ils s’inscrivent tous pour suivre la partie labo, pas pour suivre la partie cours parce qu’elle est plutôt minimale par rapport à ce qu’on leur fait en cours. C’est à peu près cinq minutes de vidéo pour une heure de cours mais ça peut leur permettre quand même d’avoir un petit résumé des choses très importantes. La partie labo va faire partie de mon enseignement de base et les enseignements dirigés partiront à partir de l’année prochaine des enseignements labo”
Dans ce cas de figure, la stratégie adoptée par le concepteur pour s’adresser à deux publics distincts consiste à proposer deux types de contenus adaptés dans un cas à un grand public s’inscrivant dans une logique de développement personnel et dans l’autre à un public de l’éducation formelle. Mais souvent, la logique est celle du « public varié », sans autre forme de précision:
Ce qui m’intéresse c’est d’avoir un public assez varié et de vérifier que ça leur a apporté quelque chose. Les gens qui sont là ne vont pas devenir des professionnels de la discipline donc on n’a pas ce but-là. On veut apporter une vision honnête et fidèle de sciences vivantes.
Il arrive souvent qu’il n’y ait pas de spécificité dans le public ciblé de la formation. C’est ce qu’illustrent les propos de cet enseignant d’entrepreneuriat, qui semble s’inscrire dans une logique de mise en valeur d’un enseignement, plus que dans une logique de conquête d’une audience particulière :
Comme je m’intéresse à [Nom de la discipline], je me suis dit que j’allais introduire [Nom de la discipline]. Je ne sais pas trop qui ça peut intéresser donc je visais un public généraliste mais j’avoue que j’ai eu finalement très peu de réflexion.
La nuance avec le cas précédent est relativement subtile; la proposition a le mérite de son honnêteté.
Pour conclure, je pense que la stratégie qui consiste à s’adresser simultanément à plusieurs publics grâce à un MOOC à géométrie variable est intéressante, et mérite d’être analysée de plus près. Il faut néanmoins prendre garde aux risques que l’on court à courir plusieurs lièvres à la fois. De même, en n’ayant pas de public précis en tête avant de lancer son projet, ou en méconnaissant les attentes de ce public, on risque fort bien de faire un projet qui ne rencontre pas d’écho chez les internautes.
Fort heureusement, ce ne fut pas le cas des cours sus-cités, mais bon, cela arrive assez régulièrement d’avoir des fausses bonnes idées de MOOC. D’ailleurs, ma réaction la plus fréquente face à une idée de MOOC (étant identifié sur la question, on me demande souvent mon avis) est toujours de dire non, jusqu’à ce que j’ai été convaincu du contraire … A bon entendeur, salut