De l’intérêt des certificats de MOOC hors du contexte professionnel

Diploma

Nous poursuivons aujourd’hui notre série de billets dédiés à l’intérêt porté au certificat. Nous distinguerons aujourd’hui deux cas de figure distincts parmi les participants portant un intérêt personnel au certificat : la vitrine, et la récompense symbolique. Dans le cas de la vitrine, le participant veut rendre publique son activité d’apprentissage. Dans le cas de la récompense symbolique, le participant considère le certificat soit comme une « carotte », qui l’aide à maintenir sa motivation jusqu’au terme du MOOC, soit comme un « bon point », qui vient récompenser a posteriori l’effort fourni.

Vitrine

Certains participants veulent rendre publique leur activité d’apprentissage, notamment en affichant les certificats sur les réseaux sociaux, et ce bien qu’ils n’envisagent pas d’utiliser le certificat dans un contexte professionnel. Nous illustrerons cette position par les propos d’une mère au foyer ; bien qu’elle n’envisage pas de reprendre son activité professionnelle à court terme, elle affiche sur les réseaux sociaux les certificats qu’elle obtient pour montrer à autrui qu’elle continue à apprendre bien qu’elle soit mère au foyer. Les certificats de MOOC lui permettent ainsi de valoriser ses apprentissages, chose qu’elle ne peut faire avec un livre. Face à la question de la valeur qu’elle accorde au certificat, elle répond comme suit :

Ben moi ça a une valeur qui est, je les ai mis sur LinkedIn parce que ça a une valeur aussi par rapport au fait d’être à la maison. Je sais pas si ça se passe comme ça en France, mais en Suisse, on a un peu l’impression avec mon mari, c’est assez drôle, quand on croise des gens, on lui pose la question ce qu’il fait, mais moi on me pose pas la question parce que je suis à la maison donc sûrement que je fais rien. Quelque part ils ont une valeur, mais le fait de dire, bah ouais, je suis à la maison, actuellement je ne suis pas employée mais je ne fais pas rien. […] Je suis sûr qu’il y a des mamans qui lisent des livres, qui font plein de choses. L’avantage c’est que les MOOC ça permet d’une certaine manière de les valoriser.

D’autres interviewés déclarent afficher les certificats obtenus sur les réseaux sociaux, sur leurs blogs et leurs sites personnels. Certains affichent ainsi des collections de plusieurs dizaines de certificat dans des domaines variés. Quentin (2015) suggère d’ailleurs sur la base de l’analyse d’écrits de participants de MOOC ayant tenu un blog que la volonté de montrer des preuves de leur démarche d’apprentissage joue largement dans la démarche de partage.

Récompense symbolique

Dans le cas de la récompense symbolique, le participant ne désire pas nécessairement montrer à autrui le certificat qu’il obtient. La récompense symbolique peut servir à maintenir la motivation tout au long du cours, c’est le cas que nous avons identifié comme la carotte. Ce cas correspond à l’utilisation du certificat à des fins d’auto-régulation interne : en jouant un rôle de récompense, même symbolique, le certificat aide à maintenir la motivation tout au long de la formation, ou apporte une forme de satisfaction a posteriori. Cette situation est illustrée par les propos de ce consultant en free lance inscrit à de nombreux MOOC.

Souvent le réflexe c’est de dire t’es allé jusqu’ici, il y a quand même la certification, donc c’est une manière de ne pas se démotiver, c’est une manière de lutter contre l’abandon.

Le surplus de motivation que procure cette récompense symbolique est explicité par ce père de famille en congé sabbatique, qui suit les MOOC principalement pour son plaisir, et notamment pour les projets sur lesquels ils peuvent déboucher. Il déclare que l’impossibilité d’obtenir le certificat ne le conduit pas systématiquement à abandonner le cours mais qu’elle diminue en revanche sa motivation, et ce bien qu’il n’envisage pas de l’utiliser par la suite.

Et je dois dire alors même si j’en ai pas besoin, euh, je suis assez, j’ai envie de cette certification en fait, je suis un peu beta avec ça mais voilà, c’est euh, et pourtant je vais le montrer à personne, mais j’ai envie de la certification, je suis vraiment comme un môme avec ça. Non mais c’est vrai c’est beta mais bon. […] Enfin bon, donc en l’occurrence, moi bêtement enfin, c’est un peu la récompense, j’aime bien, enfin voilà, et donc voilà, si je loupe la certif, ça veut pas dire que je veux pas aller jusqu’au bout, mais du coup je serai moins à fond dans le truc, et les autres vont me passer devant.

Lorsque l’intérêt pour le certificat correspond davantage à une récompense symbolique a posteriori qu’à un outil d’aide à l’auto-régulation interne, nous dirons qu’il joue le rôle du bon point. Ce consultant salarié insiste sur la satisfaction que lui procure après coup l’obtention du certificat :

Bah en fait, c’est ce qu’on garde finalement, il y a un caractère un petit peu, de propriété, de satisfaction, un petit bout de papier en forme de validation.

Ce cas est illustré par ce cadre d’entreprise qui « collectionne » les certificats de MOOC ; il souligne l’aspect ludique que revêt leur obtention, lui et sa femme jouant à les amasser comme on collectionnerait des « bons points ».

Je pense que c’est vrai, je préfère quand même avoir un petit papier, je reconnais, et puis ça fait plaisir, à titre personnel aussi. On s’amuse avec Sophie, parce qu’on a plein de certificats maintenant, donc on est très contents. Bon, bah c’est un petit, c’est un bon point qu’on nous donne, on est réalistes, mais un petit bon point avec l’université du Maryland, un petit certificat j’imagine que Sophie aura ça un jour, de Harvard ou autre chose, bon bah, c’est fun aussi.

Soulignons que les logiques du bon point et de la carotte ne sont pas incompatibles avec la logique de la vitrine. Tout ça pour dire, le certificat des MOOC, c’est important, même s’il est gratuit, même s’il n’a pas beaucoup de valeur sur le marché du travail. La disparition progressive du certificat gratuit dans les MOOC de Udacity à Coursera, contribue selon moi à faire chuter les usages sur le plan quantitatif, car l’on fait disparaître l’un des principaux leviers de la motivation. Bon, après, il y a des considérations économiques évidentes, et l’on comprend aisément que les plates-formes n’aient pas intérêt à maintenir ces certificats gratuits pour tout un tas de raisons. Néanmoins, cela ne peut qu’avoir des conséquences importantes sur les usages à long terme …N

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